Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 19 avril 2019, n° 17/03935

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4e ch. sect. 2, 19 avr. 2019, n° 17/03935
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 17/03935
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 11 juillet 2017, N° F15/02957
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

19/04/2019

ARRÊT N°19/229

N° RG 17/03935 – N° Portalis DBVI-V-B7B-LYLJ

APB/VM

Décision déférée du 12 Juillet 2017 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F 15/02957)

D-E F

SAS PROMEDIS PROMOTION MEDICALE ET INFORMATION SANTE

C/

A X

[…]

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4e Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DIX NEUF AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANTE

SAS PROMEDIS PROMOTION MEDICALE ET INFORMATION SANTE

[…]

[…]

Représentée par Me Olivier MASI de la SELARL CONSEIL JURISTES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, plaidant, et par Me Pascal GORRIAS de la SCP BOYER & GORRIAS, avocat au barreau de TOULOUSE, postulant

INTIMÉE

Madame A X

[…]

[…]

Représentée par Me Armelle AMICHAUD-DABIN de la SELARL AAD AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Alexandra PIERRE-BLANCHARD, conseillère chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

G H, présidente

Christine KHAZNADAR, conseillère

Alexandra PIERRE-BLANCHARD, conseillère

Greffière, lors des débats : B C

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par G H, présidente, et par B C, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Promedis a adressé à Mme X un courrier daté du 22 mai 2015 ainsi libellé :

« Nous avons le plaisir de vous confirmer par la présente que votre candidature a été retenue dans le cadre d’un contrat à durée déterminée du 1er juin 2015 au 31 décembre 2015 au poste de visiteur médical.

Vous êtes engagée dans le cadre d’une mission exclusive pour les laboratoires Lundbeck. Votre secteur de prospection LU0101 détaillé ci-dessous :

[…]

[…]

Les informations concernant la formation vous seront communiquées prochainement.

Vous trouverez ci-joint la liste des documents à nous fournir pour votre dossier personnel.

Nous vous transmettrons votre contrat de travail ultérieurement. »

Mme X a signé ce courrier avec la mention « bon pour accord ».

La société a convoqué la salariée le 26 mai 2015 à une formation prévue les 1er et 2 juin suivants en région parisienne puis lui a demandé le 28 mai 2015 des précisions sur son identité afin de finaliser la déclaration URSSAF.

Par la suite la formation a été annulée et la société Promodis n’a pas donné suite à l’embauche de Mme X.

Estimant qu’elle bénéficiait d’une promesse d’embauche qui devait être suivie d’un contrat de travail, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes le 26 novembre 2015.

Par jugement du 12 juillet 2017, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :

— jugé que la lettre du 22 mai 2015 est une promesse d’embauche, que cette promesse devait être suivie d’un contrat de travail entre la société Promedis et Mme X, que la promesse d’embauche doit être requalifiée en contrat de travail et que sa rupture cause un préjudice à Mme X,

— condamné la société Promedis à payer à Mme X :

* 17 675 € de dommages et intérêts pour rupture abusive de promesse d’embauche,

* 1 767,50 € au titre de l’indemnité de congés payés,

* 1 767,50 € au titre de la prime de précarité,

* 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté Mme X de l’ensemble de ses autres demandes,

— débouté la société Promedis de l’ensemble de ses demandes,

— condamné la société Promedis aux entiers dépens.

La SAS Promedis a relevé appel de ce jugement dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 février 2019 auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des moyens, la société Repsco Promotion demande à la cour de :

— prendre acte qu’elle vient aux droits de la société Promedis suite à une transmission universelle de patrimoine du 18 décembre 2018,

— juger que la lettre du 22 mai n’est ni une offre de contrat de travail, ni une promesse unilatérale de contrat de travail, ni une promesse d’embauche, ni un contrat de travail,

— infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté Mme X de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

— débouter Mme X de l’ensemble de ses demandes et la condamner aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 février 2019, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des moyens, Mme X demande à la cour de :

— juger que la promesse d’embauche du 22 mai 2015 est précise, ferme et complète, que la rupture par la société Promedis de cette promesse d’embauche est abusive,

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié la promesse d’embauche en contrat de travail d’une durée de 7 mois,

— le réformer concernant les sommes allouées,

— condamner la société Promedis à lui payer :

* 27 941,27 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

* 3 628,80 € à titre d’indemnités pour congés payés,

* 3 628,80 € au titre de la prime de précarité,

— infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

— condamner la société Promedis à lui payer :

* 3 000 € au titre du préjudice moral,

* 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* à supporter les entiers dépens.

MOTIFS

En application des dispositions combinées de l’article 1134 du code civil, en sa rédaction applicable au litige, et de l’article L. 1221-1 du code du travail, l’acte par lequel un employeur propose un engagement précisant l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction et exprime sa volonté d’être lié en cas d’acceptation constitue une offre de contrat de travail qui peut être librement rétractée tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire. Une fois l’offre parvenue, la rétractation avant l’expiration du délai fixé par son auteur ou, à défaut, à l’issue d’un délai raisonnable, fait obstacle à la conclusion du contrat de travail et engage la responsabilité extra-contractuelle de son auteur.

