Cour d'appel de Toulouse, 7 janvier 2015, n° 12/02364

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 7 janv. 2015, n° 12/02364
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 12/02364
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 15 janvier 2012, N° 10/00536

Sur les parties

Texte intégral

.

07/01/2015

ARRÊT N°6

N° RG: 12/02364

XXX

Décision déférée du 16 Janvier 2012 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE – 10/00536

Madame B

Y F – X

représentée par Me DURAND-LEVAVASSEUR

C/

BANQUE POPULAIRE OCCITANE

représentée par Me LESTRADE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e Chambre Section 1

***

ARRÊT DU SEPT JANVIER DEUX MILLE QUINZE

***

APPELANTE

Madame Y F – X

XXX

XXX

Représentée par Me Céline DURAND-LEVAVASSEUR, avocat au barreau de Toulouse

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 31555-2012-020698 du 13/12/2012 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Toulouse)

INTIMÉE

BANQUE POPULAIRE OCCITANE

XXX

XXX

Représentée par Me Christine LESTRADE de l’association cabinet d’avocats DECKER, avocat au barreau de Toulouse

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 novembre 2014, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant G. COUSTEAUX, président et V. SALMERON, conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

G. COUSTEAUX, président

V. SALMERON, conseiller

M. P. PELLARIN, conseiller

Greffier, lors des débats : C. LERMIGNY

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par G. COUSTEAUX, président, et par C. LERMIGNY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS :

Le 27 novembre 1992, Mustapha X, client de la Banque Populaire Occitane (BPO), a adhéré à un contrat d’assurance groupe dénommé « Fructi Budget » couvrant le risque de décès par accident et assurant le paiement d’une rente de 24 mois au conjoint suivant. M. X est décédé le XXX des suites d’une longue maladie.

Sa veuve, Y F veuve X, n’a pas reçu de la BPO le versement de la rente en raison du décès de son époux.

Par exploit du 4 janvier 2010, elle a fait assigner la BPO devant le tribunal de grande instance (TGI) de Toulouse en paiement de dommages-intérêts pour manquement au devoir d’information et de conseil de la banque.

Par un jugement rendu le 16 janvier 2012, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

— rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de la demande de Y X ;

— débouté Madame X de toutes ses demandes ;

— dit n’y avoir pas lieu à faire application de l’article 700 CPC ;

— laissé les dépens à la charge de l’Etat.

Le tribunal, sur la prescription quinquennale qui en application de l’article 2224 du code civil commence à courir à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, a constaté qu’il n’est nullement établi que Mme X ait eu connaissance du contrat d’assurance avant le décès de son mari et que Mme X est analphabète ; c’est avec le concours de sa fille qu’elle a eu connaissance du contrat.

Sur le fond, le tribunal a constaté que le contrat couvre le décès du souscripteur suite à un accident.

De même, il a dit que la Banque Populaire Occitane avait parfaitement exécuté son devoir d’information dans la mesure où elle avait remis à M. X la notice du contrat et normalement exécuté son devoir de conseil en lui faisant souscrire une assurance en cas de décès par accident. Il n’est pas établi que la maladie de M X était connue de la BPO s’agissant d’une maladie sans signe visible et il n’est pas certain que la Cie d’assurance aurait accepté d’assurer un homme malade et invalide à100% contre le risque décès pour maladie.

Par une déclaration en date du 10 mai 2012, Y X a relevé appel du jugement.

Par décision du 13 décembre 2012, Y X a obtenu l’aide juridictionnelle totale.

La clôture a été fixée au 14 octobre 2014.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions notifiées le 25 juillet 2012, auxquelles il sera expressément fait référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, Y X demande de :

— confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de sa demande

— de l’infirmer en ce qu’il l’a déboutée de l’intégralité de ses demandes et condamner la BPO à lui payer la somme 36.587,80 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au visa des articles 602 du code civil et L111-1 du code de la consommation,

— de condamner la BPO aux entiers dépens.

Sur la prescription de l’action, elle reprend les arguments de première intsance et les motifs du tribunal. La BPO était parfaitement informée de l’analphabétisme de Y Milde puisqu’elle a adressé l’inventaire de la succession le 21 juin 2007 à sa fille Mme Z. C’est cette dernière qui a découvert l’existence du contrat d’assurance décès accident en constatant des prélèvements de cotisations sur le compte de ses parents plusieurs mois après la mort de son père, cotisations remboursées depuis. Le contrat litigieux lui a été adressé le 17 juin 2008.

Invalide à 100% depuis une récidive de cancer à l’anus en 1981, il a souscrit le contrat d’assurance décès le 27 novembre 1992. Il bénéficiait de l’aide d’une tierce personne. Le conseiller de la BPO le savait nécessairement ; son invalidité était perceptible par son interlocuteur contrairement à l’affirmation du tribunal. Ce contrat était inadapté à sa situation lui qui était si malade et maitrisait peu le français ; il ne savait ni lire ni écrire le français comme en attestent médecin, infirmière, amie et proches. Il n’a pas pu remplir le contrat d’assurance ; il a juste apposé une signature sur le document et n’a pu lire les conditions générales valant notice.

