Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 15 décembre 2020, n° 19/02045

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 1re ch. sect.civ., 15 déc. 2020, n° 19/02045
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 19/02045
Décision précédente : Tribunal de commerce de Reims, 2 septembre 2019
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

ARRET N°

du 15 décembre 2020

R.G : N° RG 19/02045 – N° Portalis DBVQ-V-B7D-EX4G

S.A.R.L. PLOMBERIE CHAUFFAGE MAINTENANCE INDUSTRIELLE PCMI

c/

X

Formule exécutoire le :

à

 :

la SCP DELVINCOURT – E-F

Me Clément MONNIER

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 15 DECEMBRE 2020

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal de commerce de REIMS

SARL PLOMBERIE CHAUFFAGE MAINTENANCE INDUSTRIELLE PCMI

[…]

[…]

Représentée par Me Mélanie E-F de la SCP DELVINCOURT – E-F, avocat au barreau de REIMS et ayant pour conseil Maître BLANCHETIERE avocat au barreau de PARIS

INTIME :

Monsieur B X

[…]

94120 FONTENAY-SOUS-BOIS

Représenté par Me Clément MONNIER, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller redacteur

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

GREFFIER :

Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 10 novembre 2020, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 décembre 2020,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2020 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, président de chambre, et Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 19 avril 2016, M. B X a fait l’acquisition d’une maison à usage d’habitation sise […] à Reims.

Il a confié la réalisation de travaux de rénovation de cette maison à la Sarl Plomberie Chauffage Maintenance (PCMI) qui avait estimé le montant de travaux à 65.000 / 70.000 euros en février 2016.

Le 24 mai 2016, la Sarl PCMI a émis une demande d’acompte sur avancement de chantier pour 38.500 euros qui était réglée. Un deuxième acompte, de 24.500 euros, a été réglé par M. X à la demande de la Sarl PCMI selon facture du 21 septembre 2017.

Le 13 novembre 2017, la Sarl PCMI a établi un devis pour des travaux supplémentaires (dont dépose de mur, dépose de radiateurs défectueux, dépose et remplacement de chaudière) pour un montant de 40.770,40 euros TTC.

Le 10 décembre 2017, elle a émis une facture d’acompte supplémentaire de chantier d’un montant de 11.000 euros. M. X a refusé de payer cette facture selon courrier recommandé d’avocat en date du 27 février 2018, par lequel il lui a fait part de malfaçons et a sollicité la communication d’un devis détaillé des travaux réalisés.

Le 4 septembre 2018, M. X a mis en demeure la Sarl PCMI de procéder à l’indemnisation de son préjudice.

Par acte d’huissier de justice en date du 18 octobre 2018, M. X a fait assigner la Sarl PCMI devant le tribunal de commerce de Reims aux fins de résolution du contrat et indemnisation de ses préjudices, notamment 30.639,29 euros au titre de son préjudice matériel, 16.340 euros au titre de son préjudice de jouissance et 5.000 euros au titre de son préjudice moral.

La société PCMI a demandé au tribunal de débouter M. X B de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 48.670,40 euros au titre des devis et factures et impayés correspondant aux travaux réalisés.

Par jugement du 3 septembre 2019, le tribunal de commerce de Reims a :

— reçu M. B X en ses demandes, l’a déclaré partiellement bien fondé,

— prononcé la résolution du contrat entre M. X et la Sarl PCMI le 24 mai 2016, aux torts de la Sarl PCMI,

— condamné la Sarl PCMI à verser à M. X la somme de 30.639,29 euros en réparation de son préjudice matériel, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

— débouté M. X de ses demandes en réparation du préjudice de jouissance,

— débouté M. X de ses demandes en réparation du préjudice moral,

— débouté M. X de ses demandes en réparation pour résistance abusive,

— débouté la Sarl PCMI de l’ensemble de ses demandes financières reconventionnelles à l’encontre de M. X,

— condamné la Sarl PCMI au paiement la somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris le coût du procès-verbal de constat établi par Me D Y pour un coût de 340 euros TTC,

— rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions des parties,

— ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

Pour prononcer la résolution du contrat, le tribunal a retenu que M. X avait réglé à la Sarl PCMI un total de 62.000 euros, qu’il avait été contraint de faire intervenir en urgence un architecte d’intérieur pour poser un IPN pour sécuriser les lieux à la suite de la démolition d’un mur intérieur, que les travaux s’étaient poursuivis mais que M. X avait refusé de payer la troisième facture de 40.770,40 euros, qu’aucune preuve n’était rapportée sur l’existence de modifications de travaux imputables à M. X, que la Sarl PCMI n’avait jamais demandé la réception des travaux, que le constat d’huissier faisait état de nombreuses malfaçons directement imputables à la Sarl PCMI, que celle-ci avait donc exécuté imparfaitement les travaux prévus caractérisant des manquements graves à ses obligations contractuelles.

