Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 1er décembre 2021, n° 20/00194

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Chronologie de l’affaire

Commentaires12

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Charles-édouard Brault · Gazette du Palais · 14 novembre 2023

Gide Real Estate · 28 février 2023

L'article L.145-46-1 du Code de commerce, introduit par la loi dite « Pinel », prévoit un droit de préemption au profit du preneur à bail commercial de locaux « à usage commercial ou artisanal » lorsque leur propriétaire envisage de les vendre. Retour sur les dernières actualités législatives et jurisprudentielles concernant ce texte. Champ d'application Cas des « bureaux commerciaux » Dans une affaire concernant la vente de locaux abritant une « activité d'administra­tion de biens pour le compte d'autrui », la Cour d'appel de Rennes a retenu que cette activité est « commerciale par …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 1er déc. 2021, n° 20/00194
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/00194
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Meaux, 6 novembre 2019, N° 17/01957
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 1er DÉCEMBRE 2021

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00194 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBGMJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX – RG n° 17/01957

APPELANTS

Madame Z X

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentée par Me B LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480, avocat postulant

Assistée de Me Jean-Marie JOB de la SELARL JTBB, avocat au barreau de PARIS, toque : P0254, avocat plaidant substitué par Me Angélique DE LAMBERT de la SELARL JTBB, avocat au barreau de PARIS, toque : P0254, avocat plaidant

Monsieur B X

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Me B LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480, avocat postulant

Assisté de Me Jean-Marie JOB de la SELARL JTBB, avocat au barreau de PARIS, toque : P0254, avocat plaidant substitué par Me Angélique DE LAMBERT de la SELARL JTBB, avocat au barreau de PARIS, toque : P0254, avocat plaidant

INTIMEES

SCI SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DE L'[…]

immatriculée au RCS de CANNES sous le numéro 751 201 682

[…]

[…]

Représentée par Me François MEURIN de la SCP TOURAUT ET ASSOCIES, avocat au barreau de MEAUX substitué par Me Bertrand DURIEUX de la SCP TOURAUT ET ASSOCIES, avocat au barreau de MEAUX

SAS FONCIA GIEP, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 317 064 285

[…]

[…]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant

Assistée de Me Christophe Y de l’ASSOCIATION NICOLAS & Y ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0119, avocat plaidant substitué par

Me Lydie KOCHMAN de l’ASSOCIATION NICOLAS & Y ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : B0119, avocat plaidant

SCPI C D prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 337 646 764

[…]

[…]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, avocat postulant

Assistée de Me Jean-Hugues CARBONNIER de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298, avocat plaidant substitué par Me Louise BUTEL de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 05 Octobre 2021, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Gilles BALA', président de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Elisabeth GOURY, conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Sandrine GIL, conseillère pour le président empêché et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSE DU LITIGE

Madame Z X exploite une officine de pharmacie à 15 avenue Jacques Cartier à Bussy-Saint-Georges ; Monsieur B X exerce, avec elle, en qualité de conjoint collaborateur.

Aux termes d’une promesse de vente synallagmatique sous seing privé du 6 juin 2016, ils ont fait l’acquisition, auprès de la société civile immobilière de l’ensemble Parisien (SCIEP) d’un local commercial et de deux places de parking également situés à Bussy-Saint-Georges pour un prix de 1.000.000 euros, exploités par la société Giep devenue Foncia Giep au titre d’un bail commercial.

La promesse contenait trois conditions suspensives et devait être réitérée par acte authentique au plus tard le 8 octobre 2016.

La société Foncia Giep a notifié son intention d’user d’un droit de préemption aux termes de l’article L. 145-46-1 du code de commerce.

La vente à son profit s’est réalisée le 29 septembre 2016. Le 21 octobre 2016, la société Foncia Giep a revendu le local commercial et les deux places de parking à la société civile de C immobilier C D.

La réitération de la vente par acte authentique auprès de M. et Mme X ne s’est donc pas réalisée.

Par acte d’huissier du 9 mai 2017, Mme Z X et M. B X ont fait assigner la société Sciep, la société Giep Foncia et la société C D devant le tribunal de grande instance de Meaux aux fins d’obtenir la nullité des ventes successives, la régularisation de la vente du local commercial et des parkings à leur profit outre l’indemnisation de leur préjudice.

