Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 2, 6 novembre 2020, n° 19/03894

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 2, 6 nov. 2020, n° 19/03894
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/03894
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 27 janvier 2019, N° 2016028638
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2020

(n°113, 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 19/03894 – n° Portalis 35L7-V-B7D-B7LIJ

Décision déférée à la Cour : jugement du 28 janvier 2019 – Tribunal de commerce de PARIS – 15e chambre – RG n°2016028638

APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE

S.A.S.U. PURESSENTIEL FRANCE, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[…]

[…]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 418 425 716

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N – G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477

Assistée de Me Vincent FAUCHOUX, avocat au barreau de PARIS, toque P 221, Me Annabelle DALEX, avocat au barreau de PARIS, toque P 221

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE

S.A.S. CORPUS SANUM, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité au siège social situé

[…]

Innoparc A

[…]

Immatriculée au rcs de Toulouse sous le numéro 802 533 166

Représentée par Me Laurent MORET de la SELARL LM AVOCATS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque PC 427

Assistée de Me Valérie GASTINEL plaidant pour la SELURL VALERIE GASTINEL, avocate au barreau de PARIS, toque J 110

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 septembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Brigitte CHOKRON, Présidente de chambre

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 28 janvier 2019 par le tribunal de commerce de Paris qui a :

— débouté la société Puressentiel France de ses demandes en concurrence parasitaire,

— débouté la société Corpus Sanum de ses demandes en concurrence déloyale,

— débouté la société Corpus Sanum de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

— condamné la société Puressentiel France à payer à la société Corpus Sanum la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

— condamné la société Puressentiel France aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 145,82 euros dont 23,88 euros de TVA.

Vu l’appel de ce jugement interjeté par la société Puressentiel France suivant déclaration d’appel remise au greffe de la cour le 19 février 2019.

Vu les dernières conclusions (n°3) remises au greffe et notifiées par voie électronique le 5 mars 2020, de la société Puressentiel France (SAS), appelante, qui demande à la cour, au fondement de l’article 1240 du code civil (ancien article 1382 du code civil), d’infirmer le jugement déféré en ses dispositions lui faisant grief et, statuant à nouveau, de :

— la dire et juger recevable et fondée en ses demandes,

— dire et juger que la société Corpus Sanum a commis des actes de concurrence parasitaire en commercialisant les produits Roller massant aux 14 huiles essentielles, Spray aérien Air pur et sain

aux 47 huiles essentielles, Spray aérien Doux rêves aux 15 huiles essentielles et Soin minceur aux 7 huiles essentielles + caféine reprenant l’identité esthétique du Roller articulations et muscles aux 14 huiles essentielles, du Spray aérien assainissant aux 41 huiles essentielles, du Spray aérien aux 12 huiles essentielles et de la Crème Minceur aux 18 huiles essentielles +

caféine de Puressentiel,

En conséquence,

— faire interdiction à la société Corpus Sanum de commercialiser ou d’offrir au public les produits Roller Massant aux 14 huiles essentielles, Spray aérien Air pur et sain aux 47 huiles essentielles, Spray aérien Doux rêves aux 15 huiles essentielles et Soin minceur aux 7 huiles essentielles + caféine sous un conditionnement imitant ceux du Roller articulations et muscles aux 14 huiles essentielles, du Spray aérien assainissant aux 41 huiles essentielles, du Spray aérien aux 12 huiles essentielles de Puressentiel et de la Crème minceur aux 18 huiles essentielles + caféine, sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée à compter de la signification du 'jugement' (sic) à intervenir,

— ordonner la destruction des exemplaires de produits Roller massant aux 14 huiles essentielles, Spray aérien Air pur et sain aux 47 huiles essentielles, Spray aérien Doux rêves aux 15 huiles essentielles et Soin minceur aux 7 huiles essentielles + caféine dans leur conditionnement actuel, sous contrôle d’huissier de justice et aux frais de la société Corpus Sanum, commercialisés par la société Corpus Sanum et actuellement en stock chez ses dépositaires français, sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard dans un délai d’un mois à compter de la signification du 'jugement' (sic) à intervenir,

— condamner la société Corpus Sanum à payer à la société Puressentiel France une somme d’un million d’euros (1.000.000 euros) au titre des actes de concurrence parasitaire,

