Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 5 février 2019, n° 17/03710

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Chronologie de l’affaire

Commentaires3

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Thibault De Ravel D'esclapon · Bulletin Joly Sociétés · 1er septembre 2019
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 8, 5 févr. 2019, n° 17/03710
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/03710
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 2 février 2017, N° 2015052008
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 05 FÉVRIER 2019

(n° , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/03710 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B2WDO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Février 2017 -Tribunal de Commerce de Paris – RG n° 2015052008

APPELANT

Monsieur B Y

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053, avocat postulant

Assisté de Me Christophe JOFFE, avocat au barreau de PARIS, toque : L 108, avocat plaidant substitué par Me Fanny CALLEDE, avocat au barreau de PARIS, toque : L 108, avocat plaidant

INTIMÉS

Monsieur D X

né le […] à […]

Héroussard

14430 SAINT-JOUIN

R e p r é s e n t é p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assisté de Me Fabrice FAGES de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Prof essionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09 avocat plaidant et de Me Pauline GILLI de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09, avocat plaidant

SA X H agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 349 501 676

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assistée de Me Fabrice FAGES de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association

d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09 avocat plaidant et de Me Pauline GILLI de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09, avocat plaidant

Société civile I J agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 751 935 180

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assistée de Me Fabrice FAGES de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09 avocat plaidant et de Me Pauline GILLI de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09, avocat plaidant

SARL X K agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 433 188 711

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Assistée de Me Fabrice FAGES de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09 avocat plaidant et de Me Pauline GILLI de l’AARPI LATHAM & WATKINS Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle, avocat au barreau de PARIS, toque : T09, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Octobre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Q-R S-T, présidente de chambre

M. F G, conseiller

Mme L-M N, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience par Mme L-M N dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Q-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Q-R S-T, présidente de chambre et par Mme O P, greffière présente lors du prononcé.

******

Exposé du litige :

La SA X H est une société de H de portefeuille dont le capital, d’un montant de 15 000 000 euros, est divisé en 500 000 actions d’une valeur nominale de 30 euros chacune réparties en classes A et B. Les actions de la classe A sont détenues par les cadres salariés et les mandataires sociaux de la société et celles de la classe B, représentant près de 75 % du capital, le sont par M. X, président du conseil d’administration, et les sociétés I J et X K.

M. Y, en tant que salarié de X H, a acquis, le 1er septembre 2007, 3 450 actions nominatives de classe A, soit environ 0,69 % du capital.

X H a demandé le 31 mars 2015 et obtenu le 29 mai suivant, l’autorisation de licencier M. Y, alors titulaire d’un mandat syndical, décision par la suite annulée. Plusieurs contentieux ont alors opposé M. Y, d’une part, et X H et/ ou ses actionnaires majoritaires, d’autre part (mise en oeuvre de la promesse de vente des actions de M. Y consentie dans le pacte d’actionnaires, mise sous séquestre des actions de ce dernier et des dividendes attachés, etc.).

Le 3 juin 2015, a été convoquée l’assemblée générale annuelle des actionnaires de X H appelée à se tenir le 18 juin 2015 à l’effet de délibérer sur l’ordre du jour suivant :

— rapport de H et rapport relatif aux options d’achats d’actions établis par le conseil d’administration,

— rapport des commissaires aux comptes sur les comptes de l’exercice et sur les comptes consolidés,

— approbation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2014, des comptes consolidés et quitus aux administrateurs,

— affectation du résultat de l’exercice,

— fixation de la somme allouée au titre des jetons de présence et rectification d’une erreur matérielle au titre de l’exercice 2013,

— rapport spécial des commissaires aux comptes sur les conventions visées aux articles L. 225-38 et suivants du code de commerce et approbation de ces conventions,

— renouvellement du mandat de quatre administrateurs et nomination d’un nouvel administrateur,

— pouvoirs en vue des formalités.

En prévision de cette assemblée, M. Y, par courrier du 10 juin 2015, a adressé au président du conseil d’administration de X H une liste de questions écrites.

Lors de l’assemblée, les six résolutions suivantes ont été adoptées :

1) approbation des comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2014 ainsi que des opérations traduites et résumées dans ces comptes et dans le rapport général des commissaires aux comptes ;

2) distribution d’un complément de dividende d’un montant de 60 000 000 d’euros portant la distribution effective globale à la somme de 65 000 000 d’euros, affectation du solde du bénéfice de l’exercice clos (40 549 198 euros) au poste « autres réserves », et distribution d’un dividende de 130 euros par action ;

3) Approbation des conventions réglementées conclues ou poursuivies au cours de l’exercice 2014 ;

4) Fixation à la somme de 440 000 euros le montant des jetons de présence attribués au conseil d’administration et rectification du « montant erroné des jetons de présence figurant dans l’Assemblée générale ordinaire en date du 12 juin 2014 qui aurait dû être fixé à 440 000 euros et non à 400 000 euros » ;

5) Renouvellement des mandats d’administrateurs de MM. X, Z, Corne et Leroux pour une durée de trois ans et approbation de la nomination de M. de la Porte du Theil en qualité d’administrateur pour la même durée ;

6) Tous pouvoirs pour accomplir toutes formalités.

