Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 4 juin 2014, n° 12/02094

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 4 juin 2014, n° 12/02094
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 12/02094
Importance : Inédit
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Versailles, 21 mars 2012, N° 11/00700
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 novembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

17e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUIN 2014

RG 13/2456 JOINT AU

R.G. N° 12/02094

AFFAIRE :

SCI ESPACE PLUS

C/

[C] [Z]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Mars 2012 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VERSAILLES

Section : Encadrement

N° RG : 11/00700

Copies exécutoires délivrées à :

Me Sophie BREZIN

Me Nicolas SANFELLE

Copies certifiées conformes délivrées à :

SCI ESPACE PLUS

[C] [Z], Société ACCESSITE, Société DES CENTRES COMMERCIAUX (SCC)

le : 05 JUIN 2014

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUIN DEUX MILLE QUATORZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SCI ESPACE PLUS

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Sophie BREZIN, avocat au barreau de PARIS,

vestiaire : J025

APPELANTE AU PRINCIPAL

INTIMEE SUR L’APPEL INCIDENT

****************

Madame [C] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparante en personne, assistée de Me Nicolas SANFELLE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 445

Société ACCESSITE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

représentée par Me Maud ANDRIEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

Société DES CENTRES COMMERCIAUX (SCC)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par Me David CALVAYRAC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0107, substitué par Maître DENTRAYGES Pauline, (P0107)

INTIMEES SUR LE PRINCIPAL

APPELANTES SUR L’APPEL INCIDENT

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue le 27 Mars 2014, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle LACABARATS, Président,

Madame Clotilde MAUGENDRE, Conseiller,

Madame Régine NIRDE-DORAIL, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Christine LECLERC

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de Versailles (section Commerce) du 22 mars 2012 qui a :

— dit la demande de Madame [Z] recevable,

— prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [Z] aux torts de la société ESPACE PLUS et de la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, avec effet à compter de la date de prononcé du jugement,

— condamné conjointement et solidairement la société ESPACE PLUS et la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX à payer à Madame [Z] les sommes de :

. 75 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 25 748,46 euros à titre de rappel des salaires pour la période du 1er avril au 30 novembre 2011 et 2 574,85 euros au titre des congés payés afférents,

. 10 580 euros, à parfaire, à titre de rappel des salaires pour la période allant du 1er décembre 2011 jusqu’à la date du prononcé du jugement, et 1 058 euros, à parfaire, au titre des congés payés afférents,

— condamné Madame [Z] à rembourser les sommes, perçues par elle à titre de provision en exécution de l’ordonnance du bureau de conciliation du 22 novembre 2011, soit :

. 5 721,88 euros à la société ESPACE PLUS,

. 5 721,88 euros à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX,

. 5 721,88 euros à la société ACCESSITE ,

— condamné les sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX à payer conjointement et solidairement à Madame [Z], les sommes de :

. 5 721,88 euros à titre d’indemnité de préavis et 572,19 euros au titre des congés payés afférents,

. 25 033,22 euros, à parfaire jusqu’au jour du prononcé du présent jugement, à titre d’indemnité légale de licenciement,

. 3 890,87 euros au titre du solde de l’indemnité de congés payés,

— ordonné la délivrance à Madame [Z], par les sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, d’un solde de tout compte, d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle emploi avec la mention « licenciement », sous astreinte provisoire de 100 euros par document et par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter du prononcé de la décision,

— dit qu’il se réservait le pouvoir de liquider l’astreinte,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement en application de l’article 515 du code de procédure civile,

— débouté Madame [Z] du surplus de ses demandes,

— débouté la société ACCESSITE de sa demande à l’encontre des sociétés ESPACE PLUS et SOCIÉTÉ DES CENTRES COMMERCIAUX, en dehors de ses compétences,

