Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 24 mars 2015, n° 2013/23338

  • Création·
  • Collection·
  • Originalité·
  • Montagne·
  • Sociétés·
  • Cerf·
  • Produit·
  • Droits d'auteur·
  • Saisie-contrefaçon·
  • Droit patrimonial

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5, 24 mars 2015, n° 13/23338
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2013/23338
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 21 novembre 2013, N° 11/11796
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 22 novembre 2013, 2011/11796
  • (en réquisition)
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Référence INPI : D20150026
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRET DU 24 MARS 2015

Pôle 5 – Chambre 1

(n°062/2015, 11 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 13/23338

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Novembre 2013 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – 3e chambre – 3e section – RG n° 11/11796

APPELANTE Madame Angélique B Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151 Assistée de Me Alain N, avocat au barreau de PARIS, toque : E1624

INTIMES Maître Robert MEYNET, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SARL ANGEL DES MONTAGNES n’ayant pas constitué avocat, régulièrement assigné

SAS ADM CRÉATIONS ayant son siège social […] 74200 THONON LES BAINS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Assistée de Me François C, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 10 Février 2015, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre Madame Anne-Marie GABER, Conseillère Mme Nathalie AUROY, Conseillère, chargée du rapport qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno R

ARRÊT : • réputé contradictoire • par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. • signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président, et par Madame Karine A, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement rendu le 22 novembre 2013 par le tribunal de grande instance de Paris,

Vu l’appel interjeté par Mme Angélique B le 5 décembre 2013,

Vu les dernières conclusions transmises par Mme B le 2 octobre 2014, Vu les dernières conclusions transmises par la société ADM Créations le 29 août 2014, Vu l’absence de constitution de Maître Robert Meynet, ès qualités d’administrateur judiciaire de la SARL Angel des Montagnes, régulièrement assigné à domicile avec dénonciation des conclusions de l’appelante par acte du 26 février 2014,

Vu l’ordonnance de clôture du 2 décembre 2012,

MOTIFS DE L’ARRÊT

Considérant que Mme B a créé en 1995 la société Angel des Montagnes, titulaire de la marque éponyme, dont l’activité est la création et la distribution de produits et accessoires de décoration et d’habillement autour du thème de l’art de vivre à la montagne ;

Que, par jugement du 19 février 2010, le tribunal de commerce de Thonon- les-Bains a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard cette société, puis, par jugement du 9 juillet 2010, en a ordonné la vente au profit de M. T, auquel s’est substituée la société ADM Créations ;

Que, nonobstant un accord de principe, formalisé dans un courriel du 2 décembre 2010 et son avenant du 4 février 2011, prévoyant la conclusion d’un contrat de prestation de services par la société ADM Créations avec Mme B pour des prestations de création, de communication, de décoration et d’architecture d’intérieur, la cessation de leurs relations à la fin du mois d’avril 2011 a été officialisée le 24 mars 2011 ; que, par lettre du 27 avril 2011, Mme B a mis en demeure la société ADM Créations de cesser la fabrication et la commercialisation de ses créations et de réparer son préjudice résultant notamment de la violation de ses droits d’auteur ;

Que cette mise en demeure étant restée infructueuse, Mme B a, le 3 juin 2011, fait procéder à un constat par un huissier de justice sur les sites internet www.angeldesmontagnes.com et www.ange1desmonta.gnes.jp. ;

Qu’autorisée par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Lyon du 15 juin 2011, Mme B a fait diligenter, le 6 juillet 2011, une saisie-contrefaçon au siège de la société ADM Créations ; que par arrêt du 21 mai 2013, la cour d’appel de Lyon a prononcé la

mainlevée de la saisie-contrefaçon pratiquée, aux motifs de l’omission par l’étude d’huissier de justice du bordereau de pièces qui accompagnait la requête lors de la dénonciation de l’ordonnance ;