M. Y a voté en faveur des toutes les résolutions, à l’exception des première et troisième au titre desquelles il s’est abstenu.

Les 6 août, 17 août et 3 septembre 2015, M. Y a assigné X H, I J et X K ainsi que M. X devant le tribunal de commerce de Paris, en vue de voir prononcer la nullité de l’assemblée générale des actionnaires de X H du 18 juin 2015 et, en conséquence, l’annulation des cinq premières résolutions adoptées par cette assemblée ainsi que la condamnation solidaire des défendeurs au paiement de 50 000 euros de dommages et intérêts.

Les défendeurs ont conclu à l’irrecevabilité des demandes de M. Y pour défaut d’intérêt à agir, à titre subsidiaire au rejet de celles-ci et, reconventionnellement, à la condamnation de M. Y à payer un euro en réparation du préjudice moral de X H.

Par jugement du 3 février 2017, le tribunal de commerce de Paris a dit que M. Y avait intérêt à agir, l’a débouté de l’intégralité de ses demandes, et l’a condamné à payer aux défendeurs 20 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu'1 euro de dommages et intérêts à X H.

M. Y a relevé appel du jugement par déclaration du 17 février 2017.

Dans ses conclusions signifiées le 5 septembre 2018, M. Y demande à la cour:

— de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré son action recevable, de l’infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau :

— de débouter les intimés de leurs demandes,

— de prononcer la nullité de l’assemblée générale de X H du 18 juin 2015 et, en conséquence, d’annuler les cinq premières résolutions adoptées par celle-ci ;

— de condamner solidairement M. X, X K et I J à lui payer 50 000 euros de dommages et intérêts ;

— de condamner solidairement les mêmes à lui payer chacun 15 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans leurs conclusions en réponse et d’appel incident signifiées le 25 septembre 2018, X H, I J, X K et M. X demandent à la cour :

— à titre principal, de dire que M. Y n’a pas intérêt à agir à leur encontre et, en conséquence, d’infirmer le jugement de ce chef, et de déclarer M. Y irrecevable en ses demandes et de l’en débouter ;

— à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté tous les moyens et demandes de M. Y et condamné celui-ci à payer à X H la somme de 1 euro en indemnisation de son préjudice moral ;

— à titre infiniment subsidiaire, en cas de prononcé de la nullité de l’assemblée générale des actionnaires, de dire que X H disposera d’un délai d’au moins trois mois à compter de la signification de la décision pour régulariser les éventuelles irrégularités que la cour constaterait ;

— en tout état de cause, de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. Y à leur payer 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;

— de condamner M. Y à leur payer 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ainsi qu’aux dépens d’appel.

SUR CE

Sur la recevabilité des demandes de M. Y

Pour soutenir que les demandes de M. A sont irrecevables pour défaut d’intérêt à agir, les intimés font valoir que M. Y a voté en faveur des résolutions 2, 4, 5 et 6 adoptées par l’assemblée générale des actionnaires du 18 juin 2015, qu’aucun fait nouveau relatif à ces résolutions n’est apparu entre cette date et celle du 6 août 2016, jour de la délivrance de l’assignation en nullité, et qu’il est illogique de s’abstenir sur l’approbation des comptes annuels (résolution 1) puis de voter

en faveur des dividendes (résolution 2).

Toutefois, comme le relève M. Y, l’actionnaire qui a émis un vote favorable à une résolution n’est pas, de ce seul fait, dépourvu d’intérêt à en poursuivre l’annulation, même en l’absence d’élément nouveau apparu dans l’intervalle.

Compte tenu de la solution qui vient d’être énoncée, l’incohérence prétendue du vote défavorable émis par M. Y à la résolution relative aux dividendes est sans incidence sur l’appréciation de l’intérêt à agir en annulation de ce dernier.

Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a dit que M. Y avait intérêt à agir.

Sur la demande d’annulation de l’assemblée générale de X H du 18 juin 2015

M. Y invoque trois motifs d’annulation qui seront examinés successivement ci-après : la violation de son droit de communication préalable (a), l’impossibilité dans laquelle il a été placé d’émettre un vote éclairé sur les délibérations soumises à son approbation (b) et l’abus de droit commis par M. X, I J et X K (c).

a- La violation du droit de communication préalable de M. Y

M. Y argue de l’absence de communication du rapport relatif aux options d’achat établi par le conseil d’administration (i), de l’absence de précision apportée sur les références et activités professionnelles de M. de la Porte du Theil, proposé comme membre du conseil d’administration (ii) et de la communication tardive, le jour de l’assemblée, de la liste des actionnaires sans indication de leur adresse et du nombre d’actions dont ils étaient titulaires (iii).

