Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre section 1, 19 mai 2011, n° 09/09699

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch. sect. 1, 19 mai 2011, n° 09/09699
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 09/09699
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 26 octobre 2009, N° 02/12178
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

MHP

Code nac : 51Z

12e chambre section 1

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 MAI 2011

R.G. N° 09/09699

AFFAIRE :

S.A.R.L. IMMO 2000

C/

Société RESADIA venant aux droits de Z A

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Octobre 2009 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 7

N° Section :

N° RG : 02/12178

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

— SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD

— SCP BOMMART MINAULT,

— SCP JUPIN ET ALGRIN, -SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIER

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE ONZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.R.L. IMMO 2000

ayant son siège XXX

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD – avoués N° du dossier 0947228

APPELANTE

****************

Société RESADIA venant aux droits de Z A

ayant son siège XXX

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

concluant par la SCP BOMMART MINAULT – avoués N° du dossier 00038076

plaidant par Me Isabelle CHAUDESAIGUES (avocat au barreau de PARIS)

S.A. OPTIMEGE

ayant son siège Tour Gamma

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

concluant par la SCP JUPIN ET ALGRIN – avoués N° du dossier 26221

plaidant par Me Agnès LEBATTEUX SIMON (avocat au barreau de PARIS)

S.D.C. DE LA TOUR X 2 représenté par son syndic la Sté BNP PARIBAS IMMOBILIER PROPERTY MANAGEMENT

ayant son siège XXX

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

concluant par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL FERTIER – avoués N° du dossier 20100351

plaidant par la SCP FORESTIER & HINFRAY (avocats au barreau de PARIS)

par Me BARROSO

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Avril 2011, Madame Marie-Hélène POINSEAUX, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Mme Dominique ROSENTHAL, Président,

Mme Marie-Hélène POINSEAUX, Conseiller,

M. Claude TESTUT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE

Vu l’appel interjeté par la société Immo 2000 d’un jugement rendu le 27 octobre 2009 par le tribunal

de grande instance de Nanterre lequel, refusant le bénéfice de l’exécution provisoire,:

* a dit le bail en date du 23 mai 1996 portant sur des locaux à usage de bureaux constitués des trames

10 à 41 du 12e étage de l’immeuble appelé Tour X, sis à XXX à

Courbevoie, résilié aux torts de la société Immo 2000,

* a condamné la société Immo 2000 à verser à la société Resadia la somme de 117 004,91 euros en

indemnisation du préjudice résultant de la rupture du bail,

* a débouté la société Resadia du surplus de sa demande en indemnisation,

* a sursis à statuer sur le surplus jusqu’au dépôt par M. Y du rapport de l’expertise ordonnée par

la cour d’appel de Versailles par arrêt du 12 novembre 2003,

* a condamné la société Immo 2000 à verser à la société Resadia la somme de 8 000 euros en

application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens avec distraction;

Vu les écritures en date du 8 décembre 2010, par lesquelles la société Immo 2000 demande à la cour

d’infirmer cette décision et, outre diverses constatations, :

* à titre principal, de prononcer aux torts de la société Resadia la résiliation du bail, de dire que

celle-ci a renoncé à toute indemnité, et de la déclarer irrecevable et mal fondée en ses demandes,

* à titre subsidiaire, si la résiliation du bail lui était imputable, de constater que le préjudice

revendiqué par la société Resadia ne peut excéder 37 950 euros, d’ordonner une expertise sur le

montant de l’indemnité d’éviction et de surseoir à statuer sur ce point,

* de recevoir son appel en garantie du syndicat des copropriétaires de la Tour X et d’Optimege,

de les condamner in solidum, ou subsidiairement, l’un à défaut de l’autre, à la relever et garantir de

toute condamnation, en l’excluant, ainsi que ses ayant-droits, de la participation à cette indemnisation

et aux frais de procédure dans leur quote-part de charges,

* de lui donner acte de ses réserves de demande plus ample de dommages et intérêts,

