Cour d'appel de Paris, 4 décembre 2013, n° 12/01163

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4 déc. 2013, n° 12/01163
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 12/01163
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 6 décembre 2011, N° 2011001177

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRÊT DU 04 DÉCEMBRE 2013

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 12/01163

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Décembre 2011 -Tribunal de Commerce de Paris – RG n° 2011001177

APPELANTE

Madame E Z

XXX

XXX

représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI MICHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073, avocat postulant

assistée de Me Marc-Antoine LEDIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : D463, avocat plaidant

INTIMÉE

La SA LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE A X, prise en la personne de ses représentants légaux,

XXX

XXX

représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP FISSELIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant

assistée de Me Michel PEIGNARD, avocat au barreau de VANNES, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 octobre 2013, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente, chargé d’instruire l’affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente

Mme G H, Conseillère

Mme C D, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Annick MARCINKOWSKI

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente et par Mme Alexia LUBRANO, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * *

EXPOSE DU LITIGE

Faits et procédure :

Mme E Z a signé, en date des 23 et 25 octobre 2000, avec la société laboratoires de biologie végétale A X un contrat de location gérance d’une durée de trois années, d’un fonds de commerce de produits de beauté, d’hygiène et de soins esthétiques, situé en centre-ville d’ Argenteuil ; l’activité de cette boutique a été transférée dans le centre commercial Grand Argenteuil renommé Coté seine à Argenteuil à effet du 6 novembre 2002, les relations se poursuivant aux autres clauses et conditions du contrat en cours sauf de redevance. Ce contrat de location gérance ayant été résilié, un nouveau contrat de location gérance a été signé en date des 4 avril et 4 mai 2004 pour trois ans à effet du 1er novembre 2003 ; à la date du 12 juillet 2006, la société A X a fait savoir à Mme Z qu’elle n’entendait pas renouveler ce contrat, les relations des parties se poursuivant ensuite aux termes de la lettre du 16 mai 2007 suivant contrat à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2006, soumis aux mêmes charges et conditions que les précédents.

Par lettre recommandée du 7 août 2009, la société A X invoquant des fautes de gestion de Mme Z et divers manquements relatifs notamment à la tenue des locaux et la présentation des produits, a mis fin au contrat avec un préavis de 6 mois expirant le 11 février 2010 ;

Mme Z a alors assigné le 9 novembre 2009, la société A X devant le tribunal de grande instance de Pontoise en requalification des contrats successifs en bail commercial de sous location ; puis, invoquant que la société A X avait cessé de la livrer en raison de l’absence de paiement des redevances, Mme Z a changé, le 5 janvier 2010, l’enseigne de son magasin, retiré les affiches, panneaux et logos A X et vendu des produits concurrents de ceux-ci.

Constatant que Mme Z avait déposé l’enseigne et commercialisait des produits concurrents, la société A X a alors notifié la résiliation immédiate du contrat et l’a assignée devant le juge des référés du tribunal de commerce de Vannes qui, par décision du 22 janvier 2010, a ordonné l’expulsion de Mme Z qui a formé appel le 25 janvier 2010.

Le 16 février 2010, Mme Z a été expulsée et le 7 septembre 2010, la Cour d’appel de Rennes a confirmé l’ordonnance de référé et condamné Mme Z à payer à la société A X la somme de 99 000 € à titre de provision correspondant au montant de factures impayées.

Mme Z s’est désistée de son instance devant le Tribunal de commerce de Pontoise qui a rendu le 3 mai 2011, un jugement d’extinction de l’instance.

Mme Z, réclamant des dommages intérêts en raison de la rupture des relations contractuelles, a saisi le tribunal de commerce de Paris qui, par jugement du 7 décembre 2011, a :

— condamné la sa Laboratoires de biologie végétale A X à payer à Mme Z, à titre de dommages et intérêts, la somme de 12 506 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2010, la déboutant pour le surplus,

— débouté Mme Z de sa demande de restitution du chèque de caution,

— débouté Mme Z de sa demande de publication d’extraits du jugement,

— condamné Mme Z à payer à la sa Laboratoires de biologie végétale A X, au titre des factures impayées, la somme de 126 134, 71 € majorée des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement,

— ordonné aux parties de se rapprocher pour établir un inventaire du stock de produits A X restant entre les mains de Mme Z,

