Cour d'appel de Pau, 2ème ch - section 1, 14 septembre 2017, n° 15/03670

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 2e ch - sect. 1, 14 sept. 2017, n° 15/03670
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 15/03670
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bayonne, JEX, 4 octobre 2015
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

AJ/BLL

Numéro 17/ 3546

COUR D’APPEL DE PAU

2e CH – Section 1

ARRET DU 14/09/2017

Dossier : 15/03670

Nature affaire :

Demande relative aux murs, haies et fossés mitoyens

Affaire :

E A

C/

F D épouse X

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 14 Septembre 2017

, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions

prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 16 Mai 2017, devant :

Madame Y,

Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur DARRACQ, Conseiller

Madame Z,

Vice-Président placé, désigné par ordonnance du 2 décembre 2016 chargé

du rapport

assistés de Madame SAYOUS, Greffier, présent à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi. dans l’affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur E A

né le […] à […]

de nationalité Française

'La Solitude'

[…]

[…]

Représenté par Me Gilles VIOLANTE de la SCP VIOLANTE RAYNAL- VIOLANTE, avocat au barreau de Bayonne

INTIMEE :

Madame F D épouse X

née le […] à BIARRITZ

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentée par Me Teddy VERMOTE de la SCP UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET VERMOTE BERTIZBEREA, avocat au barreau de Bayonne

sur appel de la décision

en date du 05 OCTOBRE 2015

rendue par le JUGE DE L’EXECUTION DE BAYONNE

EXPOSE DU LITIGE

Faits et procédure

M. E A est propriétaire à Bidart (64) de diverses parcelles sur lesquelles sont édifiées sa maison d’habitation et ses dépendances. Il a pour voisin Mme F D-X.

Soutenant qu’à la suite de remblais de terrain, Mme D-X avait modifié l’écoulement naturel des eaux en contravention avec les prescriptions des articles 640 et suivants du code civil, M. A a assigné cette dernière devant le tribunal de grande instance de Bayonne aux fins d’obtenir la remise en état des lieux.

Par arrêt du 4 avril 2013, la cour a infirmé le jugement du tribunal qui avait débouté M.

A de ses prétentions, et a ordonné « la remise du terrain propriété de Mme D-X en l’état où il se trouvait avant l’exhaussement constaté par l’expert M. B en limite de la propriété A ».

Suite au pouvoi formé par Mme D-X à l’encontre de cet arrêt, la Cour de cassation a rendu un arrêt de non-admission.

P a r a c t e d u 1 9 n o v e m b r e 2 0 1 3 , M . A L A G U I L L A U M E a a s s i g n é Mme D-X devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Bayonne aux fins de voir assortir l’obligation de remise en état du terrain d’une astreinte de 1 000 € par jour de retard.

Par jugement du 5 octobre 2015, le juge de l’exécution a :

— assortit l’obligation de remise en état d’une astreinte provisoire de 100 € par jour passé un délai de six mois suivant la notification du jugement et ce pendant six mois,

— dit que la demande de prononcé d’une obligation de rétablissement d’une clôture ne relève pas des pouvoirs du juge de l’exécution,

— rejeté la demande de dommages-intérêts de M. A,

— condamné Mme D-X aux entiers dépens, ainsi qu’au paiement de la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 19 octobre 2015, M. A a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du magistrat de la mise en état du 14 décembre 2016, la clôture de l’instruction de l’affaire a été déclarée.

Prétentions et moyens des parties

Selon dernières conclusions du 25 août 2016, M. A demande à la cour de :

Vu les dispositions de l’article L 131-1 du code des procédures civiles d’exécution,

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a assorti l’obligation de remise en état prononcée par la cour le 4 avril 2013 d’une astreinte,

— le réformer pour le surplus,

— condamner Mme D-X à exécuter sous astreinte de 1 000 € par jour de retard les dispositions de l’arrêt du 4 avril 2013, en remettant son terrain «en l’état où il se trouvait avant l’exhaussement constaté par l’expert B en limite de la propriété A, tel que résultant du rapport d’expertise page 13 à savoir : dans sa partie sud c’est-à-dire le long d’une bande parallèle à la limite des propriétés A/ D – X, jusqu’à retrouver le sol naturel avant remblai »,

— faire interdiction sous même astreinte, à Mme D X d’effectuer quelque opération ou travaux que ce soit avant d’avoir procédé à l’exécution de l’arrêt du 4 avril 2013 dans les termes ci-dessus,

— dire que Mme D-X devra impérativement faire rétablir entre les deux propriétés la clôture initiale dévastée par le remblai et les ruissellements, constituée de poteaux ciment de 2 mètres de hauteur scellés dans le sol naturel avec espacement de 2,50 m, et grillage vert,

