Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 6 mars 2019, n° 16/10047

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 4, 6 mars 2019, n° 16/10047
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/10047
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Meaux, 12 juin 2016, N° 14/00136
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 4

ARRÊT DU 06 Mars 2019

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 16/10047 – N° Portalis 35L7-V-B7A-BZLCM

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Juin 2016 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MEAUX RG n° 14/00136

APPELANT

Monsieur Y X

[…]

[…]

représenté par Me Thibaut CAYLA, avocat au barreau de PARIS, toque : C2417 substitué par Me Olivia BERTHET PAWLOTSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : C2417

INTIMEE

SAS CITYA URBANIA SEINE ET MARNE

[…]

[…]

[…]

représentée par Me B DESHOULIERE, avocat au barreau de TOURS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Janvier 2019, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Y BLANC, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Y BLANC, président

[…], conseiller

Marianne FEBVRE MOCAER, conseiller

Greffier : Monsieur Z A, lors des débats

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Y BLANC, Président et par Z A, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat à durée indéterminée en date du 19 mai 2011, Monsieur Y X a été engagé par la société UA MANAGEMENT, en qualité d’adjoint au directeur opérationnel de cabinet, catégorie cadre .

A ce titre, il avait la charge de plusieurs cabinets d’administration de biens, dont il était chargé d’assurer la gestion, de développer les résultats et la notoriété, dans le respect des politiques définies par le groupe URBANIA, en secondant le directeur opérationnel de cabinet.

La convention collective nationale applicable aux relations contractuelles est celle de l’immobilier, des administrateurs de biens, des sociétés immobilières, agents immobiliers etc. du 9 septembre 1988.

Par courrier remis en main propre en date du 28 novembre 2013, Monsieur Y X était convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, lequel se déroulait le 12 décembre 2013 .

A cette occasion, il était mis à pied à titre conservatoire.

Par courrier recommandé avec AR en date du 19 décembre 2013, Monsieur Y X était licencié pour fautes graves.

Contestant son licenciement, Monsieur Y X a saisi le Conseil de Prud’hommes de Meaux le 29 janvier 2014.

La cour statue sur l’appel régulièrement interjeté par Monsieur Y X du jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Meaux le 13 juin 2016 qui a :

— requalifié son licenciement pour faute grave en un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;

— condamné la société SAS CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à lui verser les sommes suivantes :

—  3 787,31 euros au titre de la mise à pied ;

—  378,73 euros au titre des congés payés afférents ;

—  17 042 euros au titre de l’indemnité de préavis ;

—  1704,29 euros au titre des congés payés afférents ;

—  3 025,14 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

—  1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— débouté Monsieur X du surplus de ses demandes ;

— débouté la SAS CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

— condamné la SAS CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE aux entiers dépens.

Vu les conclusions en date du 23 janvier 2019, au soutien de ses observations orales, par lesquelles Monsieur Y X demande à la cour de :

RECEVOIR Monsieur Y X en ses écritures et les dire bien fondées ;

INFIRMER la décision du Conseil de prud’hommes de MEAUX en date du 13 juin 2016 En conséquence,

DIRE que le licenciement de Monsieur Y X notifié le 19 décembre 2013 est dénué de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 68.171,67 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (soit l’équivalent de 12 mois de salaire) ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 34.085,82 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement survenu dans des conditions vexatoires (soit l’équivalent de 6 mois de salaire) ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 3.025,14 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 17.042,98 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 1.704,29 euros à titre de congés payés sur préavis ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 3.787,31 euros à titre de rappel de salaires sur mise à pied ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 378,73 euros à titre de congés payés sur mise à pied ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE à verser à Monsieur Y X la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER la société CITYA URBANIA SEINE-ET-MARNE aux entiers dépens ;

Vu les conclusions en date du 23 janvier 2019, au soutien de ses observations orales, par lesquelles la société CITY URBANIA SEINE et MARNE demande à la cour de :

Rejeter l’appel principal de Monsieur X comme étant mal fondé;

Recevoir, en revanche, la société CITYA URBANIA SEINE ET MARNE en son appel incident et y faisant droit,

A titre principal,

Dire et juger que le Iicenciement de Monsieur X repose sur une faute grave;

En conséquence,

Débouter Monsieur X de toutes ses demandes;

Condamner Monsieur X à payer a la société CITYA URBANIA SEINE ET MARNE unelindemnité de 2 000 € sur le fondement de l|'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire,

Dire et juger que Ie licenciement de Monsieur X repose sur une cause réelle et sérieuse;

En conséquence,

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions;

Condamner Monsieur X à payer à la société CITYA URBANIA SEINE ET MARNE une indemnité de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

A titre plus subsidiaire encore, dans l’hypothèse où le licenciement serait jugé sans cause réelle et sérieuse,

Limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 6 mois de salaire, soit la somme de 34 O85 €;

Débouter Monsieur X du surplus de sa demande;

Condamner Monsieur X aux entiers dépens. .

A l’issue des plaidoiries , l’affaire a été mises en délibéré et les parties ont été informées que l’arrêt serait rendu le 06 mars 2019 par mise à dispositions au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Considérant que la lettre de licenciement, à laquelle il est expressément fait référence, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d’autres griefs que ceux qu’elle énonce, est ainsi motivée :

« Vous nous avez fait part de votre souhait de quitter la société pour des raisons personnelles (orientation vers un projet complètement différent de l’activité d’administration de biens et en lien avec une situation qui vous tient à c’ur relative à l’accompagnement des personnes handicapées). Nousn’étions pas opposés à votre démarche à condition qu’elle ne porte pas préjudice à l’entreprise.