* de constater que la cause du sursis à statuer a disparu avec le dépôt du rapport de M. Y,

d’évoquer l’affaire, et de condamner,

— in solidum et/ou subsidiairement solidairement ou subsidiairement l’un à défaut de l’autre, le

syndicat des copropriétaires de la Tour X et son syndic Optimege à lui verser une somme de 30

000 euros et de les débouter de leurs demandes,

— la société Resadia à lui payer la somme de 10 000 euros,

* de condamner in solidum et/ou subsidiairement solidairement ou subsidiairement les uns à défaut

des autres aux entiers dépens, comprenant les frais d’expertise, de première instance et d’appel, ces

derniers avec distraction;

Vu les dernières écritures en date du 4 novembre 2010, aux termes desquelles la société Resadia,

venant aux droits de la société Réseau A, prie la cour de recevoir son appel incident et, au visa

des articles L. 145-4 et suivants du code de commerce, 1134, 1722 et suivants du code civil, :

* de confirmer le jugement en ce qu’il a dit le bail résilié aux torts de la société Immo 2000, lui a

alloué des indemnités au titre du préjudice résultant de cette rupture et de ses frais irrépétibles, et a

condamné la société Immo 2000 aux dépens,

* de le réformer pour le surplus et, statuant à nouveau, de condamner la société Immo 2000 au

paiement des sommes de 348 491,19 euros en réparation de son préjudice et de 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ,

* de débouter la société Immo 2000, le syndicat des copropriétaires de la Tour X et la société

Optimege de leurs demandes dirigées à son encontre,

* de condamner la société Immo 2000 aux dépens avec distraction;

Vu les écritures en date du 31 août 2010, par lesquelles le syndicat des copropriétaires de la Tour

X, représenté par son syndic, la société BNP Paribas Immobilier Property Management,

demande à la cour de recevoir son appel provoqué, et :

* d’infirmer cette décision en ce qu’elle a déclaré le bail résilié aux torts de la société Immo 2000,

* de débouter la société Resadia de ses demandes d’indemnisation,

* de déclarer sans objet l’appel en garantie de la société Immo 2000 à son encontre,

* subsidiairement, si le bail était considéré résilié aux torts du bailleur, de ramener l’indemnisation

du préjudice de la société Resadia à de plus justes proportions, de dire n’y avoir lieu à évocation de

l’appel en garantie de la société Immo 2000 à son encontre, et très subsidiairement, dans le cas

contraire, de débouter la société Immo 2000 de ses demandes

* à titre infiniment subsidiaire et au cas où sa responsabilité serait retenue, de condamner la société

Optimege en qualité d’ancien syndic, à le relever et le garantir de toutes condamnations,

* de condamner tout succombant, le cas échéant in solidum, à lui verser la somme de 10 000 euros

au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction;

Vu les dernières écritures en date du 9 novembre 2010, aux termes desquelles la société Optimege,

ancien syndic de copropriété de la Tour X, prie la cour, au visa des articles 562 et 568 du code

de procédure civile, 1134, 1722 et 1382 du code civil, :

* de déclarer la demande de garantie de la société Immo 2000 et du syndicat des copropriétaires de la

Tour X irrecevables, au motif du sursis à statuer sur ce point,

* principalement, de débouter la société Resadia de toutes ses demandes et de déclarer sans objet

l’appel en garantie de la société Immo 2000,

* subsidiairement, de réduire les demandes de la société Resadia, y compris au titre de l’article 700

du code de procédure civile, à de plus justes proportions, et de confirmer le jugement rejetant ses

demandes d’indemnisation au titre du coût d’immobilisation du personnel, de la perte de jouissance,

du préjudice commercial et du préjudice moral,

* de rejeter les demandes de la société Resadia d’indemnisation du préjudice résultant du changement

du matériel réseaux et télécoms et de ré-installation du réseau,

* subsidiairement, sur les demandes de garantie de la société Immo 2000 et du syndicat des

copropriétaires de la Tour X, de les en débouter,

* de condamner la ou les parties succombantes in solidum à lui payer la somme de 10 000 euros au

titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens d’appel avec distraction;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au

jugement déféré et aux écritures des parties; qu’il convient de rappeler que :

