Cour d'appel de Paris, 17 décembre 2015, n° 13/12732

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 17 déc. 2015, n° 13/12732
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 13/12732
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Melun, 9 mai 2013, N° 12/00090

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 7

ARRÊT DU 17 Décembre 2015

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 13/12732

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Mai 2013 par le tribunal de grande instance de MELUN RG n° 12/00090

APPELANTS

Monsieur E Y

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Claudine SCOTTO D’APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Madame I J épouse Y

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Claudine SCOTTO D’APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Mademoiselle A Y

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Claudine SCOTTO D’APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Monsieur C Y

né le XXX à XXX

XXX

XXX

77170 BRIE-COMTE-ROBERT

Représenté par Me Claudine SCOTTO D’APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

INTIMÉS

ETAT FRANCAIS, représenté par l’ETABLISSEMENT PUBLIC D’AMENAGEMENT DE LA VILLE NOUVELLE DE MARNE LA VALLEE

XXX

Noisiel

XXX

Représenté par Me Frédéric LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : T07

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES TRESORERIE GENERALE DE SEINE ET MARNE

France Domaine

XXX

XXX

Représentée par M. Jean-Maxime BAYE en vertu d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 Novembre 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Christian HOURS, Président de chambre, spécialement désigné pour présider cette chambre par ordonnance de Madame le Premier Président de la Cour d’Appel de PARIS,

Mme Maryse LESAULT, Conseillère, Conseiller désigné par Madame le Premier Président de la Cour d’Appel de PARIS

Mme O P, Juge de l’Expropriation au Tribunal de Grande Instance d’EVRY, désignée conformément aux dispositions de l’article L. 13-1 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique

Greffière : Mme O THOMAS, lors des débats

ARRÊT : – contradictoire

— prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

— signé par Monsieur Christian HOURS, président et par Mme O THOMAS, greffière présente lors du délibéré.

Par arrêté préfectoral du 27 juillet 2012, les acquisitions foncières par l’Etat, représenté par l’Etablissement public d’aménagement du secteur IV de Marne la Vallée (en abrégé X), en vue du développement de l’éco-tourisme et la réalisation du projet Villages Nature.

Parmi les terrains concernés par l’arrêté de cessibilité du même jour se trouvent deux parcelles situées sur la commune de Villeneuve le Comte, cadastrées section XXX et XXX, appartenant à M. E Y, Mme I J épouse Y, M. C Y et Melle A Y (les consorts Y). Ces parcelles d’une superficie totale de 248 097 m² ont fait l’objet d’une emprise complète.

Par ordonnance du 27 septembre 2012, le juge de l’expropriation de Seine et Marne a déclaré ces parcelles expropriées au profit de l’Etat.

Faute d’accord sur sa proposition d’indemnisation des consorts Y, lesquels ont formé une demande de réquisition totale sur le reliquat de la propriété (334 654 m²), X a saisi ledit juge de l’expropriation.

X a fait droit par ailleurs à la demande de réquisition d’emprise totale sur d’autres parcelles appartenant aux consorts Y, situées hors du périmètre de l’opération Villages Nature :

— parcelle ZM 11, en terre agricole, de 24 582 m² ;

— parcelle ZM 7, en terre agricole, de 86 949 m² ;

— parcelle XXX, en bois et terre agricole, de 167 763 m² ;

— parcelle XXX, en bois, de 17 500 m² ;

— parcelle ZC 15, en bois, de 37 860 m².

