Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 25 octobre 2013, n° 2012/02326

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5, 25 oct. 2013, n° 12/02326
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2012/02326
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 22 septembre 2011, N° 09/01240
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Toulouse, 23 septembre 2011, 2009/01240
  • (en réquisition)
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : FR0116033
Titre du brevet : Nouvelle association contenant un poloxamer et de l'acide chondroitine sulfurique et/ou une glycoproteine et son utilisation
Classification internationale des brevets : A61K ; A61P ; A61Q ; C08L
Référence INPI : B20130218
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 5 – Chambre 2 ARRET DU 25 OCTOBRE 2013

(n° 245, 10 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 12/02326.

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Septembre 2011 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE 1re Chambre – RG n° 09/01240.

APPELANT : Monsieur Henri C représenté par la SELARL 2H en la personne de Maître Nathalie H, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, assisté de Maître Stéphane R plaidant pour le Cabinet RON Avocats, avocat au barreau de TOULOUSE.

INTIMÉES : - Société PIERRE FABRE DERMOCOSMETIQUE prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […] 92100 BOULOGNE BILLANCOURT,

- SA PIERRE FABRE venant aux droits de la Société BIOMERIEUX PIERRE FABRE prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […] 75008 PARIS,

- SAS PIERRE FABRE M prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […] 92100 BOULOGNE BILLANCOURT, représentées par Maître Mireille GARNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : J136, assistées de Maître Loïc A BUGIS P RENIER ALRAN, avocat au barreau de CASTRES.

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 19 septembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, Madame Sylvie NEROT, conseillère, Madame Marie-Antoinette COLAS, conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur T Lam NGUYEN.

ARRET : Contradictoire,

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur T Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,

Vu le jugement contradictoire du 23 septembre 2011 rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse 1re chambre,

Vu l’appel interjeté le 7 février 2012 par monsieur Henri C,

Vu les dernières conclusions de monsieur Henri C appelant en date du 5 septembre 2012,

Vu les dernières conclusions de la SAS Pierre Fabre Dermocosmetique, de la SA Pierre Fabre et de la SAS Pierre Fabre Medicament, intimées et incidemment appelantes en date du 9 juillet 2012,

Vu l’ordonnance de clôture en date du 4 juillet 2013,

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,

Il sera simplement rappelé que :

Selon acte du 16 avril 2009 monsieur Henri C a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Toulouse la SAS Pierre Fabre Dermocosmétique et la SA F aux fins de voir dire qu’il a la qualité d’inventeur hors mission au titre du brevet enregistré le 13 juin 2003 sous le n°28 332 68 intitulé 'nouvelle association pour une utilisation dans une formule cosmétique hydratante', et voir condamner les défenderesses à lui payer une provision de 2 millions d’euros à valoir sur son juste prix à lui revenir à déterminer après expertise qu’il sollicitait.

Parallèlement et par acte du 15 juillet 2009 les sociétés Pierre Fabre Dermocosmetique et Pierre M venant aux droits de la société Pierre Fabre Santé par suite d’une fusion absorption, ont attrait monsieur Henri C en contestation de la proposition de conciliation formulée le 16 juin 2009 par la Commission Nationale des Inventions des Salariés saisie par le salarié aux fins de règlement de conciliation d’un juste prix pour sa participation au dépôt de 13 brevets supplémentaires.

Suivant le jugement dont appel, le tribunal a essentiellement :

— dit que les inventions objets du litige, sont toutes des inventions de mission,

— écarté la prescription quinquennale et la prescription décennale,

— débouté monsieur Henri C de sa demande en rémunération au titre de l’invention contenue dans le brevet n° 87 12780 faute d’un intérêt exceptionnel,

— condamné in solidum la SAS Pierre Fabre Dermocosmétique, la SA Pierre Fabre et la SAS Pierre Fabre Medicament à payer à monsieur C :

* la somme de 35.000 euros à titre de rémunération supplémentaire au titre du brevet N° 91 1204,

* la somme de 60.00.000 euros à titre de rémunération supplémentaire au titre des brevets N° B2 à B13,

* la somme de 7.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En cause d’appel monsieur Henri C, appelant, demande essentiellement de :

- dire et juger qu’il doit être considéré comme inventeur hors mission au titre des brevets français N° 2624010, 8815575, 8904815, 9012811 et 9112044 et de leurs prolongements et de leur extension,