* Le 23 mai 1996, la société Réseau A a pris à bail des locaux commerciaux à usage de

bureaux, d’une surface de 205,86 m², constitués des trames 10 à 41 du 12e étage de l’immeuble

appelé Tour X, sis à XXX à Courbevoie appartenant à la société

Mabidel, laquelle les a cédés le 29 juin 1999 à la société Immo 2000;

* le 5 juin 2001, la société Immo 2000 a avisé par courrier la société Réseau A de la date de

début des travaux de désamiantage de la Tour X le 1er septembre 2001, lui demandant de

libérer ses locaux pour cette date, la rendant à défaut responsable du retard du début des travaux, et

lui rappelant ses précédentes lettre recommandée avec accusé de réception des 18 novembre 2000 et

20 avril 2001 sur ces points;

* le 31 août 2001, la société Réseau A a quitté les locaux qu’elle occupait dans la Tour X,

après en avoir avisé la société Immo 2000 par lettre recommandée avec accusé de réception du 30

juillet 2001;

* par acte d’huissier de justice du 1er octobre 2002, la société Réseau A a assigné la société

Immo 2000, laquelle a assigné le syndicat des copropriétaires de la Tour X le 18 février 2003,

et la jonction de ces procédures a été ordonnée le 20 mai 2003,

* par acte d’huissier de justice du 19 septembre 2003, la société Immo 2000 a assigné la société

Optimege et la procédure a été jointe par ordonnance du 4 mai 2004;

Sur la recevabilité des demandes formées à l’encontre de la société Optimege :

Considérant que la société Optimege soulève, au visa de l’article 562 du code de procédure civile,

l’irrecevabilité de la demande en garantie de la société Immo 2000 à son encontre, laquelle ne

critique pas la décision de sursis à statuer du tribunal de grande instance de Nanterre;

considérant qu’aux termes de l’article 562 du code de procédure civile, L’appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément ou implicitement et de ceux

qui en dépendent.

La dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs, lorsqu’il tend à

l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible;

qu’en l’espèce, en l’absence d’appel limité de la société Immo 2000, la connaissance de l’entier litige a

été dévolue à la cour, incluant les appels en garantie dépendant de l’issue de l’action en responsabilité

dirigée à l’encontre de la société Immo 2000; que les demandes de la société Immo 2000 à l’encontre

de la société Optimege seront déclarées recevables;

Sur la résiliation du bail :

Considérant que la société Immo 2000 poursuit l’infirmation du jugement sur la résiliation du bail,

dont elle demande, à titre principal, qu’elle soit prononcée aux torts de la société Resadia;

qu’elle fait valoir n’avoir jamais donné congé à sa locataire, mais lui avoir seulement demandé

d’évacuer les locaux pendant l’exécution des travaux, soulignant l’absence de preuve de l’arrêt des

services communs de l’immeuble et contestant que des rumeurs puissent constituer des raisons

crédibles d’évacuer la tour, au 15 mai 2001, date de la notification de son départ par société Resadia;

qu’elle rappelle qu’aux termes de l’article III-13 du bail, la société Resadia avait l’obligation de

souffrir, quelle que soit la durée des travaux et sans indemnité, les grosses réparations qui pourraient

s’avérer nécessaires;

qu’elle souligne les décisions de justice intervenues les 9 juillet, 10 août et 14 septembre 2001 à

l’égard d’autres locataires, considérant qu’en l’absence de libération des lieux imposée judiciairement,

le départ des preneurs était intervenu hors de toute contrainte;

qu’à titre subsidiaire, elle conteste toute faute et réticence dolosive de sa part pouvant donner lieu à

indemnisation de société Resadia, rappelant l’information distribuée aux occupants de la tour par le

syndic Optimege, relative à la présence d’amiante et la stabilité de ce composant jusqu’aux travaux de

désamiantage entamés en septembre 2002;

considérant que société Resadia lui oppose les circonstances de son départ forcé, après avoir été

avisée par la société Immo 2000, le 28 novembre 2000 de la décision de traiter l’amiante après

