Cour d'appel de Reims, 9 juillet 2013, n° 12/02130

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 9 juill. 2013, n° 12/02130
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 12/02130
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Troyes, 17 juillet 2012

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°

du 09 juillet 2013

R.G : 12/02130

SA CIBETANCHE

c/

Société NV ASK ROMEIN HOLDING

MW

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 09 JUILLET 2013

APPELANTE :

d’une ordonnance d’exequatur rendue le 18 juillet 2012 par le greffier en chef du tribunal de grande instance de TROYES,

XXX

XXX

XXX

COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD, avocats au barreau de REIMS et ayant pour conseil Maître Gérard WURTZ, avocat au barreau de REIMS

INTIMEE :

Société NV ASK ROMEIN HOLDING

XXX

XXX

COMPARANT, concluant par Maître Jean-Pierre SIX, avocat au barreau de REIMS, et ayant pour conseil Maître Jean-Philippe HONNET, avocat au barreau de TROYES.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame MAILLARD, présidente de chambre

Madame DIAS DA SILVA JARRY, conseiller

Monsieur WACHTER, conseiller

GREFFIER :

Madame THOMAS, greffier lors des débats et du prononcé.

DEBATS :

A l’audience publique du 21 mai 2013, où l’affaire a été mise en délibéré au 09 juillet 2013,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 09 juillet 2013 et signé par Madame MAILLARD, présidente de chambre, et Madame THOMAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * *

RAPPEL DU LITIGE

Suivant contrat en date du 3 janvier 2003, la société de droit belge NV Ask Romein Holding a confié à la SA Cibétanche des travaux de sous-traitance d’édification de toitures.

La société de droit belge NV Ask Romein Holding, se prévalant de malfaçons, a saisi le tribunal de commerce de l’arrondissement judiciaire d’Anvers, lequel a ordonné la réalisation d’une expertise judiciaire par jugement avant dire droit en date du 16 juin 2005.

L’expert a ensuite déposé le rapport de ses opérations.

Par jugement en date du 10 novembre 2011, le tribunal de commerce de l’arrondissement judiciaire d’Anvers a notamment dit que la SA Cibétanche avait annulé unilatéralement le contrat du 3 janvier 2003, et l’a condamnée, après compensation judiciaire, au paiement à la société de droit belge NV Ask Romein Holding d’une somme de 302.463,01 € à majorer des intérêts judiciaires depuis le 4 février 2003.

La SA Cibétanche a relevé appel de cette décision le 26 janvier 2012.

Le 30 mai 2012, la société de droit belge NV Ask Romein Holding a saisi le tribunal de grande instance de Troyes d’une demande d’exequatur du jugement rendu le 10 novembre 2011 par le tribunal de commerce de l’arrondissement d’Anvers.

Par ordonnance du 18 juillet 2012, le greffier en chef du tribunal de grande instance de Troyes a fait droit à cette requête.

La SA Cibétanche a interjeté appel de cette décision le 22 août 2012.

Par conclusions notifiées le 3 mai 2013, la SA Cibétanche demande à la cour :

Vu le règlement européen du 22 décembre 2000,

Vu la convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, et notamment son article 4,

Vu la loi sur la sous-traitance en date du 31 décembre 1975,

Vu l’article 3 du code civil,

— de la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

Y faisant droit,

— d’infirmer l’ordonnance dont appel en toutes ses dispositions ;

— de débouter la société Ask Romein Holding de sa demande aux fins d’exequatur du jugement rendu le 10 novembre 2011 par le tribunal de commerce de l’arrondissement d’Anvers ;

— d’ordonner la mainlevée de toutes mesures d’exécution diligentées par la société NV Ask Romein Holding en exécution de l’ordonnance dont appel ;

— de débouter la société Ask Romein Holding de toutes ses autres demandes, fins ou conclusions plus amples ou contraires ;

— de condamner la société Ask Romein Holding à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La SA Cibétanche fait valoir au soutien de ses prétentions que le juge de l’exequatur doit rechercher si, pour être reconnue en France, la décision étrangère respecte toutes les conditions de régularité exigées par l’ordre public international de procédure et de fond, et qu’en l’espèce le jugement étranger est contraire à l’ordre public français en ce qu’il ignore une loi de police en faveur des sous-traitants, alors qu’il s’agit d’un contrat exécuté en France par une entreprise française. Elle ajoute qu’en tout état de cause l’exequatur ne pouvait être prononcée dès lors que la décision du tribunal de commerce de l’arrondissement d’Anvers n’est pas définitive, un appel étant pendant devant la cour d’appel d’Anvers.

Par conclusions notifiées le 1er mars 2013, la société de droit belge NV Ask Romein Holding demande à la cour :

— de confirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise ;

Y ajoutant,

— de condamner la société Cibétanche à lui payer la somme de 5.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La société de droit belge NV Ask Romein Holding expose notamment à l’appui de sa position qu’il existe une présomption de régularité du jugement étranger, que le juge ne peut se livrer à la révision au fond de la décision dont l’exequatur est sollicitée, et que seule la violation manifeste d’une règle de droit considérée comme essentielle dans l’ordre juridique de l’Etat requis ou d’un droit reconnu comme fondamental dans cet ordre juridique est susceptible de faire obstacle à l’exequatur, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Par conclusions d’incident notifiées le 7 mai 2013, la société de droit belge NV Ask Romein Holding sollicite le rejet des débats des conclusions prises par la SA Cibétanche en date du 3 mai 2013.