Par jugement du 7 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Meaux a :

Rejeté les prétentions de Mme Z X et M. B X au titre de la nullité des ventes des 22 septembre et 21 octobre 2016, de la radiation des inscriptions d’hypothèque, d’injonction de régularisation d’une vente à leur profit, de condamnation à leur payer la somme de 15 000 euros par mois à compter du 1 octobre 2016 ainsi qu’au titre des frais irrépétibles;

Ordonné la mainlevée de la publication des assignations du 9 mai 2017 sous les numéros 2017 D N° 27991 et 27993 (enregistrées et publiées le 5/12/2017 au SPFE de Meaux, volume 2017 P n° 11566 et 11567) ;

Rejeté les prétentions de la société C D au titre de la procédure abusive ;

Condamné Mme Z X et M. B X à payer à la société civile immobilière de l’ensemble parisien la somme de 2 000,00 € (DEUX MILLE EUROS) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejeté les prétentions des sociétés Foncia Giep et C D au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné aux dépens dont les frais de mainlevée de la publication des assignations du 9 mai 2017, dont distraction au profit de Maître Y pour ceux dont il aurait fait l’avance sans recevoir provision suffisante.

M. et Mme X ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 17 décembre 2019.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 5 août 2020, M. et Mme X demandent à la Cour de :

Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Meaux le 7 novembre 2019 (RG n°17/01957) dans toutes ses dispositions attaquées, tel que cela ressort des termes de la déclaration d’appel en date du 17 décembre 2019 ;

Et statuant de nouveau,

Prononcer la nullité des ventes : Portant sur l’Ensemble Immobilier sis […] à Bussy-Saint-Georges (77600) figurant au cadastre Section ZB, […] pour une surface de 26 A 05 CA et n°244 pour une surface de 17 A 62 CA et constitué par le lot de copropriété n°187 au rez-de-chaussée dans le bâtiment A (local commercial), lot de copropriété n°194 au 1 er sous-sol (parking) et lot de copropriété n°246 au 2e sous-sol (parking),

Intervenues les :

—  22 septembre 2016 (acte déposé à la Publicité Foncière le 30 novembre 2016 et publié sous la référence n°2016P13155) entre la société Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien (vendeur) et la société Foncia Giep (acquéreur) au prix de 1.000.000 €,

—  21 octobre 2016 (acte déposé à la Publicité Foncière le 30 novembre 2016 et publié sous la référence n°2016D25913) entre la société Foncia Giep (vendeur) et la société C D (acquéreur) au prix de 1.030.000 € ;

Ordonner la radiation de toutes inscriptions d’hypothèque éventuellement prises sur ledit Ensemble Immobilier du fait des sociétés SCIEP, Foncia Giep et C D ;

Dire et juger que la vente de l’Ensemble Immobilier est parfaite et définitive entre la société Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien (vendeur) et Monsieur B X et Madame Z X (acquéreurs) à compter du 1er octobre 2016 ;

Donner injonction à la société Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien de régulariser la vente avec Monsieur B X et Madame Z X par acte authentique dressé par Maître E F dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir

et,

Portant sur l’Ensemble Immobilier sis […] à Bussy-Saint-Georges (77600) figurant au cadastre Section ZB, […] pour une surface de 26 a 05 ca et n°244 pour une surface de 17 a 62 ca et constitué par le lot de copropriété n°187 au rez-de-chaussée dans le bâtiment A (local commercial), lot de copropriété n°194 au 1er sous-sol (parking) et lot de copropriété n°246 au 2e sous-sol (parking),

Et ce, pour le prix de 1.000.000 € hors frais et droits ;

Dire et juger qu’à défaut pour la société Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien de régulariser la vente dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, celui-ci vaudra acte de vente, et ce pour le prix de 1.000.000 € hors frais et droits ;

Ordonner la publication de l’arrêt à intervenir au bureau des hypothèques compétent,

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Meaux le 7 novembre 2019 (RG n°17/01957) en ce qu’il a débouté les sociétés Foncia Giep et C D de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Meaux le 7 novembre 2019 (RG n°17/01957) en ce qu’il a débouté la société C D de sa demande formée au titre d’une procédure prétendument abusive,

Débouter les sociétés Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien, Foncia Giep et C D de toutes leurs demandes,

Condamner in solidum la société Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien, la société Foncia Giep et la société C D à verser in solidum aux Epoux X la somme de 15.000 € par mois à compter du 1er octobre 2016 jusqu’à ce que la vente de l’Ensemble Immobilier soit régularisée à leur profit, en réparation du préjudice que leur

ont causé l’inexécution fautive du compromis de vente du 6 juin 2016 et le comportement fautif des défendeurs ;

Condamner in solidum la société Société Civile Immobilière de l’ensemble Parisien, la société Foncia Giep et la société C D à verser aux époux X la somme de 15.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, dont distraction pour ceux d’appel au profit de la SELARL BDL Avocats en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 26 mai 2020, la Société Civile Immobilière de l’Ensemble Parisien demande à la Cour de :