La cour statue sur l’appel formé par les consorts Y, le 19 juin 2013, de la décision de la juridiction de l’expropriation de Seine et Marne, du 10 mai 2013, ayant :

— fixé à 819 720,10 euros, toutes causes confondues, l’indemnité leur revenant pour la dépossession des parcelles expropriées ;

— ordonné le transfert de propriété dans les conditions de droit commun en ce qui concerne la portion d’immeuble non comprise dans la procédure d’expropriation et constituée par les parcelles précitées ;

— fixé à 948 602 euros le prix d’acquisition de la portion acquise en sus de la partie expropriée et à 95 860,20 euros l’indemnité de remploi y afférente ;

— condamné l’Etat, représenté par X, à payer aux consorts Y la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens ;

Pour l’exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

— respectivement déposées et adressées au greffe par les consorts Y, les 16 août 2013 et 30 avril 2014, aux termes desquelles ils demandent à la cour, infirmant partiellement le jugement entrepris, de :

— fixer le montant total de l’indemnité de dépossession des parcelles ZL 22 et 8 à la somme de 4 095 600,50 euros, se décomposant de la façon suivante :

— indemnité principale de dépossession sur la base de 15 euros le m², 3 721 455 euros ;

— indemnité de remploi : 374 145,50 euros ;

— condamner l’expropriant à leur payer la somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens;

— adressées au greffe le 20 décembre 2013 par X, concluant à l’infirmation du jugement en ce qu’il rejeté sa demande d’application d’un abattement pour occupation et fixé à 2 et 3 euros le prix des parcelles situées en dehors du périmètre déclaré d’utilité publique et demandant à la cour, statuant à nouveau, de :

— fixer l’indemnité de dépossession des parcelles ZL 8 et 22 à la somme de 536 146,38 euros, déduction faite d’un abattement pour occupation de 486 496,71 euros et compte tenu d’une indemnité de remploi de 49 649,67 euros ;

— fixer le prix d’acquisition des parcelles ayant fait l’objet de la réquisition d’emprise totale à la somme de 167 327 euros, sur la base de 0,50 euro le m², outre une indemnité de remploi de 17 733 euros ;

— adressées au greffe par le commissaire du gouvernement le 7 février 2014, aux termes desquelles il demande à la cour :

— de confirmer le jugement sur la date de référence, le document de référence à la date de mise à disposition du public du rapport du débat public, soit le 20 avril 2011, étant le POS de Villeneuve le Comte, approuvé le 1er mars 2001, ainsi que sur le montant de l’indemnisation globale ;

— subsidiairement, si la date de référence était fixée à la date de publication de la DUP, le 30 juillet 2012, le document d’urbanisme opposable étant alors le PLU mis en compatibilité le 27 juillet 2012, de fixer l’indemnisation sur la base de 8 euros le m², soit, pour les parcelles expropriées, une indemnisation globale de 1 984 776 euros (hors indemnité de remploi) ;

Motifs de l’arrêt :

Considérant à titre liminaire que la recevabilité de l’appel et des écritures des parties, qui ont permis un débat contradictoire complet, n’est pas contestée ;

Considérant que les consorts Y soutiennent que :

— a été instauré, le 26 avril 2001, un droit de préemption urbain (DPU) sur l’ensemble du territoire de la commune de Villeneuve le Comte incluant par conséquent des zones agricoles ;

— le PLU de Villeneuve le Comte a été approuvé le 26 février 2002 ;

— le décret 87-191 du 24 mars 1987, modifié par celui du 13 décembre 2011, dispose expressément que l’établissement public est chargé de procéder en particulier sur le territoire de la commune de Villeneuve le Comte à toutes opérations d’aménagement, notamment en vue de la réalisation d’un parc de loisirs, ainsi que du projet Villages Nature; que l’article 3 du décret prévoit que l’établissement est habilité à exercer le droit de préemption dans les conditions prévues par le titre 1er du livre II du code de l’urbanisme, c’est à dire sur l’ensemble des terrains inclus dans l’opération d’intérêt national dont fait partie l’opération Villages Nature sur la commune de Villeneuve le Comte, en vertu du décret du 25 novembre 2011; X dispose ainsi d’un droit de préemption sur l’ensemble du secteur IV de Marne la Vallée du fait du décret 87-191 du 24 mars 1987 ;

— le décret du 25 novembre 2011 a inscrit l’opération d’aménagement Villages Nature sur la commune de Villeneuve le Comte parmi les opérations d’intérêt national mentionnées à l’article R 121-4-1 du code de l’urbanisme ;