Il convient d’observer que s’il est également fait référence, dans l’exposé des faits et de la procédure des conclusions de M. Y, à l’absence de communication des comptes sociaux « détaillés » ainsi que, semble-t-il, du rapport de H, il n’en est alors tiré aucune conséquence juridique et ces griefs ne sont ensuite plus repris dans la partie « discussion » des écritures, de sorte que la cour n’est saisie d’aucun moyen pris de l’absence de communication de ces deux documents. Au demeurant, force est de constater que ces pièces sont mentionnées comme figurant en annexe dans l’avis de convocation adressé à M. Y le 3 juin 2015. En outre, il résulte des questions posées par M. Y en vue de l’assemblée générale du 18 juin 2015 par courrier daté du 10 juin 2015, qui font référence à des pages du rapport des commissaires aux comptes se trouvant au sein de la partie reproduisant les comptes annuels 2014, ainsi qu’à des souscriptions de X H au capital de la SCI Porquerolles, mentionnées uniquement dans le rapport de H du conseil d’administration, que ce dernier était bien, à cette dernière date, en possession des documents en cause.

i – L’absence de communication du rapport relatif aux options d’achat établi par le conseil d’administration

L’article L. 225-115, 2°, du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 19 mai 2011, dispose que : « Tout actionnaire a droit, dans les conditions et délais déterminés par décret en Conseil d’Etat, d’obtenir communication : / […] / 2° Des rapports du conseil d’administration ou du directoire et du conseil de surveillance, selon le cas, et des commissaires aux comptes, qui seront soumis à l’assemblée ; ».

L’article R. 225-83, 4°, du même code, dans sa rédaction en vigueur depuis le 27 mars 2007, énonce : « La société adresse aux actionnaires ou met à leur disposition, dans les conditions prévues aux articles R. 225-88 et R. 225-89, les renseignements suivants contenus dans un ou plusieurs documents : / […] / 4° Le rapport du conseil d’administration ou du directoire, selon le cas, qui sera présenté à l’assemblée ainsi que, le cas échéant, les observations du conseil de surveillance ;

L’article R. 225-88 du même code, dans la même rédaction, prévoit : « A compter de la convocation de l’assemblée et jusqu’au cinquième jour inclusivement avant la réunion, tout actionnaire titulaire de titres nominatifs peut demander à la société de lui envoyer, à l’adresse indiquée, les documents et renseignements mentionnés aux articles R. 225-81 et R. 225-83. La société est tenue de procéder à cet envoi avant la réunion et à ses frais. Cet envoi peut être effectué par un moyen électronique de télécommunication mis en oeuvre dans les conditions mentionnées à l’article R. 225-63, à l’adresse indiquée par l’actionnaire. / […] / Les actionnaires mentionnés au premier alinéa peuvent, par une demande unique, obtenir de la société l’envoi des documents et renseignements précités à l’occasion de chacune des assemblées d’actionnaires ultérieures. »

L’article R. 225-89, alinéa 1, du même code dispose : « A compter de la convocation de l’assemblée générale ordinaire annuelle et au moins pendant le délai de quinze jours qui précède la date de la réunion, tout actionnaire a le droit de prendre connaissance, au siège social ou au lieu de la direction administrative, des documents et renseignements énumérés aux articles L. 225-115 et R. 225-83. Toutefois, il n’a le droit de prendre connaissance, aux mêmes lieux, du rapport des commissaires aux comptes, que pendant le même délai de quinze jours. »

Enfin, l’article L. 225-184 du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 5 décembre 2008, prévoit l’établissement d’un rapport spécial destiné à informer annuellement l’assemblée générale ordinaire sur les options de souscription ou d’achat d’actions de l’exercice.

Les intimés estiment que seul le rapport annuel sur les comptes établi par le conseil d’administration doit être communiqué aux actionnaires et, en tout état de cause, qu’en l’absence de disposition légale spécifique, le rapport spécial prévu par l’article L. 225-184 du code de commerce, n’entre pas dans le champ de cette communication.

Toutefois, il résulte des dispositions précitées des articles L. 225-115, 2°, R. 225-83, 4°, R. 225-88, et R. 225-89, alinéa 1, du code de commerce, qui ne visent aucun rapport du conseil d’administration en particulier, que tous les rapports établis par cet organe, dès lors qu’ils seront présentés à l’assemblée, doivent être communiqués aux actionnaires dans les conditions prévues par les deux derniers textes.

En l’espèce, conformément à l’article L. 225-184 du code de commerce, l’ordre de jour prévoyait que l’assemblée générale ordinaire annuelle des actionnaires serait appelée à délibérer sur le rapport relatif aux options de souscription ou d’achat d’actions établi par le conseil d’administration, de sorte que, contrairement aux allégations des intimés, ce document entrait dans les prévisions de l’article R. 225-88 du code de commerce et, partant, devait être adressé aux actionnaires qui en avaient fait la demande en application de ce texte.

Les intimés arguent par ailleurs que la demande de communication de M. Y du 5 mai 2015, formulée un mois avant la convocation de l’assemblée générale et non à compter de cette convocation, n’a pas été adressée dans les délais requis par l’article R. 225-88 du code de commerce.