— condamné les sociétés ESPACE PLUS et SOCIÉTÉ DES CENTRES COMMERCIAUX aux éventuels dépens et, conjointement et solidairement, au paiement de la somme de 2 500 euros à Madame [Z] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Vu la déclaration d’appel adressée au greffe le 26 avril 2012 pour la SCI ESPACE PLUS et enregistrée sous le n° RG 12/02094,

Vu la déclaration d’appel adressée au greffe le 9 mai 2012 pour la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX et enregistrée sous le n° RG 13/02456,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour la SCI ESPACES PLUS qui demande à la cour de :

à titre principal :

— constater que le mandat de gestion du centre commercial SQY OUEST ne constitue pas une activité économique autonome,

— constater que le mandat de gestion du centre commercial SQY OUEST perdu par ACCESSITE n’a pas été poursuivi à l’identique,

— juger que la convention collective de l’Immobilier n’instaure aucun transfert conventionnel des contrats de travail en cas de perte d’un mandat de gestion,

— juger que l’article L. 1224-1 du code du travail n’est donc pas applicable dans le contexte du changement de mandataire du centre commercial SQY OUEST,

en conséquence,

— infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Versailles en date du 22 mars 2012,

— juger que l’employeur de Madame [Z] est demeuré la société ACCESSITE,

— ordonner à la société ACCESSITE de s’acquitter de l’ensemble des sommes que la cour estimera être dues à Madame [Z],

— ordonner à Madame [Z] le remboursement des sommes perçues de sa part au titre de l’exécution provisoire du jugement,

— débouter Madame [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,

à titre subsidiaire, si la cour considérait que le contrat de travail de Madame [Z] aurait dû être transféré,

— juger que les fonctions essentiellement exercées par Madame [Z] sont actuellement traitées par la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX et que ledit transfert n’a pu intervenir majoritairement qu’envers cette dernière, qui a repris la gestion quotidienne du centre,

à titre infiniment subsidiaire, si la cour considérait que le contrat de travail de Madame [Z] aurait dû lui être transféré en partie,

— juger qu’elle ne peut en aucun cas se voir attribuer plus de 50% d’une assistante administrative,

en conséquence,

— partager l’intégralité des coûts afférents (salaire, bonus, dommages et intérêts, etc.) avec la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX dans une proportion qui ne saurait dépasser 50% à sa charge,

— fixer la moyenne de la rémunération brute de Madame [Z] à la somme de 2 818,57 euros,

— réformer la décision entreprise dans le montant des sommes octroyées à Madame [Z], l’intéressée ne pouvant en aucun cas se voir attribuer sur la période du 1er avril 2011 au 22 mars 2012 une rémunération brute supérieure à 32 978 euros et une indemnité de congés payés afférents de plus de 3 298 euros bruts, sachant que la proportion de ces sommes à sa charge ne saurait en aucune manière dépasser 50%,

— réformer le montant de l’indemnité compensatrice de préavis et la fixer à la somme brute de 5 086,12 euros, plus 508,61 euros d’indemnité compensatrice de congés payés afférente, sachant que la proportion de ces sommes à sa charge ne saurait en aucune manière dépasser 50%,

— réformer le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement et la fixer la somme de 24 662,44 euros, sachant que la proportion de ces sommes à sa charge ne saurait en aucune manière dépasser 50%,

— confirmer l’absence de prorata de treizième mois, aucune somme n’étant attribuée à Madame [Z] à cet égard,

— confirmer l’absence de préjudice moral distinct, aucune somme n’étant attribuée à Madame [Z] à cet égard,

— constater qu’elle n’est pas à l’origine de l’attitude intransigeante d’ACCESSITE,

— réformer la décision entreprise en diminuant le montant des dommages et intérêts octroyés à Madame [Z], sachant que la proportion des dommages et intérêts attribués à Madame [Z] et portés à sa charge ne saurait en aucune manière dépasser 50%,

en tout état de cause,

— condamner la société ACCESSITE aux entiers dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour la SAS SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX (la société SCC) qui demande à la cour de :

