Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 8, 5 mars 2021, n° 20/09291

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 8, 5 mars 2021, n° 20/09291
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/09291
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Paris, 30 juin 2020, N° 19/59354
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRET DU 05 MARS 2021

(n° 66 , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/09291 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCBDJ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 01 Juillet 2020 -Président du TGI de Paris – RG n° 19/59354

APPELANTE

S.A.S. BODEJ agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège,

[…]

[…]

représentée par Me Marine GORRE-DUTEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1882

susbtituant Me David HONORAT, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

S.C.I. DU PARC prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

[…]

[…]

représentée par Me Dikpeu-Eric X de l’ASSOCIATION X & KOUDOYOR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1635

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L’ENSEMBLE IMMOBILIER SITUÉ 4, […] représenté par son syndic, la société JOBARD IMMOBILIER PATRIMOINE (J.I.P.), prise en la personne de ses représentant légaux domicilié en cette qualité audit siège

[…],

[…]

représentée par Me Marc-Robert HOFFMANN NABOT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1364

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 janvier 2021, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Président et Rachel LE COTTY, Conseiller, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Florence LAGEMI, Président,

Rachel LE COTTY, Conseiller,

Laure ALDEBERT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Florence LAGEMI Président et Marie GOIN, Greffier présent lors de la mise à disposition.

Le 18 juillet 2019, la SCI du Parc a donné à bail commercial à la société Bodej des locaux situés […], pour y exercer une activité de restauration rapide.

Celle-ci ayant entrepris des travaux dans les locaux loués, le syndicat des copropriétaires du […], représenté par son syndic, la société Jobard Immobilier Patrimoine, l’a assignée, ainsi que la SCI du Parc, par actes des 18 et 22 octobre 2019, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de désignation d’un expert.

Par ordonnance du 1er juillet 2020, le juge des référés a :

• ordonné une mesure d’expertise ;

• dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de suspension des travaux ;

• dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de suspension et de séquestration des loyers ;

• rejeté le surplus des demandes ;

• condamné le demandeur aux dépens.

Par déclaration du 11 juillet 2020, la société Bodej a relevé appel de cette décision, limitant expressément son appel au chef de dispositif ayant dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de suspension et de séquestration des loyers.

Dans ses dernières conclusions du 24 septembre 2020, elle demande à la cour de :

• infirmer l’ordonnance du 1er juillet 2020 ;

Statuant à nouveau,

ordonner la suspension du paiement des loyers à la SCI du Parc, ou à défaut, la consignation desdits loyers entre les mains de M. le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris,

• jusqu’à l’obtention de l’autorisation, en assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble sis […], aux fins d’installer un escalier réglementaire permettant l’exploitation du local appartenant à la SCI du Parc et la pose de la devanture et de l’enseigne ; condamner in solidum le syndicat des copropriétaires du […] et la SCI du Parc, au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Dans ses dernières conclusions du 29 octobre 2020, la SCI du Parc demande à la cour de :

• débouter la société Bodej de l’intégralité de ses demandes ;

• en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;

• en tout état de cause, condamner la société Bodej à lui verser la somme de 6.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

• condamner la société Bodej aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître X, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 10 novembre 2020, le syndicat des copropriétaires du […], représenté par son syndic, demande à la cour de :

• débouter la société Bodej de l’ensemble de ses demandes ;

En conséquence,

• confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du 1er juillet 2020 ;

• condamner la société Bodej à lui payer la somme de 6.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

• condamner la société Bodej à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

• condamner la société Bodej aux entiers dépens d’appel.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 janvier 2021.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens, à la décision déférée et aux écritures des parties, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

Sur la demande de consignation ou de suspension du paiement des loyers

La cour rappelle à titre liminaire que l’appel est expressément limité au chef de dispositif ayant dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de suspension et de consignation des loyers, les intimés n’ayant pas formé d’appel incident.

La société Bodej fonde sa demande de suspension ou de consignation des loyers sur les articles 809 (sic, 835) et 834 du code de procédure civile.

Elle soutient que l’absence de convocation d’une assemblée générale pour statuer sur la demande de travaux relève d’une faute de la SCI du Parc et qu’il ne peut lui être reproché la réalisation des travaux sans l’accord de la copropriété pour s’opposer à sa demande de suspension et de séquestration des loyers, dès lors que celle-ci est la conséquence de la carence de la SCI du Parc dans la convocation d’une assemblée générale.

Elle ajoute que, contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, il n’existe aucune contestation

sérieuse de nature à faire obstacle à la suspension des loyers ou à leur consignation dès lors que ni le bailleur ni le syndicat des copropriétaires ne s’y sont opposés en première instance.

