Cour d'appel de Paris, 20 novembre 2013, n° 12/17510

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 20 nov. 2013, n° 12/17510
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/17510
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 5 septembre 2012, N° 10/08651

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 3 – Chambre 1

ARRÊT DU 20 NOVEMBRE 2013

(n° 257, 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/17510

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Septembre 2012 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 10/08651

APPELANTE

Madame K AG AH AI AJ épouse Z

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentée par Me F GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111, postulant

assistée de Me Géraldine GLIKSMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : R230, plaidant

INTIMÉES

1°) Madame W Q AE

XXX

XXX

Représentée par Me O GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020, postulant

assistée de Me O NEVOT de la SELARL NEVOT, avocat au barreau de PARIS,

toque : R042, plaidant

2°) Maître Virginie GLANDARD

XXX

XXX

XXX

Représentée et assistée de Me Valérie TOUTAIN DE HAUTECLOCQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0848

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l’affaire a été débattue le 15 octobre 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame U REYGNER, président,

Madame Nathalie AUROY, conseiller

Madame Monique MAUMUS, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats et du prononcé de l’arrêt : Madame AH-France MEGNIEN

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame U REYGNER, président, et par Madame AH-France MEGNIEN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

M E est décédé le XXX en laissant pour lui succéder, aux termes d’un testament olographe du 7 janvier 2010, Mme W Q R, légataire universelle, avec laquelle il avait conclu un pacs le 16 janvier 2004.

Par jugement du 6 septembre 2012, le tribunal de grande instance de Paris, saisi par Mme K Z, mère de M E, aux fins de voir déclarer AR le testament :

— l’a déboutée de ses demandes,

— a ordonné l’envoi en possession de Mme W Q R de la succession de M E,

— l 'a condamnée à payer à Me Virginie Glandard, notaire, la somme de 1 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— a débouté pour le surplus des demandes,

— a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

— a condamné Mme Z aux dépens.

Mme Z a interjeté appel de cette décision par déclaration du 1er octobre 2012.

Dans ses conclusions du 23 avril 2013 puis dans celles du 30 septembre 2013, Mme Z demande à la cour de :

— infirmer le jugement,

— dire que le testament litigieux n’est pas de la main de M E,

— dire qu’il était dans l’incapacité de manifester une volonté libre et consciente lors de la rédaction de ce testament,

— en conséquence,

— dire que le testament du 7 janvier 2010 est AR et de AR effet, conformément aux dispositions des articles 901 et 970 du code civil,

— condamner Mme Q R à lui payer la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts conformément aux dispositions de l’article 1382 du code civil,

— dire que la mise en cause de Me Virginie Glandard, notaire, s’avérait nécessaire,

— infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à lui payer la somme de 1 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— le confirmer en ce qu’il a débouté Mme Q R de sa demande de condamnation de toutes éventuelles dettes successorales,

— condamner Mme Q R aux dépens de première instance et d’appel avec application des dispositions de l’article 699 du même code.

Dans ses uniques conclusions du 26 février 2013, Mme Q R demande à la cour de :

— confirmer le jugement sous réserve des conséquences du défaut de paiement à la date de leur exigibilité des dettes successorales, notamment de nature fiscale, qui devront être assumées par Mme Z,

— rejeter les demandes de Mme Z,

— la condamner aux dépens et à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses uniques conclusions du 25 février 2013, Me Glandard demande à la cour de :

— confirmer le jugement en ce qu’il lui a alloué la somme de 1 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— y ajoutant,

— condamner Mme Z à lui payer la somme de 2 000 € sur ce même fondement,

— la condamner aux dépens avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans des conclusions de procédure du 9 octobre 2013, Mme Q R demande à la cour de :

— rejeter des débats les conclusions et pièce de Mme Z en date du 30 septembre 2013 comme portant atteinte aux droits de la défense et au principe du contradictoire.

Dans des conclusions de procédure du 14 octobre 2013, Mme Z demande à la cour de :

— dire irrecevable et mal fondée la demande de rejet formée par Mme Q R,

— en conséquence,

— déclarer recevables ses conclusions et pièce signifiées le 30 septembre

2013,

— statuer ce que de droit sur les dépens.

