Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 10 novembre 2011, n° 10/01042

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, ch. soc., 10 nov. 2011, n° 10/01042
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 10/01042
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau, 14 février 2010

Sur les parties

Texte intégral

SG/PV

Numéro 5014/11

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 10/11/2011

Dossier : 10/01042

Nature affaire :

Demande d’annulation d’une décision d’un organisme

Affaire :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE PAU- PYRENEES

C/

E Z

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 10 Novembre 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 15 Septembre 2011, devant :

Monsieur PUJO-SAUSSET, Président

Madame ROBERT, Conseiller

Monsieur GAUTHIER, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE PAU- PYRENEES

XXX

XXX

Représentée par Madame Karine DELAS, assistante technique juridique, munie d’ un pouvoir régulier.

INTIME :

Monsieur E Z

XXX

XXX

représenté par Maître COUDEVYLLE LOQUET, avocat au barreau de PAU

sur appel de la décision

en date du 15 FEVRIER 2010

rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE PAU

LES FAITS, LA PROCÉDURE :

Monsieur Z, né le XXX, a été engagé à compter du 1er novembre 2002, par l’ASSOCIATION SAUVEGARDE DE L’ENFANCE DU PAYS BASQUE en qualité de cadre, classe 1, niveau II, affecté en qualité de directeur de l’UNITÉ POLYVALENTE D’ACTION SOCIO-ÉDUCATIVE de Bayonne, dont les fonctions consistaient notamment en la responsabilité de la mise en oeuvre permanente des actions éducatives et pédagogiques pour lesquelles l’établissement a été créé et habilité et dont l’objet est l’accueil d’enfants délinquants et de « cas difficiles ».

Le 18 janvier 2007, à 11 heures 45, alors qu’il se rendait en voiture à une réunion de travail, M. E Z a été pris d’un malaise et a été transporté par les pompiers au centre hospitalier de Bayonne où il a été médicalement constaté un « anévrisme disséquant de l’aorte ascendante », puis a été transporté en hélicoptère au Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux où il a subi une intervention chirurgicale consistant en remplacement de l’aorte ascendante.

Une déclaration d’accident du travail a été établie le 13 mars 2007.

Le 1er juin 2007, la CPAM lui a notifié le rejet de sa demande de prise en charge de l’accident au titre de la législation relative aux risques professionnels au motif que le médecin-conseil a considéré que les lésions ne sont pas imputables à l’accident du travail.

Monsieur E Z, a sollicité une expertise qui a été diligentée par le Docteur I-J K, en application des dispositions de l’article L. 141-1 du code de la sécurité sociale, qui avait pour mission de « dire si les lésions mentionnées dans le certificat médical du 18 janvier 2007, (anévrisme disséquant de l’aorte ascendante) ont un lien de causalité avec l’accident de travail dont l’assuré a été victime le 18 janvier 2007 ».

L’expert a conclu son rapport le 23 juin 2007, en ces termes : «  les lésions mentionnées sur le certificat médical du 18 janvier 2007 : ''anévrisme disséquant de l’aorte ascendante'' n’ont pas de relation directe et certaine avec l’accident du travail du 18 janvier 2007, il existe un état évolutif ».

Le 28 juin 2007, la CPAM a notifié les conclusions de l’expertise et le rejet de la demande de prise en charge de l’accident au titre de l’accident du travail.

Monsieur E Z, a saisi la commission de recours amiable qui a confirmé la décision de la caisse le 21 août 2007.

Cette décision a été contestée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau, saisi par Monsieur E Z le 05 octobre 2007.

Monsieur E Z, a été mis en retraite anticipée le 1er octobre 2007.

Par jugement avant dire droit du 29 juin 2009, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau a ordonné une mesure d’expertise médicale, et a désigné le Docteur A B, pour y procéder avec pour mission de « dire si les lésions mentionnées dans le certificat médical du 18 janvier 2007 ''anévrisme disséquant de l’aorte ascendante'' sont en relation directe et certaine avec l’accident du travail survenu le 18 janvier 2007 et/ou s’il existe un état antérieur ».

L’expert a conclu son rapport le 27 juillet 2009 en ces termes :

« le 18 janvier 2007, M. E Z, né le XXX, a été affecté d’une dissection aortique. Depuis plusieurs jours, il était confronté à des violences au sein de l’établissement qu’il gérait.