— donné acte à la SA Laboratoires de Biologie végétale A X de son accord pour reprendre ce stock et reverser à Mme Y contre-valeur de celui-ci par imputation sur la somme due par Mme Z au titre des factures impayées,

— condamné Mme Z à payer à la SA Laboratoires de biologie végétale A X la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement,

— condamné Mme Z aux dépens ;

Mme Z a relevé appel du jugement, et par ses dernières conclusions du 11 août 2012, demande à la Cour de :

In limine litis,

Constater dans les conclusions d’ A X l’absence de bordereau de communication de pièces, l’absence de toute citation des pièces dans le corps de ces conclusions et le défaut total de communication de pièces de la part de A X,

Dire et juger irrecevable toute pièce qui viendrait à être communiquée au soutien des demandes de A X formulées dans les conclusions de A X régularisées le 11 juin 2012 et débouter purement et simplement A X de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre du jugement entrepris ou des demandes de Mme Z,

Constater l’absence de fondement en droit de la totalité des demandes de A X,

Dire et juger irrecevables les conclusions de A X et débouter A X purement et simplement de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre du jugement entrepris ou des demandes de Mme Z,

Dire et juger que les conclusions d’appel de Mme Z ne contiennent aucune prétentions nouvelles et en conséquence rejeter la fin de non recevoir soulevée par A X,

Dire A X irrecevable à soulever toute éventuelle irrégularité de la procédure d’appel de Mme Z,

Au fond,

Dire Mme Z recevable et bien fondées en son appel et ses demandes et y faisant droit,

Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 7 décembre 2011 qui a retenu :

*la nature établie de la relation commerciale entre A X et Mme Z de 2000 à 2009

*l’absence de preuve établie par A X des fautes graves reprochées à Mme Z et ayant fondé en 2009 la rupture du contrat de location gérance,

que le préavis de résiliation aurait du être de 18 mois, et non de 6 mois comme fixé par A X,

Pour le reste réformer le jugement entrepris et statuant de nouveau,

Constater le défaut systématique d’exécution de bonne foi des contrats de location gérance conclus avec Mme Z en 2000, 2003 et 2007, la fraude organisée par A X lors du transfert du fonds de commerce en novembre 2002 et l’abus d’état de dépendance totale dans lequel A X a volontairement installé et maintenu Mme Z entre 2000 et 2009,

En conséquence,

Condamner A X à payer à Mme Z la somme de 742 206 € au titre de la perte subie et 22 530 € au titre de gain manqué pour non respect d’un préavis de résiliation raisonnable et 742 206 € soit un an du dernier chiffre d’affaires de Mme Z en réparation des préjudices subis par Mme Z pour :

*le défaut d’exécution de bonne foi des conventions par A X,

*l’abus d’état de dépendance de Mme Z,

*la fraude aux droits de Mme Z lors du transfert du fonds de commerce en novembre 2002 et abus de droit de résilier le contrat de location gérance en 2009.

Donner acte à Mme Z de ce qu’elle reconnaît devoir à A X la somme de 99 000 € retenue par la cour de Rennes le 7 septembre 2010,

Ordonner la compensation entre le montant total des sommes à devoir par A X à Mme Z et celles des sommes restant dues par Mme Z à A X et constater au final une créance de Mme Z à l’encontre de A X d’un montant de 1 439 382 €,

Condamner A X à payer à Mme Z la somme de 1 439 382 € avec intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2009, l’assignation délivrée par Mme Z à A X à cette date valant interpellation suffisante au sens de l’article 1153 al 2 du Code de procédure civile,

Ordonner la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir dans un ou plusieurs journaux professionnels du choix de Mme Z pour un montant total de 10 000 euros ht plus tva montant dont le coût sera intégralement supporté par A X dans les trente jours de la signification de l’arrêt à intervenir, ainsi que de manière très apparente pendant 30 jours consécutifs et de manière continue, sur la page d’accueil du site internet accessible à l’adresse www.A-X.fr, sous astreinte provisoire d’un montant de 1 000 € par jour en cas d’inexécution,

Condamner A X à payer à Mme Z la somme de 15 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamner A X à supporter les entiers dépens.

