Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 28 juin 2017, n° 15/11190

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 10, 28 juin 2017, n° 15/11190
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/11190
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 28 septembre 2015, N° 14/02193
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRÊT DU 28 Juin 2017

(n° , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S 15/11190

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Septembre 2015 par le Conseil de Prud’hommes de PARIS RG n° 14/02193

APPELANT

Monsieur Z X

XXX

XXX

né le XXX à RENNES

représenté par Me Alexandre ALBERTINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0669

INTIMEE

XXX

XXX

XXX

N° SIRET : 339 422 289

représentée par Me Emmanuel RANDOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : J029

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 mai 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame A B C, Conseillère, chargée du rapport.

Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de chambre

Madame Stéphanie ARNAUD, vice présidente placée faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 31 mars 2017,

Madame A B C, Conseillère qui en ont délibéré

Greffier : Madame Christelle RIBEIRO, lors des débats

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente et par Madame Christelle RIBEIRO, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur X a été engagé par la société Gymnase club, aux droits de laquelle vient la société CMG, à compter du 28 avril 1986 en qualité de professeur de musculation puis d’assistant de direction selon un contrat à durée indéterminée daté du 30 septembre 1998, puis de responsable fitness – assistant directeur de club à compter du 22 mai 2003.

Le 7 décembre 2009, il a été muté sur un autre établissement à Paris aux mêmes fonctions.

Il percevait en dernier lieu une rémunération mensuelle brute de 2.915,77 € et la convention collective du Sport était applicable à la relation contractuelle.

Par lettre en date du 20 décembre 2013, Monsieur X a été convoqué à un entretien préalable fixé au 10 janvier 2014 avec mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre du 20 janvier 2014, il a été licencié pour faute grave.

Contestant le bien fondé de son licenciement, Monsieur X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 12 février 2014 qui par un jugement du 29 septembre 2015, l’ a débouté de ses demandes. La société CMG a aussi été déboutée de sa demande reconventionnelle.

Monsieur X a interjeté appel du jugement le 17 novembre 2015, demande à la cour de l’infirmer et statuant à nouveau de :

* juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

* déclarer dire nulle et de nul effet la stipulation du contrat de travail interdisant les relations des salariés comme contraires aux dispositions de l’article 9 du code civil,

* condamner la société CMG à lui payer les sommes suivantes :

—  3.309,54 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied,

—  29.960,14 € à titre d’indemnité de licenciement,

—  9.928,62 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

et subsidiairement 6.619,06 €,

—  992,86 € au titre des congés payés afférents,

et subsidiairement 661,19 €,

—  139.956,96 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  30.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et vexatoire,

—  5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société CMG conclut à la confirmation du jugement entrepris, au rejet des demandes de Monsieur X et à sa condamnation à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l’audience.

SUR CE

sur le licenciement ;

En application des dispositions de l’article L. 1235 -1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties… si un doute subsiste, il profite au salarié.

Constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il incombe à l’employeur d’établir la réalité des griefs qu’il formule.

La lettre de licenciement du 20 janvier 2014 rappelle le comportement de Monsieur X envers Madame Y et notamment l’envoi de messages indécents et parfois obscènes, la planification de Madame Y sur des cours sans respecter les préconisations médicales de la médecine du travail exposant l’employeur à des risques judiciaires, la modification des horaires contractuels de Madame Y sans son accord, et enfin l’introduction d’une personne étrangère et d’une bouteille d’alcool sur le lieu de travail le 14 septembre 2013.

Monsieur X soulève la tardiveté de la décision de l’employeur, les échanges de SMS sortis de leur contexte sont anciens puisque ils remontent à novembre 2012. Il observe que l’employeur n’a pas alors procédé à des investigations, qu’au surplus la référence ainsi faite à ces échanges est constitutive d’une atteinte à la vie privée. Il fait observer que l’employeur n’a eu connaissance de ces SMS que postérieurement à l’engagement de la procédure de licenciement.

Il réplique aussi que Madame Y n’avait pas un comportement fiable (absentéisme, absence de motivation), qu’il devait du fait de sa responsabilité dans la gestion des cours, la rappeler régulièrement à l’ordre ce qui a créé un climat désagréable. Il communique quatre attestations d’anciens salariés corroborant ses affirmations. Il invoque aussi un différent entre Madame Y et la direction dans la mesure où elle voulait être payée en heures supplémentaires pour les cours de Body Attack ce à quoi s’était opposé l’employeur.

Il prétend que la société voulait en réalité se débarrasser de lui à moindre coût car elle voulait ses parts dans la société HEALHCITY.

La société CMG explique avoir engagé la procédure de licenciement lorsque Madame Y, embauchée le 3 juillet 2012 comme conseiller sportif lui a révélé le comportement inadmissible de Monsieur X à son encontre et le « calvaire » enduré par elle au regard des SMS indécents qu’elle a reçu durant plusieurs mois, du rythme auquel elle a été soumise malgré son état de santé et de fatigue et de la tentative de modifier son contrat de travail. , Madame Y avait expliqué à l’employeur que cette situation a débuté lorsqu’elle a refusé les avances de Monsieur X.

