Cour d'appel de Poitiers, 2e chambre, 26 septembre 2023, n° 22/01566

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, 2e ch., 26 sept. 2023, n° 22/01566
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 22/01566
Importance : Inédit
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 2 octobre 2023
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Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°374

CP/KP

N° RG 22/01566 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GSGY

S.A. CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU -CHARENTES

C/

[X] NEE [V]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/01566 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GSGY

Décision déférée à la Cour : jugement du 09 mai 2022 rendu(e) par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Niort.

APPELANTE :

S.A. CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU -CHARENTES SA, agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 4]

Ayant pour avocat plaidant Me Eric DABIN de la SELARL DABIN GATINEAU, avocat au barreau de DEUX-SEVRES

INTIMEE :

Madame [R] [V] épouse [X]

née le [Date naissance 3] 1982 à [Localité 6] (79)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Olivie TIQUANT, avocat au barreau de PARIS.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 13 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Monsieur Fabrice VETU, Conseiller

Monsieur Cedric LECLER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par actes sous seing-privé du 31 janvier 2015, la banque Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes a consenti deux prêts professionnels à la SARL Marligo :

— un prêt 'PCM Equip Tfixe Ech constante’ n°9500432 d’un montant de 150.000€ d’une durée de 84 mois, au taux fixe de 3,340% l’an, remboursable par mensualités d’un montant de 2.057,56€ (assurance incluse)

— un prêt à objet professionnel 'PCM Equip Tfixe Ech constante’ n°9500433 d’un montant de 377.500€ d’une durée de 120 mois, au taux fixe de 3,640% l’an remboursable par mensualités d’un montant d’un montant 3.889,88€ (assurance incluse)

Par acte sous seing privé du même jour, Madame [R] [X], gérante, s’est portée caution des engagements de la SARL Marligo dans la limite de :

-97.500€ pour le prêt professionnel n° 9500432

-245.375€ pour le prêt professionnel n°9500433

Par jugement du 13 septembre 2017, le tribunal de commerce de Niort a ouvert une procédure de liquidation judiciaire auprès de la SARL Marligo.

Par courrier recommandé du 17 novembre 2017, la banque a informé la caution du prononcé de la déchéance du terme de deux crédits à la suite de la liquidation judiciaire de la SARL Malingo et a exigé le remboursement de l’intégralité des sommes, précisant qu’elle était redevable de 50% des sommes dues à la déchéance du terme conformément à sa quotité d’engagement.

Par jugement du 14 novembre 2018, le tribunal de commerce de Niort a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif de la SARL Marligo.

Par acte du 17 septembre 2020, la banque a assigné Mme [X] devant le tribunal judiciaire de Niort aux fins de voir condamner Madame [R] [X], en sa qualité de caution de personnelle et solidaire de la SARL Marligo, à lui verser :

— La somme de 56 177,14 € au titre du prêt professionnel n°9500432, selon décompte arrêté au 11 août 2020, outre intérêts au taux conventionnel de 3,34 % majoré de 3 points, à compter de l’assignation jusqu’à parfait paiement.

— La somme de 170 160,82 € au titre du prêt professionnel n°9500433, selon décompte arrêté au 11 août 2020, intérêts au taux conventionnel de 3,64 % majoré de 3 points, à compter de l’assignation jusqu’à parfait paiement.

Par jugement en date du 9 mai 2022, le tribunal judiciaire de Niort a statué ainsi :

— Dit que la banque ne peut se prévaloir de l’engagement de caution du 31 janvier 2015 à l’égard de la caution

— Déboute la banque de l’ensemble de ses demandes

— Condamne la banque à payer à la caution la somme de 1.200€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— Condamne la banque aux entiers dépens.

Pour statuer comme il l’a fait, le tribunal judiciaire a retenu que :

— Au moment de la conclusion du contrat de cautionnement la caution :

— percevait un revenu mesnsuel moyen de 2.958€

— remboursait des crédits à hauteur de 639€

— détenait des droits sur un immeuble à hauteur d’une somme estiée à 79.670,50€

— avait une dette en capital de 76.822,94€ envers un autre établissement bancaire.

— Le cautionnement apparaissait donc manifestement disproportionné

Par déclaration en date du 20 juin 2022, la banque a fait appel de cette décision en visant les chefs expressément critiqués en intimant la caution

La banque, par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 6 septembre 2022, demande à la cour de :

— Voir réformer le jugement entrepris

Statuant à nouveau,

— Voir condamner Madame [R] [X] née [V], en sa qualité de caution de personnelle et solidaire de la SARL MARLIGO, à verser à la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES la somme de 56 177,14 € au titre du prêt professionnel n°9500432, selon décompte arrêté au 11 août 2020.

— Dire et juger que cette somme portera intérêts au taux de 3,34 % majoré de 3 points, à compter de l’assignation jusqu’à parfait paiement.

— Voir condamner Madame [R] [X] née [V], en sa qualité de caution de personnelle et solidaire de la SARL MARLIGO, à verser à la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES la somme de 170 160,82 € au titre du prêt professionnel n°9500433, selon décompte arrêté au 11 août 2020.

— Dire et juger que cette somme portera intérêts au taux de 3,64 % majoré de 3 points, à compter de l’assignation jusqu’à parfait paiement.

— Ordonner la capitalisation des intérêts

— Voir débouter Madame [R] [X] née [V] de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de la CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES.