Par courrier avec demande d’avis de réception daté du 5 mai 2015 adressé à la secrétaire générale de X H, M. Y a formulé des demandes dans les termes reproduits ci-après :

« Pour éviter les errements de l’année passée ayant notamment conduit à me priver de mon droit de vote, et comme je vous l’indiquais aux termes de ma correspondance du 29 mai 2014, je souhaite dorénavant – conformément aux dispositions de l’article R 225-68 al. 1 du Code de commerce – recevoir mes convocations aux prochaines assemblées générales de notre Société, par voie recommandée, à l’adresse exacte (code postal inclus) visée en entête du présent courrier.

Je formule également d’ores et déjà le souhait de recevoir, en même temps que la convocation, une formule de pouvoir et – conformément aux dispositions de l’article R 225-88 du Code de commerce – tous les documents et renseignements visés aux articles R 225-81 et R 225-83 du même Code.

[…] ».

Il en résulte que M. Y a usé de la faculté offerte par l’article R. 225-88 du code de commerce à tout actionnaire titulaire de titres nominatifs d’obtenir de la société, par une demande unique, l’envoi des documents et renseignements mentionnés aux articles R. 225-81 et R. 225-83 du même code à l’occasion de chacune des assemblées d’actionnaires ultérieures.

Toutefois, si la demande unique permet à un actionnaire d’exercer son droit de communication par anticipation pour les « assemblées d’actionnaires ultérieures », elle ne saurait avoir pour effet de le soustraire, au titre de l’assemblée à venir, au délai imposé par l’article R. 225-88 du code de commerce, qui n’autorise la mise en oeuvre du droit de communication qu’entre la date de la convocation de l’assemblée et le cinquième jour avant la réunion de celle-ci.

Dès lors, M. Y, qui a exercé le droit de communication prévu à l’article R. 225-88 du code de commerce avant la convocation de l’assemblée et, partant, à un moment où celui-ci n’était pas ouvert, est mal fondé à invoquer l’absence d’envoi du rapport spécial sur les options de souscription ou d’achat d’actions.

ii- L’absence de précision apportée sur les références et activités professionnelles de M. de la Porte du Theil, dont la nomination en tant que membre du conseil d’administration était proposée

L’article R. 225-83, 5° a), du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 27 mars 2007, énonce : « La société adresse aux actionnaires ou met à leur disposition, dans les conditions prévues aux articles R. 225-88 et R. 225-89, les renseignements suivants contenus dans un ou plusieurs documents : / […] / 5° Lorsque l’ordre du jour comporte la nomination d’administrateurs ou de membres du conseil de surveillance : / a) Les nom, prénom usuel et âge des candidats, leurs références professionnelles et leurs activités professionnelles au cours des cinq dernières années, notamment les fonctions qu’ils exercent ou ont exercées dans d’autres sociétés ; / b) Les emplois ou fonctions occupés dans la société par les candidats et le nombre d’actions de la société dont ils sont titulaires ou porteurs ; ».

Les documents joints à l’avis de convocation à l’assemblée générale du 18 juin 2015 adressé à M. Y font état de ce que la nomination de M. de la Porte du Theil en qualité d’administrateur sera proposée et mentionne, au titre de son « activité au cours des 5 dernières années » : « Président de l’AFG ; Membre de divers comités d’associations professionnelles (IFA – AFEP/MEDEF – Fondact, etc) ».

M. Y soutient que ces indications ne satisfont pas à l’exigence prévue par le a) précité d’indication des références professionnelles et activités professionnelles au cours des cinq dernières années, notamment des fonctions exercées ou ayant été exercées dans d’autres sociétés.

Toutefois, aucune pièce du dossier n’établit que les mentions précitées ne renseignaient pas suffisamment les actionnaires sur les références et activités professionnelles de l’intéressé.

Dès lors, en communiquant les informations précitées sur M. de la Porte du Theil, la société X H n’a pas méconnu l’article R. 225-83, 5° a), du code de commerce.

iii- La communication tardive, le jour de l’assemblée, de la liste des actionnaires sans indication de leur adresse et du nombre d’actions dont ils étaient titulaires

L. 225-116 du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 21 septembre 2000, dispose qu'« Avant la réunion de toute assemblée générale, tout actionnaire a le droit d’obtenir, dans les conditions et les délais déterminés par décret en Conseil d’Etat, communication de la liste des actionnaires. »

L’article R. 225-90 du même code, dans sa rédaction en vigueur depuis le 27 mars 2007, énonce : « En application des dispositions de l’article L. 225-116, l’actionnaire a le droit, pendant le délai de quinze jours qui précède la réunion de l’assemblée générale de prendre connaissance ou copie, aux lieux prévus à l’article R. 225-89, de la liste des actionnaires. / A cette fin, la liste des actionnaires est arrêtée par la société le seizième jour qui précède la réunion de l’assemblée. Elle contient les nom, prénom usuel et domicile de chaque titulaire d’actions nominatives. Le nombre d’actions dont chaque actionnaire est titulaire au porteur est en outre mentionné. »

Il résulte de ces textes, qui prévoient uniquement la possibilité pour les actionnaires de prendre connaissance ou copie, pendant une période déterminée, de la liste des actionnaires aux lieux prévus par l’article R. 225-89, à savoir au siège social de la société ou au lieu de la direction administrative de celle-ci, dans les 15 jours précédant la réunion de l’assemblée, que, contrairement aux allégations de M. Y, X H n’était pas tenue de lui envoyer cette liste.