Les causes principales de cette affection sont l’hypertension artérielle et les maladies du tissu élastique (syndrome de Marfan, maladie d’Ehler-Danlos). D’autres sont plus rares : les cardiopathies congénitales (coarctation de l’aorte), le rétrécissement aortique, les efforts violents, les traumatismes thoraciques, un accident lors d’une aortographie…

Dans le cas particulier, on peut imaginer que le stress ressenti a été à l’origine d’une poussée d’hypertension artérielle mais il faut remarquer que l’accident pathologique s’est manifesté alors que les événements étaient résolus et qu’il était seul au volant de son automobile.

Il ne me semble pas pouvoir affirmer que la dissection est en relation directe et certaine avec l’accident du travail survenu le 18 janvier 2007, et je pense qu’il existait un état antérieur (le 18 janvier 2007, on signalait une hypertension artérielle dans le compte-rendu opératoire) ».

Par jugement du 15 février 2010, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau :

— a dit que l’accident dont a été victime Monsieur E Z, le 18 janvier 2007 constitue un accident du travail,

— a débouté Monsieur E Z du surplus de ses demandes.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 mars 2010, la CPAM de Pau-Pyrénées, a interjeté appel du jugement qui lui a été notifié le 26 février 2010.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

La CPAM de Pau-Pyrénées, par conclusions écrites reprises oralement à l’audience et auxquelles il convient de se référer, demande à la Cour de :

— confirmer la décision de la CPAM, soit le refus de prendre en charge au titre de la législation professionnelle les lésions constatées médicalement le 18 janvier 2007,

— débouter Monsieur E Z de toutes ses demandes,

— condamner Monsieur E Z à 300 €, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La CPAM fait valoir que : Monsieur E Z ne rapporte pas la preuve d’un état particulier de stress le jour de l’accident ; son argument, selon lequel l’accident serait justifié par des conditions de travail difficiles liées notamment aux personnalités des jeunes dont il avait la charge, est inopérant, car il ressort de ses fonctions qu’il était régulièrement confronté à des situations difficiles, de sorte que les faits relatés ne constituent pas des conditions de travail inhabituelles à l’origine de l’accident, d’autant que ces événements se sont déroulés le 15 janvier 2007 ; les conclusions des deux experts sont parfaitement claires et dépourvues d’ambiguïté, de sorte qu’elles s’imposent tant au juge qu’aux parties dès lors que la régularité de l’avis de l’expert judiciaire n’est pas contestée ; les différents médecins consultés par Monsieur E Z, concluent tous à l’existence d’un état antérieur préexistant évoluant pour son propre compte ; ainsi l’attestation du Docteur X mentionne l’existence de facteurs de risque, une hypertension artérielle et une hypercholestérolémie, cette dernière ne pouvant être provoquée par une activité professionnelle quelconque.

Sur la demande de réparation de la perte de salaire subie, la caisse s’oppose à cette demande et fait valoir qu’elle ne saurait être tenue responsable de l’accident survenu à l’assuré, ni de sa mise à la retraite anticipée.

Monsieur E Z, par conclusions écrites reprises oralement à l’audience et auxquelles il convient de se référer, demande à la Cour de :

— déclarer la CPAM irrecevable et en tout cas mal fondée dans les fins de son appel à l’encontre du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 15 février 2010,

— constater que la CPAM ne rapporte pas de preuve permettant de justifier qu’il ne peut pas bénéficier de la présomption d’imputabilité à l’accident du travail,

— constater que le lien de causalité directe et certaine entre les lésions dont il souffre et l’accident de travail en date du 18 janvier 2007 est établi,

— constater que les lésions dont il souffre sont imputables à l’accident du travail du 18 janvier 2007,

— confirmer le jugement dont appel qui a dit que l’accident dont il a été victime le 18 janvier 2007 constitue un accident du travail,

— condamner la CPAM à prendre en charge ces lésions au titre de la législation relative aux risques professionnels et à lui accorder les droits afférents au régime des accidents du travail,

— faire droit à son appel incident et ordonner la reconstitution de sa carrière pour la perte de salaire depuis octobre 2007, avec les droits à la retraite y afférents,

— condamner la CPAM à lui verser la somme de 22 950 €, au titre de la perte de salaire subie,

À titre subsidiaire :

— ordonner une mesure de contre-expertise en donnant mission à l’expert de : déterminer si les lésions sont imputables à l’accident du travail survenu le 18 janvier 2007 ; déterminer son taux d’incapacité permanente d’invalidité,

— condamner la CPAM à lui payer la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur E Z, soutient que l’accident du 18 janvier 2007, doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels aux motifs que l’accident du 18 janvier 2007 est survenu pendant son activité professionnelle et à l’occasion de son travail, de sorte qu’il bénéficie de la présomption d’imputabilité prévue par l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale et alors que la CPAM ne rapporte pas la preuve de ce que la cause de cet accident serait étrangère à l’activité professionnelle et résulterait d’un état antérieur.

