Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 16 décembre 2020, n° 20/00320

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 2e ch., 16 déc. 2020, n° 20/00320
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 20/00320
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulouse, 8 décembre 2019, N° 19/02692
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

16/12/2020

ARRÊT N°465

N° RG 20/00320 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NNQA

IMM/JBD

Décision déférée du 09 Décembre 2019 – Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE – 19/02692

M. X

Y-C Z

C/

SA CLINIQUE AMBROISE PARE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2e chambre

***

ARRÊT DU SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE VINGT

***

APPELANT

Monsieur Y-C Z

[…]

[…]

Représenté par Me Valérie NOUVEL, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SA CLINIQUE AMBROISE PARE

387 route de Saint-Simon

[…]

Représentée par Me Cindy GUERIN, avocat au barreau de TOULOUSE

Assistée de Me Anne-sophie MOULIN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 03 Novembre 2020 en audience publique, devant la Cour composée de :

F. PENAVAYRE, président

S. TRUCHE, conseiller

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : J. BARBANCE- DURAND

ARRET :

— CONTRADICTOIRE

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par F. PENAVAYRE, président, et par J. BARBANCE- DURAND, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE :

Le Docteur Y-C Z , médecin, exerce une activité de gynécologie médicale et obstétrique.

Le 21 février 2014, il a signé avec le Docteur Munos un contrat de présentation de patientèle, moyennant une indemnité globale et forfaitaire de 90.000 €.

Le 4 mars 2014, il a également conclu un contrat d’exercice libéral avec la Clinique Ambroise Paré avec effet au 21 février 2014.

Le 18 septembre 2017, le tribunal de grande instance de Toulouse a homologué le plan de redressement présenté par le Docteur Z pour une durée de huit ans ;

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 décembre 2018, la Clinique Ambroise Paré a indiqué au Docteur Z qu’elle entendait mettre fin à son contrat d’exercice libéral :

Par exploit en date du 2 août 2019, le Docteur Z, régulièrement autorisé à cette fin, a fait assigner la Clinique Ambroise Paré à jour fixe devant le tribunal de grande instance de Toulouse ;

Par jugement en date du 9 décembre 2019, le Tribunal de grande instance de Toulouse a débouté le

Docteur Z de l’intégralité de ses demandes, après avoir jugé que la résiliation du contrat d’exercice était intervenue conformément aux dispositions contractuelles, qu’aucun abus du droit de rompre par la Clinique n’était caractérisé, et qu’à défaut d’avoir présenté un successeur, le Docteur Z ne pouvait se prévaloir d’aucun manquement de la Clinique quant à son droit de présenter un successeur, et d’aucune indemnité à ce titre.

Par déclaration en date du 23 Janvier 2020, Monsieur Y C Z a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle l’a débouté de ses demandes et condamné au paiement de la somme de 3.000 € sur e fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

En l’état de ses dernières écritures signifiées le 1er octobre 2020, il demande à la cour au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil sous leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016, et 1104 et 1383-2 du Code civil, d’infirmer le jugement du Tribunal de grande instance de TOULOUSE du 9 décembre 2019 en ce qu’il l’a débouté de sa demande de condamnation de la Clinique Ambroise Paré au titre de la rupture abusive de son contrat d’exercice professionnel,

En conséquence,

A titre principal de dire que la résiliation du contrat d’exercice professionnel du Docteur Z par la société Clinique Ambroise Paré est intervenue de manière abusive,

Condamner la société Clinique Ambroise Paré à payer à Monsieur Y-C Z la somme de 189.530,00 € au titre de la perte de revenus,

Condamner la société Clinique Ambroise Paré à payer à Monsieur Y-C Z la somme de 105.344,00 € au titre du préjudice matériel,

Condamner la société Clinique Ambroise Paré à payer à Monsieur Y-C Z la somme de 15.000,00 € au titre du préjudice moral,

Condamner la société Clinique Ambroise Paré à payer à Monsieur Y-C Z la somme de 5.000,00 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens, et notamment le coût des sommations interpellatives,