— juger qu’en l’absence de transfert d’une entité économique autonome dans les conditions visées à l’article L. 1224-1 du code du travail, le contrat de travail de Madame [Z] ne lui a pas été transféré,

en conséquence,

— réformer le jugement en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

— débouter Madame [Z] de l’intégralité de ses demandes formées à son encontre,

— condamner Madame [Z] aux dépens et à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour la SAS ACCESSITE qui entend voir :

à titre principal,

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

— confirmer le transfert légal des contrats de travail aux sociétés SCI ESPACES PLUS et SCC,

— la mettre hors de cause,

— condamner Madame [Z] à lui rembourser les avances de salaire effectuées à son profit dans le cadre de la procédure, soit 5 721,88 euros,

— condamner conjointement et solidairement les sociétés SCI ESPACES PLUS et SCC aux dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

à titre infiniment subsidiaire,

— ramener le montant des dommages-intérêts à de plus justes proportions,

Vu les conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil pour Madame [C] [Z] qui entend voir :

— fixer sa rémunération mensuelle brute à 2 860,94 euros,

à titre principal,

— dire que, par application des dispositions des articles L. 1224-1 et suivants du code du travail, son contrat de travail a été transféré, à compter du 1er avril 2011, aux sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, agissant en qualité de co-employeurs,

à titre subsidiaire,

— dire qu’elle est salariée de la société ACCESSITE en l’absence de transfert de droit ou de rupture de son contrat de travail,

en conséquence,

— confirmer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur au 22 mars 2012,

— condamner l’employeur à lui verser les sommes de :

. 25 748,46 euros au titre des salaires d’avril à décembre 2011, outre 2 574,84 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 7 752,22 euros bruts au titre des salaires du 1er janvier au 22 mars 2012, outre 775,22 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 953,64 euros bruts à titre de prorata 13ème mois et prime de vacances sur la période du 1er janvier au 31 mars 2011,

. 5 721,88 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 572,18 euros au titre des congés payés afférents,

. 25 033,22 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

. 3 890,87 euros bruts au titre du solde de congés payés acquis (34 jours),

. 150 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

. 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

LA COUR,

SUR LA PROCEDURE

Considérant que, s’agissant des appels relevés par deux des parties du même jugement, il existe entre les litiges un lien tel qu’il est de l’intérêt d’une bonne justice de les instruire et juger ensemble ;

Que la jonction des procédures enregistrées sous les n° 12/02094 et 13/02456, sera en conséquence ordonnée et la procédure désormais suivie sous le seul n° 12/02094 ;

AUFOND

Considérant que la SNC PARC CULTUREL URBAIN D’ANIMATION PERMANENTE, propriétaire du centre commercial SQY OUEST de Saint Quentin en Yvelines, qui en avait précédemment confié la gestion à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX a, à compter du 1er mai 2007, confié à la SA COMPAGNIE D’IMMOBILIER, devenue la SAS ACCESSITE, un mandat de gestion comportant la gestion locative, la gestion immobilière et la direction de centre ainsi qu’un mandat simple de commercialisation ;

Que le 16 décembre 2010, la SNC PARC CULTUREL URBAIN D’ANIMATION PERMANENTE a dénoncé le mandat de gestion exercé par la société ACCESSITE à effet au 31 mars 2011 en perspective de la vente du centre commercial à venir et intervenue le 7 février 2011 au profit de la SCI ESPACE PLUS, créée à cet effet par la société HAMMERSON ASSET MANAGEMENT dont elle est la filiale ;

Que, par lettre du 10 mars 2011 s’inscrivant ' dans le cadre de la reprise de l’activité de gestion du centre commercial SQY OUEST au 1er avril 2011 'et 'en application de l’article L. 1224-1 du code du travail ', la société ACCESSITE a adressé à la SCI ESPACE PLUS la liste du personnel composé de Madame [Z], Monsieur [U] et Monsieur [R] et les documents contractuels les concernant ;