La SA Laboratoires de biologie végétale A X (également désignée société A X) par ses dernières conclusions signifiées le 16 avril 2013, demande à la Cour de :

Infirmer le jugement entrepris,

Dire et juger, que la Société A X a parfaitement respecté ses obligations en laissant un préavis de six mois compte tenu des fautes commises par Mme Z,

Constater, au surplus, que, compte tenu des graves fautes commises par Mme Z au cours du préavis, le contrat ne pouvait qu’être résilié immédiatement pendant ce même préavis,

En conséquence, débouter Mme Z de toutes ses demandes, fins et conclusions lui permettant de bénéficier d’une somme au titre du non-respect du préavis,

Constater, par ailleurs, l’existence d’une demande nouvelle, en l’occurrence des dommages-intérêts pour non-respect du contrat passé,

Déclarer irrecevables ces demandes,

A titre subsidiaire, constater que les fautes reprochées ne sont aucunement prouvées,

En conséquence, débouter Mme Z de toutes ses demandes, fins et conclusions et notamment de celles concernant la prétendue irrecevabilité tant des conclusions que des pièces communiquées,

La condamner, reconventionnellement, conformément au jugement rendu, à régler, au titre des factures impayées, la somme de 126 134,71 €, ladite somme étant majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 Janvier 2010, lesdits intérêts étant capitalisés,

Constater que Mme Z n’a jamais, depuis le prononcé du jugement, fait la moindre proposition pour faire en sorte que le stock soit tenu à la disposition de la Société concluante pour qu’il soit procédé à un inventaire contradictoire,

Condamner, par ailleurs, Mme Z à régler, à titre de dommages-intérêts pour procédure et appel abusifs, la somme de 20 000 € et, au titre des frais irrépétibles, celle de 8 000 €,

Confirmer, en outre, sur ce point, la condamnation prononcée par le tribunal de commerce de Paris concernant les frais irrépétibles devant lui,

Condamner Mme Z en tous les dépens tant de première instance que d’appel dont distraction.

SUR CE,

Sur l’irrecevabilité des pièces et conclusions de la société A X :

Mme Z demande in limine litis que la cour constate que la société A X n’a communiqué aucune pièce en même temps que ses conclusions d’appel du 11 juin 2012, aucun bordereau de communication de pièces en date de ce jour n’ayant été versé aux débats et aucune pièce n’étant visée dans les conclusions de la société.

La société A X n’a moyen opposant à cette demande ; elle ne conteste pas ne pas avoir par application des dispositions de l’article 906 du code de procédure civile communiqué ses pièces simultanément à ses premières conclusions signifiées le 11 juin 2012 de sorte que la sanction consistant à écarter des débats les pièces non visées dans les conclusions et non régulièrement communiquées par un bordereau joint doit s’appliquer.

Mme Z demande également à la cour de constater l’absence de fondement juridique des conclusions signifiées par la société A X et de les dire irrecevables.

Les conclusions d’appel doivent au terme de l’article 654 du code de procédure civile formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée, avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées ; les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif ; les parties doivent reprendre dans leurs dernières écritures les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures ; à défaut, elles sont réputées les avoir abandonnées et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

Or les conclusions signifiées par la société A X le 16 avril 2013 à Mme Z sur lesquelles la cour doit statuer, contiennent les prétentions de la société et les moyens de droit et de fait propres à fonder ces prétentions de sorte qu’elles ne peuvent, au motif de l’absence d’indication des prétentions et des moyens propres à fonder celles ci, être jugées irrecevables ;

Elles ne comportent en revanche aucun visa des pièces invoquées au soutien des prétentions, dont le bordereau est pourtant joint auxdites conclusions mais il vient précédemment d’être relevé que les pièces de la société A X n’ont pas été communiquées en temps utile, de sorte qu’elles ont été écartées des débats ; ainsi l’absence de visa des pièces ne peut conduire à écarter des débats les conclusions elles mêmes.

Sur le caractère de nouveauté des demandes présentées par Mme Z :

La société A X demande d’écarter des débats les demandes nouvelles formées par Mme Z qui, devant le tribunal de commerce, formait une demande fondée sur les dispositions de l’article L 442-6 -5° du code de commerce et sollicitait l’allocation dommages intérêts équivalent à deux années de chiffre d’affaires, au titre du préjudice subi en raison de la rupture des relations intervenue à l’initiative de la société A X et qui devant la cour, invoque l’état de dépendance économique, la mauvaise foi et la fraude à ses droits lors du transfert du fonds et dans l’exécution des conventions successivement conclues avec la société A X ;

Or les parties peuvent en cause d’appel ajouter aux demandes soumises au premier juge toutes les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément ; ne sont pas non plus nouvelles les actions qui tendent aux mêmes fins même si leur fondement juridique est différent ;