— désigner tel technicien ou expert (à l’exception de l’expert B dont la cour a sanctionné le travail) ou sapiteur ( M. C dont les constatations n’ont jamais été contestées par aucune des parties, pourrait être renommé pour des constatations ou toute autre mesure) qu’il plaira au 'tribunal’ ordonner avec mission de vérifier si les travaux susdits ont été réalisés et si les décaissements à intervenir à cet effet ont permis d’atteindre le terrain naturel avant exhaussement et ce sur toute la surface sus décrite : dans sa partie sud c’est-à-dire le long d’une bande parallèle à la limite de la propriété A jusqu’à retrouver le sol naturel avant remblai,

— mettre les frais de la mesure d’instruction ( consultation, constatation ou expertise des articles 232 et suivants du code de procédure civile) à la charge totale et exclusive de Mme D X et dire que le technicien devra déposer son rapport au plus tard dans les 3 mois de la date de signification du jugement à intervenir dont la date lui sera communiquée à la diligence de M. A,

— dire que l’astreinte courra à compter du 31e jour suivant la signification du 'jugement’ à intervenir et sera portée à 2 000 € par jour pour le cas où les travaux visés par la décision du 4 avril 2013 n’auront pas été entièrement exécutés passé le délai de 3 mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,

— condamner Mme D-X à payer à M. A les sommes de :

. 10 000 € pour résistance abusive,

. 3 000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les dépens.

* * *

L’appelant expose que Mme D-X devait, aux termes de l’arrêt de la cour du 4 avril 2013, effectuer des travaux à l’effet de mettre fin à l’écoulement anormal des eaux pluviales sur son terrain ; que les travaux réalisés par Mme D-X le 17 décembre 2013, qui ont consisté en un reprofilage d’un nouveau talus et en la création d’une tranchée le long du garage de M. A, n’ont fait qu’aggraver les désordres.

Il prétend que contrairement à ce que soutient l’intimée, l’obligation mise à sa charge par la cour est précise, les constatations objectives du sapiteur ayant assisté M. B permettant de délimiter la zone concernée.

Il rappelle que l’arrêt du 4 avril 2013 est revêtu de l’autorité de la chose jugée et que Mme D-X ne peut pas exécuter cette décision sous une forme différente de celle qui a été fixée.

* * *

Selon dernières conclusions du 6 décembre 2016, Mme D-X demande à la cour de :

Vu l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire,

— constater que la cour dans son arrêt en date du 4 avril 2013 n’a pas défini les travaux à réaliser mais a ordonné l’arrêt de l’écoulement des eaux de la propriété G X sur la propriété A,

— en conséquence réformer la décision entreprise et jugeant à nouveau :

— dire que Mme G X doit mettre un terme à l’écoulement des eaux sur la propriété A selon arrêt en date du 4 avril 2013,

— constater que Mme G X a obtenu l’autorisation d’urbanisme requise à savoir un permis d’aménager,

— autoriser Mme G X à mettre un terme à l’écoulement des eaux en réalisant les travaux prévus au projet de Lotissement XORIAK à savoir la création d’un bassin d’infiltration de grande taille, la création d’un mur étanché projeté en L avec reprofilage du terrain et création d’un caniveau de recueillement des eaux et mise en place de drains,

— constater que le coût des travaux s’élève à la somme de 105 978 €,

— dire que les travaux devront avoir été entrepris dans le délai de 12 mois à compter de la signification de la décision à intervenir,

— débouter M. A de toutes ses demandes,

— le débouter de sa demande de rétablissement de clôture, de désignation de technicien ou expert,

— le débouter de toute demande d’astreinte et d’indemnité pour résistance abusive,

— le condamner aux entiers dépens, ainsi qu’au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

* * *

L’intimée fait valoir que l’arrêt du 4 avril 2013 n’a pas défini précisément en quoi consiste la remise en état du terrain ; en revanche, il a jugé qu’il devait être mis un terme à l’écoulement des eaux de la propriété G H sur la parcelle A.

Elle invoque l’existence d’un projet de lotissement sur sa propriété, pour lequel elle a obtenu toutes les autorisations nécessaires. Il a été travaillé dans ce cadre sur l’assainissement des eaux pluviales ; des études de sol importantes et coûteuses ont été réalisées et il est prévu la création de deux bassins de rétention et d’infiltration des eaux pluviales, avec la reprise en totalité du terrain jouxtant la propriété A.

Elle souligne que M. A ne dispose d’aucun droit réel ni servitude sur sa parcelle et qu’il ne peut pas s’opposer à son droit de bâtir et de modeler les terres.