Il considère que l’expert judiciaire ne se prononce pas de façon formelle sur l’imputabilité, ni sur le lien de causalité entre son état antérieur et l’accident. Il fait valoir que l’hypertension artérielle dont fait état l’expert n’est survenue que le jour de l’accident et ne peut donc être rattachée à un état antérieur.

Il conteste l’existence d’un état antérieur qui serait à l’origine de l’accident.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L’appel, interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi, sera déclaré recevable en la forme.

Concernant la demande de reconnaissance de l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels :

Aux termes de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chef d’entreprise.

L’accident du travail est donc un événement, survenu au temps et lieu du travail, certain, identifié dans le temps, ou résultant d’une série d’événements survenus à des dates certaines, générateur d’une lésion physique ou psychologique qui s’est manifestée immédiatement ou dans un temps voisin de l’accident et médicalement constatée.

Dès lors, qu’il est établi que l’accident est survenu au temps et lieu du travail, la victime bénéficie de la présomption d’imputabilité qui institue une présomption de causalité entre, d’une part, la lésion et l’accident et d’autre part, la lésion et le travail.

Il incombe à celui qui conteste cette présomption d’imputabilité de rapporter la preuve que la lésion a une origine totalement étrangère au travail, c’est-à-dire soit que le salarié s’est soustrait à l’autorité de l’employeur, soit que la lésion se rattache un état pathologique antérieur.

Le 23 octobre 2008 Monsieur L-I N, directeur général de l’association « la Sauvegarde de l’Enfance du Pays-Basque », en poste au moment de l’accident de Monsieur E Z, le 17 janvier 2007, a établi une attestation ainsi rédigée :

« (') ses conditions de travail s’étaient particulièrement dégradées depuis le dimanche 13 janvier 2007.

En effet, en l’absence de ses deux collègues, directeur adjoint en congé et du chef de service en formation, Monsieur Z, a dû assumer seul la gestion complète de l’établissement et assurer 24 heures sur 24 l’astreinte cadres.

Dimanche 13 janvier, vers 20 heures, Monsieur Z est intervenu à la demande des éducatrices de service pour une explosion de violence à leur encontre par plusieurs adolescents pris en charge dans l’établissement. La situation a été tout à fait particulière dans la mesure où les pensionnaires, avertis de l’arrivée du cadre de permanence, l’ont attendu sournoisement pour lui exprimer dès son arrivée, virilement et physiquement, leur mécontentement. Une échauffourée s’en est suivie. Il aura fallu tout le professionnalisme de Monsieur Z pour faire régner l’ordre dans l’établissement sans que personne ne soit blessé. Il était alors 3 h 30 du matin.

Il est à noter que, lorsque nous l’avons rencontré pour faire le point sur cet incident, Monsieur Z, nous (est) apparu particulièrement troublé et affecté par cette affaire. Ne disposant, dans les conditions citées ci-dessus, d’aucun relais Monsieur Z, a ensuite assumé seul les lundi 14, mardi 15 mercredi 16 la totalité des démarches administratives, éducatives et pédagogiques liées aux événements (entretiens avec les adolescents et leurs familles, sanctions, procédures…). Plusieurs autres incidents ont éclaté durant cette période.

C’est lorsque l’ensemble de ces problèmes (a été) résolu et qu’il se déplaçait pour se rendre à une réunion organisée par les autorités de contrôle le jeudi 17 janvier 2007, que Monsieur Z, particulièrement fatigué et éprouvé par ces graves événements d’une rare intensité, a été victime de cet accident cardiaque ».

Le Président de l’association a rédigé une attestation en date du 25 septembre 2007, qui établit également que Monsieur E Z a été confronté à des événements qui l’ont obligé «  à intervenir vers minuit pour endiguer une grave crise de violence et d’agitation collective au sein du foyer », que « durant les 48 heures suivantes, en l’absence pour la semaine des deux autres cadres de l’établissement, Monsieur Z, dans l’exercice de ses fonctions, a dû faire face, seul, à toute la mise en oeuvre permettant le retour au calme de la structure éducative » et que « par leur intensité, ces graves événements ont été particulièrement stressants, et déstabilisants pour Monsieur Z, lequel a été victime le jeudi 18 janvier 2007, d’un accident cardiaque au volant de son véhicule de service ».