Par ailleurs, l’allégation des intimés selon laquelle la liste en cause a bien été mise à disposition des actionnaires au siège social de Carmingnac H dans le délai prévu par l’article R. 225-90 n’est contredite par aucune pièce du dossier, étant observé qu’il ressort de l’inventaire des pièces annexées au procès-verbal de constat d’huissier du 18 juin 2015 que cette liste, arrêtée le 2 juin 2015, existait bien à la date de l’assemblée.

Dès lors, il est établi que la liste en cause a été mise à disposition des actionnaires dans les délais et selon les modalités prévues par l’article R. 225-89.

En revanche, faute pour X H d’avoir versé cette liste aux débats, il n’est pas démontré que celle-ci contenait les informations dont M. Y déplore l’omission, à savoir, d’une part, l’indication du domicile de chaque titulaire d’actions nominatives et le nombre d’actions dont chaque actionnaire nominatif était titulaire ou porteur.

Il doit être observé, à cet égard, que, contrairement aux allégations des intimés, la circonstance que le conseil de M. Y ait adressé un courrier à un actionnaire le 8 juillet 2015 ne prouve pas qu’il avait connaissance du domicile de ce dernier avant la réunion de l’assemblée du 18 juin 2015.

La mention du domicile des actionnaires nominatifs étant exigée par l’article R. 225-90, alinéa 2, du code de commerce précité, X H a méconnu les prescriptions de ce texte en s’abstenant de porter cette information sur la liste des actionnaires.

S’agissant du nombre d’actions, le même alinéa, après avoir énoncé que la liste des actionnaires contient les nom, prénom usuel et domicile de chaque titulaire d’actions nominatives, dispose que « Le nombre d’actions dont chaque actionnaire est titulaire au porteur est en outre mentionné. »

Les intimés font valoir que cette disposition exige l’indication du nombre d’actions au porteur et, partant, ne trouve pas à s’appliquer à X H, qui n’a émis que des actions nominatives, tandis que M. Y considère que le nombre d’actions à indiquer est celui détenu par chaque actionnaire inscrit, qu’il le soit au nominatif ou au porteur.

L’alinéa litigieux est issu de la codification de l’article 140, alinéa 2, du décret n° 67-236 du 23 mars 1967 qui, dans sa dernière rédaction, était ainsi rédigé :

« A cette fin, la liste des actionnaires est arrêtée par la société, le seizième jour qui précède la réunion de l’assemblée. Elle contient les nom, prénom usuel et domicile de chaque titulaire d’actions nominatives. Le nombre d’actions dont chaque actionnaire est titulaire ou porteur est en outre mentionné. »

Ainsi, cette disposition exigeait que soit indiqué, pour chaque titulaire d’actions nominatives, le nombre d’actions détenues au nominatif et au porteur.

Or, la codification doit, en principe, être effectuée à droit constant.

En outre, force est de constater que l’article R. 225-90, alinéa 2, du code de commerce prescrit l’établissement d’une liste des titulaires d’actions nominatives, et non des actionnaires au porteur, de sorte qu’il apparaît cohérent que les précisions complémentaires à apporter quant au nombre d’actions détenues se rapportent aux personnes figurant sur cette liste.

Dès lors, la disposition litigieuse doit être comprise comme exigeant l’indication du nombre d’actions dont chaque actionnaire nominatif est titulaire ou porteur.

X H a donc méconnu les dispositions de l’article R. 225-90, alinéa 2, du code de commerce en ne précisant pas, sur la liste des actionnaires nominatifs, le nombre d’actions dont ces derniers étaient titulaires ou porteurs.

Il convient, à présent, d’examiner les conséquences des deux omissions relevées.

L’article L. 225-121 du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 24 mars 2012, dispose : « Les délibérations prises par les assemblées en violation des articles

L. 225-96, L. 225-97, L. 225-98, des troisième et quatrième alinéas de l’article L. 225-99, du deuxième alinéa de l’article L. 225-100 et de l’article L. 225-105 sont nulles. / En cas de violation des dispositions des articles L. 225-115 et L. 225-116 ou du décret pris pour leur application, l’assemblée peut être annulée ».

L’omission de la mention, sur la liste des actionnaires au nominatif mise à disposition en prévision de l’assemblée générale annuelle, du domicile de ces derniers et du nombre d’actions détenues par eux au nominatif ou au porteur, en violation des articles L. 225-116 et R. 225-90 du même code, est sanctionnée par une nullité facultative en application du second alinéa du texte précité.