— ordonner l’insertion dans trois (3) journaux au choix de la société Puressentiel France et aux frais de la société Corpus Sanum dans la limite de 7.000 euros H.T. par insertion, du dispositif de l’arrêt à intervenir,

Pour le surplus,

— confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que la société Puressentiel France n’a pas commis d’actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Corpus Sanum du fait de la publication d’un post sur sa page Facebook le 17 août 2016,

— confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que la société Puressentiel France n’a pas agi abusivement en justice,

En conséquence,

— débouter la société Corpus Sanum de l’intégralité de ses demandes,

En tout état de cause,

— condamner la société Corpus Sanum à payer à la société Puressentiel France une somme de cinquante mille euros (50.000 euros ) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions (n°4) de la société Corpus Sanum (SAS), intimée et incidemment appelante, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 3 mai 2020, demandant à la cour, au fondement de l’article 1240 du code civil (ancien article 1382 du code civil) de :

— confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes reconventionnelles en concurrence déloyale et pour procédure abusive,

Statuant à nouveau,

— dire et juger que l’action en concurrence parasitaire engagée par la société Puressentiel France est abusive,

— dire et juger que la société Puressentiel France a commis des actes de concurrence déloyale à son préjudice en diffusant une publicité sur sa page Facebook pour un Roller mal des transports reprenant la vahiné de sa publicité télévisée pour la promotion du produit Maëllya Car également destiné à lutter contre le mal des transports,

En conséquence,

— condamner la société Puressentiel France à payer à la société Corpus Sanum la somme de 30.000 euros au titre de la procédure abusive,

— faire interdiction à la société Puressentiel France de reproduire le personnage de la vahiné figurant sur sa page Facebook et sur tous supports en rapport avec la promotion et la commercialisation du produit Roller mal des transports,

— ordonner la suppression de la page Facebook de la société Puressentiel France mise en ligne le 17 août 2016 relative à la promotion du produit Roller mal des transports associée à la représentation d’une vahiné, sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, dans un délai d’un mois à compter de la signification du 'jugement’ (sic) à intervenir,

— condamner la société Puressentiel France à payer à la société Corpus Sanum la somme de 50.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale,

En tout état de cause,

— condamner la société Puressentiel France à payer à la société Corpus Sanum, pour les frais irrépétibles d’appel, une somme complémentaire de 50.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Puressentiel France aux entiers dépens de l’instance dont distraction en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’ordonnance de clôture prononcée le 25 juin 2020.

SUR CE, LA COUR :

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, au jugement entrepris et aux écritures précédemment visées des parties .

Il suffit de rappeler que la société Puressentiel France, ci-après la société Puressentiel, créée en 2005, ayant développé une gamme de plus de 280 produits à base d’huiles essentielles et d’actifs naturels destinés au bien-être quotidien de la famille, se présente comme le laboratoire n°1 de l’aromathérapie en pharmacie et parapharmacie en France et en Europe. Elle se prévaut, en particulier, de la notoriété de trois 'produits stars’ : le Roller articulations et muscles aux 14 huiles essentielles, le Spray aérien

assainissant aux 41 huiles essentielles et le Spray aérien sommeil détente aux 12 huiles essentielles, qui connaissent un très fort succès commercial, fruit des investissements qu’elle a consacré à leur développement en collaboration avec des médecins et des chercheurs indépendants et à leur promotion.

La société Corpus Sanum, créée en 2014, fabrique des produits d’aromathérapie composés d’huiles essentielles issues de l’agriculture biologique et les commercialise en France dans les grandes surfaces sous la marque 'Maëllya'.

Ayant constaté le lancement, au printemps 2015, par la société Corpus Sanum, d’un Roller massant 'Massages’ aux 14 huiles essentielles, d’un spray aérien 'Air pur et sain’ aux 47 huiles essentielles et d’un spray aérien 'Doux rêves’ imitant, selon elle, dans leur conditionnement et emballage, les caractéristiques de ses produits Roller articulations et muscles aux 14 huiles essentielles, Spray aérien assainissant aux 41 huiles essentielles et Spray aérien sommeil détente aux 12 huiles essentielles, puis, au printemps 2016, un Soin minceur aux 7 huiles essentielles + caféine directement inspiré de sa Crème minceur aux 18 huiles essentielles + caféine, la société Puressentiel a fait procéder à des constats par huissier de justice sur le site internet 'Maëllya’ les 2 et 3 février 2016 ainsi qu’à des achats dans des magasins de grande surface à Paris et en région parisienne et, après des mises en demeure infructueuses, a introduit devant le tribunal de commerce de Paris une action fondée sur le parasitisme. La société Corpus Sanum a formé reconventionnellement des demandes en concurrence déloyale et pour procédure abusive. Les premiers juges, selon le jugement dont appel, ont débouté les parties de l’ensemble de leurs demandes.

