Cour d'appel de Paris, Pôle 1 chambre 3, 26 octobre 2022, n° 22/04877

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 ch. 3, 26 oct. 2022, n° 22/04877
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 22/04877
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Paris, 13 décembre 2021, N° 21/58001
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 6 novembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 26 OCTOBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : RG 22/04877 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFNFE

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Décembre 2021 -Président du TJ de PARIS RG n° 21 / 58001

APPELANTE

S.C.I. ARTEMIS prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliès en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 523 28 5 6 82

représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

assistée par Me Dominique COHEN-TRUMER, avocat au barreau de PARIS substitué à l’audience par Me Mickael TRUMER, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

S.A.S.U. KMS prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliès en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 811 90 3 0 95

Défaillante (assignation remise à étude en date du 15/04/2022)

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Patricia LEFEVRE, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-Paul BESSON, premier président de chambre

M. Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Mme Patricia LEFEVRE, conseiller

GREFFIER lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

— RENDU PAR DÉFAUT

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Jean-Paul BESSON, premier président de chambre et par Olivier POIX, greffier, présent lors de la mise à disposition.

******

La SCI Artémis se dit propriétaire des lots 36, 5 et 2 soit un local commercial et deux réserves en sous-sol dans un immeuble en copropriété situé [Adresse 3]), qui ont été donnés à bail commercial à la société Kms, le 13 novembre 2014, sous la condition suspensive de la levée de l’arrêté de péril en date du 14 octobre 2009, frappant le local commercial.

Arguant que cette condition s’est réalisée le 31 décembre 2020, que le locataire a pris possession des lieux le 25 mars 2021 mais qu’il s’est soustrait à ses obligations contractuelles, la SCI Artémis a fait délivrer à la société Kms une mise en demeure d’exploiter les locaux loués.

Puis soutenant que l’absence d’exploitation persistait, la SCI Artémis a, par acte extra-judiciaire des 6 et 8 octobre 2021, fait assigner la société Kms devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail litigieux avec les conséquences de droit et obtenir une provision au titre principalement des loyers impayés et indemnités d’occupation.

Par ordonnance réputée contradictoire du 14 décembre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a dit n’y avoir lieu à référé et a condamné la SCI Artémis aux dépens.

Le 2 mars 2022, la société Artémis a interjeté appel et aux termes de ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 20 juin 2022 et signifiées à l’intimée par acte du 20 juillet 2022, elle demande à la cour, au visa des articles 1134 du code civil, 835 du code de procédure civile et L.145-41 du code de commerce de réformer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau de :

— constater le jeu de la clause résolutoire à effet du 30 août 2021 et ordonner en conséquence l’expulsion de la société Kms ainsi que celle de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique et l’aide d’un serrurier, du local à usage commercial qu’elle exploite [Adresse 3] ;

— dire qu’elle pourra procéder à l’enlèvement et au déménagement des objets mobiliers garnissant les lieux, soit dans l’immeuble, soit chez un garde-meubles, au choix de la demanderesse, aux frais, risques et périls de la société Kms ;

— condamner la société Kms à lui payer, à titre provisionnel, la somme totale de 160 800 euros TTC arrêtée au 19 avril 2022 outre les intérêts de retard calculés au taux légal majoré de quatre points à compter du lendemain de chaque échéance impayée et une indemnité égale à 10 % des sommes dues soit 16.080 euros ;

— condamner la société Kms à lui payer une indemnité d’occupation provisionnelle mensuelle égale au double du loyer courant à la date de la résiliation, sans préjudice du droit du bailleur à indemnisation complémentaire sur justification du préjudice effectivement subi, prorata temporis, charges et taxes en sus à compter du 30 août 2021et jusqu’à la reprise du local par le bailleur ;

— dire que le montant du dépôt de garantie lui restera acquis.

