Cour d'appel de Versailles, 17ème chambre, 20 février 2013, n° 11/04810

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 20 févr. 2013, n° 11/04810
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 11/04810
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Chartres, 28 novembre 2011, N° 10/00408
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

17e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 FEVRIER 2013

R.G. N° 11/04810

AFFAIRE :

SA FRANCEL, représentée par Mme Karine LEVEEL (RRH)

C/

Y X

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 29 Novembre 2011 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CHARTRES

Section : Industrie

N° RG : 10/00408

Copies exécutoires délivrées à :

Me Pierre DIDIER

Me Sandra RENDA

Copies certifiées conformes délivrées à :

SA FRANCEL, représentée par Mme Karine LEVEEL (RRH)

Y X

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT FEVRIER DEUX MILLE TREIZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SA FRANCEL, représentée par Mme Karine LEVEEL (RRH)

XXX

XXX

représentée par Me Pierre DIDIER de la SCP BAKER & MAC KENZIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B445

APPELANTE

****************

Monsieur Y X

XXX

XXX

représenté par Me Sandra RENDA de la SCP GERBET RENDA COYAC-GERBET, avocat au barreau de CHARTRES

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Janvier 2013, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :

Madame Isabelle LACABARATS, Président,

Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,

Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Christine LECLERC,

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de Chartres (Section Industrie) du 29 novembre 2011 qui a :

— condamné la société FRANCEL à payer à M. Y X les sommes suivantes:

. 25 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

.1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

— débouté M. X du surplus de ses demandes,

— condamné la société FRANCEL aux entiers dépens qui comprendront les frais éventuels d’exécution,

Vu la déclaration d’appel adressée au greffe le 22 décembre 2011 et les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour la société FRANCEL qui demande à la cour de :

— dire que le licenciement de M. X est fondé,

— dire que les demandes de M. X sont mal fondées,

— condamner M. X à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X aux dépens éventuels de première instance comme d’appel,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour M. X qui, relevant appel incident, demande à la cour de porter le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 40 000 euros et de condamner la société FRANCEL aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d’exécution de l’arrêt à intervenir, et à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

LA COUR,

Considérant que M. X a été engagé par la société FRANCEL à compter du 8 mars 1999 en qualité de Monteur Polyvalent P 1 ;

Que dans le cadre d’une première procédure de licenciement économique collectif , par avenant du 6 septembre 2007, M. X a été affecté à un poste de Technicien Laboratoire, niveau III coefficient 215 ;

Qu’en dernier lieu son salaire mensuel brut de base s’élevait à 1 605 euros, auquel s’ajoutait une prime d’ancienneté de 113,73 euros ;

Que, convoqué par lettre recommandée avec avis de réception du 6 juillet 2009 à un entretien préalable fixé au 16 juillet, M. X a été licencié par lettre recommandée avec avis de réception du 30 juillet 2009 pour motif économique ;

Considérant, sur la cause économique, qu’en application de l’article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l’entreprise ou, dans certaines conditions, à une cessation d’activité ; que lorsqu’une entreprise fait partie d’un groupe, ses difficultés économiques doivent être appréhendées dans le secteur d’activité du groupe auquel elle appartient ;

Que la lettre de licenciement est ainsi libellée :

' (…)

Notre société se trouve depuis toujours dans un environnement où la concurrence est très active et la pression sur les prix est omniprésente.

Depuis environ un an, nos enregistrements de commande subissent une baisse constante. Une grosse affaire Export prise en fin d’exercice dernier 'relève’ un peu la tendance mais ne la change pas profondément.

Des événements majeurs récents ont fortement aggravé notre situation économique :

1. La perte d’un marché important en France pour les trois prochaines années ( Marché des postes standard), marché qui représentait entre 1,3 et 1,8 M¿ sur les exercices précédents.

Notre client a en effet décidé de ne pas nous attribuer les postes du Groupe 2 pour des raisons purement économiques. Malheureusement le volume généré par ce groupe (environ 800 postes/an) est, de loin, le plus significatif du marché.

2. Un fort ralentissement économique global dont les répercussions se font gravement ressentir sur notre activité depuis quelques mois avec une chute spectaculaire des investissements de notre client principal Gaz de France.

