Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 23 décembre 2019, n° 17/01078

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 23 déc. 2019, n° 17/01078
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 17/01078
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 5 janvier 2017, N° 14/01994
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

23/12/2019

ARRÊT N°591

N° RG 17/01078 – N° Portalis DBVI-V-B7B-LPEL

CR/CD

Décision déférée du 06 Janvier 2017 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE – 14/01994

Mme X

D Y

E A épouse Y

C/

G B

SARL D’ARCHITECTURE B7

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1re Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT TROIS DECEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANTS

Monsieur D Y

[…]

[…]

Représenté par Me Laurence EICHENHOLC de la SELARL CABINET EICHENHOLC, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame E A épouse Y

[…]

[…]

Représentée par Me Laurence EICHENHOLC de la SELARL CABINET EICHENHOLC, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur G B

[…]

[…]

Représenté par Me D DEPUY, avocat au barreau de TOULOUSE

SARL D’ARCHITECTURE B7

[…]

[…]

Représentée par Me D DEPUY, avocat au barreau de TOULOUSE

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

[…]

[…]

Représentée par Me D DEPUY, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 03 Juin 2019 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. BELIERES, président

C. ROUGER, conseiller

C. MULLER, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : C. PREVOT

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par C. BELIERES, président, et par C. PREVOT, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat d’architecte conclu le 22 juillet 2010, M. Y et Mme A épouse Y ont confié à la Sarl d’Architecture B7 et M. B la construction d’une maison individuelle sur un terrain leur appartenant. Le contrat prévoyait une enveloppe financière globale (hors acquisition du terrain) d’un montant de 234.000 € HT, soit 279.864 € TTC et des honoraires à hauteur de 25.740 € HT outre Tva en vigueur pour une mission complète.

Les travaux ont fait l’objet d’une réception avec réserves le 6 décembre 2012.

Le 30 mars 2013, les architectes ont établi une facture d’honoraires d’un montant de 5.753,20 € TTC calculée sur un décompte définitif de travaux portant sur un montant total de 254.330,60 € HT, soit 304.179,42 € TTC.

Par courrier du 1er juin 2013, les consorts Y ont refusé de régler cette facture aux motifs d’une part, du dépassement par les architectes du montant de l’enveloppe globale initiale, et d’autre part, d’un surcoût des travaux d’un montant de 66.799,67 € resté à leur charge et réglé par eux. Ils ont en outre proposé à la Sarl d’Architecture B7 et à M. B de ramener leurs honoraires au montant initialement prévu au contrat et de verser la somme de 3.077,94 € pour solde de tout compte.

Aucun accord n’étant intervenu, les consorts Y ont saisi le Conseil régional de l’Ordre des Architectes, qui a statué en faveur des architectes selon avis en date du 24 janvier 2014.

Par acte d’huissier en date du 22 mai 2014, la Sarl d’Architecture B7 et M. B ont saisi le tribunal d’instance de Condom aux fins d’obtenir la condamnation des consorts Y au paiement de leur note d’honoraires. L’affaire a ultérieurement été radiée du rôle de cette juridiction.

Par actes du 26 mai 2014, M. et Mme Y ont fait assigner la Sarl d’Architecture B7, M. B et son assureur la Mutuelle des Architectes Français (la Maf) devant le tribunal de grande instance de Toulouse aux fins de les voir condamner solidairement au paiement des sommes de :

—  91.115,09 € au titre du dépassement fautif du budget,

—  2.574 € au titre des autres manquements commis par les architectes,

—  5.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Parallèlement à cette procédure, se plaignant de diverses malfaçons, les époux Y ont assigné en référé devant le président du tribunal de grande instance d’Auch l’Eurl F. Constructions ayant réalisé, après liquidation judiciaire d’une première entreprise, le lot gros 'uvre et enduits extérieurs de leur construction. Par ordonnance du 03 juin 2014 M. G C a été désigné, l’expertise ayant été rendue commune et opposable à M. G B et à la Sarl d’Architectes B7 par ordonnance du 7 juillet 2015. L’expert, a déposé son rapport le 30 janvier 2016.

