Cour d'appel de Riom, Chambre commerciale, 25 avril 2018, n° 16/02713

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Riom, ch. com., 25 avr. 2018, n° 16/02713
Juridiction : Cour d'appel de Riom
Numéro(s) : 16/02713
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Le Puy-en-Velay, 20 octobre 2016, N° 15/00910
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 25 Avril 2018

RG N° : 16/02713

VTD

Arrêt rendu le vingt cinq Avril deux mille dix huit

Sur APPEL d’une décision rendue le 21 octobre 2016 par le Tribunal de grande instance du PUY EN VELAY (RG n° 15/00910)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. François RIFFAUD, Président

M. François KHEITMI, Conseiller

Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La société PM AUTO LISTING

SASU immatriculée au RCS du PUY EN VELAY sous le […]

[…]

[…]

Représentant : la SELARL GRAS – OGIER, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE

APPELANTE

ET :

M. A X

[…]

69440 SANTE-CATHERINE

Représentant : Me Cédric AUGEYRE, avocat au barreau de HAUTE-LOIRE

INTIMÉ

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 22 Février 2018, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame THEUIL-DIF, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 25 Avril 2018 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. François RIFFAUD, Président, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 19 juillet 2012, M. A X a acquis un véhicule d’occasion de marque NISSAN modèle Navara immatriculé 1BVG843 d’un kilométrage de 118 560, auprès du garage AUTO LISTING pour un montant de 9 500 euros.

Un contrôle technique a été réalisé le 21 août 2014, et a mis à jour des désordres affectant le véhicule, notamment une 'corrosion perforante et/ou fissures/cassures concernant le demi-train avant'.

Mandaté par l’assureur de M. X, le cabinet B Y a réalisé une expertise amiable contradictoire, et ce en présence du cabinet RHÔNEEXPERT, lequel a rendu son propre rapport.

Le 9 mars 2015, le conseil de M. X a adressé un courrier au garage AUTO LISTING afin d’aboutir à une transaction amiable, en vain.

Par acte d’huissier de justice du 8 septembre 2015, M. A X a fait assigner la SARL PM exerçant sous l’enseigne « AUTO LISTING » devant le tribunal de grande instance du Puy-en-Velay, sur le fondement de la garantie des vices cachés pour obtenir la résolution de la vente.

Par jugement du 21 octobre 2016, cette juridiction a :

— ordonné la résolution pour vice caché de la vente du véhicule ;

— condamné la SARL PM à payer à M. X la somme de 9 500 euros au titre de la restitution du prix, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

— dit que M. X devrait lui restituer le véhicule dans un délai de huit jours à compter de la restitution du prix de vente ;

— condamné la SARL PM à payer à M. X la somme de 6 634,20 euros à titre de dommages et intérêts au titre des préjudices subis, portant intérêts au taux légal à compter du jugement ;

— débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

— condamné la SARL PM à payer à M. X la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Le tribunal a considéré que :

— M. X, acheteur non averti, était en droit d’être informé par la société venderesse, professionnelle de l’automobile, de ce que la corrosion existait sur le véhicule et pouvait devenir à terme perforante, ce qu’elle n’avait pas fait ; que l’existence d’un vice qui était bien caché au moment de la vente, était caractérisée ; que la gravité du vice était de nature à justifier la résolution de la vente ;

— qu’en application de l’article 1645 du code civil, la SARL PM, vendeur professionnel, serait tenu de rembourser à M. X la facture du changement de l’embrayage (1 150,20 euros), deux factures de frais de gardiennage (5 484 euros) ; que néanmoins, le paiement de la carte grise et la réalité du préjudice de jouissance n’étaient pas justifiés.

La SARL PM AUTO LISTING a interjeté appel de ce jugement, suivant déclaration électronique reçue au greffe de la cour en date du 22 novembre 2016.

Aux termes de ses dernières conclusions reçues au greffe en date du 17 février 2017, l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement, et de :

— débouter M. X de ses demandes ;

— à titre subsidiaire, ordonner une mesure d’expertise ;

— condamner M. X à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et, aux dépens.

Elle rappelle que lors de la vente, le véhicule avait 12 ans d’âge et avait parouru 178 500 km. Elle expose que M. Y qui a établi le rapport d’expertise amiable, a indiqué avoir relevé une importante corrosion perforante sur l’ensemble du châssis, affaiblissant les points d’ancrage mécaniques jusqu’au point de rupture ; que toutefois, il se gardait bien de préciser à quel moment ce phénomène de corrosion se serait manifesté.