L’expert judiciaire rappelle, dans son rapport du 27 juillet 2009, que Monsieur E Z a bénéficié d’une intervention chirurgicale le 18 janvier 2007, dont le diagnostic était « patient qui a présenté une douleur thoracique aiguë, importante, avec hémianopsie à gauche, régressive. Échographie et scanner confirment l’existence d’une dissection de type I jusqu’à la bifurcation iliaque. Facteurs de risque : hypertension artérielle, hypercholestérolémie. À noter : père et soeur décédés d’une hémorragie méningée ».

Les conclusions du rapport d’expertise judiciaire, du 27 juillet 2009, sont ainsi rédigées :

« le 18 janvier 2007, M. E Z, né le XXX, a été affecté d’une dissection aortique. Depuis plusieurs jours, il était confronté à des violences au sein de l’établissement qu’il gérait.

Les causes principales de cette affection sont l’hypertension artérielle et les maladies du tissu élastique (syndrome de Marfan, maladie d’Ehler-Danlos). D’autres sont plus rares : les cardiopathies congénitales (coarctation de l’aorte), le rétrécissement aortique, les efforts violents, les traumatismes thoraciques, un accident lors d’une aortographie…

Dans le cas particulier, on peut imaginer que le stress ressenti a été à l’origine d’une poussée d’hypertension artérielle mais il faut remarquer que l’accident pathologique s’est manifesté alors que les événements étaient résolus et qu’il était seul au volant de son automobile.

Il ne me semble pas pouvoir affirmer que la dissection est en relation directe et certaine avec l’accident du travail survenu le 18 janvier 2007, et je pense qu’il existait un état antérieur (le 18 janvier 2007, on signalait une hypertension artérielle dans le compte-rendu opératoire) ».

La CPAM conteste la décision de première instance de prise en charge de l’accident du 17 janvier 2007 au titre de la législation sur les risques professionnels.

La CPAM soutient, en premier moyen, que Monsieur E Z, ne rapporte pas la preuve d’un état particulier de stress le jour de l’accident.

Mais, il est établi, et non contesté, que l’accident de Monsieur E Z, du 17 janvier 2007, qui lui a valu une hospitalisation ce jour-là et une opération chirurgicale le 18 janvier 2007, est intervenu au temps et au lieu du travail, de sorte qu’il bénéficie de la présomption d’imputabilité de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale.

Dès lors, ce n’est pas à lui de rapporter la preuve d’un lien de causalité entre la lésion et l’accident ainsi qu’entre la lésion et le travail, puisqu’il y a présomption d’imputabilité du fait de la survenance d’un accident au temps et au lieu du travail, mais c’est à celui qui conteste cette présomption, en l’occurence à la CPAM, de détruire cette présomption en rapportant la preuve que la lésion a une origine totalement étrangère au travail, c’est-à-dire a une origine exclusivement étrangère au travail.

La CPAM soutient, en deuxième moyen, que les différents médecins consultés par Monsieur E Z concluent tous à l’existence d’un état antérieur préexistant évoluant pour son propre compte.

Elle fait valoir qu’ainsi l’attestation du Docteur X mentionne l’existence de facteurs de risque, une hypertension artérielle et une hypercholestérolémie, cette dernière ne pouvant être provoquée par une activité professionnelle quelconque.

L’attestation en date 18 juillet 2007 du Docteur C X, chirurgien au service de chirurgie cardio-vasculaire du centre hospitalier et universitaire de Bordeaux, qui a opéré Monsieur E Z le 18 janvier 2007, est ainsi rédigée :

« Monsieur E Z est un patient qui est arrivé en extrême urgence dans le service pour dissection aortique de type.1. Il a comme facteurs de risque une hypertension artérielle et une hypercholestérolémie.

Je l’ai opéré le 18 janvier 2000, d’un remplacement de l’aorte ascendante avec réparation du culot aortique.

Le contexte professionnel dans lequel il évolue a sûrement favorisé «l’explosion » de son aorte : il travaille dans une maison spécialisée de jeunes en difficulté et depuis 48 heures, il était en effet confronté à des problèmes très importants et générateurs de stress.

Il n’est pas exclu que sa profession soit liée à la survenue de cette complication, et je pense que cela peut entrer dans le cadre d’une maladie professionnelle ».

Ainsi le chirurgien considère qu’il y a un lien direct entre l’accident dont a été victime Monsieur E Z le 17 janvier 2007, et les conditions d’exercice de sa profession dans les heures qui ont précédé l’accident, puisque ce praticien écrit que ce contexte professionnel « a sûrement favorisé l’explosion de son aorte », écartant ainsi tout doute quant au lien entre les conditions de travail et la lésion constatée en employant l’adverbe « sûrement » qui, précisément, exprime une affirmation, une certitude.