Qu’autorisée par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris le 28 juin 2011, Mme B a également fait diligenter une saisie-contrefaçon le 6 juillet 2011, dans les locaux du magasin Angelys, situé […], au cours de laquelle 31 pièces arguées de contrefaçon ont été saisies ;

Qu’elle a enfin, par acte du 28 juillet 2011, fait assigner la société ADM Créations en contrefaçon devant le tribunal de grande instance de Paris ;

Que par acte du 23 octobre 2012, la société ADM Créations a fait assigner en intervention forcée Maître Meynet, ès qualités ;

Que les deux procédures ont été jointes ;

Considérant que dans son jugement du 22 novembre 2013, le tribunal a : • débouté Mme B de sa demande de validation du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 6 juillet 2011 (celle pratiquée au siège de la société ADM Créations), • déclaré irrecevable sa demande en contrefaçon de droits d’auteur, • débouté la société ADM Créations de sa demande reconventionnelle en procédure abusive, • condamné Mme B aux entiers dépens de l’instance, • condamné Mme B à payer à la société ADM Créations la somme de 3 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, • dit n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision ;

Considérant que Mme B revendique des droits d’auteur sur les produits référencés dans le 'catalogue produits été 2011" Angel des Montagnes, tels que repris dans ses conclusions pages 6 à 46

I Sur la recevabilité à agir de Mme B en contrefaçon de droits d’auteur :

— sur la qualité d’auteur :

Considérant que Mme B prétend être l’unique auteur de ces créations ; qu’elle fait valoir que bon nombre des créations ont été réalisées par elle avant la première embauche d’une assistante en 2002, qu’elle dispose pour chacune d’entre elles de photographies et croquis

déposés à son nom chez un notaire et de dessins, que le mode de création est toujours resté le même et que, d’ailleurs, aucune autre personne ne revendique la qualité de co-auteur ;

Que la société ADM Créations, suivie en cela par le tribunal, répond qu’il s’agit d’œuvres collectives ; qu’elle soutient que cela résulte tant du mode de création chez Angel des Montagnes, où l’activité de Mme B était celle d’une directrice artistique travaillant avec une équipe de création, que de l’absence de démonstration par Mme B, d’un acte créatif personnel et, pour chaque objet revendiqué, d’une création unique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L.113-2, alinéa 3, du code de la propriété intellectuelle, 'est dite collective l’œuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé ;

Considérant que l’ensemble des produits revendiqués ont été créés dans le cadre de l’activité de la société Angel des Montagnes, avant (dans leur grande majorité) ou après son rachat par la société ADM Créations, et divulgués sous la marque Angel des Montagnes ;

Considérant qu’il résulte de nombreuses attestations concordantes versées aux débats par Mme B – que les articles de presse produits ne font que confirmer – que celle-ci a conçu elle-même toutes les œuvres des différentes collections depuis 1995, date à laquelle elle a créé la société Angel des Montagnes ; qu’il n’est aucunement justifié de contraintes auxquelles elle aurait du se conformer dans le cadre de sa mission et qui l’auraient privée de son autonomie créatrice ainsi que de la liberté dans les choix esthétiques ;

Considérant qu’il apparaît que les collections Cœur, Flocon, Juliette, Montée à l’alpage, Pays d’en Haut, Etoile des Neiges, Tarine, Heidi, Edelweiss et Joson ont été créées avant la première embauche d’une assistante styliste en la personne de Mme Malorie V, le 5 août 2002 ; que la société ADM Créations ne saurait sérieusement prétendre que le recours par Mme B à des stagiaires – non démontré, sauf pour Mme V qui a effectué un mois de stage dans l’année précédant son embauche – avant cette date, serait de nature à remettre en cause sa qualité d’unique auteur, alors qu’il lui appartient de démontrer l’existence d’une participation effective d’autres auteurs au processus de création ;

Considérant que, pour la période postérieure, il n’est pas contesté que Mme B, également gérante de la société Angel des Montagnes, était assistée, dans son activité de création, d’une styliste assistante de collection et d’une directrice de collection ; que, présentée comme

directrice artistique par la société ADM Créations, il n’apparaît pas toutefois que ses fonctions aient fondamentalement changé après l’acquisition de la société Angel des Montagnes par cette société ;