— conformément aux dispositions de l’article L213-4 du code de l’urbanisme, la date de référence est celle du 27 juillet 2012, date de l’arrêté préfectoral emportant la mise en compatibilité avec le projet Villages Nature des documents d’urbanisme de Villeneuve le Comte, classant et délimitant le projet en zone 1 AUV dite à urbaniser ;

— les articles L213-6 et 213-4 du code de l’urbanisme restent applicables dans l’hypothèse du débat public exigé par l’article L121-8 du code de l’environnement ;

— la situation des parcelles en cause est hautement privilégiée, celles-ci étant situées à XXX de Citry), à 10 minutes de Disneyland, à une minute du centre-ville des communes de Villeneuve le Comte et de Serris ;

— les parcelles ZL 22, ZN8 (celle-ci étant recouverte de bois sur 15 % de sa surface), sont à proximité immédiate de Villeneuve le Comte (400 mètres, 30 secondes de trajet) et de Serris (une minute de trajet), à un kilomètre du village urbain Disney’s Ranch Davy Crockett, à trois minutes du centre-ville de Bailly-Romainvilliers, à XXX, à 20 minutes du centre de Meaux ; elles bénéficient d’excellentes dessertes par des chemins ruraux, la RD 231 qui mène à l’A4 ; elles disposent des divers réseaux ;

— elles sont comprises dans le secteur IV de Marne la Vallée, qui va supporter l’opération d’intérêt national 'les Villages Nature’ ;

— la population de Villeneuve le Comte a doublé en 40 ans (plus de 1 800 habitants en 2010)

— les termes de comparaison situés dans le même zonage justifient une fixation de l’indemnité de dépossession à 15 euros le m², d’autant que le coût pour amener les réseaux proches jusqu’aux abords des terrains expropriés sera marginal et que la pression foncière, du fait de la ponction de 500 hectares, ne peut être contestée ;

— il n’y a pas lieu de pratiquer un abattement pour occupation sur la valeur de la parcelle, le protocole départemental ne faisant pas de distinction entre les parcelles libres et les parcelles occupées ;

— les indemnités de remploi doivent être calculées séparément dès lors que les parcelles, non voisines, ne forment pas une unité foncière ;

Considérant que l’expropriant, X, soutient notamment que :

— il ne peut être fait application des articles L213-6 et L213-4 du code de l’urbanisme, des terres agricoles ne pouvant pas faire l’objet d’un DPU généralisé au territoire de la commune de Villeneuve le Comte ;

— lorsque comme en l’espèce le terrain exproprié était en zone naturelle avant la modification de la règle d’urbanisme , son nouveau classement en zone d’urbaine ou à urbaniser ne rend pas automatiquement applicable un droit de préemption à défaut de nouvelle délibération de la collectivité locale ;

— les terrains ne peuvent être considérés comme bénéficiant d’une situation plus que modérément privilégiée, n’étant pas à proximité immédiate d’une zone urbanisée ni des réseaux de viabilité ;

— il y a lieu de confirmer les évaluations des terres expropriées, sauf à pratiquer un abattement pour occupation des terres faisant l’objet d’un bail ;

— la valeur des terres faisant l’objet d’une réquisition d’emprise totale est nécessairement moindre car elles ne sont pas situées dans le périmètre déclaré d’utilité publique et doivent être appréciées selon le barème des prix moyens des terres agricoles en Seine et Marne, soit 0,50 euro le m² ;

Considérant que le commissaire du gouvernement affirme que :

— en instaurant en 2001 un droit de préemption urbain sur l’ensemble du territoire communal, englobant, au-delà des zones urbaines ou à urbaniser, la totalité des zones naturelles et agricoles du territoire communal, la commune a violé les dispositions des articles L211-1 et suivants du code de l’urbanisme, aucun recours n’ayant cependant été formé contre cette décision ;