Que, par lettre du 16 mars 2011, la SCI ESPACE PLUS a répondu à la société ACCESSITE que la cessation de son mandat au 31 mars n’impliquait nullement le transfert automatique des contrats de travail des trois salariés visés dans son courrier et précisé qu’en outre, elle n’entendait pas reprendre le mandat tel qu’exercé par la société ACCESSITE, prévoyant de reprendre uniquement la direction du centre et de confier à un autre prestataire la gestion technique et administrative ;

Que, par courrier du 23 mars 2011, la SCI ESPACE PLUS a informé la société ACCESSITE qu’à compter du 1er avril, la gestion du centre serait assurée par la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ;

Que, par courriers du même jour, la société ACCESSITE a informé ses salariés que, dans le cadre de la cession du centre commercial SQY OUEST et de la reprise de sa gestion par la société HAMMERSON ASSET MANAGEMENT et par la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, leurs contrats de travail ferait l’objet d’un transfert légal à l’une ou l’autre de ces sociétés conformément aux dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail et de l’article 15 de la convention collective nationale de l’immobilier ;

Que, le 28 mars 2011, la SCI ESPACE PLUS a confié à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX la gestion administrative, comptable et financière et l’exploitation technique des locaux commerciaux dont elle était propriétaire et représentant la quasi-totalité des locaux commerciaux et réserves du centre commercial SQY OUEST dont elle se réservait la direction ;

Que, le 29 mars 2011, la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, à laquelle la société ACCESSITE avait adressé copie de sa lettre du 10 mars 2011 à la SCI ESPACE PLUS ainsi que la liste et les documents contractuels du personnel affecté à la gestion du centre commercial, lui a répondu que les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail organisant un transfert des contrats de travail n’était pas réunies en l’occurrence et souligné qu’elle n’avait repris qu’une partie des missions qui lui étaient précédemment confiées ;

Que, par lettres du 1er avril 2011, la société HAMMERSON ASSET MANAGEMENT et la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ont l’une et l’autre confirmé aux trois salariés de la société ACCESSITE que les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail ne s’appliquaient pas et que leurs contrats de travail n’étaient pas transférés ;

Qu’il est constant que, depuis le 1er avril 2011, ni la société ACCESSITE ni les sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX n’ont fourni de travail aux trois salariés concernés ni ne leur ont réglé leurs salaires si ce n’est en exécution des décisions judiciaires intervenues à cet effet ;

Considérant, sur le transfert des contrats de travail, que l’article L. 1224-1 du code du travail dispose : « Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise » ;

Qu’il résulte de ce texte, interprété à la lumière de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001, que les contrats de travail subsistent avec le nouvel employeur en cas de transfert d’une entité économique autonome, conservant son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise, même en l’absence de lien de droit entre les employeurs successifs ;

Qu’une entité autonome s’entend d’un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre ;

Que les dispositions d’ordre public de l’article L. 1224-1 du code du travail auxquelles il ne peut être dérogé par des conventions particulières, doivent recevoir application dans tous les cas où une entité économique, dont l’activité est reprise, conserve son identité ;

Considérant que la SAS ACCESSITE justifie de ce que les trois salariés qu’elle employait sur le site, spécialement dédiés à la gestion du centre à laquelle ils étaient exclusivement affectés, constituaient un ensemble organisé de personnes, Monsieur [R] assurant la partie technique de la gestion et Madame [Z] l’assistance administrative, sous la direction de Monsieur [U], directeur du centre, qui établissait les plannings, leur donnait des directives, gérait leurs activités et leurs congés ; que ses salariés travaillaient dans des bureaux mis à leur disposition par le mandant au sein du centre commercial ;

Que la gestion financière du centre était distincte de celle des autres sites gérés par la société ACCESSITE et autonome ; que la gestion, dont le coût était facturé aux preneurs, était assurée dans le cadre d’un budget spécifique, au moyen d’un compte bancaire intitulé ' GES SQY OUEST 'ouvert à cet effet, et faisait l’objet d’une comptabilité propre ;