Ainsi les demandes présentées par Mme Z en appel et tendant principalement à l’octroi de dommages intérêts pour le préjudice résultant de la mauvaise exécution par la société A X de ses engagements tendent aux mêmes fins que la demande de dommages-intérêts présentée en première instance au titre du préjudice subi en raison de la rupture abusive du contrat ; elles constituent le complément de cette précédente demande et sont donc recevables en appel ;

Sur le fond :

Sur les fautes invoquées à l’encontre de la société A X dans l’exécution de ses obligations :

L’appelante fait valoir que le contrat de location gérance doit permettre au gérant de mener son activité de manière indépendante dans le fonds de commerce de son concédant, qu’en l’espèce, le dispositif mis en place par A X ne respecte pas l’article L 144 -1 du code de commerce, du fait de la totale dépendance du locataire- gérant par rapport à la société A X, se voyant imposer : la décoration du magasin, l’agencement et le mobilier, l’aménagement et l’équipement des cabines de soin, la présentation des produits, les techniques de vente, les méthodes de soins, les campagnes publicitaires, la comptabilité, les assurances.. mais aussi le système informatique, la ligne téléphonique au nom de A X, les modalités de commande et de réassort, de livraison, de délais de paiement, de remises et de prix… Mme Z ne pouvant commercialiser que les produits A X et étant soumis à une clause de non concurrence lui empêchant d’exercer toute autre activité, qu’elle était ainsi dans un état de dépendance organisée.

Concernant la fraude au transfert du fonds, elle soutient que pour qu’il y ait transfert du fonds et non création d’un nouveau fonds, l’importance respective du chiffre d’affaires de la clientèle de l’ancien et du nouveau fonds doit être appréciée, qu’en réalité, il y a eu création en 2002 d’un nouveau fonds par le travail de Mme Z, A X ayant commis une fraude en ne lui reconnaissant pas la qualité de titulaire de la clientèle, donc du fonds de commerce du magasin du centre commercial et en la privant de la juste indemnisation de son travail.

L’appelante soutient également que les contrats la liant à la société A X ont été systématiquement résiliés sans motif alors qu’ils contenaient une clause de reconduction tacite, que A X attendait de longs mois avant de proposer la signature d’un nouveau contrat tout en l’approvisionnant, ce qui la plaçait en situation de devoir accepter les conditions du nouveau contrat, que la société A X a imposé la modification des redevances en profitant de sa totale dépendance, ce qui démontre une exécution des conventions de mauvaise foi de la part de la société A X ;

L’objet principal du contrat de location gérance liant les parties est celui formulé en son article 2 d’assurer sous contrat d’exclusivité l’écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par la société A X ;

Ce contrat prévoit que seuls les produits expressément autorisés par la société A X et les traitements et méthodes de soins spécifiques mis au point par la société A X pourront être utilisés, la gérante s’engageant à ne pas pratiquer de soins qui n’auraient pas été préalablement approuvés par écrit par ladite société ;

La gérante s’oblige également à ne pas approvisionner son institut de beauté et à ne pas vendre des produits qui n’auraient pas été approuvés expressément par la société A X sans avoir informé préalablement et par écrit la société de son intention de le faire en donnant à celle-ci la possibilité de déterminer si les caractéristiques et les qualités de ces produits sont comparables à ceux antérieurement approuvés et s’ils sont compatibles avec l’image de marque de la société A X ;

Mme Z tout en décrivant le système d’approvisionnement en produits fabriqués par la société A X et les procédures auxquelles elle était soumise dans l’exercice de son activité, ce qui caractérise selon elle un abus de dépendance économique de la part de A X, ne conteste pas que ces dispositions estimées contraignantes avaient une contre partie offerte par la société A X en termes de prix, de publicité, de conseils et de soutien et n’invoque ni ne démontre que les dispositions du contrat ayant trait à ces contre parties n’ont pas été réalisées par la société A X ; elle ne démontre pas davantage qu’elle s’est trouvée dans une situation économiquement défavorable du fait des conditions financières ou autres imposées par la société A X ; elle ne démontre pas non plus qu’elle n’a pu user de la faculté prévue au contrat de solliciter auprès de son fournisseur de pouvoir utiliser d’autres produits que ceux fabriqués par A X et s’être heurtée à un refus injustifié.

