Cour d'appel de Rennes, 20 décembre 2013, n° 10/08179

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 20 déc. 2013, n° 10/08179
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 10/08179

Sur les parties

Texte intégral

2e Chambre

ARRÊT N° 452

R.G : 10/08179

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT BRIEUC – CESSON

C/

Société BRETAGNE ASSISTANCE SAS

Société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS (C) SARL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 20 DECEMBRE 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Catherine LE BAIL, Président,

Mme Isabelle LE POTIER, Conseiller,

Mme Béatrice LEFEUVRE, Conseiller,

GREFFIER :

H I, lors des débats et lors de la mise à disposition

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 Octobre 2013

ARRÊT :

Contradictoire, rendu publiquement le 20 décembre 2013 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré prévu le 29 novembre, date indiquée à l’issue des débats

****

APPELANTE :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT BRIEUC – CESSON

XXX

XXX

Représentée par la SELARL GOURVES & ASSOCIES,

Postulant, avocat au barreau de RENNES

et par la SCP ALTER & A, avocat plaidant

INTIMÉES :

Société BRETAGNE ASSISTANCE SAS

XXX

XXX

Représentée par la SCP GAND-PASCOT, avocat Plaidant

et par la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, société en liquidation prise en la personne de son liquidateur Me Philippe COLLEU, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS (C) SARL

XXX

XXX

Représentée par la SCP GAND-PASCOT, avocat Plaidant

et par la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, société en liquidation prise en la personne de son liquidateur Me Philippe COLLEU, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Intervenante volontaire à l’instance :

XXX

XXX

XXX

Représentée par la SCP GAND-PASCOT, avocat Plaidant

et par la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, société en liquidation prise en la personne de son liquidateur Me Philippe COLLEU, Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 11 septembre 2008, le tribunal correctionnel de SAINT-BRIEUC a condamné Monsieur E A, ancien directeur général de la société BRETAGNE ASSISTANCE, pour abus de biens sociaux, à une peine d’emprisonnement assorti du sursis avec mise à l’épreuve avec obligation d’indemniser les victimes, et a reçu la société BRETAGNE ASSISTANCE en sa constitution de partie civile, Monsieur A étant condamné à lui verser la somme de 25501,79€ à titre de dommages et intérêts.

Soutenant que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL de SAINT-BRIEUC a manqué à son obligation de vigilance en laissant Monsieur A encaisser trois chèques sur son compte personnel, la société BRETAGNE ASSISTANCE et sa holding le GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS ont assigné la banque aux fins d’obtenir sa condamnation à les indemniser.

Par jugement du 14 septembre 2010, le tribunal de grande instance de SAINT-BRIEUC a :

— déclaré irrecevables les demandes formées par la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS,

— déclaré la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE, caisse de SAINT-BRIEUC CESSON, entièrement responsable du préjudice subi par la société BRETAGNE ASSISTANCE sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil,

— condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL, caisse de SAINT-BRIEUC CESSON, à verser à la société BRETAGNE ASSISTANCE la somme de 14277,14 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel et la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté les parties de leurs autres demandes.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT-BRIEUC CESSON a interjeté appel de ce jugement et, dans ses uniques conclusions du 18 mars 2011, elle demandait à la cour de le réformer du chef des dispositions qui lui font grief, de débouter la société BRETAGNE ASSISTANCE de toutes ses demandes à son encontre et de condamner in solidum la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS et la société BRETAGNE ASSISTANCE à lui payer la somme de 3500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par conclusions du 6 novembre 2012,

la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS, la société BRETAGNE ASSISTANCE et la société VITALE ASSISTANCE, intervenante volontaire, sollicitaient de la cour de :

— décerner acte à la société VITALE ASSISTANCE de ce qu’elle est désormais la holding du groupe et intervient en cette qualité devant la cour,

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré irrecevable la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS en ses demandes et en ce qu’il a limité à la somme de 14 277,14 € l’indemnisation due à la société BRETAGNE ASSISTANCE ,

— et statuant à nouveau de ces chefs,

— condamner la CAISSE DE CREDIT MUTUEL à payer à la société BRETAGNE ASSISTANCE et à la société VITALE ASSISTANCE la somme de 14277,14 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel et la somme de 15000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial subi,

— débouter la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE de toutes ses demandes ,

— la condamner à payer à la société VITALE ASSISTANCE et à la société BRETAGNE ASSISTANCE la somme de 5000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 8 novembre 2012, l’affaire étant fixée pour être plaidée à l’audience du 11 décembre 2012.

Lors de cette audience, l’avocat de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT-BRIEUC CESSON a indiqué qu’il n’avait pas eu connaissance de l’intervention volontaire de la société VITALE ASSISTANCE.