SUR CE, LA COUR,

sur la procédure

Considérant que Mme Z a interjeté appel du jugement déféré le 1er octobre 2012 et a conclu le 31 décembre 2012 ;

Que Mme Q R et Me Glandard ont conclu respectivement le 26 février et le 25 février 2013 ;

Que Mme Z a répondu à ces conclusions par ses écritures du 23 avril 2013 auxquelles les intimées n’ont pas répliqué ;

Que par avis du greffe adressé le 3 avril 2013, les parties ont été informées de la date de l’ordonnance de clôture, le 1er octobre 2013, et de celle des plaidoiries, le 15 octobre 2013 ;

Considérant que le 30 septembre 2013, Mme Z a de nouveau conclu et communiqué une nouvelle pièce n° 37 ;

Considérant toutefois que ces nouvelles conclusions ne comportent aucun moyen nouveau et que l’unique pièce communiquée (la photocopie du passeport de Mme Z) ne mérite pas un examen approfondi de sorte que ces dernières conclusions et pièce n’ont pas lieu d’être rejetées ;

sur le fond

Considérant que le 19 avril 2010, Me Glandard a procédé à la description du testament déposé à l’étude par Mme Q R le 22 janvier 2010 dont la teneur est la suivante :

« Ceci est mon testament

Je soussignée Mr M AL AM AN E (1 AP AQ AR)

DIETERELE né le XXX XXX par le présent testatamant olographagne être en pleine possession de toutes mes facultés mentales

révoquer toutes dispositions testatamentaire antérieures au 7 janvier 2010

Designer comme letgataire testamentaire melle Q HAMADOUGH W née le

23 mau 1971 à CAGNNES SUR MER de père HASSAN Q HAMADOUCH ET DE

MERE MIKIKA NEE BALAN EPOUSE Q HAMADOUCH ET LUI LEGUER PAR LE

XXX

POUR faire et valeur ce que de droit

FAIT A PARIS LE 7 Janvier 2010 »

suit une signature ;

sur la nullité du testament pour vice de forme

Considérant que selon les dispositions de l’article 970 du code civil, 'le testament olographe ne sera point valable, s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n’est assujetti à aucune autre forme';

Considérant que Mme Z soutient que la signature au bas du testament n’a strictement rien à voir avec celle de son fils et produit, aux fins de démontrer ce vice de forme, la copie de deux chèques des 22 et 24 février 2003, d’un acte de notoriété du 13 septembre 2007 et d’un acte de vente du 1er août 2005 et considère que les premiers mots 'je soussignée’ démontrent également une confusion avec la tierce personne qui a nécessairement guidé la rédaction du testament ;

Considérant que Mme Q R produit un rapport du 10 septembre 2010 d’un expert en écriture, Mme Y de G H, à laquelle elle a demandé d’examiner le testament et qui conclut en ces termes : 'le testament litigieux du 7 janvier 2010 est rédigé dans son entier texte et signature par un seul et même scripteur : M E.

Le testament ne comporte pas de caractéristique d’un tracé exécuté à main guidée ni de signe de contrainte susceptible d’attester d’une rédaction à main forcée';

Considérant qu’il résulte des articles 1324 et suivants du code civil, 287 et suivants du code de procédure civile, que les héritiers ou ayants cause peuvent dénier l’écriture ou la signature de leur auteur ou simplement déclarer ne pas les reconnaître ; que, dans ces cas, il appartient au juge d’examiner lui-même l’écrit litigieux, à moins qu’il puisse statuer sans en tenir compte, de sorte qu’il doit procéder à une vérification d’écriture ; qu’il incombe à la partie qui se prévaut de l’acte d’apporter la preuve de sa sincérité ; que les héritiers peuvent cependant apporter eux-mêmes des preuves de la fausseté de l’acte et le juge peut même leur enjoindre de produire des éléments de comparaison ; que le juge n’est pas tenu d’ordonner une mesure d’expertise ; que la vérification de l’écriture et de la signature doit permettre au juge de conclure positivement à la sincérité de l’acte, à défaut de quoi la partie qui fonde ses prétentions sur cet acte doit être déboutée ;