Elle ne caractérise par ailleurs aucune fraude dans le transfert du fonds précédemment exploité XXX à Argenteuil, organisé par la société A X qui a pris de nouveaux locaux à bail dans le centre commercial Grand Argenteuil renommé coté Seine et ne justifie pas avoir en réalité créé la clientèle du fonds ainsi transféré alors qu’elle a continué à exercer son activité aux mêmes conditions que précédemment, sous la même enseigne, auprès d’une clientèle attachée à l’image de marque des produits commercialisés par la société A X.

La lettre adressée par la société A X le 12 juillet 2006 à Mme Z, écrite dans les mêmes termes que la précédente adressée le 17 juillet 2003 pour le contrat précédent, indiquait l’intention de la société A X de ne pas renouveler le contrat à effet du 1er novembre 2003 arrivé à expiration le 31 octobre 2006, précisant qu’à cette date, toutes les clauses du contrat cesseront de produire effet 'à l’exception de celles qui par nature lui survivent’ et qu’elle ne manquera pas de la recontacter pour l’informer des dispositions prises, ce qui est pour le moins ambigu dès lors que la société A X manifestait ainsi son intention de ne pas reconduire le contrat qu’elle a finalement reconduit, sauf en ce qui concerne la durée, suivant courrier en date du 16 mai 2007 par lequel elle confirmait son accord pour la poursuite des relations contractuelles dans le cadre cette fois d’un contrat à durée indéterminée ;

Malgré la formulation ambigue de la lettre de dénonciation, Mme Z ne démontre cependant ni la mauvaise foi ni l’existence de manoeuvres de son co contractant et ne caractérise aucun préjudice dès lors qu’a succédé au précédent contrat à échéance du 1er novembre 2003, un nouveau contrat aux mêmes clauses et conditions que le précédent et à celui arrivant à échéance du 31 octobre 2006 un contrat à durée indéterminée aux conditions des autres contrats auxquels il renvoie sauf de durée ; l’intention invoquée de nuire à son cocontractant n’est pas davantage démontrée par l’absence de signature sur l’avenant à effet du 1er novembre 2006 dont Mme Z ne conteste pas néanmoins qu’il s’est appliqué dans toute son étendue en ce qu’il renvoyait aux conditions des autres contrats, sans protestation de sa part, avant que d’être résilié à l’initiative de la société A X.

Il s’ensuit que les demandes en dommages intérêts pour inexécution prétendument fautive ou de mauvaise foi par la société A X de ses obligations, autres que celle faite au titre de la rupture du contrat ne sont pas fondées.

Sur la rupture des relations contractuelles :

La société A X a reproché dans la lettre de résiliation du 7 août 2009 adressée en recommandé à Mme Z ; 1° des fautes de gestion consistant à avoir opéré des prélèvements excessifs, avoir fait des choix de gestion en dépit des préconisations figurant dans le compte d’exploitation prévisionnel, choix qui ont obéré selon A X la situation financière de l’exploitation et 2° de ne pas avoir respecté les normes et l’image de marque de la société en ayant 'un magasin à la propreté discutable, tant au niveau de la surface de vente que de la présentation des produits non conforme à l’image de marque ( insuffisance des produits en démonstration, compositions non soignées ou non préparées.. ) des conseillères esthéticiennes livrées à elles mêmes ne présentant ni la tenue ni le comportement attendu par la clientèle d’une enseigne comme celle de A X , une hygiène douteuse des appareils servant à la réalisation des prestations de soins’ .

Elle y indiquait que la résiliation prendrait effet au 10 février 2010.

La société A X a diligenté un audit propreté de la boutique le 6 mai 2008 dont les résultats ont été communiqués à Mme Z révélant certains manquements ; Mme Z prenant acte de ceux-ci a proposé dans un courrier adressé à la société A X le 12 septembre 2008 un 'plan d’action’ approuvé ensuite par la société le 22 septembre 2008 ; la société A X n’invoque aucun audit qu’elle aurait effectué postérieurement qui établirait que les mesures annoncées n’ont pas été mises en oeuvre. Mme Z verse au contraire aux débats une veille de satisfaction de la clientèle du 3e trimestre 2009 établi à la diligence de la société A X qui atteignait des scores de 90 à 95 % supérieurs au seuil de sécurité et à la moyenne de l’ensemble des points de vente A X.