— Voir condamner Madame [R] [X] née [V], en sa qualité de caution de personnelle et solidaire de la SARL MARLIGO, à verser à la Société CAISSE D’EPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES la somme de 3 000,00 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

— La voir condamner aux entiers dépens.

La caution, par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 6 décembre 2022, demande à la cour de :

— Déclarer la Caisse d’Epargne mal fondée en son appel, l’en débouter,

— Confirmer le jugement du 9 mai 2022 rendu par le tribunal judicaire de Niort

— Ordonner la décharge du cautionnement de Mme [X] en raison du caractère disproportionné de son engagement.

Subsidiairement,

La Caisse d’Epargne ayant manqué à son obligation d’information annuelle de la caution car les informations

— Déchoir la banque de ses intérêts et accessoires

La Caisse d’Epargne ayant manqué à ses obligations de conseil et de mise en garde

La Caisse D’Epargne ayant manqué à son obligation de se renseigner

La Caisse D’Epargne ayant contribué à la réalisation de son propre préjudice

La Caisse D’Epargne ayant fait perdre à Mme [X] une chance de ne pas s’engager en tant que caution.

— Condamner la Caisse d’Epargne au paiement des sommes réclamées à Mme [X] au titre de la perte d’une chance de ne pas s’engager en tant que caution et prononcer la compensation avec les prétendues et éventuelles créances de la banque

— Débouter la Caisse d’Epargne de toutes demandes, fins et conclusions,

— Condamner la Caisse d’épargne paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— La condamner aux entiers frais et dépens de l’instance.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 mai 2023

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En droit, selon l’article L.332-1 du code de la consommation (ancien L.341-4) il appartient à la caution de rapporter la preuve que son engagement était manifestement proportionné à ses biens et revenus lors de la soustraction du contrat. Il appartient à l’établissement de crédit de rapporter la preuve que le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation au jour où elle est appelée.

En l’espèce, s’agissant de l’examen de la situation au jour de l’engagement de la caution (31 janvier 2015), aucune fiche de renseignements sur la situation financière et patrimoniale déclarée par Mme [X] n’a été recueillie par la Caisse d’Epargne.

La cour constate que deux prêts ont été consentis :

— pour un montant de 97.500 euros en ce qui concerne le prêt n°9500432,

— pour un montant de 245.375 euros en ce qui concerne le prêt n°9500433,

soit un total de 342.875 euros.

Il convient de comparer le montant de cet engagement avec les possibilités financières de Mme [X] au jour de la signature du contrat de caution.

Celle-ci verse aux débats sa déclaration fiscale de 2015 (pièce 6) qui atteste de revenus s’élevant, pour sa part, à hauteur de 27.793 euros annuels et pour son époux, Monsieur [X], à hauteur de 10.404 euros, soit un total annuel pour le couple de 38.197 €.

Concernant son patrimoine, deux biens immobiliers sont concernés : une maison d’habitation et un bien indivis.

La maison d’habitation :

Son estimation moyenne en 2020 était de 149.800 euros. Ce chiffre donne un ordre de grandeur de la valeur de l’immeuble en 2015. Cet immeuble a été a acquis par trois crédits. Mme [X] verse au débat les tableaux d’amortissement (pièces 1-2-3) des trois prêts dont il résulte que le capital restant dû au 15 janvier 2015 était de :

-21.150,49 euros au titre du premier prêt,

-67.067,44 € euros au titre du deuxième prêt,

-65.427,95 euros au titre du troisième prêt,

soit un montant total de capital restant à rembourser de 153.645,88 euros.

Il résulte de ces constats que la caution ne pouvait se prévaloir d’aucune patrimoine immobilier au titre de la maison d’habitation au jour de son engagement.

Le bien indivis : il est constitué par un chemin d’accès à la maison qui a été estimé à 50 euros selon attestation notariée versée au dossier.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, au jour de la signature du contrat de cautionnement, Mme [X] qui ne disposait d’aucun actif immobilier, s’est engagée pour une somme totale correspondant à neuf années de revenus du couple. Un tel engagement était manifestement disproportionné.

Au jour où la caution a été appelée (assignation en date du 17 septembre 2020), l’établissement de crédit, débiteur de la charge de la preuve n’établit pas que le patrimoine de Mme [X] lui permettait de faire face à son obligation.

Il résulte de l’ensemble de ces observations que l’établissement de crédit ne peut se prévaloir des contrats de cautionnement souscrits par Mme [X].

Il n’y a donc pas lieu d’examiner les moyens tirés des éventuelles fautes de la banque qui aurait méconnu son obligation générale d’information et de mise en garde, et son devoir de conseil. Et ce d’autant, que les échanges entre parties sur ce point concernent la relation entre la banque et le débiteur principal et non les rapports entre la banque et la caution. Il en est de même des questions relatives aux sommes éventuellement reçues par la banque (garantie OSEO et liquidation judiciaire) et aux intérêts échus.

Au vu de ces divers éléments, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions y compris celles relatives aux frais et dépens.

La Caisse d’Epargne qui succombe en appel sera condamnée aux dépens devant la cour, déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamnée à payer de ce chef la somme de 2.000 euros à Mme [X].

PAR CES MOTIFS:

La Cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou-Charente de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou-Charente à payer la somme de 2.000 € à Mme [X] au titre des frais irrépétibles devant la Cour,

Condamne la SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou-Charente aux dépens d’appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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