— condamner in solidum les sociétés Pierre Fabre Dermocosmétique, Pierre Fabre Médicament et Pierre Fabre SA à lui payer la somme de 500.000 euros au titre du juste prix, et à titre subsidiaire la même somme à titre de supplément de rémunération,

— dire et juger qu’il doit être considéré comme inventeur hors mission au titre des brevets dits B1 à B13 et de leurs prolongements et de leur extension,

— condamner in solidum les sociétés Pierre Fabre Dermocosmétique, Pierre Fabre Médicaments et Pierre Fabre SA à lui payer la somme de 556.920 euros au titre du juste prix, et à titre subsidiaire la même somme à titre de supplément de rémunération,

— condamner in solidum les sociétés intimées à lui payer une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de l’opposition formée à l’encontre de la proposition de la CNIS et celle

de 30.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

— confirmer le jugement pour le surplus.

Il fait valoir à cet effet, étant précisé qu’il est repris la distinction établie par les parties entre le brevet enregistré le 13 juin 2003 ayant fait l’objet de la procédure introduite par monsieur C (brevet A) et les inventions objets de la proposition de la CNIS (B1 à B13) que :

— il est un chercheur de haute renommée ayant une double formation universitaire en sciences physiques et chimies et sciences pharmaceutiques, et est membre de diverses académies,

— il est à l’origine, outre ses nombreuses publications notamment dans des revues d étrangères de référence, du dépôt de plus de 130 brevets français ayant donné lieu à plus de 600 extensions à l’étranger,

— il était lors de la conception du brevet A conseiller du président, monsieur F, qui n’avait plus de fonction opérationnelle après la fusion intervenue avec le groupe Biomerieux, et ne pouvait avoir plus d’attributions que n’en avait le Président de la société,

— il était rattaché à la société Pierre Fabre SA qui n’avait aucune activité de recherche s’agissant de la holding administrative et financière du groupe,

— toutes les inventions objets du présent litige ont fait l’objet d’une délivrance de brevet postérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 26 novembre 1990 et l’article L 611-7 du Code de la propriété intellectuelle prime ses rédactions issues de cette loi toutes les conventions collectives qui lui sont contraires, et il n’y a donc pas lieu d’examiner le caractère exceptionnel ou non de l’invention de mission,

— les droits du salarié sont définis au jour où le salarié fait valoir ses droits,

— la prescription quinquennale ne peut recevoir application car sa créance est indéterminée en son montant et son principe,

— les règles inhérentes à la gestion d’une indivision ne peuvent recevoir application à la copropriété d’une demande de brevet,

— il ne peut y avoir d’invention de mission lorsque comme en l’espèce il n’y a pas de contrat de travail ou de relations de travail avec la société Pierre Fabre Dermocosmétique ou à tout le moins une relation de travail révélant une mission inventive pour la période postérieure à 1986,

— il ne percevait aucune rémunération de la société Pierre Fabre Dermocosmétique et ne recevait aucune directive tendant à la réalisation de mission inventive,

— après 1986 il n’avait aucun contrat ni aucune fonction impliquant des missions inventives, il était conseiller pour la branche médicament,

— c’est spontanément, par intérêt personnel qu’il s’est impliqué dans des travaux de recherche, et a amené son concours aux travaux de recherche entrepris dans le domaine de la dermocosmétique, et non sur instruction de son employeur,

— il avait pour mission de proposer la définition d’une politique industrielle dans les domaines de l’extraction végétale et de la synthèse chimique, et n’a jamais été destinataire d’instructions précises quant à la poursuite de travaux de recherche,

— les prestations accomplies dans le cadre de sa mission de conseiller scientifique ont contribué à l’image scientifique du Groupe,

— le sociétés Pierre Fabre Médicaments et Pierre Fabre Dermo Cosmétique avaient chacune leur propre unité de recherche et déposaient des brevets sous l’autorité de directeurs de recherche distincts, à l’égard desquels il n’avait aucune position hiérarchique,

— il participait à des réunions de recherche cosmétologique à la demande de monsieur P dont il était le conseiller, pour lui rendre compte,