Qu’il résulte encore des attestations concordantes versées aux débats, et notamment des attestations de Mme Lore M, styliste assistante de collection de décembre 2009 à mai 2011, de Mme Joëlle P, responsable de collection de septembre 2008 à janvier 2010 et de Mme Jessica G, styliste développeuse graphiste de juin 2006 à décembre 2008, que si Mme B partageait sa

1:

souligné par la cour

vision créatrice avec son équipe, c’est elle qui avait l’idée du produit et elle réalisait elle-même les dessins et croquis, qui étaient ensuite repris par ordinateur pour la constitution du dossier technique et la réalisation des prototypes ; que sa mission ne se bornait donc pas à donner l’impulsion créative aux collections et à décider des thèmes à développer ; que l’ensemble des tâches décrites par les membres de '"l’équipe de création, telles qu’elles les décrivent (^applications créatives, 'élaboration de dossiers techniques'..) participait, de leur point de vue même, à une contribution d’application technique et logistique et non à un concours artistique significatif à la création des objets composant les collections, du seul ressort de Mme B, laquelle, avec Mme P, leur donnait des directives ; qu’aucune d’entre elles ne revendique au demeurant de droits d’auteur sur ces objets ;

Que la seule attestation contraire conséquente produite par la société ADM créations est à prendre avec circonspection, dès lors qu’elle émane d’une personne – Mme Sophie D – toujours salariée, donc dans un lien de dépendance vis à vis de la société intimée, qu’elle ne répond pas aux exigences de l’article 202 du code de procédure civile – et spécialement n’indique pas que son auteur a connaissance qu’une fausse attestation de sa part l’expose à des sanctions pénales – et qu’il n’est pas démontré que Mme D, dont les fonctions de couturière font essentiellement appel à un savoir-faire technique, ait eu un rôle créatif déterminant ; que ses assertions, formellement contredites par toutes les personnes qu’elle met en cause, ne seront donc pas retenues ; qu’en définitive, la société intimée, qui ne justifie de l’embauche d’aucun autre créateur concomitamment à Mme B, ne démontre pas, comme il lui incombe, l’existence d’une participation effective d’autres auteurs identifiés au processus de création pour les autres collections dont les produits sont revendiqués, soit Marie, Balthazar, Cortina, Nanin, Reine de l’Alpe, Clochette, Fée Bleue, Branche, Brute, Lucile, Lumière en Rêve, Cerf et Ange ;

Considérant qu’ainsi, étant observé que la grande majorité des produits ont fait l’objet de photographies et/ou de croquis déposées par les soins de Mme B et à ses frais en l’étude d’un notaire et/ou de croquis non certifiés, listés dans sa pièce n°22, la qualité d’auteur unique des produits revendiqués doit lui être reconnue ;

— sur la titularité des droits d’auteur :

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme B dispose des droits moraux d’auteur -incessibles – sur les produits revendiqués, sous réserve de leur originalité ;

Considérant que, s’agissant des droits patrimoniaux d’auteur sur ces mêmes produits, force est de constater que Mme B, qui conteste dans le corps de ses écritures la validité du 'contrat réitératif de cession de droits incorporels incluant ces droits , régularisé, en mai 2011, par Maître Meynet ès qualités au profit de la société ADM Créations, n’en demande pas la nullité, et ce, nonobstant la mise en cause de Maître Meynet ès qualités dans la présente instance ; qu’elle n’est donc pas fondée à soutenir que la transmission des droits patrimoniaux d’auteur par la société Angel des Montagnes représentée par Maître Meynet à la société ADM Créations serait entachée d’irrégularité, notamment du fait de l’absence de transmission préalable dans les formes requises de ses droits patrimoniaux d’auteur à la société Angel des Montagnes ;

qu’il en résulte que c’est la société ADM Créations, et non Mme B, qui dispose des droits patrimoniaux d’auteur sur les produits revendiqués ;