— se pose la question de l’application ou non des dispositions des articles L213-6 et L213-4 du code de l’urbanisme, avec fixation de la date de référence au 30 juillet 2012, puisque le support juridique de la dernière modification du PLU par arrêté du 27 juillet 2012 est illégal mais non annulé ;

— il est paradoxal de prendre en compte la date de publication de cet arrêté alors que la loi vise à protéger l’expropriant contre le risque de spéculation foncière que fait naître une opération d’aménagement urbanistique ;

— la date de référence en matière d’expropriation dans le cadre d’opérations soumises au débat public est celle de la mise à disposition du public du dossier, soit le 20 avril 2011, selon l’article L13-15 du code de l’expropriation, tel que modifié par l’article 19 de la loi du 12 juillet 2010 ;

— à la date de référence, la parcelle en cause était classée en zone Nda du POS de Villeneuve le Comte tel qu’approuvé le 1er mars 2001 ;

Considérant qu’aux termes de l''article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ;

Considérant que l’article 13-13 du code de l’expropriation dispose que les indemnités allouées doivent couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation ;

Considérant que la valeur du bien est appréciée au jour du jugement, selon sa consistance à la date de l’ordonnance d’expropriation et en considération de l’usage effectif dudit bien à la date de référence ;

Considérant que le mécanisme de la date de référence vise à écarter tout changement d’utilisation spéculatif du bien exproprié ;

Considérant que le jugement entrepris a fixé cette date de référence au 20 avril 2011 correspondant à la date de mise à disposition du public par la Commission nationale du débat public (CNDP) du dossier du débat intervenu du 12 avril au 23 juin 2011, faisant ainsi application, par des motifs pertinents que la cour adopte, des dispositions de l’article L13-15 du code de l’expropriation;

Considérant en effet que, selon ces dispositions, 'I) les biens sont estimés à la date de la première instance et sous réserve de l’application du II du présent article [ie concernant les terrains à bâtir], sera seul pris en considération l’usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l’ouverture de l’enquête prévue à l’article L11-1 ou(') dans le cas de projets ou programmes soumis au débat public prévu par l’article L121-8 du code de l’environnement (') au jour de la mise à disposition du public du dossier de ce débat’ ;

Considérant que s’agissant de terres à destination agricole et exploitées comme telles, il n’y a pas lieu de se référer aux dispositions du code de l’urbanisme relatives à l’expropriation de parcelles soumises au droit de préemption urbain ;

Considérant en outre qu’il n’est pas justifié d’une nouvelle délibération de la commune rendant applicable le droit de préemption après la modification de la règle d’urbanisme concernant ces terrains, qui étaient classés en zone naturelle, étant souligné qu’à la date de l’institution du droit de préemption urbain, en 2001, les terrains litigieux n’était pas situés dans le périmètre d’un plan de sauvegarde et de mise en valeur, ni dans celui d’une zone à aménagement différée ;

Considérant qu’il importe peu par ailleurs qu’X dispose d’un droit de préemption propre puisqu’elle ne l’a pas exercé en l’espèce ;

Considérant enfin que retenir une date postérieure à l’information du public sur le projet en cause contreviendrait directement à l’objectif recherché par le mécanisme de la date de référence tendant, comme indiqué, à éviter toute spéculation par une modification postérieure de l’usage du bien ;

Considérant dans ces conditions que le jugement doit être confirmé sur la fixation de la date de référence ;

Considérant sur la qualification des parcelles expropriées, que la reconnaissance d’une situation privilégiée ne requiert aucunement la condition préalable de sa constructibilité, mais suppose seulement qu’il se voit reconnaître d’autres éléments de plus-value ;

Considérant que si des aménagements futurs ne sauraient avoir d’incidence sur l’évaluation actuelle d’une parcelle expropriée, il doit cependant être pris en compte dans son évaluation sa situation dans une zone dont l’aménagement a été initié dans les années 1970 avec la définition de quatre secteurs de développement : Porte de Paris, Val Maubuée, Val de Bussy et Val d’Europe, ce dernier construit à partir de l’agglomération nouvelle de Marne la Vallée [décret du 24 mars 1987], secteur incluant notamment les communes de Bailly-Romainvilliers, Serris et le projet «Village Nature» ; que l’établissement X a été créé en 1987 pour accompagner le développement des vastes projets de valorisation de ce secteur, notamment en termes de développement, à dimension internationale, d’activités de loisirs (Disneyland dont l’exploitation a commencé en 1992), d’hôtellerie, vacances, services et activités commerciales associés ;