3. Notre marché Export qui a eu une activité soutenue au premier trimestre de l’exercice fiscal (octobre 2008-décembre 2008) s’est essoufflé au cours du deuxième trimestre pour être en recul de 11,2 %(ou 702K¿) à fin avril 2009.

Tout ceci a pour effet de dégrader notre carnet de commandes. L’activité France est catastrophique avec un recul de plus de 33% (ou 2,9M¿) par rapport à avril 2008.

Combiné au recul du marché Export, notre carnet de commandes global régresse de 24,2 % (ou 3,6M¿) par rapport au mois d’avril 2008.

De plus, à ce carnet de commandes, très insuffisant pour garantir un niveau de production pour les mois à venir, s’ajoute une facturation en très fort repli (23,4% ou – 3,6M¿) par rapport à l’année dernière à la même période.

Nous sommes particulièrement préoccupés pour la suite de l’exercice car toutes nos prévisions sont alarmantes.

Notre visibilité projets et portefeuille devis tant au niveau France qu’à l’Export est très limitée et ne nous laisse entrevoir aucune perspective de redressement.

Le mois de mai s’annonce particulièrement calamiteux avec un enregistrement de commandes au 12 mai de 507 K¿ pour un objectif mensuel de 1 854K¿ ( sachant que le mois fiscal s’arrête le Vendredi 22 mai). A titre de comparaison, nous avions enregistré 2 027K¿ au mois de mai 2008 !

Depuis quelques mois il y a un autre phénomène qui pourrait avoir des répercussions importantes sur notre activité. La situation financière de nos partenaires en Europe de l’Est s’étant fortement dégradée (en raison de la crise économique et financière), ils nous demandent de repousser plusieurs expéditions de matériel (qu’ils sont incapables de payer). Pour l’instant ce ne sont que des reports mais tout nous laisse à penser que plusieurs annulations de commandes vont se produire ( ce qui bien évidemment viendrait encore plus détériorer notre situation).

Cette situation a bien évidemment un impact très négatif sur les marges de la société.

D’ailleurs, notre marge étant traditionnellement plus importante en France qu’à l’Export, nous n’envisageons pas l’avenir sereinement (le marché français étant le plus impacté).

Les résultats actuels confirment malheureusement cette tendance. Sur l’exercice fiscal 2009, nous avons déjà enregistré 4 mois de résultats négatifs ( octobre : – 72 000¿ d’OP (Operation Profit), soit – 4,84 % ; février : -29 000 € d’OP soit -1,62 % ;mars : – 56 000 € d’OP soit -2,82 % ; avril: – 46 000 € d’OP soit -4,19%). La prévision de mai (également négative) pourrait encore s’aggraver si notre carnet de commandes continue sur la tendance actuelle.

De plus, la politique de réduction des frais généraux (frais de déplacement, budgets, missions, etc…) , en place depuis plusieurs mois ne s’avère malheureusement pas suffisante pour redresser la situation.

Tous les autres secteurs d’activités de la division Régulateurs sont impactés par la crise économique qui sévit en Europe. Si nous faisons un état des enregistrements de commandes à avril 2009 par rapport à avril 2008, nous avons la situation suivante :

. Tartarini (Italie) en recul de 9%

. Fisher Industrial (Italie) en recul de 8,8 %

. Tescom (Allemagne) en recul de 21,1%

La consolidation de tous ces chiffres (y compris France) nous amène à un résulta global de – 15,2 % pour la division Régulateurs en Europe.

Encore une fois, le manque de visibilité projets nous fait malheureusement penser que cette période de forte récession va perdurer pendant plusieurs mois.

Voici le détail des diverses restructurations qui ont déjà eu lieu (ou qui sont en cours) dans nos sites européens :

. Tartarini (Italie) : suppression de 4 postes ( en plus des 12 prévus suite au transfert des produits en Roumanie).

. Fisher Industrial (Italie) : suppression des 2 postes (un plan de restructuration des bureaux de ventes en Europe est en cours de discussion)

. Tescom (Allemagne et Grande-Bretagne) : suppression de 14 postes

. Cluj (Roumanie) : suppression de 18 postes.

Le marché nord américain est également fortement touché. Des restructurations impactant plus d’une cinquantaine de salariés ont d’ailleurs déjà été annoncées.

