Cour d'appel de Rennes, 3ème chambre commerciale, 23 juin 2020, n° 17/04634

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 3e ch. com., 23 juin 2020, n° 17/04634
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 17/04634
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

3e Chambre Commerciale

ARRÊT N° 247

N° RG 17/04634 et 17/04952

N° Portalis DBVL-V-B7B-OBQ2

SAS LE NEGOCE DES TRAVAUX PUBLICS – LNTP -

C/

SAS BETONS LIBAUD

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Verrando

Me E

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 23 JUIN 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller, rapporteur,

GREFFIER :

Madame Z A B, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 10 Mars 2020

ARRÊT :

contradictoire, prononcé publiquement le 23 Juin 2020 sur prorogation du délibéré du 05 Mai 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE et INTIMEE :

SAS LE NEGOCE DES TRAVAUX PUBLICS -LNTP- immatriculée au RCS de Nantes sous le n° 498 160 258, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège :

[…]

[…]

[…]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Marie FAVREAU substituant Me Emilie BUTTIER de la SELARL RACINE, plaidant, avocats au barreau de NANTES

INTIMÉE et APPELANTE :

SAS BETONS LIBAUD immatriculée au RCS de La Roche sur Yon sous le n° 317 666 931, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

rue C François Cail

[…]

Représentée par Me C-D E de la SCP C-D E, postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Nicolas LATOURNERIE de la SELARL PARTHENA 1, plaidant, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

FAITS ET PROCEDURE

La société Béton Libaud (la société BL) et la société Le Négoce des Travaux Publics (la société LNTP) sont toutes deux spécialisées dans le commerce de matériaux destinés aux entreprises de travaux publics’ ; exerçant leurs activités notamment en Loire-Atlantique, elles sont concurrentes l’une de l’autre.

Suivant contrat de travail en date du 31 juillet 2009, la société BL embauchait M. Y X en qualité de salarié technico-commercial pour être rattaché à son établissement de Thouaré en Loire-Atlantique et exercer son activité dans l’ensemble de ce département.

Le contrat de travail mettait à la charge du salarié un engagement de non-concurrence lui interdisant, en cas de rupture et pendant douze mois à compter de celle-ci, de travailler pour toute entreprise concurrente dans un rayon de 80 kms autour des usines, dépôts et agences dépendant de la société BL.

En contrepartie de cette interdiction, la société s’engageait à verser à son ex-salarié une indemnité forfaitaire dont les modalités de calcul étaient définies au contrat.

A l’inverse, il était également prévu que la violation de l’engagement de non-concurrence serait sanctionnée d’une clause pénale de 20.000 €, sans préjudice de tous dommages-intérêts que la société BL pourrait réclamer au salarié.

Ayant démissionné de la société BL à effet du 31 mars 2013, M. X était réembauché le 2 avril 2013 par la société LNTP en qualité d’attaché technico-commercial pour prospecter le même secteur géographique que précédemment, soit la Loire-Atlantique, le salarié ayant alors été affecté à l’agence LNTP de Saint Herblain.

Par lettre recommandée du 3 mai 2013 réitérée le 29 mai 2013, la société BL informait la société LNTP que l’embauche de M. X contrevenait à l’engagement de non-concurrence précédemment souscrit par celui-ci et, en conséquence, la mettait en demeure de faire cesser ce qu’elle estimait relever d’une concurrence déloyale.

Sans réponse de la part de la société LNTP, la société BL faisait établir, en date du 18 juin 2013 et après autorisation obtenue sur requête du président du tribunal de grande instance de Nantes, un constat d’huissier de justice qui allait confirmer que M. X travaillait effectivement à l’agence LNTP de Saint Herblain où il avait pour mission de prospecter les entreprises de travaux publics de Loire-Atlantique ainsi que des départements limitrophes.

Le 25 juin 2013, répondant aux mises en demeure de la société BL, la société LNTP lui faisait savoir que M. X contestait la validité de la clause de non-concurrence qui lui était opposée, qu’elle-même n’entendait pas prendre parti dans cette discussion mais qu’afin de préserver les intérêts de chacun, elle avait décidé de muter son salarié vers son établissement de Saint Jacques de la Lande en Ille-et-Vilaine.

Le même jour, M. X et la société LNTP régularisaient en ce sens un avenant au contrat de travail souscrit le 2 avril précédent.

Le 12 juillet 2013, la société BL saisissait le conseil de prud’hommes de Nantes d’une action tendant à voir condamner M. X au paiement de la clause pénale.