Par acte du 30 janvier 2016 les époux Y ont saisi le tribunal de grande instance d’Auch d’une action en nullité dudit rapport d’expertise pour défaut d’impartialité, sollicitant, dans l’instance pendante devant le tribunal de grande instance de Toulouse, que ce rapport soit écarté des débats ou, à défaut, qu’un sursis à statuer soit ordonné dans l’attente de la décision du tribunal de grande instance d’Auch.

Par jugement contradictoire en date du 6 janvier 2017 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

— rejeté la demande de sursis à statuer formée par M. Y et Mme Y née A ;

— rejeté la demande de M. Y et Mme Y née A tendant à ce que le rapport d’expertise de M. C soit écarté des débats ;

— débouté M. Y et Mme Y née A de leurs demandes d’indemnisation au titre du manquement des architectes à leur obligation de renseignement, au titre du dépassement fautif du budget et au titre du manquement des architectes à leurs obligations contractuelles ;

— condamné M. Y et Mme Y née A in solidum à payer à M. B la somme de 5.753,20 € TTC, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2016 ;

— débouté M. B de sa demande de dommages et intérêts ;

— condamné M. Y et Mme Y née A in solidum aux dépens de l’instance ;

— condamné M. Y et Mme Y née A in solidum à payer à M. B la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Par déclaration en date du 20 février 2017, M. Y et Mme A ont interjeté appel de ce jugement.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 5 septembre 2017, les consorts Y, appelants, demandent à la cour, au visa des articles 1315, 1134 et 1147 du Code civil, de :

— accueillir l’appel principal et réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions

— en conséquence, statuant à nouveau, constater qu’une action en nullité du rapport d’expertise du 30 janvier 2016 est pendante devant le tribunal de grande instance d’Auch

— écarter par conséquent des débats le rapport d’expertise de M. C du 30 janvier 2016 et à défaut, surseoir à statuer dans l’attente de la décision sur la nullité dudit rapport à intervenir

— dire que la responsabilité contractuelle de la Sarl d’Architecture B7 et de M. B et la garantie de la Maf sont engagées

— condamner in solidum la Sarl d’Architecture B7, M. B et la Maf à leur payer les sommes de :

* 5.000 € en réparation de leur préjudice au titre du manquement à leur obligation de renseignement et de conseil en l’absence d’estimation du coût des travaux

* 91.115,09 € en réparation de leur préjudice consécutif au dépassement fautif du budget

* 2.574 € en réparation du préjudice subi au titre de l’inexécution d’une partie de la mission de maîtrise d’oeuvre

En tout état de cause,

— prononcer la compensation entre les créances respectives des parties

— condamner in solidum la Sarl d’Architecture B7, M. B et la Maf à leur payer la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, en ce compris ceux de l’instance d’appel et ceux de la première instance.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 27 mars 2018, la Sarl d’Architecture B7, M. B et la Maf, intimés, demandent à la cour, au visa des articles 1134, 1147 et 1153 du Code civil, de :

— ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture afin que puisse être pris en compte le jugement du 21 mars 2018 qui déboute le maître de l’ouvrage de sa demande de nullité du rapport d’expertise

— constater que le maître d’ouvrage occupe le bien depuis décembre 2012

— constater l’absence de tout dépassement de budget, au vu des marchés signés et réglés par le maître de l’ouvrage, de la décision du Conseil Régional de l’Ordre des Architectes et du rapport d’expertise de M. C

— dire que les travaux commandés directement par le maître de l’ouvrage en dehors de la mission de maîtrise d’oeuvre sont totalement étrangers aux architectes et doivent rester à la charge du maître d’ouvrage

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les consorts Y de l’ensemble de leurs demandes

— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné les consorts Y à régler la somme de 5.753,20 € au titre du solde des honoraires avec intérêts au taux légal

— réformer le jugement sur le point de départ des intérêts et fixer la date de départ des intérêts au taux légal au 15 octobre 2013, date de mise en demeure par lettre recommandée

— condamner solidairement les consorts Y à verser à M. B une somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens

SUR CE, LA COUR,

1°/ Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture

La clôture de la procédure ayant été prononcée le 21 mai 2019, la demande de révocation formée par les intimés dans leurs dernières écritures notifiées le 27 mars 2018 aux fins de production du jugement du tribunal de grande instance de Auch du 21 mars 2018 visé au bordereau de pièces annexé aux dernières écritures est sans objet.