— son apport à l’invention du brevet A est déterminant car il a envisagé une association dans une formulation cosmétique hydratante de composés jusqu’alors inusités (ACS d’origine marine conduisant à une hydratation qui reproduit celle existant au niveau de l’œil) qui a eu un succès commercial et économique important représentant un chiffre d’affaires de 22 millions d’euros par an alors que la gamme de produit en résultant est exploitée depuis 2003 et est protégée jusqu’en 2021,

— pour l’appréciation du juste prix ou d’un complément de rémunération il convient de tenir compte des brevets en France par une société du groupe Pierre Fabre, délivré et ayant fait l’objet du paiement de plusieurs annuités (1 mois de salaire) puis à ces éléments les critères suivants : une extension à l’étranger ou maintenu en vigueur pendant plus de 10 ans par le paiement des annuités (2 mois de salaire) ou exploités commercialement sur la base des revendications du brevet ( 4 à 6 mois de salaire) ou en sus à ces derniers critères, exploités largement sur une gamme, de produits, et/ou commercialisés dans plusieurs pays et/ou ayant été exploités pendant plus de 10 ans (8 à 18 mois de salaire), son salaire moyen mensuel brut étant de 8.840 euros de sorte qu’il revendique :

* brevet B1 87 12788 brevet délivré le 15 juin 1990, exploité en 1992 et paiement de 20 annuités : 2 mois de salaire,

* brevet B2 8807425 brevet délivré le 13 mars 1992 commercialisé de 1990 à 2002 pour deux produits : six mois de salaire,

* B3 91 15430 brevet délivré le 13 juillet 1995, 17 annuités ont été payées, exploité dans un produit : 5 mois de salaire

* B4 95 08300 paiement de 13 annuités brevet délivré le 3 octobre 1997 est toujours en vigueur, nombreuses extensions à l’étranger : 2 mois de salaire,

* B6 97 05 202 délivré le 16 juillet 1999 extension dans 22 pays étrangers, 23 produits commercialisés dans plus de 10 pays depuis plus de 10 ans générant un chiffre d’affaires par an de l’ordre de 33 millions d’euros : 18 mois de salaire,

* B7 97 140093 le brevet a été délivré le 25 février 200 a fait l’objet de 19 extensions à l’étranger exploitée en Allemagne : 5 mois de salaire,

* brevet B8 99 15141 délivré le 1er mars 2002 et a fait l’objet d’extensions : 2 mois de salaire,

* brevet B9 00 01651 délivré le 7 juin 2002 avec extension pour 23 pays, exploité dans un shampoing : 5 mois de salaire,

* B10 92 04691 délivré le 8 juillet 1994 a fait l’objet de 14 extensions à l’étranger toujours en vigueur : 2 mois de salaire,

* B11 94 09630 délivré le 21 février 1997 a fait l’objet d’une extension pour l’étranger pour 16 pays, exploité : 5 mois de salaire,

* B12 97 15760 délivré le 21 juillet 200 a fait l’objet d’extension pour 20 pays étrangers annuités toujours réglées : 6 mois de salaire,

* Brevet B13 99 04 786 délivré le 9 mai 2003 et a fait l’objet d’extensions pour 18 pays : 2 mois de salaire.

Les sociétés intimées s’opposent aux prétentions de l’appelant, et pour l’essentiel, incidemment demandent dans leurs dernières écritures du 9 juillet 2012 de :

— débouter l’appelant de l’ensemble de ses demandes,

— recevoir leur appel incident,

statuant à nouveau :

— déclarer irrecevables comme prescrites les demandes de l’appelant portant sur les brevets N°87 12788, 88 07425, 91 15430, 92 0461, 94 09630, 95 00028 et 95 08 300,

subsidiairement,

— débouter l’appelant de sa demande de rémunération supplémentaire portant sur le brevet 88 07425, faute d’intérêt exceptionnel pour l’entreprise,

— fixer les rémunérations supplémentaires suivantes :

— brevet n° : 91 15430 : 1.000 euros,

— brevet n° : 95 08300 : 1.000 euros,

— brevet n° : 97 05202 : 5.000 euros,

— brevet n° : 97 15760 : 5.000 euros,

— brevet n° : 01 16033 : 20.000 euros,

— très subsidiairement, déclarer les demandes de l’appelant au titre des inventions hors mission,

— confirmer le jugement pour le surplus.