En revanche, la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat de travail, dont l’emploi, la rémunération et la date d’entrée en fonction sont déterminés et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. La révocation d’un tel engagement pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat de travail précédemment promis.

Mme X soutient que les termes du courrier du 22 mai 2015 sont clairs et non équivoques sur l’intention de la société Promedis de l’engager pour un emploi qui est précisé, que cette promesse d’embauche vaut contrat de travail, ce qui est confirmé par les échanges ultérieurs, que l’absence de mention de la rémunération n’est pas un frein à la requalification de la promesse d’embauche en contrat de travail.

La SAS Repsco Promotion fait valoir que la lettre du 22 mai 2015 adressée à Mme X ne mentionne ni la rémunération ni le temps de travail donc ne comporte pas tous les éléments essentiels du contrat de travail et ne peut donc être qualifiée de promesse d’embauche ni de promesse

unilatérale de contrat de travail ni d’offre de contrat de travail au regard de la définition qui en est donnée par la jurisprudence la plus récente.

Elle ne peut non plus être considérée comme un contrat de travail.

Le courrier du 22 mai 2015 mentionne le poste pour lequel la candidature de Mme X a été retenue, la date d’embauche et la durée du contrat, le secteur d’activité et le lieu du travail, mais ne précise ni les horaires de travail ni la rémunération.

Ce courrier ne peut donc constituer ni une promesse unilatérale ni une offre de contrat de travail.

Mme X expose qu’elle avait été embauchée du 13 août 2014 au 31 mai 2015 par la société MC² Ressources humaines dans le cadre d’un contrat de mission temporaire pour exercer les mêmes fonctions de visiteur médical sur le même secteur pour le compte de la même entreprise la société Lundbeck, que l’emploi proposé par la société Promedis était comparable et identique de sorte qu’elle aurait bénéficié de la même rémunération fixe, des mêmes primes et des mêmes avantages en nature (véhicule, frais professionnels…).

Toutefois, aucun des éléments de la cause ne permet de déterminer que la société Promedis envisageait de verser à Mme X la même rémunération que celle payée par une autre société et encore moins qu’elle s’y était engagée.

En outre, l’accord donné par Mme X au bas du courrier du 22 mai 2015 ne pouvait porter que sur les termes qui y étaient énoncés, lesquels ne concernaient pas la rémunération et les horaires de travail.

Il en résulte que le courrier du 22 mai 2015, ne constituant pas une promesse unilatérale de contrat de travail ou promesse d’embauche, ni une offre d’embauche, ne peut valoir contrat de travail.

La société Promedis pouvait donc ne pas donner suite à ce courrier sans être tenue d’une quelconque obligation ni responsabilité.

Il s’en déduit que les demandes de Mme X relatives aux conséquences de la rupture abusive d’une promesse d’embauche (congés payés, indemnité de précarité, dommages-intérêts pour rupture abusive) ne sont pas fondées.

Mme X sollicite également des dommages-intérêts pour préjudice moral résultant du caractère brutal et vexatoire de la rupture.

Il est certain que la société Promedis a informé Mme X par écrit qu’elle ne donnait pas suite à la proposition résultant du courrier du 22 mai 2015, seulement par un message du 5 juin suivant.

Mme X soutient en avoir été informée le 31 mai 2015 en tentant d’enregistrer le vol pour se rendre à la formation qui avait été annulé, et conteste avoir reçu un appel de la part de M. Z, en faisant valoir que son téléphone professionnel lui avait été volé.

La société Promedis produit une attestation de M. Z directeur régional qui déclare avoir téléphoné à l’intéressée le 29 mai pour l’informer que la société Lundbeck ne souhaitait plus poursuivre la collaboration avec elle.

Dès lors que le numéro personnel de Mme X était connu de la société Promedis et que M. Z a adressé à sa direction un mail confirmant cet appel le jour même 29 mai, il n’est pas établi que Mme X n’a pas été informée de la décision de la société Promedis dès qu’elle a été prise.

La preuve n’est donc pas rapportée que la rupture des relations par la société Promedis, qui était légitime, a été effectuée dans des conditions vexatoires et brutales.

La demande de dommages-intérêts de Mme X sera en conséquence rejetée.

Mme X, partie perdante, devra supporter les entiers dépens. Elle doit conserver à sa charge les frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés, de sorte que sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ne peut être accueillie.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a débouté Mme X de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral,

Le confirme sur ce point,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et ajoutant,

Dit que le courrier du 22 mai 2015 ne constitue ni une promesse unilatérale de contrat de travail ni une offre d’embauche, ni un contrat de travail,

Déboute Mme X de toutes ses demandes,

Condamne Mme X aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été signé par G H, présidente, et par B C, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

B C G H

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