En 2002, il a contracté un nouveau cancer qui s’est généralisé et l’a emporté.

Elle invoque les obligations du vendeur (article 602 du code civil) et de tout professionnel à l’égard d’un consommateur, (article L111-1 du code de la consommation) pour établir le manquement de la BPO à son devoir d’information et de le mettre en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.

Par conclusions notifiées le 20 septembre 2012, auxquelles il sera expressément fait référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, la BPO demande :

— d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de la demande de Z. X.

— de constater qu’elle n’a pas manqué à son devoir de conseil à l’égard de Mustapha Milde et de débouter Z. X de ses demandes

— à titre subsidiaire, de dire et juger qu’elle ne peut être condamnée à une somme supérieure à 951,36 euros

— de condamner Z. Milde au paiement de 4.000 euros au titre de l’article 700 CPC, ainsi qu’aux entiers dépens.

Sur la prescription, elle considère que Z. X avait connaissance de l’existence du contrat par l’envoi des courriers de la BPO et par les prélèvements sur les relevés de compte bancaire. La BPO a appris à l’audience que Y X était illettrée. Z. X est de mauvaise foi car elle connaissait l’existence de ce contrat. La demande est irreceveable par prescription de l’action.

Elle conteste tout manquement à son obligation d’information en 1992 par souscription d’un contrat inadapté. Elle affirme qu’elle ignorait l’état de Mustapha X. Il a d’ailleurs survécu 15 ans à son cancer et est décédé en 2007 à 69 ans. En tout état de cause, si la BPO avait connu la maladie, elle n’aurait pas proposé un contrat d’assurance décès, les assureurs refusant d’assurer un risque avéré. De plus, rien ne privait M. X de se faire assister d’une tierce personne pour comprendre les conditions générales du contrat. Le contrat est clair ; il s’agit du risque décès accident avec une définition précise.

La mention manuscrite est manifestement écrite de la main de Mustapha X preuve qu’il n’était pas aussi analphabète que veut le faire croire Z. X. Il connaissait précisément les termes du contrat.

Elle ne réclame pas l’exécution du contrat sachant qu’il ne s’applique pas à la situation de décès de M. X.

A titre subsidiaire, elle ne pourrait prétendre à plus de 951,36 euros correspondant au coût de la garantie souscrite 39,64 euros x 24 mois.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la prescription, après examen des pièces soumises à son appréciation, la cour retient que le premier juge, par des motifs précis et pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.

En effet, l’analphabétisme de Y X est établi et aucun élément ne rapporte la preuve qu’elle a eu connaissance de l’existence du contrat assurance décès accidentel litigieux avant le 17 juin 2008. Elle a assigné la BPO dès le 4 janvier 2010. Il convient en conséquence de confirmer la décision de ce chef.

Sur le fond, il appartient à Y X de rapporter la preuve de la faute de la BPO et en l’espèce que le contrat souscrit par Mustapha X était inadapté à sa situation.

Elle rappelle qu’il a souscrit non pas un contrat d’assurance vie comme le suggèrent certaines attestations mais un contrat d’assurance décès accidentel.

Aucune attestation produit n’établit que l’invalidité à 100% de Mustapha X l’écartait de tout risque de décès accidentel. De plus, en page 8 de ses conclusions, Zorha X explique que le 27 novembre 1992, son mari s’est rendu à la banque pour effectuer un retrait d’argent et que, parallèlement à cette formalité, la banque lui a fait souscrire le contrat litigieux. La cour en déduit que Mustapha X se déplaçait seul ou accompagné d’une tierce personne, en raison de son invalidité, pour se rendre à la banque et que par son mode de vie, il était donc bien en situation d’encourir l’aléa du décès accidentel. La preuve du caractère totalement inadapté du contrat d’assurance décès accidentel n’est donc pas rapporté.

Par ailleurs, le seul fait qu’il ne comprenait pas bien le français ou ne le lisait pas couramment n’établit pas pour autant qu’il a signé le contrat d’assurance sans comprendre la portée de son engagement. La preuve n’est pas rapportée que la BPO ne lui a pas donné connaissance en détails de la notice du contrat ni qu’il ne s’était pas fait accompagner d’une personne de confiance avant d’apposer sa signature sur le document et ce d’autant plus que les attestations de ses proches insistent sur le caractère très secret de ses démarches personnelles concernant son patrimoine pour expliquer le fait que Y X ne connaissait pas l’existence de ce contrat d’assurance décès accidentel alors qu’elle en était la première bénéficiaire.

Il convient par ailleurs, après examen des pièces soumises à l’appréciation de la cour, de retenir les motifs pertinents du premier juge, qui a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.

Il convient en conséquence de débouter Y X de ses demandes et de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement

Condamne Y X aux dépens d’appel avec distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,

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