A titre subsidiaire ;

dire que le contrat d’exercice professionnel du Docteur Z prévoit le droit de présentation de successeur,

dire que la Clinique a empêché le Docteur Z de céder son contrat d’exercice professionnel à un successeur,

condamner la société Clinique Ambroise Paré à payer à Monsieur Y-C Z la somme de 105.344,00 € à titre d’indemnité compensatrice de l’impossibilité de présenter un successeur,

condamner la société Clinique Ambroise Paré à payer à Monsieur Y-C Z la somme de 5.000,00 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens et qu’au coût des trois sommations interpellatives

A l’appui de ses prétentions, il fait valoir que la liberté de rompre le contrat à tout moment ne fait pas obstacle à ce que soit caractérisé un abus du droit de rompre justifiant la réparation du préjudice qu’il a subi;

qu’en l’espèce, le motif allégué tiré d’un refus d’intervention lors de sa garde des 24 et 25 novembre

2018 tel qu’il a été invoqué par son confrère le Docteur A est fallacieux, que les faits allégués sont inexacts, que les autres motifs invoqués postérieurement ne sont pas plus établis et qu’ils ne constituent pas le motif véritable de la résiliation critiquée ;

Il soutient que la clinique a profité des dénonciations calomnieuses du Docteur A pour résilier son contrat d’exercice professionnel et répercuter le chiffre d’affaires qu’il réalise au sein de la Clinique sur les obstétriciens qui ont une clause de chiffre d’affaires minimum assuré par la Clinique, et ce, sans contrepartie financière pour lui.

A l’appui de sa demande subsidiaire pour perte du droit de présenter un successeur, il soutient que le recrutement par la clinique de deux obstétriciens a fait obstacle à ce qu’il puisse exercer ce droit.

Par conclusions signifiées le 29 septembre 2020, la société Clinique Ambroise Paré demande à la Cour au visa des articles 1103, 1232-1 du Code civil et R. 4127-7, R. 4127-32 et s., R. 4127-47 du Code de la santé publique, à titre principal de confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Toulouse du 9 décembre 2019, en ce qu’il a débouté le Docteur Z de l’intégralité de ses demandes et de débouter le Docteur Z ;

A titre subsidiaire,

Si par impossible la Cour jugeait que la Clinique Ambroise Paré avait procédé à une résiliation abusive du contrat d’exercice du Docteur Z, statuant à nouveau :

Sur la demande principale du Dr Z :

Débouter le Docteur Z de toutes ses demandes, fins et de sa demande tendant à voir La Clinique condamnée à lui payer la somme de 189.530 € au titre de sa perte de revenus ;

Débouter le Docteur Z de sa demande tendant à voir la Clinique condamnée à lui payer la somme de 105.344 € au titre de son préjudice matériel ;

Débouter le Docteur Z de sa demande tendant à voir la Clinique condamnée à lui payer la somme de 15.000 € au titre de son préjudice moral ;

Sur la demande subsidiaire du Dr Z :

Débouter le Docteur Z de sa demande tendant à voir la Clinique condamnée à lui payer la somme de 105.344 € au titre de l’indemnité compensatrice de l’impossibilité de présenter un successeur, en l’absence de clause en ce sens ;

En toutes hypothèses :

Débouter le Docteur Z de sa demande formée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et des dépens ;

Condamner le Docteur Z à payer à la Clinique Ambroise Paré la somme de 5.000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure

Condamner le Docteur Z de toutes ses demandes, fins et conclusions

Condamner le Docteur Z aux entiers dépens

A l’appui de ses prétentions, elle soutient :

— qu’elle pouvait rompre le contrat d’exercice en date du 14 décembre 2012 à tout moment et sans motif, moyennant le respect d’un préavis de six mois, de sorte que la rupture du contrat est conforme aux dispositions contractuelles ;

— qu’il incombe au Docteur Z qui s’en prévaut, de rapporter la preuve d’un abus de son droit de rompre par la Clinique, ce qu’il ne fait pas ;

— que surabondamment, la rupture du contrat d’exercice est justifiée par de justes motifs et notamment par les défaillances du docteur Z attestées par des courriers de patientes alléguant des comportements non professionnels, voire déplacés ou dénués de délicatesse ou d’humanité.