— sur l’originalité :

Considérant que la société ADM Créations dénie 'à bon nombre’ des produits revendiqués toute originalité, laquelle conditionne leur éligibilité à la protection au titre du droit d’auteur ;

Que sur 40 pages de ses conclusions, à laquelle la cour se réfère expressément, Mme B récapitule les références des produits revendiqués et se livre à la description de ce qui constitue pour elle leur originalité ;

Considérant qu’après avoir procédé à l’examen de chaque produit revendiqué et recherché, pour chacun d’entre eux, si celui-ci avait une physionomie propre qui le distingue des autres 'modèles’ du même genre et qui traduit un parti-pris esthétique empreint de la personnalité de son auteur, la cour estime être en mesure de les classer en quatre catégories : 1) les produits dont l’originalité résulte de la combinaison d’un motif lui-même original et de l’effet produit par son apposition, 2) les produits dont seul le motif est original, 3) les produits dont l’originalité résulte de leur forme et 4) les produits dépourvus

d’originalité ; 1) Produits dont l’originalité résulte de la combinaison d’un motif lui-même original et de l’effet produit par son apposition :

* les créations de la collection 'Cœur’ :

Considérant que le cœur représenté sur ces créations, 'inspiré des cœurs sculptés au couteau dans le bois en région de montagne par les hommes en hiver sur les volets des chalets jusqu’au début du XXième siècle', à laquelle il n’est opposé aucun motif préexistant identique en tous points, tire son originalité de sa forme naïve et approximative, allongée et étirée à la pointe ; qu’apposé à chaud sur du verre, ou en relief sur un tissu par une broderie Cornely, ou encore de façon travaillée sur un carrelage, il produit un effet à la fois soigné et artisanal singulier, évocateur de délicatesse et de douceur ;

* les créations de la collection Etoile des neiges'

Considérant que le flocon de neige représenté sur ces créations, à branches multiples, chaque branche étant elle-même retravaillée avec plusieurs nervures, à laquelle il n’est opposé aucun motif préexistant identique en tous points, tire son originalité de son style épuré et de son apparente simplicité ; qu’apposé à chaud sur du verre, renforçant ainsi l’aspect cristallin de la matière, ou en relief sur un tissu par une broderie Cornely, ou encore sur un objet d’ambiance (bougie parfumée), dans une taille conséquente, il produit également un effet à la fois soigné et artisanal singulier, évoquant, en contraste avec le froid de l’hiver, le réconfort de la chaleur d’un intérieur ;

* les créations de la collection 'Montée à l’alpage’ :

Considérant que le motif de la Montée à l’Alpage, inspiré de la tradition suisse décorative du découpage du Pays de Haut en 'Gruyère’ (papier très fin, coupé de façon symétrique) et de la Poya (peinture sur le fronton de l’entrée des fermes) tire son originalité de son thème et de sa composition – un troupeau de vaches en transhumance, accompagné d’acteurs principaux (un berger, un chien, un sapin, un oiseau des fleurs…) -, auxquels il n’est opposé aucun motif préexistant identique en tous points ; qu’apposé, par reproduction en frise de tout ou partie des scènes qui le compose, par sérigraphie sur du verre ou de la porcelaine, pour de la vaisselle, par pyrogravure sur du bois, pour des manches de couverts, des cadres ou des décorations murales, brodé sur du coton ou du lin pour tous types de linge de maison, ou encore apposé sur un objet d’ambiance, il confère au produit final une stylisation particulière, alliant tradition et raffinement, qui en a fait, selon les termes mêmes du catalogue Angel des Montagnes, 'la collection emblématique’ de la maison, 'comme un signe de reconnaissance';

* les créations de la collection 'Pays d’en haut’ :