Elle souligne que le rapport amiable RHÔNEXPERT a indiqué que la corrosion perforante n’était pas apparente lors de la vente du véhicule à M. X ; que le châssis était de toute évidence en état de corrosion importante, à l’intérieur des longerons et traverses comme d’autres châssis de 15 ans ; que le site « LE BON COIN »

mettait en ligne des Navara avec châssis corrodés à des prix situés entre 3 500 et 4 000 euros ; que la corrosion s’est propagée et a continué de progresser jusqu’à perforation.

Elle en conclut qu’il n’est nullement établi que la corrosion perforante rendant le véhicule impropre à son utilisation existait au moment de la vente. Elle met en avant le caractère contradictoire des deux rapports d’expertise.

Dans ses dernières conclusions reçues au greffe en date du 12 avril 2017, M. A X sollicite au visa des articles 1641 et suivants du code civil, la confirmation du jugement, sauf à parfaire le montant du préjudice économique inhérent aux frais supplémentaires de gardiennage.

Il conclut au rejet de la demande d’expertise de la SARL PM AUTO LISTING et sollicite la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Il estime que les deux expertises amiables ne sont pas contradictoires, mais complémentaires : toutes deux affirment qu’au moment de la vente, le véhicule était atteint d’un phénomène de corrosion. Il fait valoir que l’expert Y a souligné que la corrosion était invisible à M. X puisqu’une couche de peinture avait été appliquée sur l’ensemble du châssis avant la vente. Cette dissimulation est avérée car le contrôle technique du 18 juillet 2012 mentionne : « Infrastructure soubassement : contrôle impossible. »

Il en conclut que la venderesse, professionnelle de l’automobile d’occasion, a dissimulé le phénomène de corrosion en repeignant le châssis, rendant le contrôle de cet élément impossible avant la cession et que lui même, acheteur profane et non averti, ne pouvait pas avoir connaissance de ce vice en raison de cette dissimulation. Il ajoute que s’agissant des annonces de mise en vente de véhicules de même nature mais corrodés, celles-ci ne dissimulent pas le phénomène de corrosion aux acquéreurs qui achètent en connaissance de cause et à un moindre prix.

Enfin, il conclut que l’ancienneté du litige rend inopportune un nouvel examen du véhicule.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 décembre 2017.

Il sera renvoyé pour l’exposé complet des demandes et moyens des parties, à leurs dernières conclusions.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- Sur l’existence d’un vice caché

En application de l’article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

L’article 1644 du code civil énonce que dans le cas des articles 1641 et 1643, l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats et des explications des parties que le véhicule NISSAN Navara, mis en circulation le 21 décembre 1999, présentait un kilométrage de 118 560 au moment de son acquisition par M. X, tel que cela résulte de la déclaration de cession du 19 juillet 2012. Le compteur a été remplacé le jour de la cession, et il présentait un kilométrage de 89 037.

Le véhicule a fait l’objet d’un contrôle technique le 18 juillet 2012, le procès-verbal mentionnant que le contrôle du soubassement était impossible.

Un nouveau contrôle technique a eu lieu le 21 août 2014 faisant apparaître une corrosion perforante et/ou fissure/cassure sur le demi-train avant et sur le soubassement, alors que le véhicule présentait un kilométrage de 107 185.

Un expertise amiable du véhicule a eu lieu en présence des experts mandatés par les compagnies d’assurance respectives des parties. Chaque expert a rendu un rapport.

Il ressort de celui du cabinet de M. B Y daté du 25 novembre 2014, expert mandaté par l’assureur de M. X, que les désordres du véhicule consistent en une importante corrosion perforante sur l’ensemble du châssis affaiblissant les points d’ancrage mécaniques jusqu’au point de rupture. Le châssis est à remplacer, y compris les éléments mécaniques notifiés sur le dernier contrôle technique, les réparations avoisinent le prix du véhicule. L’expert estime que le véhicule est impropre à la circulation, dangereux pour l’utilisateur et les usagers de la route. Il indique que la corrosion s’est accentuée dans le temps jusqu’à la perforation du métal et qu’il est probable que la peinture qui recouvrait le châssis au moment de la vente dissimulait un début de corrosion puisque le contrôle technique ne l’avait pas constaté et il était noté : « infrastructure, soubassement, contrôle impossible ».

Le rapport du cabinet RHÔNEXPERT, expert mandaté par l’assureur de la SARL PM AUTO LISTING, daté du 1er décembre 2014, conclut que la corrosion est effectivement perforante et rend le véhicule dangereux ; qu’il s’agit d’un véhicule âgé de 15 ans, que la corrosion était de toute évidence présente à l’intérieur des longerons du châssis, mais non perforante lors de la vente du véhicule par AUTO LISTING ; que la corrosion a progressé durant les deux ans qui ont suivi la vente.