Sur les demandes de la société Puressentiel,

Il est précisé que la société Puressentiel fonde ses demandes formées à l’encontre de la société Corpus Sanum sur le parasitisme, lequel constitue un comportement fautif au sens des dispositions de l’article 1240 du code civil, caractérisé par la circonstance selon laquelle une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, copie ou imite une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire et d’investissements humains et financiers.

En l’espèce, la société Puressentiel fait grief à la société Corpus Sanum d’avoir copié ou imité la charte graphique, très distinctive de ses produits, pour la conception de laquelle elle a consenti des investissements humains et financiers extrêmement importants et constituant pour elle une valeur économique individualisée.

Cette charte graphique a pour particularité, selon elle, de mettre en exergue, au sein d’une large pastille circulaire de couleur, un numéro correspondant au nombre d’huiles essentielles qui composent le produit, ladite pastille étant centrée sur la face avant du conditionnement du produit. Elle rappelle à cet égard avoir été le premier acteur du marché à associer, dès 2005, plusieurs huiles essentielles dans la composition de ses produits et qu’il s’agissait là d’une véritable innovation, les produits concurrents étant pour la plupart composés d’une seule huile essentielle. Elle a ainsi délibérément choisi, en tant que pionnière sur le marché de l’aromathérapie, de mettre en avant le nombre d’huiles essentielles entrant dans la composition du produit et d’en faire l’un de ses principaux atouts marketing, alors qu’elle n’y était aucunement contrainte par la réglementation sur l’information du consommateur.

Elle ajoute que sa charte graphique combine à la mise en exergue du numéro correspondant au nombre d’huiles essentielles qui composent le produit, des éléments de décor comprenant des petites feuilles en forme stylisée d’arabesques ainsi qu’un cartouche rectangulaire dans lequel est indiquée la fonction du produit.

Elle soutient que la reprise par la société Corpus Sanum, dans les emballages et les conditionnements

de ses produits, des éléments caractéristiques de sa charte graphique, est révélatrice de sa volonté de s’immiscer dans le sillage du leader du marché de l’aromathérapie pour bénéficier, sans bourse délier, de la visibilité et de l’attractivité attachée à ses produits.

Ceci posé, la cour observe que si la société Puressentiel invoque les investissements humains et financiers extrêmement importants consacrés à la conception de la charte graphique de ses produits, qui constituerait, en elle-même, une valeur économique individualisée, elle ne justifie guère des investissements propres à la charte graphique revendiquée.

Elle produit, nouvellement devant la cour, une attestation d’une société d’expertise comptable établie le 17 mai 2019, indiquant le montant des investissements consentis en 2016, 2017 et 2018 pour chacun des quatre produits qui auraient été copiés ou imités par la société Corpus Sanum. Or, cette attestation n’est aucunement pertinente à établir la captation alléguée à l’encontre de la société Corpus Sanum pour avoir commercialisé, au printemps 2015, les produits Roller massant 'Massages', Spray aérien 'Air pur et sain’ et Spray aérien 'Doux rêves’ puis, au printemps 2016, un Soin minceur, ne faisant état que d’investissements réalisés par la société Puressentiel postérieurement aux faits de parasitisme qui sont l’objet du présent litige.

En outre, il ressort de cette attestation que, contrairement à ce qu’il est prétendu par la société Puressentiel, les dépenses consacrées au 'packaging' (sic) ne sont pas 'extrêmement importantes'(de l’ordre de 15.000 euros en 2016 et 2017 puis de 25.000 euros en 2018 pour le Spray assainissant, 5.000 euros en 2016, 19.000 euros en 2017 et 7.000 euros en 2018 pour le Roller articulations et muscles, 765 euros en 2016, 3.560 euros en 2017 et 4.175 euros en 2018 pour le Spray sommeil détente, 10.000 euros en 2016, 13.000 euros en 2017 et 7.000 euros en 2018 pour la Crème minceur) comparativement aux budgets alloués au poste 'communication’ qui excèdent le million d’euros en 2016, en 2017 et en 2018 pour les produits Spray assainissant et Roller articulations et muscles.