Parallèlement et par acte du 9 août 2013, elle faisait assigner la société LNTP devant le tribunal de commerce de Nantes pour concurrence déloyale, la société BL sollicitant sa condamnation à l’indemniser des préjudices qu’elle estimait subir du fait de l’embauche par la société LNTP de M. X en violation de son engagement de non-concurrence.

Par jugement du 9 juillet 2014, le conseil de prud’hommes déclarait valable la clause de non-concurrence, jugeait que M. X l’avait enfreinte en se faisant embaucher par la société LNTP, et condamnait en conséquence l’intéressé à payer à la société BL la somme de 20.000 € prévue à titre de clause pénale.

Par arrêt du 17 juin 2016, la cour d’appel de Rennes confirmait ce jugement dans son principe, mais réduisait le montant de la condamnation à la somme de 2.000 €, ayant en effet considéré la clause pénale contractuellement prévue comme manifestementdisproportionnée par rapport au préjudice réellement subi par la société BL.

Par jugement du 29 mai 2017, le tribunal de commerce, qui avait sursis à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure prud’homale’ :

— condamnait finalement la société LNTP à payer à la société BL une somme de 19.064 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice’ ;

— assortissait cette condamnation des intérêts au taux légal à compter du jugement et ordonnait leur capitalisation conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil ;

— condamnait également la société LNTP au paiement d’une somme de 4.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ';

— déboutait les parties du surplus de leurs demandes’ ;

— condamnait la société LNTP aux entiers dépens de l’instance.

Pour ce faire, les premiers juges devaient essentiellement retenir’ :

— qu’en embauchant M. X en violation de son engagement de non-concurrence et en s’abstenant de vérifier qu’il était réellement «'libre de tout engagement'» comme le salarié l’affirmait l’être, la société LNTP avait fait preuve à tout le moins de négligence, ayant dès lors engagé sa responsabilité délictuelle pour concurrence déloyale envers la société BL'; que par ailleurs et contrairement à ce qu’elle affirmait, la société LNTP n’avait pas mis fin à cette situation illicite en mutant son salarié vers son établissement de Saint Jacques de la Lande dès lors en effet qu’en dépit de cette mutation, le salarié n’avait pas réellement modifié son secteur de prospection puisqu’étant toujours en mesure d’intervenir en tous lieux, y compris sur la zone géographique visée par la clause de non-concurrence’ ;

— que si la société BL justifiait d’une certaine perte de marge sur le chiffre d’affaires désormais réalisé par la société LNTP par l’intermédiaire de M. X, en revanche elle ne rapportait pas la preuve de l’importance du préjudice dont elle se prévalait ; finalement, le tribunal devait retenait que l’embauche illicite de M. X par la société LNTP avait au moins privé la société BL d’une chance de réaliser des ventes auprès des clients dont celui-ci avait précédemment la charge, ayant ainsi estimé cette perte de chance à 20 % de la perte de marge alléguée ;

— qu’en revanche, la société BL ne rapportait pas la preuve du préjudice commercial dont elle se prévalait par ailleurs, préjudice lié, selon elle, à la révélation par M. X à son nouvel employeur de la politique tarifaire pratiquée par la société BL.

Suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 27 juin 2017, la société LNTP interjetait appel de ce jugement, cet appel ayant été enregistré sous le n° RG 17-4634.

A son tour et suivant déclaration reçue au greffe le 7 juillet 2017, la société BL interjetait également appel du même jugement, cet appel ayant été enregistré sous le n° RG 17-4952.

La société LNTP notifiait ses dernières conclusions le 9 septembre 2019, la société BL les siennes le 2 octobre 2017.

La clôture intervenait par ordonnance du 6 février 2020.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société LNTP demande à la cour de :

Vu l’article 1382 du code civil,

La recevant en son appel et en ses contestations et demandes, l’y déclarant fondée et y faisant droit,

— réformer le jugement en ce qu’il a :

* condamné la société LNTP à payer à la société BL la somme de 19.064 € avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;

* ordonné la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil ;

* condamné la société LNTP à payer à la société BL la somme de 4.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile’ ;

En conséquence,

— rejeter l’ensemble des demandes formulées par la société BL’ ;

En revanche,

— débouter la société BL de son appel incident ';

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société BL des demandes qu’elle formulait au titre de son prétendu préjudice commercial’ ;

Y ajoutant,

— condamner la société BL à payer à la société LNTP la somme de 5.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de la Selarl LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocats aux offres de droit.