S’agissant des demandes indemnitaires, la clinique soutient :

Sur les demandes indemnitaires formées à titre principal :

— que les demandes indemnitaires du Docteur Z au titre de la rupture abusive de son contrat ne sont fondées ni dans leur principe, ni dans leur quantum.

Sur la demande indemnitaire formée à titre subsidiaire :

— que le Docteur Z ayant été mis en mesure de présenter un successeur par la clinique et n’ayant proposé aucun successeur, il ne peut se prévaloir d’une impossibilité de présenter un successeur et solliciter une indemnité à ce titre ;

— qu’en tout état de cause, le préjudice invoqué par le Docteur Z au titre de l’impossibilité de présenter un successeur n’est fondé ni dans son principe, ni dans son quantum.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties à leurs dernières écritures.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 3 novembre 2020.

MOTIFS DE LA DECISION :

— sur le caractère abusif de la rupture :

En droit et en l’absence de disposition légale particulière, toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou à défaut un délai de préavis raisonnable ;

Il appartient à celui qui invoque un abus du droit de rompre d’établir les circonstances qui ont fait dégénérer l’exercice de ce droit en abus ;

C’est ainsi de façon inopérante que le Docteur Z reproche à la clinique de ne pas avoir motivé la lettre de rupture qui lui a été adressée le dès lors que le principe d’une libre révocation emporte que la résiliation n’a pas à être motivée ;

Pour caractériser cet abus, le docteur Z soutient également que la résolution trouverait sans raison d’être dans une dénonciation mensongère de défaut de prise en charge d’une patiente ;

C’est sur ce point à juste titre que le premier juge à relevé que la lettre de résiliation ne comportant aucun motif, le lien entre cet épisode controversé et la rupture n’est pas rapporté ;

Il n’est pas non plus démontré que cette résiliation serait motivée par le souci de favoriser l’installation en février et mai 2019 de deux gynécologues-obstétriciens dont le docteur Z estime qu’ils ont pu exercer au sein de la clinique sans avoir à racheter une patientèle; il suffit sur ce point de relever que la clinique indique, qu’alors que son équipe comprenait jusqu’en octobre 2018, 14 obstétriciens, elle ne compte plus à ce jour que dix praticiens qui doivent faire face à une activité inchangée, et que la pénurie de gynécologues obstétriciens sur le territoire et le nombre important de patientes a imposé le recrutement de nouveaux praticiens ; En tout état de cause, ces installations intervenues courant 2019 sont susceptibles de s’analyser comme la conséquence du départ du Docteur Z, et l’appelant ne démontre pas qu’elles en seraient la cause.

Il est tout aussi inopérant pour le Docteur Z d’invoquer la reconnaissance professionnelle qu’il a obtenue de ses patientes et confrères et l’ampleur de ses compétences puisque la clinique, si elle invoque à titre subsidiaire des difficultés d’ordre déontologiques, n’a pas entendu motiver la résiliation de la convention par une quelconque insuffisance professionnelle ;

Enfin, le caractère abusif ne peut pas non plus se déduire de la seule constatation de l’existence d’un préjudice qu’il subirait en raison de cette rupture.