A titre subsidiaire, elle soutient également la réformation de l’ordonnance et demande à la cour de constater que la condition suspensive prévue au bail du 13 novembre 2014 n’a pas été levée dans le délai prévu et par conséquent, de juger que le bail du 13 novembre 2014 est caduc et de nul effet.

En toute hypothèse, elle réclame la condamnation de l’intimée à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel en ce compris les frais de délivrance de l’assignation, de la notification éventuelle à créanciers inscrits et de la signification de la décision à intervenir.

La déclaration d’appel a été signifiée par acte extra-judiciaire du 15 avril 2022 remis selon les modalités des articles 656 et 658 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

La SCI Artémis critique la décision déférée en ce qu’elle a retenu une contestation sérieuse en raison d’une levée de l’arrêté de péril le 31 décembre 2020, soit postérieurement à la date prévue au dernier avenant de prorogation de la condition suspensive. Elle prétend, eu égard aux circonstances de l’espèce – établissement d’un état des lieux d’entrée, remise des clefs et d’une attestation d’assurance – que les parties ont, à tout le moins implicitement, renoncé à se prévaloir de l’expiration du délai de réalisation de la condition suspensive et elle fait valoir que le bail a pris effet, le 25 mars 2021.

L’article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail

commercial prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un

commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité,

mentionner ce délai. L’expulsion d’un locataire commercial devenu occupant sans droit ni titre en vertu du jeu d’une clause résolutoire de plein droit peut être demandée au juge des référés du tribunal judiciaire en application des dispositions de l’article 835 du code de procédure civile, dès lors que le maintien dans les lieux de cet occupant constitue un trouble manifestement illicite ou qu’à tout le moins l’obligation de libérer les lieux correspond dans cette hypothèse à une obligation non sérieusement contestable.

Les locaux litigieux ont été donnés en location à la société Kms en cours de formation par la SCI Artémis, aux termes d’un bail commercial en date du 13 novembre 2014, conclu sous la condition suspensive de la levée de l’arrêté de péril frappant les locaux commerciaux de cet immeuble au plus tard le 1er mars 2015. Deux avenants ont été signés par la société Kms, le 5 novembre 2018 puis le 13 mars 2019 afin de proroger la condition suspensive au 31 mars 2019 puis au 31 mars 2020.

La société Artémis justifie (sa pièce 14) de la levée de l’arrêté de péril après la réalisation des travaux de confortation de ses locaux commerciaux ainsi que de la notification de cette levée à la société preneuse par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 11 février 2021, en conformité avec les stipulations du bail.

La volonté des parties d’inscrire leurs relations dans le cadre juridique du bail du 13 novembre 2014 et de ses deux avenants et de constater à effet du 25 mars 2021, la réalisation de la condition suspensive ressort avec l’évidence requise en référé de l’établissement d’un état des lieux d’entrée à cette date accompagné de la remise des clefs au preneur, de la remise par ce dernier d’une attestation d’assurance locative qui fait état de l’exercice de son activité dans les locaux du [Adresse 3] et surtout du mandat donné par la société Kms à une agence immobilière de vendre son droit au bail.

Par un acte d’huissier en date du 29 juillet 2021, la SCI Artémis a mis la société preneuse en demeure de démarrer l’exploitation dans le local loué, visant la clause résolutoire inscrite au bail qui prévoit qu’en cas de méconnaissance par le preneur d’une seule des obligations résultant pour lui du présent bail (…) le présent bail sera résilié de plein droit, s’il plaît au bailleur et sans qu’il soit besoin d’aucune formalité judiciaire, si un mois après un commandement ou une mise en demeure visant la clause résolutoire mettant le preneur en demeure de payer ou d’exécuter l’obligation ainsi méconnue, il n’a pas été satisfait à ce commandement ou cette mise en demeure.