évacuation complète de la tour, le 20 avril 2001, de l’obligation d’évacuer les lieux, sans préciser de

date, et de chercher des locaux de remplacement, puis, par les services de l’inspection du travail, le 3

juin 2001, du début des travaux le 1er juillet 2001, puis le 1er septembre 2001 selon la société Immo

2000, laquelle lui a demandé par une mise en demeure du 5 juin 2001 de prendre ses dispositions

pour libérer ses locaux pour cette date, sous peine de prise en charge des conséquences du report du

démarrage des travaux;

qu’elle rappelle la fermeture du restaurant inter-entreprises à compter du 1er juillet 2001, les

demandes adressées aux locataires des copropriétaires institutionnels de quitter les lieux, jusqu’à un

jugement du 20 juin 2001 du tribunal de grande instance de Nanterre confirmé en appel sur ce point,

ordonnant à la société Immo 2000 de prendre les mesures nécessaires auprès de ses locataires pour

assurer une totale libération des lieux pour le 1er septembre 2001, l’expulsion de plusieurs locataires

étant ordonnée en référé le 4 juillet 2001;

qu’elle fait valoir avoir été assignée en référé d’heure à heure, ainsi que l’ensemble des locataires de

la tour, par l’inspection du travail, aux fins de condamnation sous astreinte à fermer les locaux de

travail à compter du 1er septembre 2001;

qu’elle souligne avoir été dans l’obligation de quitter les lieux sans contrepartie, pour des locaux

d’une taille équivalente à Levallois-Perret, alors que la société Immo 2000 assignait en référé par acte

d’huissier de justice des 22 et 23 août 2001 ses autres locataires, aux fins de leur voir quitter les lieux

sous astreinte, sous peine d’expulsion;

qu’elle s’oppose à l’application de l’article 1722 du code civil, en l’absence de disparition totale de la

chose louée, dont la ré-occupation était possible et la valeur supérieure au coût des travaux, et

résultant, non d’un cas fortuit, mais d’une décision du syndicat des copropriétaires de modernisation

de la tour, les propriétaires ayant été avisés de la présence d’amiante au mois de juin 1994,

l’obligation de réaliser des travaux en cas de dégradation de l’amiante résultant d’un décret du 7

février 1996, et la signature de son bail étant intervenue le 23 mai 1996;

qu’elle conteste l’application de la clause 13 du titre III du bail à des travaux de désamiantage, ainsi

que les dispositions de l’article 1724 du code civil, en l’absence d’urgence des travaux et de la

privation, non d’une partie, mais de la totalité des lieux loués;

considérant que syndicat des copropriétaires de la Tour X forme un appel provoqué à l’encontre

des dispositions constatant la résiliation du bail aux torts du bailleur, soutenant le départ volontaire

de société Resadia, en l’absence de résiliation invoquée par la société Immo 2000 et de son invitation

à rechercher des locaux de remplacement;

qu’il souligne que la société Resadia, dans son courrier du 30 juillet 2001, n’a pas invoqué

l’impossibilité d’une jouissance paisible et que la lettre circulaire en date du 5 juin 2001 de la société