Or, depuis plusieurs semaines, vous avez construit à travers des mails, des messages et des annonces téléphoniques une mise en cause inadmissible de votre employeur en prétendant publiquement (annonces téléphoniques) que vous n’aviez pas les moyens de travailler.

Tout cela est parfaitement faux et extrêmement préjudiciable à l’image de l’entreprise à l’heure où elle a besoin de se mobiliser pour rassurer sa clientèle.

Au surplus, vous avez été défaillant sur plusieurs sujets essentiels pour la bonne marche de l’entreprise : Vous avez manqué à tous les accompagnements de B C, Directeur de l’agence de Serris aux différentes réunions des copropriétés situées à Meaux et dépendant de l’agence de Vaires sur Marne (rattachée dorénavant à B C).

Vous n’avez pas fait diligence à votre interlocutrice de la société Saint Pierre Assurances concernant la MRP du cabinet alors que le contrat actuel est résilié au 31 décembre 2013 ! Or, vous aviez été relancé à plusieurs reprises.

Vous vous bornez à renvoyer votre défaut de prise de décisions sur moi-même (en l’occurrence sur Monsieur D E, Président). Or,je vous rappelle que vous êtes le directeur opérationnel et de surcroît mandataire social du cabinet !

Je ne peux admettre votre acharnement à ne pas prendre vos responsabilités et à attendre que je les prenne à votre place.

Dans vos échanges, vous précisez ne pas être informé des plans d’actions, des plannings’ de ne pas disposer de moyens’ Or, c’est vous le dirigeant et c’est bien vous qui devez réfléchir sur des plans d’actions, des plannings’ C’est bien vous qui devez faire en sorte de disposer des moyens adéquates pour réussir dans vos missions !

Vous communiquez sur une soi-disant absence d’outil informatique, connexion à votre espèce informatique professionnel’ Or, contrairement à ce que vous prétendez vous disposez de tous les moyens pour travailler. C’est bien vous qui ne vous donnez pas les moyen d’utiliser les outils à votre disposition.

Vous manquez totalement à votre rôle de dirigeant et n’avez de cesse que de vous poser en victime d’une prétendue d’isolement dont vous êtes le scénariste !

S’agissant d’un licenciement pour fautes graves, vous n’effectuerez pas le préavis habituellement prévu. Vous ne bénéficierez pas d’indemnité compensatrice de préavis, ni d’indemnité de licenciement »

Considérant que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié , qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail , d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l’employeur ;

Que c’est à l’employeur qui invoque la faute grave et s’est situé sur le terrain disciplinaire et à lui seul de rapporter la preuve des faits allégués et de justifier qu’ils rendaient impossible la poursuite du contrat de travail de Monsieur Y X même pendant la durée du préavis ;

Considérant que la lettre de licenciement est un mélange de griefs tenant à l’insuffisance professionnel et au comportement du salarié ;

Considérant que les juges qui constatent que l’employeur s’est placé sur le terrain disciplinaire , doivent retenir, après avoir examiné l’ensemble des motifs mentionnés dans la lettre de licenciement , si aucun d’entre eux, dont certains relèvent de l’insuffisance professionnelle, ne présente de caractère fautif ni ne résulte d’une mauvaise volonté délibérée du salarié, que le licenciement est en conséquence sans cause réelle et sérieuse;

Considérant qu’en application de l’article L 1235-1 du code du travail, il appartient au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur et de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ;

Considérant que si l’appréciation des aptitudes professionnelles à l’emploi incombe à l’employeur, l’insuffisance professionnelle et l’insuffisance de résultat dés lors qu’elles sont soutenues doivent reposer sur des éléments concrets et des griefs suffisamment pertinents pour justifier le licenciement ;

Que pour établir les faits fautifs, la société CITY URBANIA SEINE et MARNE verse aux débats 13 courriels qui s’ils permettent d’établir que des pourparler relatifs au départ de Monsieur Y X ont eu lieu entre les parties, ne permettent pas d’établir la matérialité des faits fautifs reprochés ;

Que dés lors, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a retenu une cause réelle et sérieuse au licenciement ;

Considérant que compte tenu de l’effectif du personnel de l’entreprise( plus de 11 salariés) , de l’ancienneté et de l’âge du salarié de la salariée (né en 1971) ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, telles qu’elles résultent des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l’article L 1235-3 du code du travail une somme de 35.000 € à titre de dommages-intérêts ;

Qu’en l’absence de préjudice établi, la demande de dommages et interets pour licenciement vexatoire sera rejetée ;

Considérant qu’en vertu l’article L 1235-4 du code du travail dont les conditions sont réunies en l’espèce, le remboursement des indemnités de chômage par la société CITY URBANIA SEINE et MARNE , employeur fautif, est de droit ; que ce remboursement sera ordonné ;

Considérant que l’équité et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l’appel de Monsieur Y X recevable,

INFIRME le jugement entrepris uniquement en ce qu’il a jugé le licenciement de Monsieur Y X fondé sur une cause réelle et sérieuse et l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONFIRME pour le surplus le jugement ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

JUGE le licenciement de Monsieur Y X dépourvu de cause réelle et sérieuse

Condamne la société CITY URBANIA SEINE et MARNE à payer à Monsieur Y X la somme de 35.000 euros (trente cinq mille euros) nets à titre de dommages et intérêts ;

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter du jour où l’employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées;

ORDONNE, dans les limites de l’article 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société CITY URBANIA SEINE et MARNE à l’organisme social concerné des indemnités de chômage payées à Monsieur Y X dans la limite de deux mois

Condamne la société CITY URBANIA SEINE et MARNE à payer à Monsieur Y X la somme de 2.000 euros (deux mille euros) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société CITY URBANIA SEINE et MARNE aux entiers dépens de première instance et d’appel,

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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