Considérant que les parcelles considérées ne peuvent être privées de la spécificité de ce contexte déjà ancien ;

Considérant que la situation des parcelles expropriées des consorts Y est privilégiée;

Considérant en effet que la parcelle ZL 22 ayant la forme d’un parallélogramme de 550 m sur 185 m pour les largeur et longueur maximales, en nature de terre cultivée, est située à XXX, à 400 m au nord-ouest de la zone agglomérée de la commune de Villeneuve le Comte ; elle est longée sur son côté sud et son côté ouest par la route départementale 231 reliant Lagny à Provins menant directement au centre-ville de Villeneuve le Comte (30 secondes de trajet), de Serris (une minute) et par l’A4 à celui de Bailly-Romainvilliers (3 minutes) ;

Considérant que la parcelle ZL 8, proche de la parcelle ZL 22, qu’elle ne jouxte toutefois pas, de forme rectangulaire dont les largeur et profondeur maximales sont de 470 m et de 430 m, en nature de bois sur 15 % de sa superficie (27 750 m² sur XXX m²) est longée également par la RD 31 et se situe sensiblement aux mêmes distances de Disneyland Paris, Villeneuve le Comte, Serris et Bailly-Romainvilliers ;

Considérant que les deux parcelles sont à 20 mn du centre-ville de Meaux, à XXX, à 30 mn de Paris et à proximité des réseaux (1 000 m du village urbain, le XXX ; la population de Villeneuve le Comte a doublé en 40 ans (plus de 1 800 habitants en 2010) ;

Considérant que le réseau de communication de proximité est ainsi adapté à la dimension internationale du pôle d’activité [accès autoroute et RER très proche (gare desservant Disneyland), correspondances vers l’aéroport Charles de Gaulle] et offre, de longue date, aux secteurs concernés par la présente opération, la possibilité d’implantations d’activités facilitées ;

Considérant que, nonobstant la nécessité certaine pour l’Etablissement public de développer au fur à mesure de l’aménagement des pôles d’activités prévus le dimensionnement de ces réseaux, il existe d’ores et déjà un réseau public en amont du ranch Davy Crockett préexistant à l’opération village Nature, à proximité des parcelles en cause ;

Considérant que, nonobstant l’absence de démonstration d’une pression foncière sur le marché privé, difficile à établir en raison de l’importance des transactions négociées dans le cadre des grands aménagements en cours, qui rendent le marché foncier captif, l’ensemble des circonstances invoquées permettent de retenir le caractère privilégié de la situation des parcelles concernées ;

Considérant sur la valeur de ces parcelles que leur situation d’urbanisme à la date de référence est en zone NDa du POS de Villeneuve le Comte du 1er mars 2001; que ce classement désigne une zone à dominante naturelle non équipée qui doit être protégée en raison de la qualité du paysage et du caractère des éléments naturels la composant ; que cette zone est destinée à recevoir l’aménagement et l’extension mesurée des constructions existantes ;

Considérant que l’appréciation de la pertinence des références produites conduit à écarter celles concernant des parcelles de taille trop sensiblement différentes, ou situées dans un zonage différent ou d’une plus grande proximité d’urbanisation ou de forte urbanisation, étant rappelé que la commune de Villeneuve le Comte comprend environ 2000 habitants ou, encore, de parcelles situées à proximité de secteurs d’activités trop différents des parcelles concernées ; que les références tirées de délibérations de conseils municipaux ne peuvent davantage être prises en compte comme indicatives, n’ayant pas valeur de références établies ;