Comme il a été dit, il n’est pas établi que M. Y a eu connaissance des informations manquantes préalablement à la tenue de l’assemblée, comme l’exigent les articles L. 225-116 et R. 225-90 du code de commerce, de sorte que, contrairement aux allégations des intimés, qui invoquent l’article 1844-11 du code civil (dont l’équivalent se trouve à l’article 235-3 du code de commerce), la cause de la nullité n’a pas disparu.

Toutefois, M. Y ne s’étant pas déplacé au siège de la société pour consulter la liste des actionnaires mise à disposition, le caractère incomplet de celle-ci n’a eu aucune incidence concrète sur l’exercice de ses droits.

Dès lors, il n’y a pas lieu d’accueillir la demande de nullité de M. Y.

b- L’impossibilité pour M. Y d’émettre un vote éclairé sur les délibérations soumises à son approbation

M. Y soutient qu’à défaut d’avoir reçu communication du rapport spécial relatif aux options d’achats d’actions avant la tenue de l’assemblée, d’avoir disposé d’informations précises sur les références et activités professionnelles exercées par M. de la Porte du Theil et, enfin, d’avoir reçu une réponse « claire, précise et complète » aux questions écrites qu’il avait posées avant l’assemblée, il n’a pas été en mesure d’émettre un vote éclairé sur les délibérations soumises à son approbation, en violation de l’article L. 225-108 du code de commerce. Il cite également l’article L. 225-104, alinéa 2, du même code et, dans ses développements consacrés à l’insuffisance des réponses apportées à ses questions, fait valoir que les juges ont « la faculté de sanctionner sa méconnaissance [ du droit des actionnaires d’obtenir des réponses aux questions écrites qu’ils ont posées] par la nullité des résolutions irrégulièrement adoptées puisqu’il s’agit, en substance, d’une disposition impérative qu’il convient de protéger ».

Les intimés répliquent que M. Y a disposé de tous les éléments nécessaires à un vote éclairé, qu’il a reçu des réponses satisfaisantes pendant les délibérations de l’assemblée générale et, enfin, que le prétendu manquement à l’obligation de répondre aux questions posées n’est pas sanctionné par la nullité.

Il convient de déterminer si les violations invoquées sont susceptibles d’être sanctionnées par la nullité des délibérations.

L’article L. 225-104 du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 21 septembre 2000, cité par M. Y, prévoit :

« La convocation des assemblées d’actionnaires est faite dans les formes et délais fixés par décret en Conseil d’Etat.

Toute assemblée irrégulièrement convoquée peut être annulée. Toutefois, l’action en nullité n’est pas recevable lorsque tous les actionnaires étaient présents ou représentés.»

Ces dispositions, qui concernent la convocation des assemblées, n’ont aucun lien avec les violations alléguées et, partant, ne peuvent fonder la nullité invoquée par M. Y.

L’article L. 225-108 du même code, dans sa rédaction en vigueur depuis le 11 décembre 2010, également cité par M. Y, dispose :

« Le conseil d’administration ou le directoire, selon le cas, doit adresser ou mettre à la disposition des actionnaires les documents nécessaires pour permettre à ceux-ci de se prononcer en connaissance de cause et de porter un jugement informé sur la H et la marche des affaires de la société.

La nature de ces documents et les conditions de leur envoi ou de leur mise à la disposition des actionnaires sont déterminées par décret en Conseil d’Etat.

A compter de la communication prévue au premier alinéa, tout actionnaire a la faculté de poser par écrit des questions auxquelles le conseil d’administration ou le directoire, selon le cas, est tenu de répondre au cours de l’assemblée. Une réponse commune peut être apportée à ces questions dès lors qu’elles présentent le même contenu.

La réponse à une question écrite est réputée avoir été donnée dès lors qu’elle figure sur le site internet de la société dans une rubrique consacrée aux questions-réponses.»

Le non-respect de cet article n’est sanctionné par aucune disposition spéciale, de sorte qu’il convient de se référer à l’article L. 235-1, alinéa 2, du code de commerce aux termes duquel « La nullité d’actes ou délibérations autres que ceux prévus à l’alinéa précédent [relatif à la nullité d’une société ou d’un acte modifiant les statuts] ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative du présent livre ou des lois qui régissent les contrats. »

Il a été dit qu’aucune nullité n’était encourue à raison de la communication du rapport spécial concernant les options d’achat d’actions et des informations fournies sur le parcours de M. de la Porte du Theil.

Il reste à examiner la violation alléguée par M. Y tenant aux réponses apportées à ses questions écrites.

Par courrier du 10 juin 2015 adressé au président du conseil d’administration de X H, M. Y a demandé qu’une réponse soit apportée lors de l’assemblée générale du 18 juin 2015 à des questions se rapportant aux comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2014 (explications sur certains aspects des postes « Participations », « Instruments financiers », « salaires et traitements », « provisions pour risques et charges »), aux conventions réglementées, aux documents de H prévisionnelle, aux options d’achat ou de souscription d’actions réservées aux mandataires sociaux et salariés et aux jetons de présence.