Il a jugé également qu’en l’absence de réalisation de l’intégralité des travaux, M. X avait fait réaliser à ses propres frais les travaux de reprise et de poursuite du chantier, de sorte que le préjudice matériel s’élevait à la somme totale de 30.639,29 euros sur factures. Sur le préjudice de jouissance, il a retenu que M. X n’apportait pas la preuve de demande d’exécution contractuelle envoyée à la Sarl PCMI. Sur le préjudice moral et la résistance abusive, il a jugé que M. X n’apportait aucune preuve d’une démarche amiable en 2016, 2017 ou 2018.

Sur la demande reconventionnelle de la Sarl PCMI, il a jugé que M. X lui avait versé la somme totale de 63.000 euros, et que le devis complémentaire d’un montant de 40.770,40 euros, adressé alors même que des malfaçons étaient constatées, n’avait pas été accepté.

Par déclaration du 3 octobre 2019, la société PCMI a fait appel de ce jugement.

Par conclusions n°3 déposées le 27 octobre 2020, la société PCMI demande à la cour de :

— réformer le jugement en ce qu’il a prononcé la résolution du contrat,

— réformer le jugement en ce qu’il est entré en voie de condamnation à son encontre à hauteur de la somme de 30.639,29 euros,

— réformer le jugement en ce qu’il l’a condamnée société PCMI aux dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X à lui payer la somme de 48.670,40 euros,

— condamner M. X au paiement d’une somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me E F, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Sur la résolution du contrat, la société PCMI fait valoir en premier lieu que la preuve d’une inexécution grave du contrat est nécessaire pour que soit prononcée sa résolution et qu’une telle preuve n’est pas rapportée en l’espèce. Elle explique tout d’abord que le constat non contradictoire établi par Me Y n’est pas probant car il ne permet pas d’établir l’existence de défauts d’exécution, l’huissier se livrant à des appréciations subjectives, faisant état d’éléments non constatés ou non étayés, et étant dépourvu de toute compétence technique. Ensuite, elle estime qu’il n’est pas prouvé que les éléments rapportés par l’huissier lui seraient imputables, d’autant plus que M. X a effectué lui-même de nombreuses interventions dans la maison avant les constats de l’huissier. Enfin, elle fait valoir que les attestations établies par des représentants des sociétés Châlons Peinture et J’Novelec et produites par M. X sont également insuffisantes pour prouver l’existence de manquements et justifier la résolution du contrat, d’autant plus qu’elles ne remplissent aucune des conditions énumérées à l’article 202 du code de procédure civile. En second lieu, elle soutient qu’en toute hypothèse, la résolution du contrat, qui suppose la restitution à chaque partie de sa prestation, est impossible en l’espèce, puisque le litige porte sur d’importants travaux de sorte que la restitution de la prestation de chaque partie est impossible.

Sur sa condamnation au paiement de la somme de 30.639,29 euros, elle invoque l’absence de lien entre les factures produites par M. X et les malfaçons qui lui sont reprochées, expliquant que ces factures ne correspondent pas à la réparation de dommages qui lui seraient imputées. A titre subsidiaire, elle soutient qu’il n’est pas démontré que les travaux mentionnés dans les factures de M. X G dans leur principe et dans leur quantum à la juste réparation du préjudice allégué par lui, et permettraient donc d’évaluer celui-ci et de déterminer l’indemnité pouvant lui être versée.

Sur sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 48.670,40 euros, elle soutient que le refus de paiement de M. X n’est aucunement justifié, de sorte qu’il doit être condamné à lui payer la somme de 40.770,40 euros prévue par le devis du 13 novembre 2017, ainsi que la somme de 7.900 euros restant due sur les trois premiers devis.