Considérant qu’inspiré de la même tradition suisse décorative du découpage que précédemment, l’originalité du motif du Pays d’en haut
- qui résulte de son aspect monochrome et de sa forme de fine 'dentelle de papier', incluant notamment des cœurs – et celle de l’effet produit par son apposition dans des conditions similaires au motif précédant – qui en fait 'un classique d’Angel des Montagnes', selon les termes même du catalogue, aisément reconnaissable – ne sont pas discutées ;

* les créations de la collection 'Cortina':

Considérant que réalisé selon un dessin en forme de rosace/spirale, il est composé de bandes de coton déchirées apposées par surpiqûre (Cornely) pour former un pompon, le rendu étant différent visuellement que celui obtenu à l’aide d’autres modes de fabrication (travail en plissé, cercles de tissus empilés…) tel qu’il apparaît sur les pièces produites par la société ADM Création, qui ne sont pas de nature à en détruire l’originalité ;

* les créations de la collection 'Nanin ' :

Considérant que réalisé selon un dessin en forme de coeur, retravaillé de plusieurs coeurs l’un dans l’autre pour former une guirlande, pour lequel il n’est opposé par la partie adverse aucune création similaire ou identique préexistante, il est également composé de bandes de coton blanc déchirées apposées par surpiqûre (Cornely) ;

* les créations de la collection 'Reine de l’Alpe’ :

Considérant que le motif, représentant un portrait de vache, tire son originalité de sa composition (tissu découpé et surpiqué, effiloché) ; que son mariage avec le fond écossais sur lequel il est brodé offre un rendu singulier, alliant traditionnel et renouveau ;

2) Produits dont seul le motif est original :

Considérant que pour les collections suivantes, l’originalité du motif n’est pas suffisante pour emporter celle du produit fini, résultat des seuls modes d’apposition les plus simples (impression sur papier et sur coton, sérigraphie sur vaisselle) sur des objets banaux du domaine public (bols, nappes cirées, serviettes en papier, linge, accessoires de salle de bain…)

* les créations de la collection Tarine ' :

Considérant qu’inspiré du marquage du bétail à fer chaud, le motif Tarine, qui représente, comme son nom l’indique, une petite vache de montagne, entourée de trois cœurs au centre d’un double cercle

décoré de motifs naïfs (cœurs, fleurs) figurant un tampon, tire son originalité de son caractère tout à la fois évocateur et moderne ;

* les créations de la collection 'Juliette ' :

Considérant qu’inspiré des broderies traditionnelles autrichiennes et de la région du Tyrol, le motif Juliette, qui représente un motif de coeur brodé suspendu à de fines tiges et à l’intérieur duquel se trouve trois edelweiss, tire son originalité de son caractère tout à la fois évocateur et léger ;

* les créations de la collection 'Balthazar’ :

Considérant que le motif Balthazar, représentant un trèfle à quatre feuilles dans un nuage scintillant formé d’une multitude de clous acier, allié à un ruban laine brodé de paillettes, tire son originalité de sa composition ;

* les créations de la collection Edelweiss ':

Considérant que le motif 'Edelweiss’ tire son originalité de la stylisation des trois Edelweiss qui y sont représentés, de tailles différentes, au cœur formé de petits cercles déroulant, entourés de feuilles de tailles irrégulières ;

* les créations de la collection Cerf:

Considérant que le motif représente un portrait à plat d’un cerf dont la stylisation, à laquelle il n’est opposé aucun motif préexistant identique en tous points, fait l’originalité ;

* création de la collection Ange ' :

Considérant qu’il s’agit d’un petit ange en bois de palissandre, dont l’originalité, non discutée, tient à la forme stylisée et arrondie ; 3) Produits dont l’originalité résulte de leur forme :

* les créations de la collection 'Aurore – Clochette – Fée bleue’ :

Considérant qu’il s’agit en réalité de trois collections d’abat-jour en verre soufflé reprenant l’idée d’une cloche de vache des Alpes, la première, à base de trapèze, la deuxième de forme arrondie et la troisième, en forme de coupelle ; que, réalisés en verre soufflé, ils tirent leur originalité de leur forme évocatrice et de l’irrégularité conférée par leur réalisation artisanale, qui ne se retrouvent pas dans d’autres créations préexistantes produites par la société ADM Créations ;