Elles exposent à cet effet que :

— le groupe Pierre Fabre a toujours eu la double activité cosmétique et pharmaceutique, à laquelle monsieur Henri C en sa qualité de conseiller scientifique du Président participait comme en atteste le détail de la définition de sa mission,

— il a passé toute carrière dans le groupe avec une mission inventive et a d’ailleurs déposé plus de 130 brevets français,

— tous les brevets revendiqués sont le fruit d’un travail d’équipe avec plusieurs co-inventeurs,

dont parfois son supérieur hiérarchique, monsieur F,

— l’action de l’appelant qui était en mesure d’agir plus de cinq ans avant l’introduction de celle-ci est prescrite car la rémunération supplémentaire fait toujours l’objet d’une rémunération forfaitaire et il en connaissait toutes les données,

— le point de prescription décennale doit se situer au jour de la délivrance du brevet correspondant à la date d’exigibilité de la rémunération supplémentaire, et toutes les demandes concernant des

brevets délivrés plus de dix ans avant la saisine du CNIS sont donc prescrites,

— les dispositions d’une convention collective même restrictive du droit à rémunération supplémentaire du salarié demeurent applicables aux inventions de mission réalisées avant le 26 novembre 1990 comme pour en l’espèce les brevets N° 87 12788 qui est inexploité et 88 07425 exploité pendant une période réduite avec un chiffre d’affaires symbolique,

— pour les inventions hors mission, le juste prix appartient à tous les co-inventeurs pour chacun des brevets revendiqués en indivision entre eux et la demande du seul appelant est donc irrecevable faute du consentement de tous les co-indivisaires,

— concernant les rémunérations supplémentaires :

* brevet B1 87 12788 brevet délivré le 15 juin 1990, mentionne 3 co-inventeurs dont monsieur P, n’a jamais été exploité,

* brevet B2 8807425 brevet délivré le 13 mars 1992 mentionne 4 co-inventeurs, commercialisé de 1998 à 2002 pour un produit pour un chiffre d’affaires modeste : 428.645 euros, la protection est expirée depuis 2008,

* B3 91 15430 brevet délivré le 13 juillet 1995, mentionne 4 co-inventeurs, n’a jamais été exploité, l’appelant n’a eu qu’un rôle d’accompagnateur du projet,

* B4 95 08300 mentionne 4 co-inventeurs dont un inventeur consultant le professeur S paiement de 13 annuités brevet délivré le 3 octobre 1997 est toujours en vigueur, n’a été maintenu qu’en France, aucun médicament n’a été produit en liaison avec ce brevet,

* B6 97 05 202 délivré le 16 juillet 1999 n’a été maintenu qu’en France et l’appelant est apparu comme co-inventeur d’avantage en raison de ses fonctions d’encadrement de la recherche,

* B7 97 140093 le brevet a été délivré le 25 février 2000 mentionne 3 co-inventeurs n’a été exploité qu’en Allemagne, a fait l’objet d’une extension, une entrée en phase européenne et 3 validations de ce brevet européen,

* brevet B8 99 15141 délivré le 1er mars 2002, mentionne 4 co-inventeurs dont monsieur F, n’a pas été exploité,

* brevet B9 00 01651 délivré le 7 juin 2002 mentionne 3 co-inventeurs dont monsieur F, la demande d’extension a été abandonnée, exploité de façon très limitée,

* B10 92 04691 délivré le 8 juillet 1994 mentionne 5 co-inventeurs dont monsieur F, seul le brevet français reste en vigueur et n’est pas exploité,

* B11 94 09630 délivré le 21 février 1997 mentionne 5 co-inventeurs dont monsieur F, est limité au territoire français, ce brevet est le fruit d’une collaboration avec la société TEC dans le cadre d’un contrat cadre, a été exploité de façon confidentielle pendant 5 ans,

* B12 97 15760 délivré le 21 juillet 2000, mentionne 3 co-inventeurs et ne concerne que la France, a été abandonné en 2005

* Brevet B13 99 04 786 délivré le 9 mai 2003 mentionne 4 co-inventeurs dont monsieur F, n’a fait l’objet d’aucune exploitation,

* brevet N° 95 00028 :délivré le 21 mars 1997, il mentionne 4 co-inventeurs dont monsieur F, n’a jamais été exploité,

* brevet N° 01 16033 délivré le 8 juillet 2005 étendu à l’étranger par une demande internationale en cours d’examen, l’appelant n’étant intervenu que de façon marginale dans l’association de l’ACS avec du Poloxamer selon un ration très spécifique objet de l’invention brevetable, qui est commercialisée sous une marque connue avec des efforts marketing considérables.