Considérant que Mme Z, qui prétend que la signature au bas du testament n’a strictement rien à voir avec celle de son fils, ne précise pas en quoi elle la trouve différente, se bornant à une simple affirmation sans détailler les éléments de cette signature qui la conduisent à cette conviction ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble des éléments de comparaison produits par les deux parties que l’écriture de M E, après le début de sa maladie, avait un caractère 'tremblé', caractère que la détérioration de son état de santé a accentué mais qui ne permet aucun doute sur l’auteur de l’ensemble du testament et plus particulièrement sur le scripteur de la signature qui ne présente pas de différence saillante avec les signatures présentées comme éléments de comparaison ;

Considérant que la faute d’orthographe commise dans l’expression 'je soussignée’ est dépourvue de signification dès lors qu’elle avait déjà été faite par M E dans un document antérieur (le pouvoir donné à Mme Q R pour faire établir le constat d’huissier du 31 décembre 2009), peu important que dans ce cas cette faute Q été corrigée, le simple fait qu’elle se soit déjà produite montrant les difficultés du de cujus avec l’orthographe dont attestent plusieurs documents produits tant par sa mère que par sa compagne ;

Considérant en conséquence, que la demande de nullité formée par Mme Z en application de l’article 970 du code civil doit être rejetée, dès lors que la signature portée sur le testament est bien celle du testateur ;

sur la nullité du testament pour vice de fond

Considérant que selon les dispositions de l’article 901 du code civil, pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit ;

Que la charge de la preuve de l’insanité d’esprit du testateur incombe à celui qui agit en annulation du testament ;

Considérant que M E a été opéré le 19 décembre 2008 d’un cancer de type carcinome épidermoïde du larynx et a subi une récidive à compter d’août 2009 ;

Considérant que Mme Z expose qu’elle a sollicité l’intervention du professeur O P, chef de service à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, service neurologie épileptologie, aux fins d’obtenir son analyse médicale au regard de la gravité de la maladie dont était atteint son fils et de déterminer si celui-ci aurait pu disposer de toutes ses facultés mentales lors de la rédaction du testament litigieux ;

Considérant que le professeur P, dans son rapport du 30 juin 2011, après avoir décrit l’apparition et l’évolution de la maladie, conclut qu’en décembre 2009, janvier 2010, M E était manifestement dans un état de cancer au stade terminal, sous stupéfiants, avec des complications neurologiques majeures ;

Qu’il se livre ensuite, de façon étonnante, dès lors qu’il ne s’agit pas de son domaine de compétence, à une analyse de l’écriture du malade et estime que l’écriture du testament est très hétérogène ;

Qu’il conclut en ces termes : 'l’analyse du document peut traduire la fatigabilité intense de M. D. et un manque total de concentration. L’essentiel reste la compréhension de ce qui a été écrit, quelque soit la ou les modalités de réalisation pratique, ainsi que de la parfaite appréhension du texte ou de ses implications.

Il est bien connu que des personnes sous cocktails médicamenteux qui annihilent compréhension, vigilance et esprit critique, peuvent établir des documents ou signer des chèques en faveur de tiers.

Il existe donc beaucoup d’éléments d’ordre médical indiquant que l’état de M. D. au moment où ce testament a été établi, le 7 janvier 2010, alors qu’il recevait des stupéfiants, comportait des troubles de la vigilance, une confusion, et une altération diffuse de ses fonctions intellectuelles';

Que dans un rapport complémentaire du 14 février 2012, il indique 'l’état clinique du patient, son extrême fatigabilité et vulnérabilité, les propriétés et effets secondaires des morphiniques, tels qu’utilisés dans les cancers en phase terminale, sont autant d’éléments qui dans l’expérience médicale sont de nature à altérer les capacités d’attention et de jugement ';

Considérant que Mme Z produit en outre des témoignages qui révèlent selon elle que les 28 décembre 2009 et 7 janvier 2010, l’état de santé de son fils était plus que défaillant au point qu’il ne disposait plus de toutes ses facultés mentales;

Considérant que ces témoignages proviennent du commissaire-priseur, de M. A E, oncle du de cujus et de M. U Z, fils du second époux de l’appelante ;