* les créations de la collection 'Branche ':

Considérant que cette collection de luminaires est réalisée en bois de châtaignier, taillé, chaque branche de longueur différente selon qu’il s’agit d’une lampe, d’un lampadaire ou d’une applique, électrifié et supportant le poids de l’abat-jour, de forme cylindrique suspendu ou accroché comme un lampion ; qu’ils tirent leur originalité de leur aspect spécialement naturel, très évocateur de la nature ; qu’il n’est opposé par la partie adverse aucune pièce de nature à en détruire l’originalité ;

* les créations de la collection 'Brut’ :

Considérant que cette collection de luminaires, de ligne simple et épurée, a pour trait commun la présence systématique d’un socle en forme de croix qui en fait l’originalité, qui n’est d’ailleurs pas discutée par la société intimée ;

* les créations de la collection 'Lucile ' :

Considérant que pour cette collection de luminaires, en métal rouillé, c’est la combinaison de deux particularités – une électrification apparente, un cœur 'flottant’ de la même finition qui lui est accroché – qui lui confère son originalité ;

* les créations de la collection 'Lumière en rêve ' :

Considérant que cette collection de luminaires reprend la structure d’un abat-jour, mais sans la couvrir, celle-ci étant habillée de perles et billes de verres soufflées ; que son originalité n’est pas discutée ;

4) Produits dépourvus d’originalité :

* les créations de la collection Heidi

Considérant que les pièces produites ne permettent pas de retenir l’originalité ni du motif, simple reprise de symboles des Alpes, ni du produit sur lequel il figure, du domaine public ;

* les créations de la collection Jason :

Considérant qu’il n’est donné aucune description de cette gamme de maroquinerie, de nature à en justifier l’originalité ; que la simple signature de chaque article par un marquage à chaud reprenant la symbolique des Alpes ne peut à elle seule leur conférer un caractère original ;

Considérant qu’en conséquence, il convient donc, infirmant le jugement de ce chef, de déclarer Mme B irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits patrimoniaux d’auteur, mais recevable à agir

en contrefaçon de ses droits moraux d’auteur pour les créations des collections 'Cœur, Etoile des neiges, Montée à l’alpage, Pays d’en haut, Cortina, Nanin, Reine de l’Alpe’ et 'Aurore – Clochette -Fée bleue, Branche, Brut, Lucile, Lumière en rêve'( pour les produits référencés tels que repris dans ses conclusions), ainsi que pour celles des collections 'Tarine, Juliette, Balthazar, Edelweiss, Cerf, Ange’ (pour les motifs) ;

Il-Sur la validité du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 6 juillet 2011 pratiquée au siège de la société ADM Créations :

Considérant que le tribunal a débouté Mme B de sa demande de validation de ce procès-verbal en se fondant sur l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Lyon du 21 mai 2013 qui avait ordonné la mainlevée de la saisie ;

Que Mme B fait valoir que cette décision, rendue en matière de référé, n’a pas autorité de la chose jugée ; qu’elle demande à la cour de constater que l’omission par l’huissier de justice du bordereau de pièces qui accompagnait la requête lors de la dénonciation de l’ordonnance n’a causé aucun grief à la société ADM Créations qui a pu contester la saisie en référé et obtenir, dans le cadre de cette procédure contradictoire, le bordereau et les pièces, et de valider en conséquence le procès-verbal ;

Considérant que s’il est vrai qu’un arrêt rendu en matière de référé n’a pas au principal autorité de la chose jugée, il demeure que l’irrégularité de la procédure suivie au regard des exigences de l’article 495 du code de procédure civile a causé un grief à la société intimée, qui n’a pas été en mesure, au moment où la saisie a été pratiquée, de connaître sur la base de quelles pièces elle avait été ordonnée et d’apprécier son bien-fondé ; qu’il convient donc de confirmer le jugement qui a débouté Mme B de sa demande ;