Au contraire, la société BL demande à la cour de :

— déclarer l’appel de la société BL recevable et bien fondé et y faire droit ';

— en conséquence, confirmer le jugement en l’ensemble de ses dispositions, hormis celles :

* relative au quantum de la demande formulée au titre du préjudice subi pour perte de chiffre d’affaires ;

* rejetant la demande de la société BL au titre de son préjudice commercial ';

Statuant à nouveau sur ces chefs de demande :

— condamner la société LNTP à payer à la société BL la somme de 95.320 € à titre de dommages- intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir’ ;

— condamner la société LNTP à payer à la société BL la somme de 50.000 € au titre de son préjudice commercial, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ';

— ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1154 du code civil’ ;

— débouter la société LNTP de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions’ ;

Y ajoutant,

— condamner la société LNTP à payer à la société BL la somme de 6.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’ ;

— condamner la société LNTP aux entiers dépens d’instance et d’appel dont distraction au profit de la SCP C-D E conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et argumentations des parties.

MOTIFS DE LA DECISION

I – Sur la jonction :

Les instances n° 17-4634 et 17-4952 ayant le même objet, il convient d’en ordonner la jonction par application des dispositions de l’article 367 du code de procédure civile.

II – Sur l’absence de faute commise par la société LNTP lors de l’embauche de M. X :

Commet une faute délictuelle l’employeur qui, sciemment, embauche un salarié en violation de l’engagement de non-concurrence auquel celui-ci demeure soumis envers son ancien employeur, une telle faute étant en effet constitutive d’un acte de concurrence déloyale susceptible d’engager la responsabilité délictuelle de son auteur à l’égard de la victime de l’infraction.

En revanche et pour que cette faute soit caractérisée, encore faut-il que la preuve soit rapportée qu’au moment de l’embauche, le nouvel employeur avait connaissance de l’existence de l’engagement de non-concurrence précédemment contracté par le candidat à l’emploi.

Or, tel n’est pas le cas en l’occurrence, dès lors en effet qu’aux termes de son nouveau contrat de travail, M. X s’est lui-même déclaré 'libre de tout engagement', ayant par là même dissimulé à son nouvel employeur qu’il demeurait soumis à un engagement de non-concurrence au profit de l’ancien.

A cet égard et contrairement aux affirmations de la société BL, il ne saurait être présumé que la société SNTP ait eu connaissance de cet engagement du seul fait que les usages professionnels du secteur d’activité concerné rendraient habituelles les clauses de non-concurrence dans les contrats de travail.

De même, aucune présomption de connaissance de la clause insérée dans le contrat de travail établi par la société BL ne saurait être déduite de la circonstance que la société SNTP a elle-même prévu une clause semblable dans le contrat qu’elle a fait signer au même salarié, chaque employeur demeurant en effet libre d’insérer les clauses de son choix dans ses propres contrats sans que les mêmes clauses soient nécessairement appliquées par les autres employeurs.

Aussi et dès lors que M. X lui affirmait être 'libre de tout engagement', par là même qu’il n’était pas lié par un engagement de non-concurrence envers son ancien employeur, la société LNTP pouvait l’embaucher sans avoir à s’interroger davantage sur la véracité de cette affirmation.

En effet et eu égard aux relations de loyauté censées prévaloir dans les relations entre employeurs et salariés, il ne saurait être reproché à la société SNTP de ne pas avoir vérifié auprès de la société BL la véracité des déclarations qui lui étaient faites par M. X.

III – Sur l’absence de faute commise par la société LNTP postérieurement aux mises en demeure de la société BL :

Il est constant que la société LNTP a été informée de l’existence de la clause litigieuse par une première lettre recommandée distribuée le 3 mai 2013, la société BL l’ayant alors avisée de la difficulté avant de la mettre en demeure de faire cesser ce qu’elle estimait relever d’une concurrence déloyale ; cette première mise en demeure a été réitérée par une seconde lettre recommandée distribuée le 29 mai 2013.

Pour autant et dès le 25 juin 2013, soit dans un délai relativement court eu égard à la nature du litige et aux difficultés pour y remédier, la société LNTP a réagi en écrivant à la société BL une lettre aux termes de laquelle elle lui indiquait :

— prendre acte de l’existence de cet engagement de non-concurrence,

— prendre acte également de ce que le salarié contestait la validité de la clause qui lui était opposée,

— ne pas vouloir prendre parti entre M. X et la société BL,

— décider néanmoins, afin de 'préserver les intérêts de chacun', de muter le salarié vers un autre établissement situé en dehors du périmètre géographique de l’interdiction, cette mutation ayant fait l’objet, le même jour, d’un avenant au contrat de travail de M. X.

Ainsi, aucun retard ne saurait être reproché à la société SNTP qui, au contraire, a réagi aussi vite qu’elle le pouvait aux mises en demeure de la société BL en prenant les décisions qui s’imposaient, étant ici observé que la société SNTP ne pouvait pas se faire juge du litige opposant la société BL à M. X.