L’affaire a été mise en délibéré au 8 février 2013.

Par courriers des 11 et 14 décembre 2012, l’avocat de la caisse a écrit à la cour pour confirmer que les conclusions d’intervention volontaire ne lui ont pas été signifiées et pour solliciter la réouverture des débats.

L’avocat des intimés et de l’intervenant volontaire a écrit les 11 et 14 décembre 2012 pour exposer que ses conclusions ont été régulièrement signifiées à la cour et à Maître G par le B, mais qu’il ne s’oppose pas à une réouverture des débats.

Par arrêt du 8 février 2013, la cour a ordonné la réouverture des débats et a renvoyé l’affaire à la mise en état pour ordre à la conférence du 21 mars 2013.

Par conclusions du 22 avril 2013, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT-BRIEUC CESSON demande à la cour de:

— infirmer le jugement en date du 14 septembre 2010 du chef des dispositions qui lui font grief,

Statuant à nouveau de ce chef,

Vu l’article 1382 du Code Civil,

— dire que la Société C ne formule plus de demande à son égard,

— dire la Société C et la Société VITALE ASSISTANCE irrecevables,

— dire que la société BRETAGNE ASSISTANCE et la société VITALE ASSISTANCE sont défaillantes dans l’administration de la preuve d’une faute imputable à la caisse,

— dire que la société BRETAGNE ASSISTANCE a commis une faute source exclusive de son préjudice,

— dire que la société BRETAGNE ASSISTANCE et la société VITALE ASSISTANCE ne font la preuve ni du principe, ni de l’étendue d’un préjudice indemnisable,

En conséquence,

— débouter la société BRETAGNE ASSISTANCE et la société VITALE ASSISTANCE de toutes leurs demandes,

— condamner in solidum la Société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS, la Société VITALE ASSISTANCE et la société BRETAGNE ASSISTANCE à lui payer la somme de 3500€ par application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Le 3 juillet 2013, la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS, la société BRETAGNE ASSISTANCE et la société VITALE ASSISTANCE, ont notifiées à nouveau leurs conclusions du 6 novembre 2012.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 4 juillet 2013.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande de la société VITALE ASSISTANCE

Dés lors que la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS (C) ne formule plus aucune demande à l’encontre de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL, ce qui sera constaté, la question de son intérêt à agir est devenue sans objet.

La société VITALE ASSISTANCE intervient à la procédure, et forme les demandes précédemment présentées par C.

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL lui oppose l’irrecevabilité de son action, faute d’intérêt direct et personnel à agir.

Mais, l’intérêt à agir n’est pas subordonné au bien-fondé de l’action, et la société VITALE ASSISTANCE , qui se présente comme la nouvelle holding du groupe dont fait partie la société BRETAGNE ASSISTANCE justifie ainsi d’un intérêt à agir et sera en consequence déclarée recevable en ses demandes.

Sur le fond

La banque est tenue de l’obligation de contrôler les titres qui lui sont remis pour encaissement et engage sa responsabilité délictuelle lorsqu’elle a accepté de déposer des chèques sur un compte dans des conditions manifestement irrégulières.

En l’espèce, il est établi que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL ne conteste pas avoir procédé à l’encaissement sur le compte personnel de Monsieur A de chèques, déposés par ce dernier, qui étaient établis par des clients de la société BRETAGNE ASSISTANCE à l’ordre de celle-ci en paiement de chantiers par elle exécutés.

Le défaut d’identité entre le remettant des chèques et leur bénéficiaire devait entraîner un refus de la banque de porter le chèque sur le compte du remettant qui n’était pas désigné par les chèques, et à tout le moins de demander des explications au déposant.

La banque est mal fondée à invoquer que Monsieur A, directeur général de BRETAGNE ASSISTANCE, détenait seul le pouvoir de signature que le représentant légal dispose à l’égard des tiers de pouvoirs étendus et qu’elle n’avait pas à s’immiscer dans les affaires d’un client, alors qu’il était manifeste que, sauf à commettre des abus de biens sociaux, délit pour lequel Monsieur A a été condamné , le dirigeant n’a pas le pouvoir d’encaisser sur son compte des chèques émis au nom de la société, et il incombe à la banque de relever cette irrégularité manifeste.

Par ailleurs, la banque ne caractérise aucunement une faute de surveillance de la victime ayant contribué à son préjudice, puisque par définition la société BRETAGNE ASSISTANCE n’avait pas à surveiller le compte personnel de son directeur et que la surveillance de son propre compte ne pouvait pas révéler immédiatement les agissements frauduleux de ce dernier, la société observant à juste titre qu’elle a porté plainte le 5 novembre 2007 après la disparition de Monsieur A en octobre 2007 et qu’ avant cette date aucun élément ne lui permettait de douter des agissements de son directeur général.