III-Sur le préjudice :

Considérant toutefois que les autres pièces produites par Mme B, et notamment l’autre procès-verbal de saisie-contrefaçon au magasin Angelys à Paris, qui a permis d’appréhender 29 objets contrefaisants, le catalogue Angel de Montagnes litigieux, le constat d’huissier de justice sur le site internet, suffisent à établir la réalité des actes de contrefaçon des droits moraux d’auteur réalisés par la société ADM Création au préjudice de Mme B ;

Qu’en s’abstenant de préciser quelles créations étaient attribuées à cette dernière, la société intimée l’a privé de la reconnaissance de son travail créatif et porté atteinte à son droit de paternité ; qu’au vu des éléments produits, ce préjudice doit être estimé à la somme de 10 000 € ; qu’il convient de condamner la société ADM Créations à payer cette somme à Mme B en réparation de son préjudice et de lui

interdire de représenter et de vendre les créations de Mme B correspondant aux créations des collections 'Cœur, Etoile des neiges, Montée à l’alpage, Pays d’en haut, Cortina, Nanin, Reine de l’Alpe,Tarine, Juliette, Balthazar, Edelweiss, Cerf, Ange, Aurore – Clochette – Fée bleue, Branche, Brut, Lucile, Lumière en rêve’ dont il vient d’être reconnu l’originalité sans lui en attribuer expressément la paternité, et ce, sous astreinte de 100 € par infraction constatée à compter du mois suivant la signification du présent arrêt ; qu’en revanche, les circonstances de l’espèce ne justifient pas de mesure de publication ;

IV-Sur les autres demandes :

Considérant que Mme B ayant obtenu satisfaction pour partie de ses demandes, la présente action ne saurait être qualifiée d’abusive ; qu’il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société ADM Créations de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Considérant que les mêmes motifs commandent d’infirmer les dispositions du jugement ayant condamné Mme B au titre des frais irrépétibles et des dépens et de statuer à nouveau de ces chefs, dans les termes précisés au dispositif du présent arrêt ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en ce qu’il a : • déclaré Mme B irrecevable sa demande en contrefaçon de droits d’auteur, • condamné Mme B aux entiers dépens de l’instance, • condamné Mme B à payer à la société ADM Créations la somme de 3 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmés et y ajoutant,

Déclare Mme B irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits patrimoniaux d’auteur, mais recevable à agir en contrefaçon de ses droits moraux d’auteur pour les créations des collections 'Cœur, Etoile des neiges, Montée à l’alpage, Pays d’en haut, Cortina, Nanin, Reine de l’Alpe’ et 'Aurore – Clochette – Fée bleue, Branche, Brut, Lucile, Lumière en rêve'( pour les produits référencés tels que repris dans ses conclusions), ainsi que pour celles des collections 'Tarine, Juliette, Balthazar, Edelweiss, Cerf, Ange'(pour les motifs) ;

Condamne la société ADM Créations à payer à Mme B la somme de 10 000 € en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de ses droits moraux d’auteur,

Interdit à la société ADM Créations de représenter et de vendre les créations de Mme B correspondant aux créations des collections des créations des collections 'Cœur, Etoile des neiges, Montée à l’alpage, Pays d’en haut, Cortina, Nanin, Reine de l’Alpe’ et 'Aurore – Clochette
- Fée bleue, Branche, Brut, Lucile, Lumière en rêve'
( pour les produits référencés tels que repris dans ses conclusions),ainsi que pour celles des collections Tarine, Juliette, Balthazar, Edelweiss, Cerf, Ange’ (pour les motifs) sans lui en attribuer expressément la paternité, et ce, sous astreinte de 100 € par infraction constatée à compter du mois suivant la signification du présent arrêt,

Rejette toutes autres demandes,

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société ADM Créations et la condamne à payer à Mme B la somme de 6 000 €,

Condamne la société ADM Créations aux dépens,

Accorde à Maître Edmond F le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 24 mars 2015, n° 2013/23338