2°/ Sur les demandes des consorts Y tendant à ce que le rapport d’expertise de M. C soit écarté des débats ou, à défaut, que soit ordonné un sursis à statuer dans l’attente de la décision à intervenir sur la nullité dudit rapport

Selon jugement du 21 mars 2018 régulièrement produit au débat et prononcé au contradictoire de M. G B, de la Sarl d’Architectes B7 et de M. et Mme Y, parties au présent litige, le tribunal de grande instance d’Auch a débouté les consorts Y de leur demande tendant au prononcé de la nullité du rapport d’expertise de M. C pour défaut d’impartialité.

Dans ces conditions, ce rapport d’expertise, établi au contradictoire des parties au présent litige, peut être produit aux débats par M. B et la Sarl Architectes B7 dans le cadre de la présente instance au soutien de leurs prétentions, les consorts Y devant être déboutés, ainsi que l’a retenu le premier juge, de leur demande tendant à ce qu’il soit écarté des débats, et, compte tenu du jugement rendu par le tribunal de grande instance d’Auch, la demande de sursis à statuer devient sans objet.

3°/ Sur la responsabilité de l’architecte

En application des dispositions des articles 1134 et suivants, 1147 du code civil, dans leur rédaction applicable au présent litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, elles doivent être exécutées de bonne foi et obligent non seulement à ce qui y est exprimé mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature. En cas d’inexécution ou de retard dans l’exécution d’une obligation, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une

cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

L’octroi de dommages et intérêts suppose l’établissement d’un manquement contractuel et du préjudice en résultant.

En l’espèce, selon contrat d’architecte du 22 juillet 2010, M. D Y et Mme E A épouse Y ont confié à la Sarl d’architecture B7, représentée par M. I J et M. G B, architecte consultant, une mission de maîtrise d’oeuvre complète pour la réalisation d’une maison individuelle à La Réoule, 32500 Urdens, allant de l’avant-projet à l’assistance aux opérations de réception, moyennant une rémunération fixée à 25.740 € HT outre Tva au taux en vigueur, représentant 11 % du montant HT des travaux estimés au jour de la signature du contrat de maîtrise d’oeuvre au regard de la déclaration du maître de l’ouvrage selon laquelle il disposait d’une enveloppe financière globale, hors acquisition du terrain, de 234.000 € HT, soit 279.864 € TTC. Cette enveloppe était mentionnée comme à redéfinir après l’avant-projet sommaire.

Dans le cadre de sa mission, s’il n’a pas à s’assurer des capacités financières du maître de l’ouvrage ni à établir un plan de financement, l’architecte est néanmoins tenu d’un devoir de conseil envers le maître de l’ouvrage. Il doit concevoir un projet réalisable tenant compte des contraintes inhérentes au sol ou à la réalisation de l’opération envisagée et, nécessairement, s’informer corrélativement de l’enveloppe budgétaire que le maître de l’ouvrage entend y consacrer.

L’article 5.2 du contrat de maîtrise d’oeuvre rappelle en l’espèce au titre des obligations de l’architecte cette obligation d’information, énonçant que l’architecte fournit au maître d’ouvrage toutes les informations utiles sur le déroulement de sa mission ; il l’informe notamment de toute évolution significative du coût de l’opération ; au cours des travaux et sauf urgence liée à la sécurité des personnes ou des biens, toute décision entraînant un supplément de dépenses fait l’objet d’un accord écrit du maître d’ouvrage.

L’article 7 relatif aux définitions des éléments de mission précise quant à lui que sur la base du programme et de l’esquisse approuvée par le maître d’ouvrage, l’architecte établit l’estimation définitive du coût prévisionnel des travaux, avec la précision que cette estimation est assortie d’un taux de tolérance de plus ou moins 10 % en monnaie constante.

Il n’est pas justifié par la Sarl d’Architecture B7 et M. G B ayant suivi le chantier de M. et Mme Y, de la réalisation de cette estimation définitive du coût prévisionnel des travaux sur la base du programme et de l’esquisse approuvée par les maîtres d’ouvrage. Il n’est pas davantage justifié que lors de la signature du contrat de maîtrise d’oeuvre portant sur une mission complète, les maîtres d’ouvrage se soient réservé le suivi et l’exécution d’une partie des travaux à réaliser.