Dans la partie « Avis technique », l’expert observe que le contrôle technique du 18 juillet 2012 ne fait pas état de corrosion perforante, et que le garage Z qui a remplacé l’embrayage le 22 février 2014, n’a pas noté la gravité de l’état du châssis. Il ajoute qu’il est probable que M. X ou les intervenants aient gratté certaines zones boursouflées, ce qui a eu pour conséquence de mettre en évidence l’état de corrosion avancé.

Ainsi, les deux experts considèrent qu’il existait une corrosion du châssis au moment de la vente du véhicule NISSAN Navara, même si elle n’a pas été détectée lors du contrôle technique du 18 juillet 2012.

La différence d’analyse des experts est que pour l’expert du cabinet RHÔNEXPERT, la corrosion n’était pas perforante au moment de la vente, alors que pour M. Y, la peinture qui recouvrait le châssis a empêché la découverte d’un début de corrosion.

Toutefois, il est établi que la corrosion du châssis existait au moment de la vente, et comme l’a relevé le premier juge, cette corrosion était ou est devenue perforante rendant le véhicule impropre à son utilisation.

M. X n’est pas un professionnel de l’automobile, et n’a pas pu constater et mesurer l’ampleur de ce phénomène. Il était en droit d’être informé par la société PM AUTO LISTING, professionnelle de l’automobile, de l’existence de cette corrosion sur le véhicule pouvant devenir perforante à terme.

Ainsi, est caractérisée l’existence d’un défaut caché de la chose vendue qui la rend impropre à l’usage auquel on la destine, et l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou en aurait donné un moindre prix s’il l’avait connu.

La demande d’expertise sera rejetée, les éléments produits aux débats sont suffisants pour trancher le litige.

Par ailleurs, la gravité du vice justifie la résolution de la vente.

Il y a donc lieu de prononcer la résolution du contrat de vente passé entre la SARL PM AUTO LISTING et M. X. La société devra restituer le prix de vente, à savoir la somme de 9 500 euros et M. X devra de son côté restituer le véhicule à la société venderesse, dans un délai de huit jours à compter de la restitution du prix de vente.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les préjudices

En vertu de l’article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

L’article 1646 prévoit que si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu’à la restitution du prix, et à rembourser à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente. Les frais occasionnés par la vente s’entendent des dépenses directement liées à la conclusion du contrat.

Toutefois, le vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose vendue, sa bonne foi ne l’exonère pas de verser à l’acquéreur des dommages et intérêts à titre compensatoire.

En l’espèce, la SARL PM AUTO LISTING est un vendeur professionnel. Il est donc présumé connaître les vices affectant le véhicule vendu. Il est ainsi tenu à la réparation de l’entier préjudice subi par M. X.

Le tribunal a retenu que M. X produisait aux débats des justificatifs de certains de ses préjudices, à savoir une facture de remplacement de l’embrayage du 22 février 2014 (1 150,20 euros) et deux factures de frais de gardiennage du véhicule depuis le 1er mars 2015 jusqu’au 31 mai 2016 (5 484 euros). Il a en revanche rejeté les demandes relatives aux frais de certificat d’immatriculation et au préjudice de jouissance, préjudices qu’il a considérés comme non justifiés ou non établis.

M. X sollicite la confirmation du jugement, sauf à parfaire le montant du préjudice économique inhérent aux frais supplémentaires de gardiennage.

Le jugement sera confirmé quant aux préjudices retenus et leur quantum. M. X ne produit pas de facture supplémentaire par rapport aux frais de gardiennage, la dernière facture s’arrêtant au 31 mai 2016. Il n’y a donc pas lieu de 'parfaire le montant du préjudice économique inhérent aux frais supplémentaires de gardiennage'.

Par ailleurs, il n’a pas été réclamé le coût de la carte grise en appel.

- Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de confirmer le jugement sur les condamnations sur le fondement l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La SARL PM AUTO LISTING succombant entièrement à l’instance, sera condamnée aux dépens d’appel et à verser à M. X la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;

Rejette la demande d’expertise judiciaire formée par la SARL PM AUTO LISTING ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute M. A X de sa demande visant à parfaire le montant du préjudice économique inhérent aux frais supplémentaires de gardiennage ;

Condamne la SARL PM AUTO LISTING aux dépens et à payer à M. A X la somme de mille cinq cents euros (1.500 €) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

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