C’est donc à juste titre que le tribunal de commerce a relevé que la circonstance que certaines clientes au nombre de '14 ' environ aient exprimé leur insatisfaction en raison de l’absence de qualité des soins ou de l’absence de propreté attendue d’un institut de beauté, d’autres se prévalant uniquement de l’absence de remise des cadeaux annoncés par courrier, sur un total de 140 000 achats effectués sur la période allant de 2007 à 2009 ne permet pas d’établir l’insatisfaction de la clientèle ;

S’agissant des comptes d’exploitation, les griefs invoqués demeurent vagues et ne sont justifiés par aucune pièce laissant apparaître des prélèvements excessifs de la part de la gérante, les chiffres invoqués dans la lettre de résiliation ne révélant en eux mêmes aucun excès, sauf un montant élevé en 2006, à une date éloignée de la rupture, ce niveau de prélèvements n’ayant pas été ensuite poursuivi, et la société A X ne s’attachant pas à démontrer le caractère excessif de celui-ci par rapport aux prélèvements admis généralement pour les gérants des points de vente.

Le fait ensuite pour Mme Z d’avoir cessé de régler les factures à compter de novembre 2009 puis d’avoir déposé l’enseigne et vendu des produits de soins et d’esthétique d’une marque concurrente, remisé l’ensemble des matériels de type caisse enregistreuse, machine à carte bancaire pour les remplacer par des matériels neufs, ces derniers faits étant survenus postérieurement à la lettre de rupture dans un contexte de conflit marqué par l’absence de paiement des redevances d’un coté et l’absence de livraison de produits de l’autre, ne peuvent a posteriori légitimer et conférer à des motifs insuffisants un caractère de gravité ;

C’est donc par des motifs pertinents que la cour approuve que le tribunal a jugé que l’absence de motifs et l’insuffisance de la durée de préavis pour permettre à Mme Z de reconstituer une nouvelle clientèle conféraient à la rupture des relations contractuelles un caractère brutal et que compte tenu de la durée de ces relations et de la présence d’une clause de non concurrence sur toute la commune d’Argenteuil pendant un an, il convenait par application de l’article L 442-6 5° d’indemniser Mme Z en lui allouant des dommages intérêts plus justement évalués en outre des six mois accordés, à un an de la perte de marge brute de 2009 soit la somme de 15 000 € qui portera intérêts au taux légal à compter de l’assignation devant le tribunal de commerce de Paris.

En ce qui concerne les factures impayées, la cour d’appel de Rennes a condamné Mme Z à payer une somme de 99 000 € à la société Laboratoires de biologie végétale A X qui réclame à ce titre une somme de 126 134,71 € telle que retenue par le jugement déféré ; l’absence de production de pièces par ladite société conduit cependant à ne condamner Mme Z qu’au montant de la somme de 99 000 € à laquelle elle a été condamnée par provision, dont elle se reconnaît débitrice et qui portera intérêts au taux légal à compter du 7 septembre 2010 ;

S’agissant du stock, les parties ne formulent aucune contestation de la décision déférée qui a donné acte à la société Laboratoires de biologie végétale A X de son intention de le reprendre et d’imputer sa valeur sur les sommes dues au titre des factures impayées.

La société A X sera déboutée de sa demande en dommages-intérêts, faute de démontrer le caractère abusif de l’appel. Les deux parties seront déboutées de leur demande en cause d’appel fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

La nature du conflit qui oppose les deux parties et la décision qui en résulte ne justifient pas de publication d’extraits de l’arrêt.

La société Laboratoires de biologie végétale A X supportera les entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

Rejette les pièces non régulièrement communiquées par la société Laboratoires de biologie végétale A X simultanément à ses conclusions signifiées le 11 juin 2012,

Dit n’y avoir lieu de rejeter les conclusions signifiées le 16 avril 2013 par la société Laboratoires de biologie végétale A X,

Dit recevables les demandes de Mme Z formées pour la première fois devant la cour,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne le montant des dommages- intérêts alloués à Mme Z en application de l’article L 442-6-5° et le montant de la condamnation de Mme Z au profit de la société Laboratoires de biologie végétale A X ;

Statuant à nouveau sur ces points,

Condamne la société Laboratoires de biologie végétale A X à payer à Mme Z la somme de 15 000 € à titre de dommages intérêts pour rupture brutale du contrat liant les deux parties, majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2010,

Condamne Mme Z à payer à la société Laboratoires de biologie végétale A X la somme de 99 000 € au titre des factures impayées, majorée des intérêts au taux légal à compter du 7 septembre 2010.

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne la société Laboratoires de biologie végétale A X aux dépens de l’appel qui seront recouvrés directement par application de dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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