En conséquence, ainsi que le premier juge l’a justement retenu, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL est entièrement responsable du préjudice causé à la société BRETAGNE ASSISTANCE par les agissements de Monsieur A et la banque doit indemniser la société de la totalité de son préjudice.

La société VITALE ASSISTANCE n’établit pas même un principe de préjudice et sera déboutée de toutes ses demandes .

S’agissant de son préjudice matériel, la société BRETAGNE ASSISTANCE sollicite la somme de 14 277,14€ correspondant au montant total de trois chèques émis à son ordre par Messieurs X, Y et Z et encaissé au profit du compte de Monsieur A.

Le jugement du tribunal correctionnel de SAINT-BRIEUC n’a pas autorité de chose jugée à l’égard de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL mais il y a lieu de rappeler que Monsieur A a été déclaré coupable du délit d’abus de biens sociaux pour avoir notamment encaissé trois chèques de clients sur son compte personnel pour un montant de 14 277,14 €.

La société BRETAGNE ASSISTANCE produit la copie des chèques émis à son ordre par Monsieur Y pour la somme de 2591, 62 € , par Monsieur D pour 8532,92 € et par Monsieur Z pour un montant de 3152,60 € ( pièce 17 ).

La CAISSE DE CREDIT MUTUEL est mal fondée à exiger de la société BRETAGNE ASSISTANCE la preuve négative de ce qu’elle n’aurait reçu aucun versement de Monsieur A.

De plus, la société BRETAGNE ASSISTANCE démontre la carence de Monsieur A en produisant les courriers par elle adressés au juge de l’application des peines du tribunal de grande instance de GRASSE pour l’informer que Monsieur A n’avait procédé à aucun versement auprès d’elle, ainsi que le jugement du 8 février 2012 prononcé par ce juge qui a ordonné la révocation totale du sursis avec mise à l’épreuve prononcé le 11 septembre 2008 par le tribunal correctionnel de SAINT-BRIEUC à l’égard de Monsieur A aux motifs que celui-ci n’a accompli aucun effort pour tenter de s’acquitter même modestement des dommages et intérêts mis à sa charge.

Il y a lieu faire droit à la demande de la société BRETAGNE ASSISTANCE de condamnation de Monsieur A au paiement de la somme de 14 277,14 € au titre de son préjudice matériel, le jugement étant confirmé.

La société BRETAGNE ASSISTANCE invoque avoir subi un préjudice commercial résultant de ce qu’elle a adressé des relances auprès des clients alors qu’ils avaient payé, ce qui a donné une mauvaise image de la société.

Il ressort des pièces produites que des courriers ont été adressés par la société BRETAGNE ASSISTANCE , en octobre 2007, à Messieurs X, Y et Z pour leur indiquer que leurs chèques ne lui étaient pas parvenus, que leur bonne foi n’était pas mise en cause et qu’elle leur demandait de vérifier auprès de leur banque le bénéficiaire du chèque.

Les courriers de protestation de Messieurs X, Y et Z ne font pas suite à ces courriers d’octobre 2007 mais à ceux qui leur ont été adressés le 31 janvier 2008 par l’avocat de la société BRETAGNE ASSISTANCE pour leur réclamer paiement du montant des chèques, alors qu’il était établi et admis , en particulier grâce aux démarches effectuées auprès de la banque par les clients, que les chèques avaient été débités de leurs comptes.

Ainsi, le mécontentement exprimé par les trois clients provient d’une relance injustifiée en janvier 2008, démarche qui n’est pas imputable à la CAISSE DE CREDIT MUTUEL.

La société BRETAGNE ASSISTANCE qui ne démontre pas l’existence d’un préjudice commercial imputable à la banque, sera déboutée de sa demande à ce titre, le jugement étant également confirmé sur ce point.

La somme attribuée par le tribunal par application de l’article 700 du code de procédure civile était justifiée et sera maintenue.

En indemnisation des frais irrépétibles d’appel, il convient d’accorder à la société BRETAGNE ASSISTANCE la somme de 3000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Constate que la société GROUPE TANGUY INVESTISSEMENTS ne formule plus aucune demande à l’encontre de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT-BRIEUC CESSON;

Confirme le jugement déféré ;

Y additant ;

Déclare recevables mais mal fondées les demandes formées par la société VITALE ASSISTANCE , intervenante volontaire;

Déboute la société VITALE ASSISTANCE de ses demandes ;

Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT-BRIEUC CESSON à payer à la société BRETAGNE ASSISTANCE la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamne la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE BRETAGNE DE SAINT-BRIEUC CESSON aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Le Greffier

Le Président

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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