Les éléments du projet produits au débat établissent, qu’après la signature du contrat de maîtrise d’oeuvre complète du 22 juillet 2010, le dossier descriptif et quantitatif des travaux devant servir de support au dossier de consultation des entreprises, destiné à l’établissement des devis estimatifs, a été élaboré par le maître d’oeuvre le 6 octobre 2010, que le dossier de permis de construire a été déposé le 11 octobre 2010 et le permis obtenu le 27 octobre 2010, et que le projet de conception générale comportant les plans de masse, de coupes et les volumétries, dûment approuvé par les maîtres d’ouvrage, est en date du 15 juin 2011.

Le dossier de consultation des entreprises avec l’intégralité des devis soumis à l’approbation des maîtres d’ouvrage n’est pas produit, pas plus que les devis acceptés par les maîtres d’ouvrage suite à cette consultation.

Il n’est néanmoins pas contesté que toutes les factures prises en compte par le maître d’oeuvre pour le calcul de ses honoraires correspondent à des devis acceptés et réglés par les maîtres d’ouvrage.

Il résulte en outre des pièces produites par les appelants que le devis Bagnarosa du 24 février 2011 relatif au lot chauffage et élaboré sur la base du quantitatif et estimatif du 6 octobre 2010 prévoyant la fourniture et la pose d’un plancher chauffant, d’une pompe à chaleur et d’un sèche serviette, s’élevant à 19.993,77 €, n’a pas été accepté, les maîtres d’ouvrage ayant finalement fait le choix de s’occuper directement des fournitures de l’équipement auprès des établissements Richardson, et qu’il

en a été de même pour le lot peintures, prévu au descriptif quantitatif et estimatif établi par le maître d’oeuvre, le devis Marque du 23 avril 2011, concernant la fourniture et la pose des peintures intérieures n’ayant pas été accepté, les maîtres d’ouvrage ayant fait le choix de prendre en charge directement l’achat des fournitures auprès des établissements Delzongle pour un total de 2.978,25 € en peintures et tapisseries et d’assumer eux-mêmes la main d’oeuvre inhérente à leur pose.

Il ressort de ces éléments que la procédure de consultation des entreprises sur la base du dossier descriptif et quantitatif établi le 6 octobre 2010 par le maître d’oeuvre est intervenue à partir du mois de février 2011 et que suite aux retours des devis qui leur paraissaient excessifs, les maîtres d’ouvrage ont pris la décision pour des raisons d’économie, de se charger eux-mêmes de l’achat d’un certain nombre de fournitures comprises dans le dossier descriptif et quantitatif élaboré par le maître d’oeuvre (parquets, carrelages, faïences, certains équipements sanitaires), seule la pose des carrelages, faïences et des équipements de chauffage-sanitaire restant soumise au contrôle du maître d’oeuvre (pose de carrelages et faïences par l’entreprise Lorenzi, pose du plancher chauffant, d’une chaudière électrique, d’un radiateur sèche-serviette, de certains sanitaires et du système d’aspiration par le plombier-chauffagiste Bouloufa), ainsi que de contracter directement avec diverses entreprises, notamment avec Cash Piscines pour la réalisation de la filtration, la fourniture, la pose du liner et les finitions de la piscine, initialement prévus au dossier quantitatif et descriptif établi par le maître d’oeuvre, et à l’entreprise Chevallier pour la mise en service de cette dernière, tout comme de confier la réalisation du terrassement pour la plate-forme d’accès et de retournement ainsi que du parking, initialement prévue dans le descriptif et quantitatif dressé par le maître d’oeuvre, directement à la Sas Garenne.

La prescription et le suivi de l’étude de sol nécessaire à la conception des fondations relevait quant à elle par nature de la maîtrise d’oeuvre complète. Il n’est pas contesté qu’elle a été commandée et suivie directement par les maîtres de l’ouvrage.

En revanche, contrairement à ce que soutiennent les époux Y, toutes les prestations qu’ils ont réglées directement sans l’intervention du maître d’oeuvre, dont les factures sont produites et inventoriées en pièce 11, n’étaient pas prévues au descriptif élaboré par le maître d’oeuvre et ne peuvent donc être considérées comme ayant fait partie de la mission confiée à ce dernier par le contrat de maîtrise d’oeuvre.

