Cour d'appel de Versailles, 19 janvier 2007, n° 05/06639

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 19 janv. 2007, n° 05/06639
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 05/06639
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 27 juin 2005, N° 11620/01

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50F

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 JANVIER 2007

R.G. N° 05/06639

AFFAIRE :

XXX

C/

XXX


Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Juin 2005 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre : 6

N° RG : 11620/01

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE SEPT,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

XXX

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoués – N° du dossier 32152

ayant pour avocat Me FEDER au barreau de PARIS (B.0018)

APPELANTE

****************

XXX

2/ S.A. SEFRI CIME

XXX

XXX

prises en leurs personnes de leurs représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentées par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués – N° du dossier 00032172

plaidant par Me FERTOUKH, avocat au barreau de PARIS (J.79)

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du nouveau code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Novembre 2006 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant M. REGIMBEAU, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bernadette WALLON, président,

Monsieur Marc REGIMBEAU, conseiller,

Madame Marie-Claude CALOT, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claire THEODOSE,

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES

A la suite d’un contrat de réservation du 4 octobre 2000, la SCI AUDREY a acquis de la SCI LE PARC DES RENARDIERES, en l’état futur d’achèvement, suivant acte notarié du 24 janvier 2001, un appartement duplex au rez de chaussée, pourvu d’un jardin privatif ayant vu sur un espace vert sis dans le bâtiment E, d’un ensemble immobilier dénommé Manhattan Parc à Courbevoie moyennant le prix de 293.677,78 euros.

La SCI LE PARC DES RENARDIERES, a mandaté la SA SEFRI CIME pour promouvoir ce projet.

La SCI AUDREY ayant appris par la suite que la ville de Courbevoie projetait de construire au milieu de cet espace vert un local de gardien, s’est pourvue en référé par acte du 11 septembre 2001, sollicitant la désignation d’un expert.

Par ordonnance du 29 septembre 2003, M. X a été désigné expert avec pour mission de donner tous éléments sur les projets de construction de la ville, et la configuration des lieux suite à la réalisation de ces projets, et sur les préjudice pouvant résulter de la réalisation des travaux. Il a déposé son rapport le 28 mai 2004. Malgré les conclusions de ce rapport, la SCI AUDREY a saisi le tribunal au fond.

La SCI AUDREY a interjeté appel du jugement rendu le 28 juin 2005 par le tribunal de grande instance de Nanterre, qui, sur son assignation tendant à voir condamner solidairement la SA SEFRI CIME et la SCI LE PARC DES RENARDIERES à lui payer la somme de 46.000 euros pour lui avoir dissimulé le projet de construction dont elles avaient connaissance lors de la cession, a :

— mis la SA SEFRI CIME hors de cause,

— débouté la SA SEFRI CIME de sa demande de dommages et intérêts,

— débouté la SCI AUDREY de ses demandes,

— débouté les parties de leurs demandes,

— condamné la SCI AUDREY à payer à la SCI LE PARC DES RENARDIERES et à la SA SEFRI CIME la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens.


Dans ses dernières conclusions signifiées le 26 décembre 2005, la SCI AUDREY, qui conclut à l’infirmation du jugement, prie la cour de :

— vu les articles 1116 et 1382 du Code civil,

— dire n’y avoir lieu à mettre hors de cause la SA SEFRI CIME qui ne justifie pas de sa seule qualité de gérante de la SCI LE PARC DES RENARDIERES et constater que ces dernières ont commis des manoeuvres dolosives ayant vicié le consentement de l’acquéreur,

— à titre subsidiaire, dire qu’elles ont manqué à leurs obligations pré-contractuelles de renseignement en dissimulant à la concluante l’implantation projeté d’un bâtiment à l’initiative de la ville de Courbevoie dans les parties communes de l’ensemble immobilier Manhattan Parc,

— condamner in solidum la SA SEFRI CIME et la SCI LE PARC DES RENARDIERES à payer à la SCI AUDREY la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens.


Dans leurs dernières conclusions signifiées le 14 avril 2006, la SA SEFRI CIME et la SCI LE PARC DES RENARDIERES, qui concluent à la confirmation partielle du jugement déféré, demandent à la cour de :

— confirmer le jugement en ce qu’il a mis la SA SEFRI CIME hors de cause, débouté la SCI AUDREY de ses demandes et condamné la SCI AUDREY au paiement de la somme de 3.000 euros à la SA SEFRI CIME et à la SCI LE PARC DES RENARDIERES,

— infirmer le jugement en ce qu’il les a débouté de leurs demandes,

— condamner la SCI AUDREY à leur payer à chacune la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— condamner la SCI AUDREY à leur payer la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens comprenant les frais d’expertise.

DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DECISION

— Sur la mise en cause de la société SEFRI CIME

Considérant que la SCI AUDREY expose que la SA SEFRI CIME ne peut être mise hors de cause, car elle est intervenue en qualité de mandataire de la SCI LE PARC DES RENARDIERES et que le pouvoir tendant à établir le contraire déposé devant le tribunal administratif n’a pas été enregistré ;

Que la SA SEFRI CIME et la société SEFRI CIME affirment que la première a agi en qualité de gérante de la seconde, qu’elle doit être mise hors de cause, et que la commercialisation du lot a été effectuée par la société ALM ;

Considérant qu’il est produit pour toute preuve de la qualité de la société SEFRI-CIME dans les opérations en cause, l’acte de réservation, l’acte de vente, et un pouvoir donné le 14 février 2001 par le Président directeur-général de la société SEFRI-CIME, à l’un de ses directeurs, pour autoriser la Ville de COURBEVOIE à déposer un permis de construire le local litigieux ;

Que la société SEFRI-CIME figure au contrat de réservation en qualité de représentante de la SCI LE PARC DES RENARDIERES, laquelle figure seule au contrat de vente ;

Que le pouvoir du 14 février 2001 indique que la société SEFRI-CIME est gérante de la SCI LE PARC DES RENARDIERES ;

Mais considérant que le pouvoir versé aux débats n’est qu’un titre que la SCI LE PARC DES RENARDIERES se délivre à elle-même et par suite sans valeur probante ;

Que l’acte de vente désignant la société SEFRI-CIME comme étant la représentante de la SCI LE PARC DES RENARDIERES, il convient de retenir cette qualification ;

Que cependant, dès lors qu’il n’est pas allégué que la société SEFRI-CIME ait commis une quelconque faute personnelle, tenant au dépassement de son mandat par exemple, elle n’a pas pu engager sa responsabilité à l’égard des tiers ;

Qu’elle doit donc être mise hors de cause ;

— Sur le fond

Considérant que la SCI AUDREY invoque successivement, à l’appui de sa demande en payement, le moyen tiré du dol par réticence dont les vendeurs se seraient rendus coupables, et la violation de leur obligation d’information pré-contractuelle ;

* le dol

Considérant que la SCI AUDREY expose que :

— l’expert n’a pas donné un avis technique, mais juridique en violation de l’article 283 du nouveau code de procédure civile,

— l’expert indique cependant que la construction du local de 3,825 m de haut serait dans le prolongement de la vue depuis l’appartement de la SCI AUDREY et qu’il constate que l’appartement est situé au rez-de-chaussée de l’immeuble,

— son consentement a été vicié du fait des manoeuvres dolosives employées par la SA SEFRI CIME et par la SCI LE PARC DES RENARDIERES qui ont gardé le silence sur cette construction dont ils avaient connaissance, puisque cette construction était prévue sur le terrain dont l’assiette faisait partie de la copropriété, que ce terrain a été cédé à la ville de Courbevoie au mois de juin 2001 et que l’autorisation de construire a été donnée le 20 février 2002, que la demande de permis de construire date du 26 janvier 2001, que sa publication date du 24 janvier 2001, date de la vente et qu’à cette date, le vendeur avait bien connaissance de cette construction alors que la plaquette publicitaire présentait à cet emplacement un espace vert qui a déterminé l’acquisition de son appartement par la SCI AUDREY ;

Que la SCI LE PARC DES RENARDIERES et la société SEFRI CIME répliquent qu’elles n’ont pas dissimulé le projet aux acquéreurs, que l’acte de vente contenait tous les renseignements nécessaires pour s’en informer, et qu’en tout état de cause, la SCI AUDREY ne subi aucun préjudice de ce fait ;

Considérant que l’article 1116 du code civil dispose que 'le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé.' ;

Considérant qu’il est constant et non discuté que la SCI AUDREY a acquis à COURBEVOIE, un 'duplex’ en rez de chaussée, et petit jardin attenant avec vue sur un espace vert en prolongement du Parc Diderot, ce que montre la photographie jointe au rapport de l’expert, que la SCI LE PARC DES RENARDIERES et la société SEFRI CIME avaient connaissance du projet de la Ville de construire sur cet espace vert, un local destiné au gardien du parc, et que l’acte de vente ne mentionne pas ce projet ;

Qu’il ressort du rapport de l’expert judiciaire que le projet, pour lequel un permis de construire a été délivré, concerne un local de 30 m2 environ, sur une hauteur de 3,825 m au plus, à 13 m au sud du duplex, que le volet paysager joint à la demande de permis mentionne la vue depuis le duplex litigieux, que sa perception pourrait être occultée par la plantation d’arbres, et que son implantation exclut une perte de lumière ou d’ensoleillement ;

Qu’il convient de juger que s’agissant de l’achat d’un appartement sis au rez de chaussée avec jardin, donnant sur une zone verte publique, où la construction d’un édifice paraît improbable, et indépendamment des conséquences sur l’ensoleillement et la lumière, l’édification d’un local tel que celui sus-décrit, qui prive les acquéreurs d’une large perspective sur ladite zone, constitue une donnée déterminante du consentement, c’est à dire telle que si l’acquéreur l’avait connue, il n’aurait certainement pas donné le même prix du bien à vendre ;