Considérant que les appelants se prévalent notamment de diverses références, dont il convient d’écarter par application des règles précitées, celles concernant des zonages différents (15 euros le m² à XXX, Aub, 37 euros à XXX, 15 euros à Chauconin-Neufmoutiers en zonage 2NAX, un village éloigné de plus de 20 km (Saint Mard où les termes de comparaison pour des parcelles en zonage NAX font ressortir un prix moyen de 17,85 euros), de simples projets de vente ; qu’il reste, pour les terrains en zone ND ou NC et les terrains en situation privilégiés, sans qu’il y ait lieu d’écarter des estimations antérieures à 2007, dès lors que c’est l’exproprié qui s’en prévaut :

— une vente du 26 novembre 2007 sur la commune de Charny, d’une parcelle de 13 ha, de terre agricole, occupée, pour une valeur libre de 14,76 euros ;

— une vente du 18 septembre 2007, sur la commune de Charny, d’une parcelle de 9 ha, en nature de terre agricole, libre, pour une valeur de 13,96 euros ;

— plusieurs jugements du tribunal de grande instance de Melun du 17 décembre 2009 pour des parcelles à Serris, en situation très privilégiée, d’une superficie d’environ 16 ha, 6 000 m² , 5 500m², 5 000 m², pour une même valeur de 9 euros le m² ;

Considérant que X fait état pour sa part de plusieurs références dont :

— celles concernant des ventes de parcelles boisées le 20 avril 2012 à Coulommiers pour une valeur de 0,61 €/m² et, en janvier 2011, pour une valeur de 1,8€/m²,

— celles issues de plusieurs accords homologués le 21 juin 2012 par le tribunal de grande instance de Melun pour la valeur libre de 3 €/m² concernant des parcelles en nature de taillis;

— celles tirées d’arrêts de la cour d’appel de Paris du 26 septembre 2013 ayant admis une valeur de 12 €/m² et 9 €/m² pour une situation qualifiée de très privilégiée,

— celles concernant des échanges des 7 et 10 décembre 2007 de parcelles sises à Emerainville entre la Région IDF et Eparmarne pour la valeur de 0,61 €/M² en valeur libre,

— celles tirées de jugements du tribunal d’expropriation de Melun du 10 mai 2013 mentionnés être définitifs concernant des parcelles boisées en zone non constructible ni privilégiée sises à proximité immédiate de l’emprise de « Village Nature » pour 2 €/M² ;

Considérant que si la valeur moyenne des terres agricoles selon barème publié par arrêté préfectoral du 5 juillet 2012 pour l’année 2011 est de 0,63 €/m² moyenne générale de valeurs comprises entre 0,26 et 2,10 €/m², cette information, émise à partir d’un marché foncier devenu captif, ne peut en l’espèce être pertinente ;

Considérant qu’en ces circonstances, la cour retiendra que l’offre faite par l’expropriant à 3 € le m², valeur libre, ne prend que très partiellement en compte une plus-value tenant à la situation spécifique des parcelles, et que, au regard des valeurs de transactions et mutations versées aux débats, il convient de fixer la valeur libre des parcelles ZL 22 et 8 en nature de terrain agricole ou très majoritairement en nature de terrain agricole au lieudit Les Cardinaux, respectivement de 69 705 m² et XXX m², à 8 €, soit 7 €, valeur occupée, ces parcelles étant exploités par un fermier et par conséquent nécessairement d’une valeur moindre car indisponibles ;

Considérant que l’indemnisation des appelants sera dès lors fixée de la façon suivante :

Indemnité principale :

ZL 22 : 69 705 m² x 6 € = 418 230 €

ZL 8 : XXX m² X 6 = 1 070 352 €

Considérant que les deux parcelles ne formant pas une unité foncière, les indemnités de remploi doivent être calculées séparément :

sur ZL 22 :

20% jusqu’à 5000 € = 1 000 €

15% de 5001 à 15000 € = 1 500 €

10% pour le surplus, soit 403 230 € = 40 323 € ;

Total indemnité de remploi ZL 22 : 42 823 € ;

sur ZL 8 :