Par conclusions déposées le 22 octobre 2020, M. B X demande à la cour de:

— débouter la Sarl PCMI de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions formées à hauteur de cour,

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Reims,

Y ajoutant,

— condamner la Sarl PCMI au paiement de la somme de 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens de première instance et d’appel, en ce compris le coût du procès-verbal de constat établi par Me Y, les 26 janvier et 9 février 2018, pour un coût de 340 euros TTC, dont distraction est requise au profit de Me Monnier, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

M. X fonde ses demandes sur les articles 1134, 1184, 1146 et 1147 du code civil, faisant valoir que la Sarl PCMI a commis de multiples manquements fautifs à ses obligations contractuelles engageant sa responsabilité. Il souligne à titre liminaire qu’elle ne lui a jamais adressé de devis préalablement à la réalisation des travaux, la Sarl PCMI s’étant limitée à chiffrer approximativement le coût de son intervention. Il explique qu’il a fait constater par huissier la présence de nombreux défauts et malfaçons traduisant l’existence de nombreux manquements aux règles de l’art de la Sarl PCMI'; que celle-ci n’a en outre pas réalisé

l’intégralité des travaux initialement prévus, si bien qu’il a dû mandater plusieurs sociétés aux fins de réalisation des travaux de reprises nécessaires et de poursuite du chantier, alors même que la Sarl PCMI demeure tenue d’une obligation de résultat quant aux prestations fournies. Il souligne que la Sarl PCMI ne démontre pas qu’il aurait sollicité une modification des travaux initiaux comme elle le prétend, et que la durée excessive du chantier, durant près de deux années, est en réalité uniquement imputable à la Sarl PCMI. Il conteste avoir été contacté en vue de la réception des travaux, étant rappelé que ceux-ci n’ont d’ailleurs jamais été terminés par l’entrepreneur. Il soutient que le procès-verbal de constat établi par Me Y met clairement en exergue la présence de nombreux défauts et malfaçons résultant de manquements commis par la Sarl PCMI, notamment l’absence de réagréage au niveau du sol de la chambre, l’absence d’isolation au niveau du placo, l’existence d’un réagréage inégal au niveau du sol du salon et l’absence de prise de force dans la cuisine au niveau de l’emplacement du four'; que selon l’attestation de la Sarl J’Novelec, société ayant réalisé les travaux de remise en état de l’électricité, l’installation électrique posée par la Sarl PCMI était dangereuse et contraire à la réglementation en vigueur'; que les malfaçons ne sont donc pas de simples désordres esthétiques mais constituent des manquements graves de l’entrepreneur à ses obligations contractuelles, qui a exécuté imparfaitement et partiellement les travaux prévus. Il ajoute qu’il n’a fait procéder aux travaux de reprise et de finitions jamais réalisées, et non pas d’embellissement, par d’autres entreprises qu’à compter de février 2018, soit après l’établissement du procès-verbal de constat, et pour un montant total de 30.639,29 euros. Il conclut que l’inexécution fautive de la Sarl PCMI est caractérisée et revêt une gravité justifiant l’anéantissement de la relation contractuelle aux torts de l’entrepreneur par une résolution pure et simple du contrat, laquelle est parfaitement possible, de même que l’exception d’inexécution opposée à la demande en paiement de la Sarl PCMI. Il estime enfin son préjudice matériel justifié pour un montant total de 30.639,29 euros par la production de dix factures de travaux.

Sur la demande reconventionnelle en paiement, il soutient qu’il n’a pas accepté le devis d’un montant de 40.770,40 euros TTC établi par la Sarl PCMI le 13 novembre 2017, de sorte que la demande en paiement de cette somme, qui correspond à des travaux qui n’ont pas été réalisés, est mal fondée'; qu’il a intégralement payé les travaux effectués en amont de sorte que la demande en paiement d’un solde de 7.900 euros n’est pas justifiée'; qu’en tout état de cause, au regard des multiples manquements de la Sarl PCMI et de son inexécution fautive, il était parfaitement en droit de suspendre l’exécution de ses propres obligations, conformément aux dispositions de l’article 1219 du code civil.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 novembre 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résolution du contrat

Il résulte de l’article 1184 du code civil, dans sa version en vigueur à la date du contrat litigieux, qu’une partie peut toujours demander au juge de prononcer la résolution du contrat pour manquement grave ou répété de son cocontractant à ses obligations contractuelles.