Immo 2000 ne peut être assimilée à un congé;

considérant que la société Optimege soutient que la nécessité d’entreprendre des travaux dont la

valeur excède le bien caractérise la perte par cas fortuit prévue à l’article 1722 du code civil, ne

pouvant donner lieu à aucun dédommagement;

qu’elle souligne à cet égard que se trouvent réunies les conditions de la force majeure, dont le

caractère fortuit de la découverte d’amiante dégradée, mais également la mise aux normes incendie et

la rénovation de l’immeuble votées par le syndicat des copropriétaires, lui imposaient de résilier les

baux de ses locataires;

considérant en droit, que l’article 1719 3° du code civil dispose que Le bailleur est obligé, par la

nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière : (…) 3° d’en faire jouir

paisiblement le preneur pendant la durée du bail (…);

que l’article 1722 du code civil dispose que Si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite

en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit; si elle n’est détruite qu’en partie, le

preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même

du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement;

que selon l’article 1724 alinéa 1 du code civil, Si, durant le bail, la chose louée a besoin de

réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu’à sa fin, le preneur doit les souffrir,

quelque incommodité qu’elles lui causent, et quoiqu’il soit privé, pendant qu’elles se font, d’une

partie de la chose louée;

qu’aux termes de la clause 13 du titre III du bail, le preneur s’oblige à souffrir, quelque soit la durée

des travaux et sans indemnité, les grosses réparations qui pourraient s’avérer nécessaires, cette

durée dût-elle excéder 40 jours;

qu’en l’espèce, il est acquis aux débats, d’une part, que les travaux réalisés dans la tour X se

rapportent certes au désamiantage, mais également à la mise en conformité de l’installation

électrique, puis à la rénovation de l’immeuble, et ont été décidés après évacuation totale de

l’immeuble par les assemblées générales de copropriétaires, d’autre part, qu’aucun congé dans les

formes de l’article L. 145-4 du code de commerce n’a été délivré par la société Immo 2000 à la

société Resadia;

que la société Immo 2000 a demandé avec persistance à sa locataire de quitter les lieux, pour une

durée indéterminée et sous peine de porter la responsabilité d’un retard dans le début des travaux, par

lettres recommandées avec accusé de réception des 18 novembre 2000, 5 juin et 20 avril 2001;

que l’origine d’un cas de force majeure étant nécessairement extérieure à la chose louée, l’instabilité

de l’amiante, incorporée dans la structure de cette tour de première génération, rendant son retrait

nécessaire, ne peut exonérer le bailleur de la garantie de jouissance paisible due au locataire;

que les travaux de retrait de l’amiante, nécessitant l’évacuation temporaire de l’ensemble des

occupants de l’immeuble, dans la perspective d’une réoccupation des locaux, ne constituent pas la

destruction totale au sens de l’article 1722 du code civil, ayant pour conséquence l’impossibilité

absolue et définitive d’user de la chose louée conformément à sa destination, et n’entraînent pas la

résiliation de plein droit du bail, le coût des travaux étant inférieur, en l’espèce, à la valeur des

locaux;

que les travaux de traitement de l’amiante imposés par décret, pas plus que ceux de remise aux

normes et de rénovation, ne constituent les réparations, urgentes ou grosses, visées à l’article 1724 du

code civil et à la clause III-13 du bail, lesquels n’imposent pas au preneur la conséquence du

délaissement complet des lieux;

qu’il résulte de ces éléments que la société Immo 2000 a manqué à son obligation d’assurer à son

locataire la jouissance paisible des lieux loués et que la rupture du bail lui est exclusivement

imputable, le courrier de réserves adressé le 30 juillet 2001 par la société Resadia à son bailleur

établissant qu’elle n’a pas fait le choix de quitter les lieux de son plein gré, les demandes répétées en

ce sens de son bailleur, corroborées par les éléments provenant du syndicat des copropriétaires et de

l’inspection du travail, étant la seule cause de son départ;

Sur le préjudice de la société Resadia :

Considérant que société Resadia reproche au jugement entrepris de n’avoir accueilli que

partiellement ses demandes indemnitaires et demande la condamnation de la société Immo 2000 à lui

verser la somme de 348 491,19 euros à titre de dommages et intérêts;

qu’elle sollicite que l’indemnisation du remplacement de l’équipement télécom et réseau soit portée

de 5 186 euros à 6 795,45 euros, et que lui soient allouées les sommes de 16 731,28 euros au titre du

dépôt de garantie, 2 230 euros au titre des formalités de transfert de siège, 5 929 euros au titre de

l’immobilisation du personnel, 56 596 euros au titre de la perte d’exploitation, soit une semaine de

chiffre d’affaires, et 150 000 euros au titre du préjudice moral;

considérant que la société Immo 2000, à laquelle s’associent le syndicat des copropriétaires de la