20% jusqu’à 5000 € = 1 000 €

15% de 5001 à 15000 € = 1 500 €

10% pour le surplus, soit 1 055 352 € = 105 535,20 euros, arrondis à 105 535 € ;

Total indemnité de remploi : 108 035 € ;

Total indemnité de dépossession pour les parcelles ZL 22 et ZL 8 : 1 639 440 € ;

Considérant que les autres parcelles, faisant l’objet d’une réquisition d’emprise totale acceptée, se répartissent, comme indiqué par le commissaire du gouvernement en première instance, en quatre unités foncières : unité 1 (XXX en nature de terre et XXX en nature de bois), unité 2 (ZM7 en nature de terre), unité 3 (ZM 11 en nature de terre), unité 4 (ZC 15) ; qu’aucune d’elle, à la différence de celles expropriées, n’est comprise dans le périmètre de la déclaration d’utilité publique ;

Considérant toutefois que unités foncières 1 à 3, apparaissent profiter d’une situation modérément privilégiée puisqu’elles sont situées juste de l’autre côté du CD 231 par rapport aux parcelles expropriées ; qu’elles disposent de façades importantes sur la voirie; qu’eu égard aux références précitées, il convient de retenir pour les surfaces en nature de terre une valeur au m² de 3 euros, valeur libre et de 2,62 euros en valeur occupée, pour les surfaces en nature de bois, une valeur de 2 euros ;

Considérant en revanche que l’unité 4 ne dispose pas des mêmes avantages et sa valeur sera fixée sur la base du prix moyen des terres en Seine et Marne de 0,50 euro ;

Considérant dans ces conditions que la valorisation des terres hors emprise s’établit comme suit:

— unité 1 : XXX : 167 263 m² x 2,62 € = 438 229,06 euros arrondis à 438 230 euros ;

XXX : 17 500 m² x 2 € = 35 000 euros ;

— unité 2 : ZM 7 : 86 949 m² x 2,62 € = 227 806,38 euros arrondis à 227 807 euros ;

— unité 3 : ZM 11 : 24 582 m² x 2,62 € = 64 404,84 euros arrondis à 64 405 euros ;

— unité 4 : ZC 15 : 37 860 em x 0,50 € = 18 930 euros ;

Total valorisation : 749 372 euros ;

Considérant qu’en l’absence d’appel des consorts Y sur les modalités de calcul de l’indemnité de remploi pour l’acquisation des terres hors emprise, il sera calculé, comme le premier juge, une seule indemnité de remploi, comme suit :

20% jusqu’à 5000 € = 1 000 €

15% de 5001 à 15000 € = 1 500 €

10% pour le surplus, soit 734 372 € = 73 437,20 €, arrondis à 73 437 € ;

Total indemnité de remploi : 75 937 € ;

Considérant en conséquence que le jugement querellé doit être infirmé sur le montant des indemnisations et confirmé pour le surplus de ses dispositions ;

Considérant que l’Etat français représenté par X devra verser aux consorts Y, ensemble, la somme de 1 500 €, au titre des frais irrépétibles exposés en appel, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et supporter les dépens d’appel ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

— confirme le jugement entrepris sauf sur le montant de l’indemnisation ;

— statuant à nouveau :

— fixe à la somme totale de 1 639 440 € le montant de l’indemnisation globale (principale et de remploi) pour la dépossession des parcelles ZL 22 et ZL 8 que l’Etat français représenté par l’Etablissement Public d’Aménagement du secteur IV de Marne la Vallée devra verser aux consorts Y ;

— fixe le prix des parcelles acquises en sus de la partie expropriée à la somme de 749 372 euros et à 75 937 € le montant de l’indemnité de remploi y afférente ;

— y ajoutant, condamne l’Etat français représenté par l’Etablissement Public d’Aménagement du secteur IV de Marne la Vallée à verser aux consorts Y, ensemble, la somme de 1 500 €, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel, en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Paris, 17 décembre 2015, n° 13/12732