Selon l’article 834 du code de procédure civile (anciennement article 808) dans sa rédaction applicable au 1er janvier 2020, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Selon l’article 835 du code de procédure civile (anciennement article 809), dans sa rédaction applicable au 1er janvier 2020, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Les dispositions du second de ces textes, visées par l’appelante, ne sont pas susceptibles de fonder sa demande de suspension du paiement des loyers ou de consignation dès lors qu’elle ne justifie d’aucun dommage imminent ou trouble manifestement illicite.

Le premier de ces textes peut en revanche fonder une mesure de suspension des loyers en cas d’urgence et si le différend entre les parties le justifie (Com., 15 février 1983, pourvoi n°78-687, Bull. n° 108).

En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats, et notamment du procès-verbal d’huissier du 29 août 2019 et du courrier de l’architecte de l’immeuble du 9 janvier 2020, que la société Bodej a procédé, au cours de l’été 2019, à des travaux sur des parties communes de l’immeuble (agrandissement de la trémie actuelle afin de relier par un escalier le local situé au rez-de-chaussée au sous-sol, traversant ainsi le plancher, partie commune) sans l’accord préalable de l’assemblée générale des copropriétaires, alors que l’article 25, b) de la loi du 10 juillet 1965 soumet à l’autorisation des copropriétaires tous les travaux portant sur des parties communes.

Elle tente, depuis lors, de régulariser la situation en sollicitant l’accord de la copropriété (courrier du 5 novembre 2019 demandant une assemblée générale pour 'recueillir l’autorisation pour l’exécution des travaux touchant aux parties communes, c’est-à-dire : modification de la trémie d’escalier, modification de façade pour l’exploitation sous l’enseigne Natumi' ; courriers des 14 et 17 février 2020 demandant une nouvelle assemblée générale). Lors de l’assemblée générale du 28 janvier 2020, la décision a été différée dans l’attente de l’avis de l’architecte de l’immeuble et, depuis lors, aucune assemblée générale ne semble avoir été convoquée.

L’expertise ordonnée par le premier juge aura pour objet de déterminer les désordres éventuellement provoqués par ces travaux et les responsabilités encourues.

Cependant, dans les relations de la société Bodej avec son bailleur, il résulte du contrat de bail commercial qu’elle a pris les locaux à bail en connaissance de cause, sans aucune obligation pour le bailleur de réaliser des travaux ou de l’autoriser à les effectuer.

L’article 3 du bail stipule ainsi que 'le preneur atteste qu’il est un professionnel de l’activité autorisée et qu’il est en mesure de l’exercer dans les locaux loués'.

L’article 6 précise que 'le preneur prendra les locaux objet du présent bail dans l’état où ils se trouvent au moment de l’entrée en jouissance sans pouvoir exiger du bailleur aucune réduction de loyer, ni aménagement, réparation, actuelle ou future, ou remise en état de quelque nature que ce soit et mise en conformité'.

S’agissant des travaux, l’article 7, 12°, du bail prévoit que 'tous travaux, à l’exception de ceux concernant les cloisons légères, notamment ceux comportant démolition ou percement de mur, de poutre ou de plancher, d’installation de machinerie quelle qu’en soit la source d’énergie, devront faire l’objet d’une autorisation préalable et écrite du bailleur et, le cas échéant, de la copropriété'.

L’article 7, 13°, prévoit encore que 'le preneur ne pourra, sans l’accord préalable et écrit du bailleur et de la copropriété, poser ni plaque ni enseigne, ou réaliser une installation quelconque intéressant l’aspect extérieur de l’immeuble'.

Il appartenait donc à la société Bodej de solliciter les autorisations nécessaires avant d’entreprendre les travaux litigieux et elle ne peut en conséquence imputer une faute à son bailleur de nature à justifier une suspension du paiement des loyers, ou même leur consignation.

En tout état de cause, elle ne justifie nullement être dans l’impossibilité d’exploiter son commerce en raison de l’état des lieux loués.

Enfin, et contrairement à ce qu’elle soutient, il existe une contestation sérieuse de la SCI du Parc, qui s’oppose à sa demande de suspension du paiement des loyers en invoquant les clauses du bail liant les parties.

Sa demande sera donc rejetée et l’ordonnance confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

La demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires ne relève pas du juge des référés, qui ne peut allouer que des provisions à valoir sur les préjudices éventuellement subis.

La société Bodej, qui succombe en son appel, sera tenue aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement de la somme de 1.500 euros à la SCI du Parc et au syndicat des copropriétaires.

PAR CES MOTIFS :

Confirme en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires ;

Condamne la société Bodej aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Maître X en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société Bodej à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé […] et à la SCI du Parc la somme de 1.500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

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