Il appartient à M. X, qui demande la résolution, d’apporter la preuve des graves manquements contractuels de la société PCMI.

La résolution étant un anéantissement rétroactif du contrat, elle entraîne la remise des parties dans l’état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat, ce qui implique dans un contrat synallagmatique des restitutions réciproques, sous la seule réserve de l’impossibilité pratique.

Lorsque le contrat n’est pas instantané et qu’il a été partiellement exécuté, son anéantissement ne peut être rétroactif mais il n’est pas impossible.

C’est donc en vain que la société PCMI soutient que la résolution du contrat est impossible en l’espèce en raison de l’impossibilité de restituer la prestation exécutée. Il convient seulement de requalifier la demande de M. X en demande de résiliation judiciaire qui n’est pas rétroactive et n’implique pas la restitution des

prestations déjà exécutées par les parties, étant précisé que M. X ne sollicite pas la restitution des sommes qu’il a payées.

Il est constant qu’aucun devis de travaux n’a été signé en l’espèce. M. X produit un courrier de la société PCMI en date du 14 février 2016 qui indique': «'Je soussigné M. H I, gérant de la Sarl PCMI, suite à notre entretien pour la rénovation du bien au 5 rue de Lude à Reims. Vous pouvez prévoir un budget de 65000/70000 euros pour les différents travaux évoqués ensemble.'».

Les factures de demandes d’acompte sont tout aussi imprécises sur l’objet des travaux.

La Sarl PCMI produit trois devis au nom de M. X, non signés, datés du 23 février 2016, portant sur des travaux de rénovation en électricité, de rénovation en peinture intérieur et de rénovation en plomberie/isolation, étant précisé qu’à cette date M. X n’était pas encore propriétaire de la maison. Même s’ils ne sont pas signés, ces documents peuvent donner à la cour une idée des travaux que la société PCMI s’était engagée à réaliser, d’autant plus que le montant total des travaux s’élève à près de 70.000 euros. Le devis pour travaux supplémentaires du 13 novembre 2017 d’un montant de 40.770,40 euros porte notamment sur le ponçage et la vérification du parquet, la fourniture et la pose d’un parquet flottant avec réagréage, la fourniture et la pose de carrelage, la dépose de murs et la pose de poteaux métalliques, le remplacement des fenêtres, la dépose des radiateurs et de la chaudière défectueux et leur remplacement, la fourniture et la pose d’un meuble de cuisine avec plaque, four et d’un évier avec robinet. Ce devis n’a pas été signé par M. X, qui a refusé de payer l’acompte de 11.000 euros réclamé le 10 décembre 2017 pour «'avancement chantier supplémentaire'».

M. X produit un procès-verbal de constat d’huissier de justice en date du 26 janvier 2018 dont il ressort notamment que':

— le sol en parquet au rez-de-chaussée et dans le salon séjour est bombé de sorte qu’il n’est pas droit et forme une bosse,

— des espaces importants entre le parquet et les plinthes sont visibles et ont été occultés par un mastic couleur marron appliqué grossièrement,

— certaines plinthes ne sont pas droites,

— les fixations d’un radiateur commencent à se détacher du mur,

— dans le couloir, les plinthes comportent des traces de peinture,

— le mastic sur la verrière a été appliqué très grossièrement,

— dans la cuisine, le plan de travail n’est pas fixé correctement,

— les marches de l’escalier sont mouchetées de peinture,

— dans la cuisine, deux prises de courant ont été posées de travers et sur un joint de carrelage,

— les verrous de la porte de la cuisine ont été peints sans protection et sont bloqués par la peinture,

— dans la salle de bains, les plinthes sont dépourvues de joints.

Le 9 février 2018, le même huissier constate':

— que le plancher a été enlevé, qu’aucun réagréage n’est présent, que des plaquettes de bois sont visibles sur le sol,

— que dans le salon séjour, le placo a été enlevé et qu’il n’existe aucune isolation,

— dans la cuisine, à l’emplacement du four, il n’existe aucune prise de force, mais une simple rallonge.