La situation à fin juillet reste très préoccupante. L’activité France reste catastrophique avec un recul de plus de 27 % par rapport à juillet 2008. Notre carnet de commande France à la fin du mois de juillet est de – 33% par rapport à la même période l’année dernière. Quelques commandes exceptionnelles à l’international ne compensent pas cette forte dégradation et le chiffre d’affaires de la société à fin juillet est en recul de 23% soit – 5,3 M¿.

Notre société doit réduire ses pertes financières afin de retrouver un équilibre financier lui permettant de poursuivre son activité en France.

La situation économique inquiétante que nous traversons nous a contraint à devoir renoncer au projet de grand laboratoire Européen. Cette décision entraîne par conséquent un rééquilibrage des ressources en fonction des capacités et besoins réels du service Laboratoire et rend ainsi nécessaire la suppression du poste de Technicien Laboratoire, que vous occupez actuellement (…) ' ;

Qu’il est constant que la société FRANCEL, société spécialisée dans le développement et la vente de régulateurs et postes de détente pour l’industrie du gaz naturel, fait partie du Groupe EMERSON, spécialisé dans les produits et services industriels et divisé en huit branches d’activités principales ;

Que la société FRANCEL soutient que son activité appartient à la division 'Régulateurs pour Gaz Naturel Europe ' de la branche d’activité Emerson Process Management dont le siège de division est à McKinney au Texas, alors que M. X prétend qu’elle fait partie seulement de la division Emerson Process Management largement bénéficiaire et que son rattachement à une autre division, celle des Régulateurs est artificielle ;

Qu’il appartient à l’employeur de produire les éléments permettant de déterminer l’étendue du secteur d’activité du groupe dont relève l’entreprise ;

Que la société FRANCEL se contente d’affirmer qu’ ' aucune division d’Emerson Process Management ne vend des produits pour la distribution et le transport du gaz naturel ' et que ' la nature des produits et les procédés de fabrication n’ont rien en commun avec les autres divisions de Process management car ils doivent répondre à des normes et exigences très particulières de l’industrie gazière ' en soulignant que les méthodes de distribution des produits ou services ne sont absolument pas identiques ;

Qu’elle ne communique, cependant, pas même un organigramme officiel sur lequel figurerait cette division 'Régulateurs ' au sein d’Emerson Process Management et ne produit aucune pièce permettant de connaître la situation financière de la prétendue 'division Régulateurs pour Gaz Naturel Europe ';

Qu’elle admet pourtant qu’existe une activité de Régulateurs aux Etats Unis puisque la lettre de licenciement mentionne ' Le marché nord américain est également fortement touché. Des restructurations impactant plus d’une cinquantaine de salariés ont d’ailleurs déjà été annoncées.' ;

Que faute pour la société FRANCEL d’établir la réalité des difficultés économiques du secteur d’activité du Groupe Emerson auquel elle appartient, le licenciement de M. X est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Considérant, sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que M. X qui, à la date du licenciement, comptait plus de deux ans d=ancienneté dans une entreprise occupant habituellement plus de onze salariés a droit, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ;

Qu’au regard de son âge au moment du licenciement, 34 ans, de son ancienneté d’environ 10 années dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi eu égard à son expérience professionnelle et de la justification de ce qu’il n’a retrouvé des emplois qu’en qualité d’intérimaire, il convient de lui allouer, de ce chef la somme de 18 000 euros ; que le jugement sera infirmé de ce chef ;

Considérant qu’en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités ;

Considérant que, s’il peut être rappelé qu’en application de l’article 8-1 du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996, tel que modifié par le décret n° 2001-376 du 27 avril 2001, le droit de recouvrement ou d’encaissement des sommes dues en vertu d’une décision de justice, alloué à l’huissier de justice qui en a reçu mandat, est à la charge du débiteur, la demande présentée à ce titre par l’intimé est irrecevable, faute d’intérêt à agir, en l’absence de litige né de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

STATUANT PUBLIQUEMENT ET CONTRADICTOIREMENT,

INFIRMANT partiellement le jugement,

CONDAMNE la société FRANCEL à payer à M. Y X la somme de 18 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONFIRME pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris,

ORDONNE d’office le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités,

DEBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société FRANCEL à payer à M. Y X la somme complémentaire de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,

DEBOUTE la société FRANCEL de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société FRANCEL aux dépens .

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats en application de l’article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle Lacabarats, président et Madame Christine Leclerc, greffier.

Le GREFFIER Le PRESIDENT

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