La société bailleresse justifie, par la production d’un constat d’huissier en date du 2 septembre 2021, de l’absence d’exploitation et même de toute activité ou travaux d’aménagement dans les locaux loués. La résiliation du bail est, par conséquent acquise, par l’effet de la clause résolutoire au 29 août 2021 et l’occupation des lieux par la société Kms, depuis cette date, sans droit ni titre.

En conséquence, il convient d’ordonner l’expulsion de la société Kms dans les conditions indiquées au dispositif du présent arrêt. L’occupation sans droit ni titre justifie en outre l’octroi d’une indemnité d’occupation provisionnelle due à compter du 30 août 2021, qui sera fixée au montant du loyer contractuel outre la provision pour charges.

Aux termes du deuxième alinéa de l’article 835 du même code, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

La SCI Artémis sollicite, sans produire un décompte des sommes réclamées, une provision de 160 800 euros correspondant à l’arriéré locatif arrêté au 19 avril 2022 or, elle ne verse qu’un extrait de compte et trois factures (ses pièces 12 et 13) se rapportant aux deux termes appelés avant l’acquisition de la clause résolutoire faisant apparaître un solde débiteur de 46 320 euros pour la période du 1er avril au 30 septembre 2021 qui prend en compte les remise et franchise de loyer prévues au bail uniquement au titre du premier trimestre.

Or la suppression de la remise contractuelle de l’article 8-4-1 du bail (de 5000 euros par trimestre les deux premières années) constitue selon cet article, la sanction de l’inexécution par le preneur de son obligation de payer les sommes dues au bailleur et donc une clause pénale.

Il en est de même des accessoires prévus aux articles 5-7 et 11 du bail dont l’appelante réclame le bénéfice. Le pouvoir de modérer ces clauses, susceptible de procurer un avantage excessif au créancier relève de l’appréciation des juges du fond et par conséquent aucune provision ne sera allouée à la société bailleresse à ce titre.

La provision sera en conséquence ramenée à son montant incontestable, soit 41 320 euros, étant relevé qu’elle inclut l’indemnité d’occupation pour la période du 31 août au 30 septembre 2021 et il n’y a pas lieu à référé au titre des accessoires.

Enfin, la demande tendant à voir juger que le montant du dépôt de garantie est acquis à la bailleresse, qui tend au paiement de la créance et non d’une provision excède les pouvoirs du juge des référés.

L’ordonnance entreprise sera infirmée dans toutes ses dispositions, y compris les dépens. La société Kms sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, sans qu’il y ait lieu d’énoncer les actes inclus dans ces dépens et à payer à la société Artémis la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme l’ordonnance rendue le 14 décembre 2021 ;

Statuant à nouveau,

Constate que la société Kms est occupante sans droit ni titre des locaux commerciaux constituant les lots numéros 36, 5 et 2 de l’immeuble en copropriété situé [Adresse 3]) depuis le 30 août 2021 ;

En conséquence,

Ordonne, à défaut de départ volontaire dans les quinze jours de la signification du présent arrêt, l’expulsion de la société Kms et de tous occupants de son chef des lots 36, 5 et 2 de l’immeuble en copropriété du [Adresse 3]) avec si nécessaire l’assistance de la force publique et l’aide d’un serrurier ;

Autorise l’enlèvement et la séquestration des biens et objets mobiliers dans ces locaux dans un garde meubles ou dans tout autre lieu au choix de la SCI Artémis, aux risques et périls de la société Kms et à ses frais ;

Fixe le montant de l’indemnité d’occupation provisionnelle due par la société Kms à une somme égale au loyer mensuel majoré de la provision pour charges, à compter du 1er octobre 2021 jusqu’à parfaite libération des lieux et condamne la société Kms à verser cette somme à la société Artémis ;

Condamne la société Kms à payer à la société Artémis la somme provisionnelle de 41 320 euros au titre des loyers et indemnité d’occupation pour la période du 1er avril au 30 septembre 2021 ;

Pour le surplus des demandes, dit n’y avoir lieu à référé ;

Condamne la société Kms à payer à la SCI Artémis la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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