Considérant toutefois qu’il y a lieu d’écarter les témoignages provenant de personnes censées être dépourvues de connaissances médicales notamment en matière de troubles de l’esprit, étant souligné que Me Marchandet, commissaire-priseur, a indiqué que M E n’a pas été capable de lui répondre ni même de la saluer et qu’elle n’a pas entendu le son de sa voix ;

Que cette dernière remarque montre l’acuité relative de ce témoin en la matière, dès lors que M E avait subi une pharyngo-laryngectomie totale en décembre 2008 et qu’il ne pouvait plus s’exprimer oralement, si ce n’est éventuellement, par chuchotements;

Considérant que Mme Z produit également une lettre de Me Jacquin, notaire, qui lui relate qu’il avait, lors de sa visite du 28 décembre 2010, refusé d’instrumenter compte-tenu de l’altération non équivoque des facultés mentales de M E ;

Qu’il convient toutefois de préciser le contexte dans lequel le notaire intervenait ;

Qu’il résulte de l’attestation de M. A E que celui-ci avait l’intention de voir instrumenter Me Jacquin, son propre notaire, pour la signature d’un compromis de vente, un projet de partage d’indivision et la prise en compte des dernières volontés de son neveu ;

Considérant, vu l’ampleur des opérations envisagées, que c’est à juste titre que le notaire, qui n’avait pas été sollicité par M E mais par son oncle, a estimé de pas pouvoir procéder aux actes prévus et a indiqué, selon les dires de M. A E, qu’il serait nécessaire de procéder en présence de deux notaires et de deux médecins experts ;

Considérant que Mme Z allègue également le fait que son fils a été emmené le 7 janvier 2010, jour de la rédaction du testament, à l’hôpital par des ambulanciers dont Me Marchandet a été témoin de l’intervention ;

Considérant toutefois que Mme Q R prouve par les documents du dossier médical qu’il s’agissait d’une visite de contrôle programmée et non d’une hospitalisation en urgence ;

Qu’il convient en outre d’observer qu’à la suite de cette visite, M E a regagné son domicile, ce qui atteste que l’équipe médicale n’a pas jugé nécessaire de l’hospitaliser ;

Considérant enfin que Mme Z fait état de l’annulation d’un voyage au Maroc prévu du 12 au 24 février 2010 eu égard à l’état de santé de M E ;

Que cependant cet épisode montre que ce voyage avait en tout état de cause été envisagé, ce qui témoigne que même dans un état de faiblesse, le malade conservait la capacité de formuler des souhaits et des projets ;

Considérant que Mme Q R produit quant à elle le certificat médical du 7 janvier 2010 du docteur D qui est intervenu dans le suivi de M E à compter de février 2009, rédigé en ces termes : 'je soussignée docteur S D praticien hospitalier dans le service d’oncologie radiothérapie du professeur Toboul, certifie que M. M E, né le XXX, est en pleine possession de ses facultés mentales. Fait à la demande de l’intéressé ' ainsi qu’un rapport du docteur X ;

Considérant que Mme Z a déposé plainte le 8 juin 2010 à l’encontre du docteur D auprès de l’ordre des médecins qui, le 24 juin 2011, a rendu une décision aux termes de laquelle, la plainte a été rejetée, dès lors qu’aucun manquement aux obligations déontologiques n’a été retenu à l’encontre du docteur D ;

Considérant que l’argumentation du docteur D était ainsi rappelé dans la décision de l’ordre 'Considérant que le docteur D fait valoir, sans être sérieusement contredit, qu’il n’y a pas de discordance entre les constatations du praticien et les termes de son certificat, concernant les facultés mentales du patient ; qu’il s’agissait le 7 janvier 2010 d’une consultation prévue depuis 15 jours et non d’une hospitalisation en urgence ; que les constatations des témoins qui ont adressés une attestation sont partiales et ne reflètent pas l’état exact du patient ; que le 7 janvier le patient a été renvoyé à son domicile alors qu’un état inconscient aurait imposé son hospitalisation ; que M. E est décédé plus de deux mois après la rédaction du certificat médical contesté et qu’excepté les 26 et 27 janvier 2010, son état n’a pas nécessité de périodes d’hospitalisation à partir de décembre 2009 jusqu’à son décès ; que le docteur D nie toute relation amicale avec la bénéficiaire testamentaire ; que les doses morphiniques auxquelles étaient astreint le patient étant modérées, n’étaient pas de nature à altérer ses facultés mentales ; que les difficultés d’élocution de M. E dont il est fait état étaient consécutives à une trachéotomie sans canule parlante ; qu’aucun confusion mentale n’a été notée à l’une quelconque des consultations ';