Sur la qualification des inventions :

Monsieur Henri C a été embauché le 1er mars 1968 par la société Centre de Recherche Pierre Fabre Medicament (ISP) disparue en 1971 après sa fusion absorption par la société Pierre Fabre SA, en qualité de cadre de recherche, puis a exercé les fonctions de :

— chef de service (1969),

— adjoint au chef département (1974),

— chef de département (1977),

— cadre supérieur, direction du département (1978),

— directeur de recherche adjoint (1983)

— conseiller scientifique du Président Dermocosmétique.

La qualité de co-inventeur de monsieur Henri C portant sur les brevets dont s’agit n’est pas contestée, ceux-ci comportant d’ailleurs son nom en cette qualité.

L’article L 611-7 du code de la Propriété Intellectuelle définit les inventions de mission comme celles faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui corresponde à ses fonctions effectives soit d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées.

Sont inventions hors missions toutes les autres.

S’il n’existait aucune relation de travail entre la société Pierre Favre Dermocosmétique et monsieur Henri C comme celui-ci le soutient à tort, il serait irrecevable à revendiquer une invention de salarié et à solliciter sa condamnation in solidum en cette qualité d’employeur. Il est justifié à ce titre qu’il a procédé aux dépôts des brevets dont s’agit lui-même au nom et pour le compte de cette société en sa qualité de conseiller du président de la holding auquel appartient

Dès lors, l’absence de contrat écrit avec cette société dépendant de la même entité économique et pour laquelle il a déposé en son nom des brevets comme ses fonctions et sa position hiérarchique dans ce groupe lui permettaient est sans incidence sur la relation de travail de fait qu’il a exercée.

Le groupe Pierre Favre au cours de ses évolutions juridiques et mutations a toujours eu dès son origine, en mai 1962, jusqu’à la reprise absorption de 1995, la double activité cosmétique et pharmaceutique de sorte que les prestations de monsieur Henri C affecté à la direction générale du groupe de par sa mission de conseiller scientifique du président intervenait dans ces deux secteurs en raison, comme rappelé lors de son affectation à ce poste, de sa grande expérience acquise dans le domaine de la recherche et de ses applications industrielles avec comme première mission de proposer la définition d’une politique industrielle dans les domaines de l’extraction végétale et de la synthèse chimique Cette fonction impliquant sa participation aux réunions institutionnelles aux comités de recherche cosmétologique et scientifique dermo-cosmétique.

Sa participation aux activités des Comités de recherche du groupe de par son obligation de salarié contredisent le caractère spontané de ses recherches alors qu’il a toujours évolué dans le secteur inventif du groupe en cette qualité.

Il est par ailleurs mal venu à soutenir que chacune des sociétés Pierre Fabre Dermosmétique et Pierre Fabre Médicaments avaient leur propre unité de recherches et directeurs de recherche ce qui exclut qu’il ait eu une mission inventive alors que de 1976 à 1986 il reconnaît que dans cette même configuration, ses inventions ressortissaient d’invention de mission.

D’ailleurs tous les brevets revendiqués sont le résultat d’un travail d’équipe avec plusieurs co-inventeurs de salariés du groupe

économique dont parfois des tiers ayant conclu des conventions de partenariat avec les sociétés du groupe et avec les moyens de l’entreprise.

Concernant les brevets N° 88 07425 et 00 01651 monsieur C rend compte de ses recherches à monsieur F en lui demandant son accord pour la formulation du brevet objectivant le caractère d’invention de mission.

Il s’ensuit que c’est à bon droit que le tribunal tout comme la Commission Nationale des Inventions des Salariés ont qualifié l’ensemble des inventions objets du litige, d’inventions de mission.

Sur la fin de non-recevoir de la prescription :

Les intimées soutiennent que l’action relative aux brevets B1 à B 13 est prescrite.

Cependant la créance invoquée lors de la saisine de la CNIS le 13 juin 2008 interruptive de prescription est une créance indéterminée quant à son principe et son montant et ne peut de ce fait comme justement jugé par le tribunal être soumise à la prescription quinquennale de l’article 2277 du code civil qui suppose une périodicité au moins annuelle et implique une créance déterminée ou déterminable.