Confirmer en toutes ces dispositions le jugement du Tribunal de Grande Instance de Meaux du 07 novembre 2019

Condamner Monsieur et Madame X à payer à la société SCIEP la somme de 15 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les Condamner aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 29 juin 2020, la société Foncia Giep demande à la Cour de :

1°) Sur l’appel principal

Dire et juger que les époux X ne critiquant pas le jugement en ce qu’il a estimé que le bail consenti à Foncia Giep étant soumis aux articles L 145-1 et suivants du code de commerce, la société Foncia Giep bénéficiait du droit de préemption prévu à l’article L 145-46-1 du même code, ce point est définitivement acquis,

Juger qu’en toute hypothèse, Foncia Giep bénéficiait, en sa qualité de locataire commerçant, du droit de préemption instauré par l’article L 145-46-1 du Code de commerce,

Juger que Foncia Giep était en droit de revendre les locaux dont elle avait fait l’acquisition sans être tenue par aucun délai, et à qui bon lui semblait, aucune fraude n’ayant été commise,

En conséquence,

Dire et juger M. et Mme X mal fondés en toutes leurs demandes et les en débouter,

Confirmer le jugement rendu le 7 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Meaux en ce qu’il a :

— Rejeté les prétentions de M. et Mme X au titre de la nullité des ventes des 22 septembre 2016 et 21 octobre 2016, de radiation des inscriptions d’hypothèques, d’injonction de régularisation d’une vente à leur profit, de condamnation à leur payer la somme de 15.000 € par mois à compter du 1e octobre 2016 ainsi qu’au titre des frais irrépétibles,

— Ordonné la mainlevée de la publication des assignations du 9 mai 2017 sous les numéros 2017 DN N° 27991 et 27993 (enregistrées et publiées le 5 décembre 2017 au SPFE de Meaux, volume 2017 P n° 11566 et 11567),

— Condamné les époux X aux dépens.

2°) Sur l’appel incident

Dire et juger Foncia Giep recevable et bien fondée en son appel incident,

En conséquence,

Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a rejeté la demande de Foncia Giep au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau :

Condamner in solidum M. et Mme X au paiement de la somme de 10.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance,

3°) En toute hypothèse

Condamner in solidum les époux X au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner in solidum les époux X au paiement de la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Frédérique Etevenard, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 12 mai 2020, la société C D demande à la Cour de :

Recevoir la SCPI C D en ses demandes, fins et conclusions et la dire recevable et bien fondée ;

Dire et juger Monsieur et Madame X mal fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter ;

1. Sur la confirmation du jugement entrepris :

Confirmer le jugement prononcé par le Tribunal de grande instance de Meaux en date du 7 novembre 2019 en ce qu’il a :

— Rejeté les prétentions des époux X au titre de la nullité des ventes des 22 septembre et 21 octobre 2016, de la radiation des inscriptions d’hypothèque, d’injonction de régularisation d’une vente à leur profit, de condamnation à leur payer la somme de 15.000 euros par mois à compter du 1er octobre 2016, ainsi qu’au titre des frais irrépétibles ;

— Ordonné la mainlevée de la publication des assignations du 9 mai 2017 sous les numéros 2017 D N° 27991 et 27993 (enregistrées et publiées le 5/12/2017 au SPFE de Meaux, volume 2017 P n° 11566 et 11567) ;

— Condamné aux dépens les époux X ;

2. Sur l’infirmation du jugement entrepris :

Infirmer le jugement prononcé par le Tribunal de grande instance de Meaux en date du 7 novembre 2019 en ce qu’il a :

— Rejeté la demande de la SCPI C D de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

— Rejeté les demandes de la SCPI C D au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Et, statuant à nouveau :

Condamner solidairement Monsieur et Madame X à verser à la SCPI C D la somme de 7.000 euros pour procédure abusive ;

En tout état de cause :

Condamner in solidum Monsieur et Madame X à verser à la SCPI C D la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner in solidum Monsieur et Madame X aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP Baechlin sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 24 juin 2021.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions précitées des parties pour ce qui concerne l’exposé détaillé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le droit de préemption :

Les parties s’opposent sur l’applicabilité de l’article L. 145-46-1 du code de commerce, Monsieur et Madame X faisant valoir principalement que cet article ne s’applique que lors de la vente de locaux à usage commercial ou artisanal ; que les locaux à usage de bureaux ont été expressément exclus du champ d’application de ce texte par le législateur ainsi qu’il résulte du rejet de l’amendement 148 ; que les locaux loués à la société Foncia Giep étant à usage exclusif de bureaux, elle ne bénéficiait pas d’un droit de préemption ; qu’en outre le droit de préemption instauré au profit du locataire constituant une atteinte au droit de propriété du bailleur les intimées ne peuvent se livrer à une interprétation extensive de l’article L. 145-46-1 contraire à l’esprit même du texte.