Il apparaît cependant, à la lecture du dossier de presse réalisé par la société Puressentiel en 2015 à l’occasion du dixième anniversaire de sa création, que le Roller articulations et muscles est le n°1 du marché 'Articulations et Muscles’ hors AMM et n°2 du marché global de l’aromathérapie en pharmacie avec des ventes en constante progression de plus de 1 million d’unités vendues en 2014, le Spray aérien assainissant est le produit leader du segment de marché concerné avec 67,1% de parts de marché et 2.500.000 unités vendues en France en 2014, le Spray sommeil détente est leader du marché 'aromathérapie sommeil détente’ et a fait l’objet d’une étude menée sous la direction de l’Institut national du sommeil et de la vigilance, enfin, la Crème minceur aux 18 huiles essentielles + caféine, lancée en janvier 2015, est le fruit de quatre années d’élaboration et d’une centaine de tests en laboratoire.

Ce même document annonce que la société Puressentiel occupe une part du marché de l’aromathérapie de 24,3% en France et de plus de 30% en Europe.

Ces informations, qui ne sont pas démenties, établissent le succès commercial des produits de la société Puressentiel, fruit des investissements humains et financiers consentis par cette société pour les élaborer et les promouvoir, et justifient de la valeur économique individualisée attachée à chacun de ces produits pris en son tout, ce qui englobe le conditionnement et l’emballage qui font sa présentation extérieure par laquelle il est identifié par le public.

S’agissant de son Roller articulations et muscles aux 14 huiles essentielles, la société Puressentiel expose que l’identité esthétique de son 'packaging' (sic) se définit par la combinaison des éléments suivants, reprise selon elle à l’identique par la société Corpus Sanum dans la présentation de son produit Roller massant 'Massages’ aux 14 huiles essentielles :

— la présence d’une pastille circulaire centrée sur la face avant du 'packaging’ structurée en trois points : a) le nombre 14, mis en exergue par une grande taille de police, de couleur blanche sur un

fond orangé, b) la mention 'huiles essentielles', c) juste en dessous, la mention '100% naturelles/pures/actives’ et dont le pourtour circulaire est de couleur verte,

— la présence en deux endroits du 'packaging', de petites feuilles vertes présentant une forme stylisée d’arabesques,

— la présence de cartouches rectangulaires de couleur orange avec un jeu d’alternance de lettres majuscules et minuscules,

— une structure en partie basse du 'packaging’ caractérisée par une couleur verte discrètement évoquée, apparaissant en fondu, et comprenant des mentions : 'Pour aider à Soulager (…) Détendre (…),

— d’une manière générale, une combinaison de codes couleurs orange, vert et bleu ciel sur fond blanc.

Force est toutefois d’observer que l’emballage du produit incriminé de la société Corpus Sanum diffère d’emblée de celui du produit de la société Puressentiel à raison de la mise en évidence, au sommet de l’emballage et en gros caractères stylisés, de la marque 'Maëllya’ suivie de l’énoncé 'pour un corps sain', de la présence de quatre cartouches rectangulaires de couleur orange associés à la mention 'Roller massant’ inscrite en surplomb en caractères majuscules de couleur orange également, ce qui confère à cette couleur une large représentation et distingue ainsi cet emballage de celui, plus sobre, du produit Puressentiel où prédomine un fond blanc. Par ailleurs, le chiffre représentant le nombre d’huiles essentielles constituant le produit n’est pas particulièrement mis en exergue dans l’emballage du produit de la société Corpus Sanum où ce chiffre ressort à l’égal des autres informations telles, 'huiles essentielles', 'massages', 'apaiser', 'décontracter', figurant dans les cartouches de couleur orange. Enfin, le feuillage stylisé en forme d’arabesques de l’emballage du produit Puressentiel n’apparaît pas dans l’emballage du produit incriminé qui montre une simple feuille verte à l’intérieur de laquelle est inscrite la mention 'Bio'.

A l’intérieur de l’emballage cartonné, le flacon de conditionnement du produit incriminé, diffère également du flacon de conditionnent du produit Puressentiel. Ce dernier, très épuré, laisse prédominer la couleur blanche tandis que le premier, beaucoup plus chargé, donne à voir très majoritairement de la couleur orange.