Considérant que Mme Z trouve curieux que ce certificat Q été annexé au testament litigieux ;

Considérant, toutefois, que cette précaution manifeste au contraire le souci de prévenir toute contestation de la part de M E, qui était avocat et qui avait vu à l’occasion de la première visite de son oncle accompagné de Me Jacquin, le 28 décembre 2009, puis de la seconde visite, le 7 janvier 2010, cette fois accompagné d’un commissaire-priseur pour faire l’inventaire des meubles de l’appartement occupé par son neveu, que sa succession serait probablement l’objet de conflit ;

Considérant que le docteur X, chef de service de neurophysiologie clinique de l’hôpital G-F consulté par Mme Q R, après avoir pris connaissance de l’avis du professeur P, conclut dans son rapport du 12 janvier 2012 :

— 'que M. E avait incontestablement une altération de l’état général, qu’il pouvait avoir des accès de somnolence, qu’il avait une certaine faiblesse physique et des troubles visuels notamment à type de diplopie (vision double) ces deux derniers éléments pouvant à eux-seuls expliquer des anomalies de l’écriture.

— que M. E était sous morphiniques, ces morphiniques pouvant entraîner des troubles de vigilance et des altérations des fonctions cognitives, voire des altérations plus profondes de la conscience et du jugement mais cela dépend d’une part. des doses utilisées , d’autre part de la susceptibilité de chaque personne,

— aucun élément dans le dossier de M. E ne permet de retenir qu’il Q pu présenter une altération majeure de ses fonctions cognitives et notamment une altération de ses facultés mentales et donc de ses capacités de jugement le 7 janvier 2010 lorsqu’il a rédigé son testament.

Le docteur D qui connaissait bien M. E pour le suivre depuis un certain nombre de mois, a rédigé le 7 janvier 2010, au terme d’une consultation, un certificat attestant que l’intéressé avait toutes ses facultés mentales. Il existe de fait dans le dossier un compte-rendu d’examen de ce même médecin et des infirmiers de l’hospitalisation à domicile qui ne font pas état d’une altération de son état mental ou de troubles psychocomportementaux à cette date.

Les considérations exposées par le professeur P dans son document du 30 juin 2011 relèvent de considérations générales et théoriques basées sur les données de la littérature médicale et de pharmacologie mais ne relèvent d’aucune constatation médicale faite chez M. E .

Il ne peut en aucun cas être affirmé tant au vu des documents médicaux concernant M. E que de façon théorique et générale que M. E avait une altération de ses capacités de jugement le jour de la signature de son testament le 7 janvier 2010";

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments que la démonstration de l’insanité d’esprit de M E lors de la rédaction du testament du 7 janvier 2010, requise par l’article 901 du code civil n’est pas effectuée par Mme Z, qui doit être déboutée de sa demande de nullité de ce testament ;

Considérant qu’il doit être observé au surplus que cet acte est cohérent par rapport aux volontés exprimées par M E aux termes des messages qu’il écrivait à sa compagne à défaut de pouvoir parler, puisque en décembre 2009, il évoquait sa proposition d’épouser Mme Q R ;

Considérant ainsi, que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions, y compris en ce qu’il a rejeté la demande de Mme Q R, en l’absence d’éléments relatifs aux conséquences d’éventuels retards de paiement de dettes successorales et notamment fiscales ;

Considérant que Mme Z a interjeté appel également à l’encontre de Me Glandard, qu’elle a ainsi contrainte à constituer avocat, de sorte qu’il convient de faire droit à la demande du notaire sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Dit n’y avoir lieu au rejet des conclusions signifiées le 30 septembre 2013 et de la pièce communiquée à cette même date par Mme Z,

Confirme le jugement,

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Z, la condamne à payer à Mme Q R la somme de 3 000 € et à Me Glandard, celle de 1 500 €,

Condamne Mme Z aux dépens,

Accorde à l’avocat de Me Glandard le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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