Il est établi par le procès-verbal de constat établi par huissier de justice le 18 juin 2015, qui transcrit les débats intervenus lors de l’assemblée, que des éléments de réponse ont été apportés sur tous les thèmes mentionnés ci-dessus et qu’en dépit du caractère peu détaillé des explications données sur certains points, ceux-ci n’équivalent pas à une absence de réponse.

La seule circonstance que M. Y estime les éléments fournis insatisfaisants en ce qu’ils n’apporteraient pas une réponse « claire, précise et complète » ne caractérise pas une violation d’une disposition impérative.

Il en est de même de l’absence de convocation préalable du conseil d’administration en vue de préparer la réponse aux questions posées qui, de surcroît, n’est pas établie au vu de la production, par les intimés, d’une convocation adressée le 8 juin 2015 à un administrateur qui fait état d’une réunion du conseil d’administration le 18 juin 2015 à 11 heures en prévision de l’assemblée du même jour à l’effet, notamment, d’examiner les réponses à apporter aux questions écrites.

Dès lors, aucune nullité n’est encourue à raison de l’impossibilité alléguée par M. Y d’émettre un vote éclairé sur les délibérations soumises à son approbation.

c- L’abus de droit commis par M. X et les sociétés I J et X K

M. Y soutient que M. X, en qualité de dirigeant de X H, a abusé de son pouvoir de direction pour le maintenir dans l’ignorance « la plus totale » de la H de la société en violant ses droits « en tout impunité et depuis des années », en particulier son droit d’actionnaire à l’information, et en voyant « d’un regard ironique ses tentatives de faire respecter ces droits échouer invariablement », le plaçant ainsi dans l’impossibilité de mesurer le sens, l’impact réel et la conformité à l’intérêt social des délibérations soumises à son approbation « que ce soit dans le cadre de l’assemblée litigieuse comme des assemblées précédentes ».

Il ajoute que M. X, en qualité d’actionnaire de X H, conjointement avec les sociétés I J et X K, ont « usé de tout le poids de la majorité pour voter impunément l’ensemble des délibérations souhaitées ».

Il invoque, en particulier, d’une part, la résolution ayant validé le versement, au titre des jetons de présence, d’une somme excédant de 40 000 euros l’enveloppe votée par l’assemblée générale de 2014 et, d’autre part, la décision du conseil d’administration de distribuer des dividendes au titre de l’exercice 2013 avant que les comptes ne soient validés par les commissaires aux comptes puis approuvés par l’assemblée, au risque que ceux-ci soient qualifiés de dividendes fictifs.

Il a été dit que les violations de ses droits invoquées par M. Y ne justifiaient pas de prononcer la nullité de l’assemblée du 18 juin 2015 et, cette nullité étant seule demandée, les allégations relatives aux assemblées antérieures sont inopérantes.

S’agissant de l’abus de majorité allégué, M. Y ne précise pas en quoi les résolutions adoptées par l’assemblée du 18 juin 2015 seraient contraires à l’intérêt social et auraient été prises dans l’intérêt des actionnaires majoritaires à son détriment. Il convient de relever, à cet égard, que la nécessité de rectifier l’enveloppe de 400 000 euros votée en 2014, pour la porter à 440 000 euros, a été expliquée par l’absence de prise en compte de l’augmentation du nombre d’administrateurs, passé de 10 à 11, et que M. Y a émis un vote favorable à la résolution correspondante. Quant à la distribution de dividendes au titre de l’exercice 2013 avant la tenue de l’assemblée générale annuelle du 12 juin 2014, elle ne présente aucun lien avec les résolutions adoptées par l’assemblée générale du 18 juin 2015.

Aucun abus de majorité n’est donc établi.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de prononcer la nullité de l’assemblée du 18 juin 2015 à raison des abus de droit, notamment de majorité, invoqués.

Il résulte de tout ce qui précède que les demandes d’annulation de l’assemblée générale de la société X H du 18 juin 2015 et d’annulation subséquente des résolutions adoptées à cette occasion doivent être rejetées.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par M. Y à raison de l’abus de droit commis par M. X et les sociétés I J et X K

M. Y fait valoir que les arguments avancés au soutien de sa demande de nullité de l’assemblée générale du 18 juin 2015 à raison de l’abus de droit commis par M. X et les sociétés I J et X K, rappelés ci-avant, justifient également l’allocation de dommages-intérêts d’un montant de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral, « né non seulement de la privation répétée de ses droits d’actionnaire, mais aussi du risque fiscal majeur résultant des dividendes fictifs, ainsi que du dédain public que M. X lui a réservé en pleine assemblée (refus catégoriques de répondre à ses questions, fins de non-recevoir, commentaires ironiques à son sujet, réponses volontairement inaudibles ou expéditives, rires en réaction à ses interrogations etc.) ».