La société Puressentiel invoque la reprise de ses codes couleurs orange, vert et bleu ciel sur fond blanc. Ces mêmes couleurs se retrouvent certes, dans l’emballage du produit de la société Corpus Sanum mais dans une combinaison différente ainsi qu’il résulte de ce qui a été précédemment observé concernant la place de la couleur orange, au surplus, le bleu qui occupe une place importante dans l’emballage du produit Puressentiel et apparaît à tous les niveaux de la face avant, est exclusivement limité, dans l’emballage du produit incriminé, à la mention 'Maëllya’ en partie supérieure de la face avant de l’emballage. Quant au flacon de conditionnement, le bleu y est présent à tous les niveaux s’agissant du produit de la société Puressentiel, il est en revanche totalement absent s’agissant du produit de la société Corpus Sanum. Au surplus, les pièces de la procédure montrent que le fond blanc se rencontre dans la plupart des emballages utilisés par les marques concurrentes où sont, pareillement, très représentées la couleur orange ainsi que la couleur verte pour des feuilles ou autres végétaux. Il en est ainsi des produits de type roller pour articulations et muscles des marques Pranarom, Laboratoire Altho ou Ladrôme.

Enfin, l’indication 'Huiles essentielles’ ou 'Aux huiles essentielles’ assortie des mentions '100% pures', '100% naturelles', '100% 'pures et naturelles', '100% bio', se rencontre dans la plupart des produits concurrents en particulier les produits des marques Pranarom, Laboratoire Altho ou Arkopharma, de même que se retrouve encore l’information sur la destination du produit ' articulations et muscles’ ainsi que sur les bienfaits du produit : 'soulager', 'détendre', 'décontractant', 'effet apaisant', 'effet chauffant'.

Il suit de ces éléments d’observation que les emballages comparés sont différents et le consommateur moyen apte à les distinguer aisément. Ainsi, l’intention de la société Corpus Sanum de s’immiscer dans le sillage de la société Puressentiel en copiant ou en imitant son produit ou encore en s’inspirant de ce produit, pour tirer profit indûment et sans bourse délier de son succès commercial, n’est pas établie.

S’agissant de son Spray assainissant aux 41 huiles essentielles, l’ identité esthétique de son 'packaging' (sic) réside, selon la société Puressentiel, dans la combinaison des éléments suivants, repris, selon elle, dans leur majeure partie, par la société Corpus Sanum pour son produit Sray air pur et sain et 47 huiles essentielles :

— la présence d’une pastille circulaire centrée sur la face avant du 'packaging’ structurée en trois points : a) le nombre 41, mis en exergue par une grande taille de police, de couleur blanche sur un fond orangé, b) la mention 'huiles essentielles', c) juste en dessous, la mention '100% naturelles/pures/actives’ et dont le pourtour circulaire est de couleur verte,

— la présence en deux endroits du 'packaging', de petites feuilles vertes présentant une forme stylisée d’arabesques,

— la présence de cartouches rectangulaires de couleur orange avec un jeu d’alternance de lettres majuscules et minuscules,

— une structure en partie basse du 'packaging’ caractérisée par une couleur verte discrètement évoquée, apparaissant en fondu, et comprenant des mentions : 'chasser les acariens, germes, virus, champignons microscopiques, mauvaises odeurs… limiter les sources d’allergies, respirer un air plus pur',

— d’une manière générale, une combinaison de codes couleurs orange, vert et bleu ciel sur fond blanc.

Force est cependant de constater que les emballages comparés se présentent très différemment, celui du produit incriminé faisant largement prédominer le bleu qui est la couleur de trois cartouches rectangulaires siégeant sur la majeure partie de l’espace et en particulier du cartouche renfermant le chiffre 47, qui est également la couleur de la marque 'Maëllya’ et des mentions 'Spray aérien pour pièces à vivre’ figurant en surplomb en gros caractères, tandis que l’emballage du produit de la société Puressentiel ne présente que deux minces cartouches, l’un orange l’autre vert, très discrètement répartis de part et d’autre de la face avant et laisse prédominer un fond blanc.

Par ailleurs, la liste des bienfaits du produit en partie inférieure de l’emballage, invoquée par la société Puressentiel, ne se retrouve pas dans l’emballage du produit de la société Corpus Sanum qui indique seulement 'Purifie l’air ambiant'.