Cette interprétation est confortée par l’attestation de ce praticien du 28 décembre 2007 qui certifie que Monsieur E Z « est hypertendu », et que «  l’hypertension peut être majorée par le stress (professionnel ou autre) et être à l’origine de dissection aortique, pathologie que Monsieur E Z, a présentée en janvier 2007, et qui a nécessité une intervention chirurgicale le 18 janvier 2007 ».

Or, les éléments médicaux produits aux débats, et qui ont été soumis à l’expert judiciaire, démontrent qu’antérieurement à l’accident du 17 janvier 2007, il n’a jamais été décelé chez Monsieur E Z une hypertension qui pourrait avoir constitué des facteurs de risque susceptible de rendre compte de la lésion qui s’est produite ce jour-là.

Ainsi, Monsieur E Z a fait l’objet d’une exploration hémodynamique réalisée le 9 janvier 1998 par le Docteur Y qui conclut notamment que « cette exploration », « est dans l’ensemble globalement rassurante, sans anomalie évidente ».

De même, l’expert judiciaire ne relève pas d’anomalie dans le holter tensionnel effectué le 25 et 26 septembre 2003, ni dans les examens et analyses du 2 août 2005 et du 1er septembre 2006.

L’existence d’une hypertension antérieure à l’accident du 17 janvier 2007, susceptible de constituer un état antérieur préexistant qui aurait évolué pour son propre compte et qui permettrait d’expliquer, au moins en partie, la lésion constatée, n’est donc pas démontrée.

En tout état de cause, il appartient à la CPAM de démontrer, outre l’existence d’un état antérieur préexistant, démonstration qui en l’espèce n’est pas faite, que cet état serait à l’origine de la lésion constatée, c’est-à-dire que celle-ci aurait une origine totalement et exclusivement étrangère au travail.

Or, en l’espèce, la caisse ne démontre pas non plus que le facteur de risque caractérisé par l’hypertension aurait une origine totalement étrangère au travail de l’assuré, puisque les éléments médicaux versés aux débats établissent que l’hypertension peut être liée aux conditions de travail, ainsi que l’expert judiciaire le note lui-même dans ses conclusions en écrivant que dans ce cas particulier «  on peut imaginer que le stress ressenti a été à l’origine d’une poussée d’hypertension artérielle».

Le fait que l’expert judiciaire ajoute qu’il « faut remarquer que l’incident pathologique s’est manifesté alors que les événements étaient résolus et qu’il était seul au volant de son automobile », n’est pas de nature à exclure la causalité entre la lésion physique et le travail car, ainsi qu’il a été dit précédemment, l’accident du travail peut résulter d’une série d’événements survenus à des dates certaines, générateur d’une lésion physique ou psychologique, qui s’est manifestée immédiatement ou dans un temps voisin de l’accident et médicalement constatée.

Or, en l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats, et il n’est pas contesté, que dans les jours précédents l’accident, Monsieur E Z, a vécu, sur son lieu de travail et dans le cadre de ses fonctions professionnelles, une situation de violence et de stress important, qui s’est manifestée dans un temps voisin de l’accident, de nature à constituer une série d’événements générateur de la lésion médicalement constatée.

Par conséquent, au vu de l’ensemble de ces éléments, le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale sera confirmé en ce qu’il a dit que l’accident de Monsieur E Z du 18 janvier 2007, doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.

Concernant la demande relative à la perte de salaire subie :

Monsieur E Z sollicite que soit ordonnée la reconstitution de sa carrière pour la perte de salaire depuis octobre 2007 avec les droits à la retraite y afférents et que la CPAM soit condamnée à lui verser la somme de 22.950 €, au titre de la perte de salaire subie.

Mais, il ne justifie ni en droit, ni en fait du bien-fondé de sa demande dont il sera, en conséquence, débouté.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

La CPAM, partie perdante, sera condamnée à payer à Monsieur E Z la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il convient de rappeler que la procédure en matière de sécurité sociale est gratuite et sans frais, en application des dispositions de l’article R. 144-10 du code de la sécurité sociale.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

REÇOIT l’appel formé le 11 mars 2010 par la CPAM de Pau-Pyrénées à l’encontre du jugement rendu le 15 février 2010 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau, notifié le 26 février 2010, et l’appel incident formé par Monsieur. E Z,

CONFIRME ledit jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la CPAM de Pau-Pyrénées à payer à Monsieur E Z, la somme de 1.500 € (mille cinq cents euros), au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Monsieur PUJO-SAUSSET, Président, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

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