Concernant la prescription décennale de droit commun, inapplicable en l’espèce, l’action étant relative à une créance salariale seule soumise à la prescription quinquennale, celle-ci ne peut être invoquée.

Sur les rémunérations :

L’article 29 de la Convention collective de l’Industrie pharmaceutique prévoit :

'La rétribution du salarié tient compte de ses missions, de ses études, de ses recherches et rémunère forfaitairement les résultats de son travail.

Toutefois, si une invention dont il est l’auteur, dans le cadre de cette tâche présente un intérêt exceptionnel, il se verra attribuer, après la délivrance du brevet, une rémunération supplémentaire pouvant prendre la forme d’une prime globale versée en une ou plusieurs fois'.

La loi du 26 novembre 1990 a rendu obligatoire en modifiant la rédaction de l’article 611-7 du code de la propriété intellectuelle, l’article 29 de cette convention collective et donc la rémunération supplémentaire attribuée au salarié, auteur d’une invention de mission.

Ce droit à rémunération supplémentaire prenant naissance à la date de réalisation de l’invention brevetable, c’est la loi en vigueur à cette date qui doit seule s’appliquer pour déterminer la mise en œuvre de ce droit.

Or, en l’espèce deux des 13 brevets ont été déposés avant le 26 novembre 1990, c’est donc à bon droit que le tribunal a jugé que les brevets 87 12788 et 88 07425 sont soumis aux dispositions de la convention collective exigeant la démonstration de leur intérêt exceptionnel.

Il convient d’examiner l’ensemble de ces brevets :

* brevet A délivré le 8 juillet 2005 sous le numéro 01 16033 mentionne 3 co-inventeurs, l’invention concerne l’association de deux substances le Polixamer et l’Acide Chondroïtine Sulfurine (ACS) marin et/ou un glycoprotéïne pour son utilisation dans une formulation cosmétique hydratante. L’invention consiste à divulguer une formulation mimant la composition chimique et les propriétés physico chimique du film oculaire à base de lipides, il a fait l’objet d’une exploitation commerciale importante en matière de cosmétiques importante sur les crèmes hydratantes et l’invention est protégée jusqu’en 2012, le tribunal a fixé la rémunération supplémentaire à 35.000 euros.

* B 1 brevet B1 87 12780 brevet délivré le 15 juin 1990, mentionne 3 co-inventeurs dont monsieur P, l’invention concerne une composition topique utile dans le traitement de l’alopécie n’a jamais été exploité, et ne présente donc pas d’intérêt exceptionnel, aucune rémunération n’a été accordée par le tribunal,

* B 2 brevet B2 8807425 brevet délivré le 13 mars 1992 mentionne 4 co-inventeurs, commercialisé de 1998 à 2002, le principe breveté est afférent à une composition dermato-cosmétologique pour le traitement du vieillissement cutané et la prévention des rides, ayant permis l’élaboration d’un produit ayant généré un chiffre d’affaires : 428.645 euros, la protection est expirée depuis 2008, le tribunal a considéré que son intérêt était exceptionnel ayant été maintenu pendant toute la durée de protection et a fixé la rémunération à la somme de 7.000 euros,

* B3 91 15430 brevet délivré le 13 juillet 1995, mentionne 4 co-inventeurs, 17 annuités ont été payées il concerne un procédé industriel de synthèse de dérivé de l’acide hydroxy-10-décene2-oïque, exploité de façon limitée, le tribunal a fixé à 5.000 euros la rémunération, par référence à celle allouée à un autre co-inventeur,

* B 4 brevet N° 95 00028 :délivré le 21 mars 1997, il mentionne 4 co-inventeurs dont monsieur F, il porte sur un produit antifongique contenant du crotamiton à vocation de médicament, il est toujours en

vigueur mais n’a jamais été exploité, le tribunal a fixé la rémunération à 1.000 euros,

* B 5 95 08300 mentionne 4 co-inventeurs dont un inventeur consultant le professeur S paiement de 13 annuités brevet délivré le 3 octobre 1997 est toujours en vigueur, n’a été maintenu qu’en France, il est afférent à l’utilisation d’un rétinoïde pour la préparation d’un médicament antibactérien et une méthode de traitement cosmétique, aucun médicament n’a été produit en liaison avec ce brevet, mais le brevet est maintenu, le tribunal a fixé à la somme de 5.000 euros la rémunération supplémentaire,