Elle soutient que l’autorisation d’urbanisme qu’elle a obtenue le 29 mars 2016 constitue un événement postérieur à l’arrêt du 4 avril 2013 valant « fait nouveau » ; qu’il est constant que l’autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.

MOTIVATION

M. A demande pour l’essentiel à la cour de préciser les contours de l’obligation faite à Mme D- X par l’arrêt du 4 avril 2013, de l’assortir d’une astreinte de 1 000 € par jour de retard, et de désigner un technicien ou expert avec mission de vérifier si les travaux ont été réalisés.

Mme D X soutient que l’arrêt du 4 avril 2013 n’a pas défini les travaux à réaliser et qu’il doit être interprété comme mettant à sa charge une obligation d’arrêter l’écoulement des eaux de sa propriété sur la propriété A. Elle demande à être autorisée à réaliser les travaux prévus au projet de lotissement XORIAK, dont elle soutient qu’ils remédieront à la difficulté.

Aux termes de l’article L 131-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution peut assortir d’une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.

L ' a r r ê t d u 4 a v r i l 2 0 1 3 a o r d o n n é « l a r e m i s e d u t e r r a i n p r o p r i é t é d e Mme D-X en l’état où il se trouvait avant l’exhaussement constaté par l’expert M. B en limite de la propriété A », sans fixer de délai d’exécution ni d’astreinte.

L’expert M. B a conclu dans son rapport que la propriété D X avait été réhaussée de manière significative dans sa partie sud, c’est-à-dire le long d’une bande parallèle à la limite avec la propriété A. Il a cependant estimé que cet exhaussement n’avait pas eu pour effet d’envoyer des eaux vers la propriété A.

La cour a considéré, à l’inverse de l’expert, et en se fondant sur les éléments fournis par M. A, que la surélévation du terrain avait créé une pente qui n’existait pas auparavant et que cette pente « inversée » constituait une modification de la situation des lieux entraînant nécessairement une aggravation de la servitude du fonds inférieur de M. A, les eaux pluviales s’écoulant naturellement dans le sens de la pente.

Il n’est pas contesté que l’arrêt du 4 avril 2013 n’a toujours pas été exécuté. Les travaux réalisés par Mme D-X le 17 décembre 2013, qui ont consisté en un reprofilage d’un nouveau talus et en la création d’une tranchée le long du garage de M. A, non seulement ne correspondent pas à ce qui était préconisé par l’arrêt, mais n’ont, au surplus, pas remédié au problème d’écoulement des eaux.

Cependant, deux difficultés d’exécution se posent :

— d’une part, contrairement à ce que soutient M. A, l’arrêt du 4 avril 2013 est imprécis quant à la nature et à l’ampleur des travaux à effectuer ; en effet, M. B n’a pas répondu à la question de savoir quels étaient les travaux propres à remédier aux désordres, estimant que ce chef de mission était sans objet, compte-tenu de ses conclusions mettant hors de cause Mme D-X ; les éléments contenus dans le corps du rapport d’expertise sont insuffisants pour déterminer avec précision ces travaux, l’expert s’étant borné à donner des indications sur la largeur de la bande de remblai (15 à 25 m dans le quart sud-ouest, et 5 à 10 m dans le quart sud-est) mais n’ayant fourni aucune précision quant à la profondeur de celui-ci,

— d’autre part, la situation a évolué depuis le prononcé de l’arrêt ; en effet, Mme D- X a sollicité et obtenu l’autorisation d’aménager un lotissement sur sa propriété, composé de six lots ; dans ce cadre, des travaux de grande ampleur sont prévus, tant en termes de terrassements que d’assainissement des eaux pluviales ; ces travaux dont le coût est estimé à plus de 100'000 € vont sensiblement modifier la configuration des lieux.

Compte-tenu de ces circonstances, il n’apparaît ni nécessaire, ni opportun de fixer une astreinte.

Il n’y a pas davantage lieu de faire droit aux demandes de l’intimée, tendant notamment à se voir autoriser à effectuer des travaux, dès lors que s’il appartient au juge de l’exécution d’interpréter les décisions dont il lui est demandé d’assurer l’exécution, il ne peut cependant, sous couvert de cette interprétation en modifier le sens ou la portée.

Il convient par conséquent de réformer le jugement déféré et de débouter les parties de l’ensemble de leurs demandes.

* * *

Il convient d’ordonner le partage des dépens entre les parties, en application de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Déboute les parties de l’ensemble de leurs demandes,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne le partage des dépens de première instance et d’appel, par moitié entre les parties.

Arrêt signé par Madame Y, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Catherine SAYOUS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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