La comparaison entre le devis descriptif et quantitatif établi par le maître d’oeuvre pour permettre la consultation des entreprises et les factures produites établit que ne faisaient pas partie des prestations prévues dans la mission du maître d’oeuvre, la fourniture et la pose de la cheminée du salon, facturée par les établissements Cheminées Sparte le 5 septembre 2012, l’installation d’une seconde salle de bains, ledit descriptif tout comme les plans visés par eux ne faisant ressortir qu’une salle de bains et une salle d’eau, les meubles de cuisine, dont la fourniture et la pose avec fabrication et pose d’un plan de travail ont été facturées par la Sarl Ayraud, seule étant prévue au descriptif la réalisation d’un plan de travail avec la précision «non défini, à créer avec le projet global du meuble de cuisine», l’achat de luminaires, de lampe et d’un vidéo-interphone tactile facturés par l’entreprise Ramin le 23 février 2013, les meubles de salle de bain facturés le 10 janvier 2012 par les établissements Richardson.

Déduction faites de ces prestations, le coût assumé par les époux Y pour des prestations qui entraient à l’origine dans la mission du maître d’oeuvre et dont ils ont finalement pris en charge seuls le contrôle de la réalisation pour réduire les coûts, ressort à un total de l’ordre de 36.544 € TTC soit 30.555,18 HT.

Il résulte du tout que le coût total effectif des travaux devant relever du contrat de maîtrise d’oeuvre, ressort à 284.885,80 € HT (254.330,62 € HT au titre de montants arrêtés par la maîtrise d’oeuvre + 30.555,18 € HT assumés directement par les maîtres d’ouvrage en lieu et place de la maîtrise d’oeuvre), représentant une augmentation de 21,74 % par rapport à l’enveloppe budgétaire fixée par les maîtres d’ouvrage au contrat de maîtrise d’oeuvre (234.000 € HT), dépassant le seuil de tolérance de + ou – 10 % prévu au contrat.

Cette situation établit la réalité du dépassement du budget imputable au projet conçu par le maître d’oeuvre, sans qu’une estimation définitive du coût prévisionnel des travaux sur la base du programme et de l’esquisse approuvée par les maîtres d’ouvrage ait été réalisée contrairement aux

prévisions contractuelles, sans qu’il soit justifié que ces derniers aient été alertés par le maître d’oeuvre sur l’impossibilité de respecter l’enveloppe budgétaire prévue au contrat de maîtrise d’oeuvre, et sans qu’un avenant corrélatif à ce contrat ait été soumis à leur signature, ces manquements étant de nature à engager la responsabilité contractuelle de la Sarl d’Architecture B7 et de M. B, architecte ayant suivi le dossier, à leur égard.

Le préjudice en résultant pour les époux Y ne peut être constitué par le coût des travaux qu’ils ont dû effectivement supporter pour les avoir commandés par approbation de devis et achats de fournitures et dont ils bénéficient pour avoir pris livraison de l’immeuble achevé lors de la réception du 6 décembre 2012, avec uniquement des réserves concernant le lot gros 'uvre et enduits extérieurs réalisés par la société F/Constructions pour la reprise desquelles ils ont obtenu condamnation par le tribunal de grande instance d’Auch de l’assureur décennal de ladite société par jugement du 21 mars 2018.

En revanche, ayant dû se substituer au maître d’oeuvre dans l’accomplissement de sa mission, ils ont supporté diverses tracasseries pour obtenir des devis moins-disants d’autres entreprises que celles consultées par l’architecte et suivre l’exécution de leurs travaux sans l’assistance de ce dernier afin de rester dans un budget financièrement admissible, ce qui caractérise un préjudice directement lié aux manquements contractuels du maître d’oeuvre et justifie, au regard de l’ampleur du dépassement et de la diversité des prestations ainsi réalisées, une juste indemnisation à hauteur de 10.000 € au paiement de laquelle la Sarl d’Architecture B7 et M. G B doivent être condamnés in solidum. Cette somme allouée à titre de dommages et intérêts portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt en application de l’article 1153-1 devenu 1231-7 du code civil.

La Maf, à l’encontre de laquelle les époux Y exercent une action directe et qui ne conteste pas devoir sa garantie contractuelle au titre de la responsabilité civile de la Sarl d’Architecture B7 et de M. G B, sera tenue in solidum avec ces derniers au paiement des dommages et intérêts ci-dessus fixés dans la limite de son contrat.