D’après les pièces produites, la cour relève que :

— rien ne corrobore la réalité d’une quelconque cession de parts à une autre société ou la mise en oeuvre d’un plan social,

— l’employeur avait déjà adressé une lettre à Monsieur X, le 22 mars 2007 pour l’informer des plaintes formulées par les conseillers sportifs sur son comportement et ses remarques d’ordre personnel tout en lui renouvelant sa confiance pour rétablir cette situation.

Si les faits concernant Madame Y remontent à 2012 et 2013 pour les SMS et à août et septembre 2013 pour les faits concernant l’atteinte à sa santé, il est établi que l’employeur n’a été alerté par Madame Y, sur les comportements reprochés à Monsieur X que par la lettre que celle-ci lui a adressée et qu’il a reçue le 20 décembre 2013, qu’il a donc eu connaissance des faits dans le délai de deux mois requis par la loi pour sanctionner l’auteur desdits agissements.

Par ailleurs, contrairement à ce qu’indique Monsieur X les messages retranscrits par un huissier de justice dans un procès verbal de constat du 13 janvier 2014 attestent des échanges des deux parties et sont suffisamment dénués de toute ambiguïté pour établir un comportement insistant de sa part afin d’obtenir, a minima, des rendez vous avec Madame Y, ce qu’il ne conteste pas. Ces courriels envoyés à la salariée même à des heures tardives étaient ainsi libellés : « Non je suis un garçon très doux, je ne te déchirerai pas » « No sexe ! enfin’sauf si tu me violes lol » – « j’aimerai bien être le médecin qui t’ausculte ' » – « tu es sur la liste en attente de validation de la direction opération pour les 21 et 22/11. Je viens d’avoir Nadège’et’tu peux passer sur moi ou sous moi comm ».

Au surplus, la cour relève que l’un des SMS est rédigé en ces termes : « parfois j’ai l’impression de te faire peur ».

Pour combattre ces griefs, Monsieur X soutient que ces messages relèvent de la vie privée, qu’ils ont été émis hors du temps de travail et qu’aucun trouble caractérisé n’est démontré.

Il sollicite l’annulation d’une clause du contrat de travail qui indique « aucun salarié au sein de l’entreprise n’aura un comportement ou ne tiendra des propos envers un autre salarié ou un client pouvant provoquer une ambiguïté quelconque dans la relation professionnelle ou commerciale »

L’employeur invoque la forclusion pour cette demande du fait que la modification du contrat de travail remonte à 2003 soit à plus de cinq années.

L’exception de nullité d’une clause contractuelle est perpétuelle, si l’action en exécution de l’obligation litigieuse est introduite après l’expiration du délai de prescription de l’action en nullité.

Sur le fond, outre que l’employeur n’a pas invoqué la violation de cette clause contractuelle aux termes de la lettre de licenciement, force est de relever qu’elle n’est pas de nature à interdire toute relation entre salariés et caractérise une simple recommandation déontologique.La demande tendant à la voir déclarer nulle sera rejetée.

Par ailleurs, il est exact que la loi garantit à chacun le respect de sa vie privée, se définissant comme étant celle ayant lieu en dehors du temps de travail et en dehors du lieu de travail. Aussi par principe, un fait tiré de la vie personnelle d’un salarié ne peut-il fonder légitimement un licenciement pour motif disciplinaire.

Toutefois, les propos à caractère sexuel et l’attitude déplacée du salarié à l’égard d’une personne avec laquelle il était en contact en raison de son travail s’agissant d’une personne âgée de 28 ans travaillant sous sa subordination et à l’égard de qui il a en réalité usé de son pouvoir hiérarchique pour tenter de la contraindre à céder à ses avances ne relevaient pas de sa vie privée et ce d’autant plus que la jeune femme a refusé de satisfaire à ses attentes. Le lien hiérarchique professionnel qui unit l’auteur Monsieur X à la victime de ses agissements et propos déplacés à connotation sexuelle caractérise le rattachement à la vie professionnelle.

De tels faits de harcèlement sexuel commis par un salarié abusant de ses fonctions sont constitutifs d’une faute grave.

Sans qu’il soit besoin d’évoquer les autres griefs, Monsieur X sera donc débouté de sa demande en nullité de la clause précédemment citée et de sa demande en licenciement sans cause réelle et sérieuse, le licenciement étant justifié par une faute grave caractérisée nonobstant son ancienneté importante et l’absence de sanctions antérieures.

Succombant en son appel, Monsieur X supportera la charge des dépens et réglera à la SA CMG SPORTS CLUB une indemnité de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré,

Déboute Monsieur Z X de ses demandes,

Condamne Monsieur Z X à verser à la SA CMG SPORTS CLUB une indemnité de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur Z X aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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