* B6 97 05 202 délivré le 16 juillet 1999 n’a été maintenu qu’en France il décrit un procédé de fabrication d’un extrait colloïdal d’avoine blanche caractérisée, l’extrait obtenue est utilisé pour préparer des compositions cosmétologiques qui ont été exploitées dans plusieurs produits pendant 10 ans, le tribunal a fixé à la somme de 20.000 euros en regard de sa participation,

* B7 97 140093 le brevet a été délivré le 25 février 2000 mentionne 3 co-inventeurs n’a été exploité qu’en Allemagne, a fait l’objet d’une extension, une entrée en phase européenne et 3 validations de ce brevet européen, il est relatif à une composition synergique destinée à être administrée par voie orale constituant un complément alimentaire en nutrithérapie, il a été principalement exploité en Allemagne, et le tribunal a fixé la rémunération supplémentaire à la somme de 5.000 euros,

* B 8 brevet 99 15141 délivré le 1er mars 2002, mentionne 4 co-inventeurs dont monsieur F, il concerne une composition topique, utile comme amincissant, n’a pas été exploité,

* B 9 brevet 00 01651 délivré le 7 juin 2002 mentionne 3 co-inventeurs dont monsieur F, la demande d’extension a été abandonnée, l’invention décrit des compositions cosmétiques destinées à la prévention et au traitement du vieillissement cutané, exploitée de façon très limitée, le tribunal a fixé à la somme de 2.000 euros la rémunération complémentaire tout comme celle allouée à un autre co- inventeur,

* B10 92 04691 délivré le 8 juillet 1994 mentionne 5 co-inventeurs dont monsieur F, seul, il concerne une composition dermatologique et/ou cosmétique utile pour le traitement de la pédiculose, le brevet français reste en vigueur et n’est pas exploité, le tribunal a fixé à la somme de 1.000 euros la rémunération complémentaire,

* B 11 94 09630 délivré le 21 février 1997 mentionne 5 co-inventeurs dont monsieur F, est limité au territoire français, ce brevet est le fruit d’une collaboration avec la société TEC dans le cadre d’un contrat cadre, il concerne une composition acaricide et a été exploité de façon

pendant 5 ans, le tribunal a fixé à la somme de 5.000 euros la rémunération complémentaire,

* B12 97 15760 délivré le 21 juillet 2000 mentionne 3 co-inventeurs est relatif à une composition polyphénolique utile comme complément alimentaire nutraceutique ou comme composition cosmétique a fait l’objet d’extension pour 20 pays étrangers et a donné lieu à une exploitation commerciale mais a été abandonné en 2005 en raison de son échec commercial, le brevet est encore protégé et tribunal a fixé à la somme de 7.000 euros la rémunération complémentaire.

* Brevet B13 99 04 786 délivré le 9 mai 2003, il mentionne 5 co-inventeurs il concerne un hydrate de pyrrolidone carboxylate de n-diméthyl amino éthanol sous forme cristallisée, sa vocation est d’être utilisée comme médicament dans le traitement des asthénies et de la maladie d’alzheimer ; et a fait l’objet d’extensions pour 18 pays non poursuivies et il n’est pas exploité, le tribunal a fixé à la somme de 1.000 euros la rémunération supplémentaire ;

En regard de l’ensemble de ces éléments c’est par de justes motifs que la cour fait siens que le tribunal a fixé la rémunération complémentaire de l’appelant pour les inventions de mission dont s’agit et a rejeté le paiement de rémunération pour celles ne revêtant pas un caractère exceptionnel, qu’il convient de confirmer.

La demande de paiement de dommages et intérêts formées par l’appelant au titre du recours abusif des intimées sur la proposition de CNIS, non fondée en regard des termes du présent arrêt doit être rejetée.

L’équité ne commande pas de faire droit à la demande formée par l’appelant sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Les dépens resteront à la charge de l’appelant qui succombe.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

En conséquence,

Rejette l’ensemble des demandes de l’appelant,

Condamne Monsieur Henri C aux entiers dépens d’appel.

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 25 octobre 2013, n° 2012/02326