2°/ Sur le solde d’honoraires du maître d’oeuvre

La rémunération du maître d’oeuvre a été chiffrée au contrat de maîtrise d’oeuvre à 25.740 € HT outre Tva en vigueur sur la base d’une mission complète, soit 11 % des 234.000 € HT annoncés au jour de la signature du contrat comme constituant l’enveloppe globale dont le maître de l’ouvrage déclarait disposer.

L’article 9 du contrat de maîtrise d’oeuvre précise que toute augmentation, toute remise en cause du programme ou du calendrier de réalisation, toute modification des documents approuvés, demandées par le maître d’ouvrage donnent lieu à l’établissement d’un avenant et emportent augmentation des honoraires à proportion des études ou autres prestations supplémentaires indispensables à sa satisfaction.

En l’espèce, il n’y a pas d’avenant produit relativement à un supplément de prestations ou de rémunération.

En conséquence, le coût des honoraires du maître d’oeuvre, lequel a bien exercé pour les prestations qui lui sont restées confiées une maîtrise d’oeuvre complète jusqu’à la réception des travaux en exécution de devis acceptés par les maîtres d’ouvrage objets de factures réglées, ne peut être retenu qu’à hauteur de la somme de 25.740 € HT outre TVA à 19,60 % telle que prévue au contrat de maîtrise d’oeuvre, et non sur la base de 11 % d’un montant HT de travaux de 254.330,62 € tels que facturés dans la note d’honoraires N° 7.

Sur cette somme, il est acquis que M. et Mme Y ont d’ores et déjà versé les montants réclamés dans les six premières notes d’honoraires soit un total de 23.166 €.

Le solde d’honoraires revenant au maître d’oeuvre ressort donc à la somme de 2.574 € HT (25.740-23.166), soit 3.078,50 € TTC compte tenu d’une TVA à 19,60 % telle que prévue au contrat de maîtrise d’oeuvre.

En conséquence, infirmant le jugement entrepris sur ce point, il convient de condamner in solidum M. et Mme Y à payer à la Sarl d’Architecture B7 et M. G B pris ensemble, la somme de 3.078,50 € TTC au titre du solde d’honoraires leur revenant, outre intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2013 date de la réception de la lettre de mise en demeure de payer, ainsi qu’il en est justifié, en application des dispositions de l’article 1153, devenu 1231-6 du code civil, le surplus des demandes à ce titre devant être rejeté.

Compte tenu des créances réciproques entre la Sarl d’Architecture B7, M. G B et les époux Y, il y a lieu d’ordonner compensation.

3°/ Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant, la Sarl d’Architecture B7, M. G B et la Maf supporteront in solidum les dépens de première instance et d’appel et se trouvent redevables sous la même solidarité envers les époux Y d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 susvisé dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir eux-mêmes prétendre à une indemnité sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté la demande de M. D Y et Mme E A épouse Y tendant à ce que le rapport d’expertise de M. C soit écarté des débats,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare sans objet la demande de sursis à statuer,

Dit que la Sarl d’Architecture B7 et M. G B engagent leur responsabilité contractuelle à l’égard de M. D Y et Mme E A épouse Y,

Condamne in solidum la Sarl d’Architecture B7 et M. G B à payer à M. D Y et Mme E A épouse Y pris ensemble la somme de 10.000 € (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Dit que la Maf est tenue in solidum avec la Sarl d’Architecture B7 et M. G B de la condamnation prononcée ci-dessus dans les limites de son contrat,

Condamne in solidum M. D Y et Mme E A épouse Y à payer à la Sarl d’architecture B7 et M. G B pris ensemble la somme de 3.078,50 € TTC (trois mille soixante dix-huit euros et cinquante centimes) au titre du solde d’honoraires leur revenant, outre intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2013,

Ordonne la compensation entre les créances respectives de M. D Y et Mme E A épouse Y d’une part, et de la Sarl d’Architecture B7 et M. G B d’autre part,

Condamne in solidum la Sarl d’architecture B7, M. G B et la Maf à payer à M. D Y et Mme E A épouse Y pris ensemble une indemnité de 3.000 € (trois mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne in solidum la Sarl d’architecture B7, M. G B et la Maf aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier Le président

.

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