Tour X et la société Optimege, conteste le préjudice allégué et la réparation accordée par les

premiers juges, soutenant, sur le différentiel de loyers, que la société Resadia a porté la surface de

ses bureaux de 141 m² dans la tour X à 207 m² dans ses nouveaux locaux, contestant que la

surface de 206 m² portée sur les factures corresponde à celle réellement occupée, ainsi que calculée

par expert dans le cadre de l’instance l’opposant à un autre locataire, le nouveau prix au m² étant

inférieur à l’ancien;

qu’elle conteste les frais de remplacement de l’équipement télécoms et réseau, ainsi que de mise en

service du réseau, dont le déménagement ne peut être la cause, les frais d’immobilisation du

personnel dont la réalité n’est pas démontrée, le préjudice commercial et la perte d’exploitation,

lesquels ne sont pas établis par la production du bilan en l’absence de lien avec le déménagement,

ainsi que le préjudice moral non démontré;

qu’elle sollicite que les demandes justifiées, pour un montant de 37 949,12 euros, soient réduites au

prorata des surfaces occupées et fassent l’objet d’une expertise, au titre de l’indemnité d’éviction,

justifiant un sursis à statuer;

considérant que la société Optimege ajoute que les préjudices immatériels allégués ne sont pas

démontrés, pas plus que n’est établi leur lien avec le déménagement et que l’atteinte portée à l’image de la société Resadia, constitutive d’un préjudice moral, n’est ni alléguée, ni démontrée;

considérant que la société Resadia ne réclame pas d’indemnité d’éviction, mais la réparation de divers

postes de préjudice, avec production de pièces à l’appui; que la mesure d’expertise sollicitée par la

société Immo 2000 est dès lors inutile et sera rejetée;

que le préjudice retenu par le tribunal, pour un montant de 117 004,91 euros, se décompose en :

— différentiel de loyer : 80 288,28 euros,

— honoraires de commercialisation (nouveau bail) : 20 077,54 euros,

— frais de signature du bail : 533,57 euros,

— déménagement : 1 981,84 euros,

— Impression de nouvelles cartes de visite : 329,19 euros,

— Impression de nouveau papier à lettres : 86,80 euros,

— Frais de câblage : 762,25 euros,

— Remplacement de l’équipement télécom et réseau : 5 186 euros,

— Gestion des sauvegardes télécom et réseau : 146,35 euros,

— Gestion de configuration de l’équipement télécom et réseau : 533,57 euros,

— Mise en service du réseau : 5 186,62 euros,

— Frais de poste : 283,45 euros,

les demandes relatives au dépôt de garantie, au coût d’immobilisation du personnel, aux formalités de

transfert du siège social et au préjudice moral ayant été rejetées comme non justifiées;

que, sur la demande relative au différentiel de loyers, la société Resadia établit, par la production du

bail ne portant mention d’aucune surface, mais également d’une facture n° 2001 381 adressée par la

société Immo 2000 le 17 mars 2001, que la location portait sur les trames 10 à 41 du 12° étage, soit

une superficie de 205,86 m²; que la somme allouée de 80 288,28 euros constitue le différentiel

justifié de loyers, la société Resadia s’étant relogée dans des locaux de surface équivalente;

que la somme de 16 731,28 euros réclamée au titre du dépôt de garantie, correspond au montant du

dépôt de 109 750 francs versé à la signature du bail des locaux de Levallois-Perret; que le rejet de la demande de ce chef sera confirmé, cette somme ayant vocation à être restituée à la société Resadia

en fin de bail;

que l’indemnisation des frais de remplacement de l’équipement télécom et réseau, demandée à

hauteur de 6 795,45 euros, est justifiée par trois factures correspondant principalement à la fourniture

et l’installation d’un autocommutateur, assorti d’un poste et d’un casque, soit des frais en relation

directe avec le déménagement et l’équipement nécessaire de nouveaux locaux;

qu’il est produit une attestation du cabinet d’avocats ayant réalisé les formalités de transfert du siège

social de la société Resadia auprès du greffe, sur le montant des frais et honoraires pour la somme de