M. X produit en outre une attestation du gérant de la société J’Novelec en date du 16 octobre 2020 dont il ressort qu’il a fait des travaux d’électricité dans la maison de M. X à la suite de nombreuses malfaçons et non respect des règles de l’art. Il précise': «'Notamment dans la cuisine, il n’avait pas été posé de prise de force pour la plaque de cuisson ni de prise spécialisée pour l’alimentation du four électrique, l’ensemble plaque de cuisson et four électrique étaient raccordés via une simple rallonge de type multiprise ce qui est interdit (voir norme NFC-15100 qui stipule une prise dédiée de courant fort 32A 6² pour les plaques de cuisson et une prise dédiée 20A 2,5² pour le four) ce type de raccordement pouvait entraîner un incendie.'»

C’est en vain que la société PCMI soutient que le constat d’huissier ne fait état que d’appréciations subjectives et d’éléments non constatés et qu’il est dépourvu de toute compétence technique. En effet, les photographies du procès-verbal sont très éloquentes et confirment les constatations de l’expert rappelées ci-dessus. L’huissier n’a fait aucun commentaire subjectif et s’est borné à des constatations objectives conformes à sa mission d’officier ministériel. Certes l’huissier de justice n’a pas de compétence technique en matière de bâtiment, mais le procès-verbal de constat établit clairement que les travaux ne sont toujours pas terminés, près de deux ans après leur commencement, et qu’ils ont été mal réalisés, sans aucun soin (joints, mastic, plinthes, taches de peinture), sans réagréage avant la pose du parquet, sans isolation avant la pose du placo-plâtre, certains travaux d’électricité apparaissant même assez fantaisistes. Nul besoin d’être expert ou technicien pour se rendre compte de l’existence de malfaçons en l’espèce.

La Sarl PCMI soutient tout aussi vainement qu’il n’est pas établi que les éléments constatés lui seraient imputables sachant que M. X a fait plusieurs interventions dans la maison avant les constats. En effet, d’une part c’est l’entrepreneur lui-même qui a produit des devis, certes non signés, portant notamment sur des travaux d’électricité, plomberie, de parquet, carrelage, fenêtres, cuisine, et d’autre part toutes les factures de travaux produites par M. X émanant d’autres entreprises et en lien avec les malfaçons constatées sont postérieures aux constats d’huissier des 26 janvier 2018 et 9 février 2018 et seuls deux devis (parquet, peinture et plomberie) ont été réalisés entre les deux constats. Les deux seules factures antérieures (de la Sarl MFG et de M. Z), de juin et juillet 2016, sont relatives à la création d’un portique métallique en renfort au droit d’une baie existante. La note d’honoraires de M. Z, architecte d’intérieur, précise, dans l’objet de sa mission': «'transmission du dossier de plans au bureau d’études MFG (M. A) pour étude de renforcement de la structure au niveau de la démolition du mur de façade en rez-de-chaussée, démolition préalablement réalisée par votre entrepreneur et à consolider d’urgence'». Il en résulte que ces travaux, qui n’ont pas de rapport avec les constatations de l’huissier, étaient déjà liés à un manquement aux règles de l’art de la société PMCI qui a démoli un mur, mettant ainsi en péril la solidité du batiment.

Enfin, l’attestation de l’électricien ne respecte certes pas les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, mais ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité et il appartient au juge d’apprécier souverainement si l’attestation non conforme à l’article 202 présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction. En l’espèce, l’entreprise J’Novelec a réellement accompli des travaux d’électricité chez M. X selon devis du 19 février 2018 et factures du 14 mars 2008 et du 10 mai 2008. En outre, elle ne fait que confirmer les constatations de l’huissier de justice tout en apportant un éclairage objectif, très technique et exact sur la dangerosité de l’installation électrique réalisée par la société PCMI. Dès lors, la cour ne peut qu’accorder foi à cette attestation, de même qu’aux constats d’huissier.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il est établi que la société PCMI, qui est tenue d’une obligation de résultat en application de l’article 1147 ancien du code civil, a gravement manqué à ses obligations contractuelles, ce qui justifie d’une part que M. X, qui a payé la somme totale de 63.000 euros à la société PCMI, soit dispensée du solde du prix, et d’autre part que soit prononcée la résiliation du marché aux torts exclusifs de l’entrepreneur, étant précisé que l’appelante n’invoque aucune cause étrangère exonératoire de responsabilité.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a prononcé la résolution, sauf à la requalifier en résiliation.