En outre, il ressort des pièces de la procédure que l’offre concurrente met fréquemment en exergue, en partie centrale de l’emballage, le chiffre représentant le nombre d’huiles essentielles composant le produit. Il en est ainsi des sprays assainissants des marques Pharmavie aux 46 huiles essentielles, Le comptoir de l’apothicaire aux 46 huiles essentielles, Mességué aux 45 huiles essentielles, Aera Nature aux 43 huiles essentielles naturelles, Florame aux 28 huiles essentielles, Naturactive aux 25 huiles essentielles. Ces mêmes produits, à l’instar de celui de la société Puressentiel, portent des mentions de type 'bactéries', 'champignons', 'mauvaises odeurs', 'virus', 'moisissures’ qui ne se retrouvent pas sur l’emballage du spray air pur et sain de la société Corpus Sanum.

Il suit de ces observations que l’imitation reprochée par la société Puressentiel à la société Corpus Sanum n’est pas établie.

Concernant son Spray sommeil détente aux 12 huiles essentielles, la société Puressentiel décrit sa

présentation extérieure comme suit :

— la présence d’une pastille circulaire centrée sur la face avant du 'packaging’ structurée en trois points : a) le nombre 12, mis en exergue par une grande taille de police, de couleur blanche sur un fond orangé, b) la mention 'huiles essentielles', c) juste en dessous, la mention '100% naturelles/pures/actives’ et dont le pourtour circulaire est de couleur verte,

— la présence en deux endroits du 'packaging', de petites feuilles vertes présentant une forme stylisée d’arabesques,

— la présence de cartouches rectangulaires de couleur orange avec un jeu d’alternance de lettres majuscules et minuscules,

— une structure en partie basse du 'packaging’ caractérisée par une couleur verte discrètement évoquée, apparaissant en fondu, et comprenant des mentions : 'Pour aider à : procurer détente, relaxation et repos, calmer les tensions, favoriser le sommeil, passer des nuits calmes, sereines et réparatrices',

— d’une manière générale, une combinaison de codes couleurs orange, vert et bleu ciel sur fond blanc.

La cour observe que l’ensemble des éléments de cette combinaison ne se retrouvent pas dans l’emballage du produit Spray aérien 'Doux rêves’ de la société Corpus Sanum où le bleu nuit est très largement dominant, cette couleur étant celle des cinq cartouches occupant la majeure partie de la face avant, et en particulier du cartouche au sein duquel figure le chiffre 15 outre celle des mentions inscrites en surplomb en caractères gras 'Maëllya’ et 'Spray aérien pour pièces à vivre', ce qui confère aux emballages en présence des physionomies radicalement distinctes.

S’agissant enfin, de sa Crème minceur aux 18 huiles essentielles + caféine, la société Puressentiel, qui ne prétend pas s’approprier l’association des huiles essentielles et de la caféine pour un produit amincissant, association dont elle n’est pas l’initiatrice, la marque Linéance ayant avant elle, en mars 2014, lancé un produit de même type, n’est pas davantage fondée à soutenir qu’elle seule utilise la couleur rose pour le conditionnement d’un tel produit. Les pièces versées aux débats, dont la pertinence n’est pas contestée, montrent en effet l’utilisation du rose pour l’emballage des produits Huile minceur anti-cellulite de Lipo-Science, Huile sublimante anti-cellulite du Petit Marseillais, Minceur globale de Liérac, Soin remodelant ventre et taille de Clarins ou Dior Svelte de Dior.

En outre, le rose du produit de la société Puressentiel, très intense et virant au grenat, est très différent de celui, beaucoup plus clair, du produit incriminé qui présente par ailleurs, un fond blanc et une note de vert à l’inverse du produit de la société Puressentiel de même couleur quasi uniformément. Enfin, le produit incriminé de la société Corpus Sanum donne à voir un dessin évoquant les contours d’une silhouette féminine tandis que celui de la société Puressentiel présente des feuillages en forme d’arabesques et produit une impression générale de sobriété qui ne se retrouve pas dans le produit incriminé dont la présentation est plus chargée tant en éléments décoratifs qu’en mentions d’information sur les résultats promis par le produit.

Ainsi, l’imitation invoquée par la société Puressentiel n’est pas davantage démontrée en ce qui concerne sa Crème minceur.