2 230 euros; que cette demande est ainsi justifiée;

qu’en revanche, les frais d’immobilisation du personnel, évalués à la somme de 5 929 euros, ne sont

pas démontrés par le décompte établi par la société Resadia, dépourvu de tout justificatif, de même

que le préjudice commercial, la perte d’exploitation que n’établit aucune pièce comptable en lien

direct avec le changement de locaux, ainsi que le préjudice moral, en l’absence d’atteinte à l’image et

à la réputation de la société Resadia;

que l’indemnisation de la société Resadia sera ainsi portée à la somme globale de 127 639,81 euros,

le demande de dommages et intérêts de la société Immo 2000 à son encontre étant rejetée;

Sur les recours en garantie :

Considérant que la société Immo 2000 appelle en garantie le syndicat des copropriétaires de la Tour

X et la société Optimege, demandant leur condamnation in solidum, ou subsidiairement, l’un à

défaut de l’autre, à la relever et garantir de toute condamnation, en l’excluant, ainsi que ses

ayant-droits, de la participation à cette indemnisation et aux frais de procédure dans leur quote-part

de charges, se réservant la possibilité de demande plus ample de dommages et intérêts;

qu’elle prie la cour de constater que la cause du sursis à statuer a disparu avec le dépôt du rapport de

M. Y, d’évoquer l’affaire, et de condamner, in solidum et/ou subsidiairement solidairement ou

subsidiairement l’un à défaut de l’autre, le syndicat des copropriétaires de la Tour X et son

syndic Optimege à lui verser une somme de 30 000 euros;

considérant que le syndicat des copropriétaires de la Tour X s’oppose à l’évocation de sa

garantie par la cour, comme le privant, de même que la société Optimege, du double degré de

juridiction, demandant son examen par les juges de première instance, dans l’intérêt du litige;

considérant que la société Optimege soutient que l’affaire ne peut être évoquée par la cour en

application de l’article 568 du code de procédure civile, en l’absence de mesure d’instruction

ordonnée par le tribunal;

considérant que M. Y, dont l’attente du dépôt de rapport a justifié le sursis à statuer ordonné par le tribunal de grande instance de Nanterre, a été désigné comme expert par arrêt de la cour d’appel de

Versailles du 12 novembre 2003, dans le cadre d’une instance distincte;

qu’en application de l’article 568 du code de procédure civile, la cour, n’étant pas saisie d’un

jugement ayant ordonné une mesure d’instruction, ne peut évoquer les points non jugés; qu’ainsi le

jugement sera confirmé en ce qu’il a ordonné le sursis à statuer sur les appels en garantie;

Sur les autres demandes:

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la société Resadia la charge de ses frais irrépétibles;

que les demandes adverses formées sur le même fondement seront rejetées;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

— DÉCLARE recevables les demandes de la société Immo 2000 à l’encontre de la société Optimege,

— CONFIRME la décision déférée, sauf sur le montant des dommages et intérêts,

— STATUANT à nouveau sur ce point, condamne la société Immo 2000 à payer à la société Resadia

la somme de 127 639,81 euros,

— REJETTE le surplus des demandes,

— Y AJOUTANT, CONDAMNE la société Immo 2000 à payer à la société Resadia la somme de 10

000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— CONDAMNE la société Immo 2000 aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699

du code de procédure civile,

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement

avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Dominique ROSENTHAL, président, et par Alexandre GAVACHE, greffier, auquel le

magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre section 1, 19 mai 2011, n° 09/09699