Sur la demande en réparation du préjudice matériel

M. X produit les factures de travaux suivantes correspondant à la reprise des malfaçons commises par la société PCMI et la poursuite du chantier':

— factures des 10 juin et 26 juillet 2016, de la Sarl MFG et de M. Z, correspondant à la création d’un portique métallique en renfort au droit d’une baie existante d’un montant total de 1.080 euros': M. X explique que la société PCMI a démoli, par négligence, un mur porteur mettant en péril la solidité de l’immeuble, de sorte qu’il a été contraint de faire intervenir la Sarl MFG, ingénieur, et un architecte d’intérieur pour poser un IPN pour sécuriser les lieux, ce qui est confirmé par la note d’honoraires de M. Z précitée.

— facture de Châlons Peinture du 13 avril 2018 d’un montant de 17.294,22 euros portant sur des travaux de nettoyage, reprise ponctuelle de la peinture, dépose et repose du parquet, réagréage, ponçage, grattage et reprise du mastic, dépose et repose des plinthes, finitions peinture, dépose des plaques de plâtre, pose d’isolation…

— factures de la société JNovelec en date des 25 février, 14 mars et 10 mai 2018 d’un montant total de 7.779,51 euros portant essentiellement sur la «'remise en état du réseau de distribution suite malfaçon » (électricité).

— facture du 30 mars 2018 du plombier-chauffagiste «'Neuf-Rénovation'» d’un montant de 4.336,71 euros qui porte sur le «'rattrapage malfaçon sur rénovation maison'».

— factures de Brico-Dépôt des 22 février 2018 et 6 mars 2018 d’un montant total de 328,85 euros portant sur l’achat de meubles de cuisine,

soit un montant total de 30.819,29 euros.

Cependant, il résulte de l’ensemble des pièces produites par les parties que les malfaçons portent tant sur des travaux convenus initialement (électricité, isolation, peinture) et que sur des travaux supplémentaires (parquet, cuisine, radiateurs). Il est constant que M. X a payé à la société PCMI une somme totale de 63.000 euros, et ce entre juin 2016 et décembre 2017, ce qui correspond à la première partie des travaux, mais il a refusé de continuer à payer après réalisation des travaux supplémentaires compte tenu des malfaçons flagrantes. La résiliation du contrat a pour conséquence de le dispenser du paiement du solde du prix. Dès lors, il n’est pas démontré que la somme qu’il a dû débourser pour reprendre les malfaçons corresponde à un préjudice matériel persistant puisque la résiliation du contrat suffit à réparer intégralement son préjudice. Sans la résiliation, M. X aurait obtenu réparation de son préjudice mais aurait dû également payer le solde du prix des travaux confiés à la société PCMI et les deux sommes se seraient compensées.

Dès lors, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société PCMI au paiement de la somme de 30.639,29 euros et de débouter M. X de sa demande indemnitaire.

Sur la demande en paiement de la société PCMI

Il est constant que M. X a payé un total de 63.000 euros. La résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société PCMI et l’exception d’exécution invoquée à juste titre par M. X ne permettent pas à l’entrepreneur de prétendre au paiement du solde du prix.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la société PCMI de ses demandes.

Sur les demandes accessoires

Au vu de la présente décision, il y a lieu de confirmer les condamnations de la société PCMI aux dépens et au paiement d’une indemnité pour frais irrépétibles.

La société PCMI sera également condamnée aux dépens de la procédure d’appel, avec distraction au profit de l’avocat de M. X, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’équité justifie en revanche de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles d’appel. Les demandes des parties fondées l’article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal de commerce de Reims en ce qu’il a condamné la Sarl Plomberie Chauffage Maintenance Industrielle à payer à M. B X la somme de 30.639,29 euros en réparation de son préjudice matériel,

Statuant à nouveau sur ce seul chef,

DÉBOUTE M. B X de sa demande de dommages-intérêts au titre de son préjudice matériel,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

REQUALIFIE cependant la résolution du contrat en résiliation, aux torts exclusifs de la société Plomberie Chauffage Maintenance Industrielle,

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sarl Plomberie Chauffage Maintenance Industrielle aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Clément Monnier, avocat, en vertu de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 15 décembre 2020, n° 19/02045