Certes, la cour d’appel, statuant dans le cadre de ce litige prud’homal, a considéré que la violation de la clause de non-concurrence avait pu perdurer postérieurement à la mutation du salarié dans la mesure où l’avenant prévoyait que si M. X était désormais affecté 'sur la zone d’influence commerciale’ de l’établissement de Saint Jacques de la Lande, pour autant 'la société SNTP se réservait en tout état de cause le droit de modifier à tout moment, en fonction des nécessités de l’organisation commerciale mais aussi des résultats enregistrés par M. X, le secteur confié'.

Encore faudrait-il, pour que la responsabilité de la société SNTP puisse être engagée à ce titre, que la société BL établisse qu’en dépit de la mutation du salarié, celui-ci a effectivement continué le démarchage prohibé, en l’occurrence celui des entreprises de travaux publics de Loire-Atlantique.

Or, force est de constater que la société BL ne rapporte pas cette preuve, celle-ci se bornant en effet à justifier d’une diminution de son chiffre d’affaires lié à la clientèle précédemment entretene par M. X, ce qui ne démontre nullement que le chiffre d’affaires manquant ait été réalisé dans le même temps par la société SNTP, encore moins qu’il l’ait été par l’intermédiaire du salarié en violation de son engagement de non-concurrence.

Au contraire, la société LNTP produit une attestation du supérieur hiérarchique de M. X qui affirme qu’à la suite de la mutation dont celui-ci a fait l’objet, le salarié a été chargé de la prospection commerciale sur le secteur de l’Ille-et-Vilaine ainsi que des Côtes d’Armor, de même que de missions sédentaires à Saint Jacques de la Lande ainsi qu’à Miniac-Morvan en Ille-et-Vilaine.

La société LNTP produit également en pièce n° 20 une liste des clients démarchés par M. X depuis son arrivée à Saint Jacques de la Lande, en l’occurrence uniquement des entreprises des Côtes d’Armor et d’Ille-et-Vilaine, soit des secteurs géographiques non concernés par la clause de non-concurrence.

Au surplus, il est établi qu’avant même la démission de M. X, les deux sociétés BL et LNTP prospectaient déjà les mêmes clients, la plupart d’entre eux ayant en effet un compte ouvert simultanément auprès des deux sociétés.

Ainsi et quand bien même une partie du chiffre d’affaires perdu par la société BL aurait été récupéré par la société LNTP, d’une part aucun détournement de clientèle ne peut être invoqué, d’autre part il n’est pas établi que ce transfert partiel de chiffre d’affaires soit le fait de M. X lui-même, les clients concernés ayant pu avoir d’autres raisons de commercer avec la société LNTP plutôt qu’avec la société BL : tarifs, disponibilité des produits etc.

En conséquence, la société BL ne rapporte pas la preuve de ce que, même après avoir eu connaissance de l’engagement de non-concurrence incombant au salarié, la société LNTP ait

contribué, par une attitude fautive de sa part, à la violation de cet engagement, ni qu’elle ait de ce fait contribué à la perte de marge alléguée par la société BL.

Par suite, la société BL sera déboutée de la demande indemnitaire qu’elle forme à ce titre à l’encontre de la société LNTP, le jugement déféré devant être infirmé en ce sens.

IV – Sur la révélation prétendue de la politique tarifaire de la société BL :

Quant bien même M. X avait connaissance de la politique tarifaire pratiquée par la société BL, pour autant il n’est pas établi qu’il l’ait révélée à la société SNTP lors de son embauche par celle-ci.

Ainsi, c’est sans aucune démonstration que la société BL affirme que depuis qu’elle a recruté M. X, la société SNTP dispose désormais d’informations privilégiées lui permettant de se positionner plus favorablement envers la clientèle prospectée et de causer un préjudice commercial à la société BL.

La cour observe d’ailleurs qu’il n’est pas démontré ni même allégué que M. X ait détourné des documents confidentiels, notamment tarifaires, au moment de sa démission.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société BL de la demande indemnitaire qu’elle forme à ce titre.

V – Sur les autres demandes :

Même partie perdante, la société BL sera dispensée de toute condamnation au titre des frais irrépétibles.

En revanche, elle supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour':

— ordonne la jonction des instances n° 17-4634 et 17-4952 ;

— confirme le jugement en ce qu’il a débouté la société Bétons Libaud de sa demande indemnitaire pour préjudice commercial ;

— l’infirmant pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant :

* déboute la société Bétons Libaud de sa demande indemnitaire pour perte de marge ;

* déboute la société Le Négoce des Travaux Publics de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamne la société Bétons Libaud aux entiers dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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