La Cour rappelle que l’article L. 145-46-1 du code de commerce instaure un droit de préemption au profit du locataire 'lorsque le propriétaire d’un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci', sauf exceptions tenant à l’objet de la vente ou l’identité de l’acquéreur.

Les locaux à usage de bureaux ne sont ni inclus expressément ni exclus expressément du champ d’application de ce texte et il est inopérant pour Monsieur et Madame X de se prévaloir du rejet de l’amendement n° 148 visant à étendre ces dispositions aux locaux à usage de bureaux dès lors que cet amendement ne visait que les bureaux de professionnels non commerçants pratiquant une activité libérale et que tel n’est pas le cas en l’espèce, le litige portant sur les locaux donnés à bail à la société Foncia Giep, société inscrite au registre du commerce et des sociétés, locataire en vertu d’un bail conclu le 27 mars 2013 et soumis aux dispositions des articles L. 145-1 et suivants du code de commerce.

Selon la clause de destination du bail, les locaux sont destinés à l’usage exclusif de bureaux, pour l’activité d’administrateur de biens, syndic de copropriété, location, transaction. Cette activité est une activité commerciale par application des dispositions de l’article L. 110-1 du code commerce. Il s’ensuit que les locaux loués à la la société Foncia Giep sont affectés à un usage commercial ; que par conséquent, c’est à juste titre que le premier juge a retenu qu’elle bénéficiait d’un droit de préemption lors de la vente des locaux loués par la société SCIEP.

Sur la fraude alléguée :

Monsieur et Madame X se prévalent de l’adage 'la fraude corrompt tout', invoquant un concert frauduleux entre la société Foncia Giep et la SCPI C D consistant en un détournement de la loi afin de les spolier dans leurs droits.

La cour rappelle que le principe selon lequel 'la fraude corrompt tout’ suppose établie la volonté de nuire à autrui et d’éluder les dispositions de la loi, la preuve de l’existence de

la fraude incombant à celui qui s’en prévaut.

Ainsi qu’il a été retenu ci-avant, la société Foncia Giep bénéficiait d’un droit de préemption lors de la vente par la société SCIEP des locaux donnés à bail. La cour renvoie à la motivation du jugement entrepris qui après avoir analysé les différentes opérations intervenues a retenu qu’aucune fraude n’est caractérisée, étant souligné qu’aucun élément ne permet de démontrer que la société SCIEP était informée que la société Foncia Giep envisageait une revente après exercice de son droit de préemption ; qu’aucun texte ne restreint le droit pour l’acquéreur d’un bien par l’exercice de son droit de préemption d’en disposer librement, même dans un délai rapproché ; que cette revente à une société juridiquement distincte procède d’un choix de gestion et non d’une quelconque intention de nuire, la société Foncia Giep ayant fait le choix de préserver ses intérêts en acquérant les locaux en cause pour les revendre à une société de gestion.

Au vu des développements qui précèdent, le jugement entrepris déboutant Monsieur et Madame

X de leurs demandes et ordonnant la mainlevée de la publication des assignations du 9 mai 2017 sera confirmé.

Sur les demandes de dommages-intérêts :

La SCPI C D qui sollicite l’infirmation du chef du jugement entrepris l’ayant déboutée de la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée à l’encontre de Monsieur et Madame X, ne caractérise pas l’existence d’une faute de ceux-ci ayant dégénéré en abus du droit d’agir, le premier juge ayant à juste titre relevé qu’ils avaient pu se méprendre sur la teneur et l’étendue de leur droit. Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

La demande de la société Foncia Giep tendant à l’allocation de dommages-intérêts ne peut pas davantage prospérer dès lors que l’exercice de l’action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à dommages-intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol et qu’elle ne rapporte pas la preuve qui lui incombe.

Sur les demandes accessoires :

Monsieur et Madame X qui succombent en leur appel en supporteront les dépens, le jugement entrepris étant confirmé sur la charge des dépens et l’indemnité de procédure.

La distraction des dépens d’appel sera autorisée conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il est de plus équitable de contraindre Monsieur et Madame X en cause d’appel à participer aux frais irrépétibles exposés par les intimés à hauteur de 3.000 euros chacun.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la société Foncia Giep de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne Monsieur et Madame X à payer à la société SCIEP la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur et Madame X à payer à la société Foncia Giep la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur et Madame X à payer à la SCPI C D la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur et Madame X aux dépens dont distraction au bénéfice des postulants qui en ont fait la demande en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA CONSEILLÈRE POUR

LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ

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