Que la SCI LE PARC DES RENARDIERES, après avoir souligné que le local ne se situe pas sur le même terrain que le terrain de la copropriété, fait valoir que l’acte de réservation du 4 octobre 2000 précise qu’il est conclu sous condition suspensive de validation du 5e modificatif de la ZAC Renardières, et que l’acte de vente fait une référence expresse à ce document, lequel contient le plan d’aménagement de la zone, publié en 1988 et qui fait expressément référence à un local jardinier. de sorte que la SCI AUDREY a bénéficié de toutes les informations ;

Qu’elle ajoute que ce document est mentionné au titre des servitudes résultant de la loi et des prescriptions d’urbanisme et que le conseil municipal du 19 février 1999 a entériné la 5e modification du plan d’aménagement de la zone ;

Que toutefois cette mention ne peut être considérée comme une information claire et loyale de l’acquéreur non professionnel averti des règles d’urbanisme, n’étant pas argué que tel était le cas de l’acquéreur en l’espèce, concernant la construction du local, alors que le vendeur détenait cette information dont il ne pouvait pas ignorer l’importance, au regard de la force de vente des espaces verts en zone fortement urbanisée ;

Que la SCI LE PARC DES RENARDIERES soutient vainement en cet état de l’argumentation, que le local était de toutes façons reproduit sur le descriptif publicitaire mis à la disposition des acquéreurs, en l’absence de preuve de la remise de cette pièce à la SCI LE PARC DES RENARDIERES avant la vente, et celle-ci produisant au contraire une plaquette sur laquelle le local est absent ;

Que le fait que le notaire de la SCI AUDREY, professionnel de la matière, n’ait pas renseigné son client comme il l’aurait dû, n’est pas exclusif de la responsabilité du vendeur au surplus professionnel ;

Que la clause par laquelle l’acquéreur a renoncé à tout recours dans le contrat de vente (page 12) est inefficace en présence d’un dol par réticence ;

Qu’il convient en conséquence des énonciations ci-dessus, de juger que le silence gardé par le vendeur sur le projet de local constituent des manoeuvres dolosives ouvrant droit à une réduction du prix pour l’acquéreur ;

Que le dol par réticence constituant aussi une violation d’une obligation d’information, il n’est pas utile d’examiner le second moyen de la demanderesse ;

— Sur la demande de dommages-intérêts

Considérant que la SCI LE PARC DES RENARDIERES a conclu au débouté de la demande de dommages-intérêts de la SCI AUDREY faute de préjudice, faisant observer que l’expert a exclu tout préjudice résultant de la construction de ce local, et constaté une absence de préjudice du fait de la sécurité qu’apporterait sa construction ;

Qu’elle précise que le local du gardien sera recouvert de végétation à l’exception des ouvertures et que ses prolongements seront recouverts de gazon ;

Mais considérant que le préjudice de la SCI AUDREY consiste dans la perspective de la construction du local pour laquelle l’expert note que la ville avait prévu dès 1998 un préfinancement de 180.000 francs HT, et n’avait différé les travaux que dans l’attente de la fin des constructions d’immeubles ;

Qu’il y a aussi lieu de tenir compte de ce que le local n’est pas construit à ce jour, et de l’existence d’une pétition des riverains ;

Que par suite le préjudice engendré par la réticence de la SCI LE PARC DES RENARDIERES n’est que celui d’un risque de construction, dépendant seulement du bon vouloir des autorités communales, et qui sera réparé par l’allocation de la somme de 15.000 euros ;

— Sur la demande de dommages-intérêts de la SCI LE PARC DES RENARDIERES et de la société SEFRI CIME

Considérant que la SCI AUDREY prospère pour partie dans ses prétentions ;

Que son action et son appel ne peuvent donc pas être jugés abusif ;

— Sur la demande au titre des frais irrépétibles

Considérant que l’équité commande d’allouer à la SCI AUDREY l’indemnité indiquée au dispositif au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;

— Sur les dépens

Considérant que la SCI LE PARC DES RENARDIERES qui succombent doit supporter les dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne la mise hors de cause de la société SEFRI CIME, et statuant à nouveau,

Dit que la SCI LE PARC DES RENARDIERES a commis au détriment de la SCI AUDREY un dol par réticence, qui lui a causé un préjudice dont elle doit réparation,

Condamne la SCI LE PARC DES RENARDIERES à payer à la SCI AUDREY la somme de 15.000 euros de dommages-intérêts de ce chef, et 3.000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

Rejette les autres demandes,

Condamne la SCI LE PARC DES RENARDIERES aux dépens de première instance et d’appel,

Dit que ces dépens pourront être recouvrés par la SCP BOMMART MINAULT, avoué de la SCI AUDREY, pour la part la concernant, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau code de procédure civile.

— signé par Monsieur REGIMBEAU, conseiller pour le président empêché, et par Madame THEODOSE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le CONSEILLER pour le président empêché,

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