En premier lieu, il a été retenu que la seule irrégularité relevée concernant la mise en oeuvre du droit de communication des actionnaires à l’occasion de l’assemblée du 18 juin 2015, à savoir le caractère incomplet de la liste des actionnaires mise à disposition par X H, n’avait eu aucune incidence concrète sur l’exercice des droits de M. Y.

En deuxième lieu, le risque fiscal majeur évoqué par M. Y, tenant à la distribution du dividende de l’exercice 2013 les 30 avril et 14 mai 2014 avant l’approbation des comptes par l’assemblée du 12 juin 2014 ne présente aucun lien avec l’assemblée du 18 juin 2015. Au demeurant, la distribution d’un acompte sur dividende avant l’approbation des comptes de l’exercice est autorisée par l’article L. 232-12 du code de commerce sous certaines conditions dont la lettre des commissaires aux comptes produite par M. Y ne permet pas de déterminer si elles étaient remplies en l’espèce.

En troisième lieu, la lecture du procès-verbal de constat d’huissier qui transcrit les débats de l’assemblée générale du 18 juin 2015 laisse apparaître que le seul refus opposé par M. X (« je ne vois pas en quoi cela vous regarde ») à M. Y a porté sur la demande de ce dernier d’obtenir la communication « des listes précises des salariés ayant bénéficié des options », information qui n’a pas à figurer dans le rapport destiné à l’information des actionnaires prévu par L. 225-184 du code de commerce. De surcroît, il n’est pas établi que celles des réponses de M. X qui ont été brèves ou dont certains mots ont été indiqués comme étant inaudibles procédaient d’une intention malveillante. Quant aux commentaires ironiques auxquels M. X se serait livrés, la cour n’en a dénombré qu’un seul, d’une portée limitée (« Je suis touché que vous preniez un tel intérêt à nos affaires »). Enfin, le procès-verbal ne mentionne l’expression de rires qu’à deux reprises, une fois de la part du directeur général, à la suite d’un trait d’humour qu’il venait lui-même de faire, et une seconde fois de la part de l’assemblée après l’adoption de la première résolution, sans qu’il soit possible d’en déterminer la cause. Dès lors, le caractère fautif du comportement de M. X n’est pas démontré.

Enfin, comme il a été dit, aucun abus de majorité n’est établi en ce qui concerne l’assemblée générale du 18 juin 2015.

Dès lors, il y a lieu de rejeter la demande de dommages et intérêts de M. Y et, partant, de confirmer le jugement sur ce point.

- Sur la demande de dommages et intérêts formée par X H

X H soutient que l’action de M. Y procède d’une vindicte personnelle, poursuivie par ce dernier depuis son licenciement et qui s’est notamment manifestée par une dénonciation unilatérale et fautive du pacte d’actionnaires et des statuts. Elle ajoute qu’un tel comportement lui cause un préjudice moral qui mérite d’être réparé

à hauteur d’un euro symbolique sur le fondement de l’ancien article 1382 du code civil, devenu 1240 du même code.

M. Y réplique qu’il s’est contenté de défendre ses droits d’actionnaire en engageant l’action en cause et en dénonçant le pacte et les statuts, que la partie adverse a multiplié les procédures (seconde tentative de licenciement, mise sous séquestre de ses actions et des dividendes attachés, etc.) et qu’il a eu gain de cause en ce qui concerne son licenciement.

L’existence d’un contentieux entre les parties ne suffit pas à établir que l’action a été engagée par M. Y dans le but de satisfaire une vengeance personnelle.

Si M. Y a fait preuve d’une certaine légèreté en invoquant un abus de majorité sans même préciser en quoi les résolutions adoptées lors de l’assemblée du 18 juin 2015 étaient contraires à l’intérêt social, alors de surcroît qu’il avait lui-même voté en faveur de quatre d’entre elles, il reste que X H a fourni une liste d’actionnaires incomplète et que les réponses apportées à M. Y lors des débats manquaient de précision sur certains points.

Dans ces conditions, il n’est pas établi que l’action engagée par M. Y revêt un caractère abusif.

Il y aura lieu, en conséquence, d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. Y à payer une somme de 1 euro de dommages et intérêts à la société X H et, statuant à nouveau, de rejeter la demande présentée par cette dernière à ce titre.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

M. Y, qui succombe, supportera les dépens et sera débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera par ailleurs confirmé en ce qu’il a condamné M. Y à payer la somme de 20 000 euros à M. X ainsi qu’aux sociétés X H, I J et X K sur le fondement de ce dernier texte.

Enfin, M. Y sera condamné à payer aux intimés une somme de 3 000 euros, en application du même texte, au titre des frais exposés en appel par ces derniers et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement, sauf en ce qu’il condamne M. B Y à payer à la SA X H la somme de 1 euro de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande de dommages et intérêts formée par la SA X H,

Y ajoutant,

Condamne M. B Y à payer à M. D X, à la SA X H, à la société civile I J et à la SARL X K la somme globale de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. B Y aux dépens.

Le Greffier, La Présidente,

O P Q-R S-T

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 8, 5 février 2019, n° 17/03710