Par conclusions notifiées le 10 mai 2013, la SA Cibétanche s’oppose à cette demande, faisant valoir qu’elle n’était pas motivée, et que les conclusions litigieuses, qui ne comportent aucune prétention nouvelle, ont été notifiées quatre jours avant la clôture des débats.

SUR CE, LA COUR

Sur l’incident

Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande tendant au rejet des conclusions de la SA Cibétanche dès lors que la société NV Ask Romein Holding n’indique à aucun moment en quoi leur notification porterait atteinte à son droit à faire valoir ses moyens de défense, et que les conclusions litigieuses ont été notifiées le 3 mai 2013, soit antérieurement à la clôture des débats.

Sur le bien fondé de l’exequatur

Sur l’argument tiré de la contrariété à l’ordre public français

L’article 33 du règlement du conseil n°44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale dispose que les décisions rendues dans un Etat membre sont reconnues dans les autres Etats membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure, mais qu’en cas de contestation, toute partie intéressée qui invoque la reconnaissance à titre principal peut faire constater, selon les procédures prévues aux sections 2 et 3 du présent chapitre, que la décision doit être reconnue.

L’article 34 du même règlement énonce qu’une décision n’est pas reconnue si :

1) la reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public de l’Etat membre requis ;

2) l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre, à moins qu’il n’ait pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire ;

3) elle est inconciliable avec une décision rendue entre les mêmes parties dans l’Etat membre requis ;

4) elle est inconciliable avec une décision rendue antérieurement dans un autre Etat membre ou dans un Etat tiers entre les mêmes parties dans un litige ayant le même objet et la même cause, lorsque la décision rendue antérieurement réunit les conditions nécessaires à sa reconnaissance dans l’Etat membre requis.

L’article 36 ajoute qu’en aucun cas, la décision étrangère ne peut faire l’objet d’une révision au fond.

En l’espèce, la seule cause d’exclusion de la reconnaissance du jugement étranger qu’invoque la SA Cibétanche est celle prévue au 1) de l’article 34.

Or, force est de constater que le jugement rendu le 10 novembre 2011 par le tribunal de commerce de l’arrondissement judiciaire d’Anvers ne comporte aucune disposition qui soit manifestement contraire à l’ordre public français.

En effet, le seul fait que la législation de l’Etat belge relative aux contrats de sous-traitance puisse différer de la législation française ne suffit à l’évidence pas à caractériser une telle contrariété manifeste, dès lors que les dispositions régissant les contrats de sous-traitance ne constituent aucunement une règle de droit fondamentale de l’ordre juridique français.

L’argumentation de la SA Cibétanche, qui ne tend au final qu’à remettre en cause le fond du litige tel que tranché par la juridiction belge, ne pourra qu’être rejetée.

Sur l’argument tiré de l’absence de caractère définitif du jugement étranger

Il sera d’abord constaté que la SA Cibétanche ne justifie d’aucune manière de l’appel qu’elle allègue avoir interjeté à l’encontre du jugement rendu le 10 novembre 2011 par le tribunal de commerce de l’arrondissement judiciaire d’Anvers.

Ensuite, et en tout état de cause, il sera rappelé que l’article 38 du règlement du conseil n°44/2001 du 22 décembre 2000 dispose que les décisions rendues dans un Etat membre et qui y sont exécutoires sont mises à exécution dans un autre Etat membre après y avoir été déclarées exécutoires sur requête de toute partie intéressée.

Or, il résulte expressément des dispositions du jugement du 10 novembre 2011 que son exécution provisoire a été ordonnée, alors par ailleurs que cette décision a été régulièrement signifiée à la SA Cibétanche par acte d’huissier en date du15 février 2012.

Ainsi, la décision étant exécutoire dans son Etat d’origine, sa mise à exécution en France est parfaitement régulière, nonobstant l’existence d’un éventuel appel.

L’exequatur du jugement du tribunal de commerce de l’arrondissement judiciaire d’Anvers du 10 novembre 2011 étant pleinement justifiée, l’ordonnance déférée devra être confirmée.

Sur les autres demandes

La SA Cibétanche, qui succombe, sera condamnée à verser à la société de droit belge NV Ask Romein Holding la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles engagés à hauteur d’appel, et sera déboutée de la demande qu’elle a elle-même formée de ce chef.

Elle sera enfin condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Rejette les conclusions d’incident de la société NV Ask Romein Holding ;

Confirme l’ordonnance d’exequatur rendue le 18 juillet 2012 par le tribunal de grande instance de Troyes ;

Condamne la SA Cibétanche à payer à la société de droit belge NV Ask Romein Holding la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande formée par la SA Cibétanche sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA Cibétanche aux dépens d’appel.

Le greffier La présidente

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