Il n’y a pas lieu de porter une appréciation sur les éléments de contexte évoqués à titre subsidiaire par la clinique, mais discutés par le Docteur Z, et notamment sur le refus de prise en charge susmentionné au sujet duquel la directrice de l’établissement avait indiqué au médecin que son refus de répondre aux sollicitations des sages-femmes, alors qu’il était de garde, et d’intervenir en salle de naissance pouvait mettre en danger les patientes, le personnel et la clinique, que cette attitude était inacceptable, que dans l’hypothèse ou il contestait l’indication d’un confrère il se devait de le contacter directement, en discuter et de mettre en place une conduite à tenir avec lui, ou encore sur l’existence de comportements déplacés invoqués par plusieurs patientes, sur ses retards réguliers, ou enfin sur des dépassements d’honoraires imposés à une patiente alors qu’elle était en travail. En effet, la circonstance que ces reproches ne seraient pas parfaitement démontrés est indifférente puisque la clinique n’a pas à rapporter la preuve d’un comportement fautif imputable au médecin ; Il doit simplement être estimé que la simple dégradation des relations entre les parties suffit à expliquer cette rupture et à exclure ainsi son caractère abusif.

C’est tout aussi vainement que le Docteur Z invoque une quelconque précipitation qui ne peut se déduire de la circonstance que la résolution est intervenue alors que le contrat n’était pas encore ancien de cinq ans, limitant le préavis à 6 mois alors que la clinique aurait été débitrice d’un préavis de un an au delà de la cinquième année ; Il suffit sur ce point de rappeler que le contrat à durée indéterminée est par principe susceptible d’être résilié à tout moment.

La bonne foi devant toujours être présumée et la mauvaise foi de la Clinique dans l’exercice de son droit de rompre n’étant pas établie, c’est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé que la démonstration d’un abus du droit de rompre n’était pas rapportée ;

En l’absence de tout manquement de la clinique dans l’exercice du droit de rompre, Monsieur Y-C Z sera en conséquence débouté de l’ensemble des demandes indemnitaires formées à titre principal ;

— Sur la perte du droit de présenter un successeur :

La convention du 21 février 2014 prévoit en son article 11 que le praticien aura la possibilité de présenter à la Clinique un candidat à sa succession exerçant la même spécialité que lui et présentant les garanties de compétence et de moralité requises, en cas de résiliation du contrat de son fait comme du fait de la Clinique['] sans que la Clinique puisse intervenir dans la négociation de ce droit. La Direction de la Clinique ne pourra refuser d’agréer le successeur que pour de justes motifs relatifs au comportement et à la compétence de ce dernier.

Le Praticien ne pourra toutefois prétendre à une quelconque indemnité, si la Clinique refusait d’agréer les candidats à sa succession ['].

En l’espèce, aucun manquement ne peut être reproché à la clinique qui a rappelé au Docteur Z son droit de présentation dans la lettre de résiliation, dès lors qu’à aucun moment le Docteur Z n’a sollicité le bénéfice de ce droit.

Le Docteur Z ne démontre pas comme il le soutient avoir été privé de la possibilité de présenter une patientèle par l’arrivée à la Clinique des Docteur B et Behluli au cours de l’année 2019 puisqu’il ne justifie d’aucune recherche réalisée au cours de son préavis de 6 mois ; il n’établit donc pas l’existence d’un lien causal entre ces recrutements effectués dans le contexte de pénurie invoqué par la clinique et son préjudice résultant de la perte du droit de présentation qui demeurait d’ailleurs conditionnel en l’état de la stipulation susvisée excluant toute indemnité en cas de refus d’agréer un successeur pour de justes motifs.

Le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande subsidiaire formée par Monsieur Y-C Z.

— Sur les demandes annexes :

Le jugement doit être confirmé en ce qu’ il a condamné le Docteur Z aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 3.000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Partie perdante en cause d’appel, le docteur Z supportera les dépens et devra indemniser la clinique Ambroise Paré des frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’exposer pour les besoins de sa défense en cause d’appel, lesquels peuvent être évalués à la somme de 1.500 €.

.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant après en avoir délibéré ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

y ajoutant ;

Condamne Monsieur Y C Z à payer à la société Clinique Ambroise Paré la somme de 1.500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Y-C Z aux dépens qui pourront être recouvrés directement par la Selarl Lexavoué Pau-Toulouse sur son affirmation de droit.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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