La cour relève au surplus que la société Corpus Sanum justifie d’investissements importants consacrés au développement et à la promotion de ses produits à hauteur de 452.140 euros entre le 1er janvier 2015 et le 31 août 2016 ainsi qu’au marketing à hauteur de 622.009 euros en 2016, qu’elle a été récompensée en juillet 2015 par le grand prix de l’innovation Auchan /FEEF et en mai 2016 par le grand prix de l’innovation Carrefour /FEEF, qu’elle pratique des prix comparables sinon supérieurs à ceux de la société Puressentiel, ainsi son Spray Air pur et sain est vendu au prix de 14,90 euros en

supermarché quand celui de la société 10,35 euros en parapharmacie. Il n’est pas établi, en l’état de ces éléments, qu’elle aurait fait une économie d’investissements humains et financiers lui procurant l’avantage concurrentiel d’offrir ses produits à meilleur prix.

Il découle en définitive des développements qui précèdent que les critères définissant le parasitisme ne sont pas réunis en l’espèce, la preuve n’étant pas rapportée par la société Puressentiel d’un comportement fautif de la société Corpus Sanum consistant à copier ou imiter les éléments caractéristiques de la charte graphique des emballages de ses produits dans l’intention de se s’immiscer dans son sillage pour tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de sa notoriété acquise ou de ses investissements consentis.

Les demandes formées de ce chef par la société Puressentiel sont en conséquence, et par confirmation du jugement entrepris, rejetées.

Sur les demandes de la société Corpus Sanum,

La société Corpus Sanum, exposant avoir fait diffuser entre le 12 et 31 juillet 2016 sur la chaîne de télévision TF1, pour son produit 'Maëllya Car’ destiné à prévenir le mal des transports ( 1.300 diffusions au total), un spot publicitaire faisant figurer une vahiné postée sur la tableau de bord d’un véhicule automobile circulant sur une route, reproche à la société Puressentiel d’avoir publié le 17 août 2016, sur sa page Facebook, une communication publicitaire pour son roller contre le mal des transports faisant pareillement figurer une vahiné postée sur le tableau de bord d’un véhicule automobile, ces faits caractérisant selon elle une concurrence déloyale.

La cour observe cependant que la société Corpus Sanum ne justifie pas de la campagne publicitaire télévisée invoquée ni, en particulier, de sa durée et de l’étendue de sa diffusion, le nombre de 1.300 spots diffusés n’étant aucunement établi. La seule pièce justificative produite aux débats (pièce n°29), à savoir un extrait de courriel faisant état d’objectifs de performance dépassés, ne permet pas d’identifier son expéditeur, ni son destinataire, ni n’évoque le produit Maëllya contre le mal des transports, et se trouve en conséquence dépourvue de toute force probante pour établir la matérialité des faits invoqués par la société Corpus Sanum au soutien de son grief à savoir l’imitation par la société Puressentiel de sa campagne publicitaire et la création d’un risque de confusion.

En conséquence et en l’état des éléments soumis à son appréciation, il n’est aucunement permis de retenir à la charge de la société Puressentiel une faute de concurrence déloyale pour avoir créé un risque de confusion en utilisant une figurine de vahiné dans une communication publicitaire pour son roller contre le mal des transports.

Le jugement déféré est dès lors confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de la société Corpus Sanum formées au fondement de concurrence déloyale.

La société Corpus Sanum forme en outre une demande de dommages-intérêts pour procédure abusive. Or, le droit d’ester en justice qui comprend le droit de former appel, ne dégénère en abus ouvrant droit à dommages-intérêts que s’il est exercé de mauvaise foi, par intention de nuire ou par légèreté blâmable équipollente au dol, toutes circonstances qui ne sont pas démontrées à l’encontre de la société Puressentiel qui a pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits.

La demande formée de ce chef est en conséquence, par confirmation du jugement entrepris, rejetée.

Sur les autres demandes,

Le sens de l’arrêt conduit à confirmer également les dispositions du jugement statuant sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance.

L’équité commande de condamner la société Puressentiel à verser à la société Corpus Sanum une indemnité complémentaire de 25.000 euros au titre des frais irrépétibles et de la débouter de sa demande formée à ce même titre.

Partie perdante, la société Puressentiel supportera les dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Ajoutant,

Condamne la société Puressentiel France à verser à la société Corpus Sanum une indemnité de 25.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

Condamne la société Puressentiel France aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires aux motifs de l’arrêt.

La Greffière La Présidente

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 2, 6 novembre 2020, n° 19/03894