Que le service disposait d’éléments corporels et incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation tels que notamment clefs des locaux, badges, déclaration d’exploitation, registres et rapports de sécurité, baux, contrats de prestataires, contrats d’assurances, documents comptables, dont la société ACCESSITE justifie de la remise à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ;

Que la société ACCESSITE démontre ainsi que ce service constituait, au moment du transfert, une entité économique autonome qui avait pour objectif propre la gestion du centre commercial SQY OUEST et avait vocation à se maintenir ;

Qu’il résulte du mandat de gestion consenti par la SCI ESPACE PLUS à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX que cette dernière s’est vue confier l’essentiel des missions de gestion administrative, technique et de sûreté précédemment assumées par la société ACCESSITE dont elle a ainsi poursuivi l’activité en étroite collaboration avec la SCI à la disposition de laquelle elle devait mettre un responsable adjoint pour la gestion technique et la gestion de la sécurité ainsi qu’une assistance administrative et une assistance aux commerçants et à la direction du centre que la SCI assurait ; que le fait que le mandat de la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ne comporte expressément ni la gestion locative ni la direction du centre n’exclut pas le transfert de l’entité économique alors que les termes très larges du mandat témoignent de l’assistance constante que la société mandataire devait assurer à son mandant dans la direction du centre qu’il conservait formellement ; que cet état de fait est notamment corroboré par le bordereau contradictoire établi le 31 mars 2011 à l’occasion de la remise par la société ACCESSITE des documents concernant le centre commercial, dont les dossiers des preneurs et le registre de sécurité, que le nouveau propriétaire y était représenté par une salariée de la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ; qu’il en résulte que, quoique l’entité transférée n’ait pas conservé son autonomie d’un point de vue organisationnel, le lien fonctionnel était maintenu et permettait aux repreneurs la poursuite d’une activité analogue ;

Que, si un mandat de gestion n’est pas 'en soi’ une entité économique autonome, le seul fait qu’une société soit chargée d’un mandat de gestion ne suffit pas à exclure que cette activité soit exercée par une entité économique autonome ; qu’il convient de constater, en l’espèce, l’existence d’un ensemble organisé de personnes disposant de ses propres moyens d’action qui poursuit un objectif propre, réunissant ainsi les conditions d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail ;

Que, de même, les circonstances que la société ACCESSITE, comme d’ailleurs la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, soit spécialisée dans la gestion de centres commerciaux, que l’entité chargée de la gestion du centre commercial SQY OUEST soit rattachée à la direction de la société ACCESSITE dont elle bénéficiait des supports ou que les contrats de travail des salariés stipulent qu’ils pourront être employés sur d’autres centres commerciaux, ne conduisent pas à écarter l’application de l’article L. 1224-1 dès lors que, la gestion du centre commercial SQY OUEST étant exercée par une entité économique autonome, les conditions en sont réunies ; qu’il résulte d’ailleurs de l’extrait du registre du commerce de la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX que le centre commercial SQY OUEST constitue, au sein de la société, un établissement à part entière ;

Considérant, au surplus, que la société ACCESSITE justifie de ce que le contrat de travail de Madame [Z] lui avait été transféré le 1er mai 2007, dans les mêmes conditions, par application expresse de l’article L. 122-12 (devenu L. 1224-1), par la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX elle-même, déjà précédemment chargée de la gestion du centre commercial SQY OUEST ; qu’elle produit également un contrat de travail dont il résulte que la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX a repris, sur le fondement des mêmes dispositions, une assistante de direction de centres ainsi que des conventions tripartites aux termes desquelles, elle a elle-même, à l’occasion de la reprise de la gestion de divers centres commerciaux, repris les contrats de travail de salariés qui y étaient affectés par application de l’article L. 1224-1 du code du travail et de l’article 15 de la convention collective nationale de l’Immobilier ;

Qu’en effet, aux termes de cette disposition conventionnelle, dont la société ACCESSITE se prévaut également, « dans le cas où intervient une modification de la situation juridique de l’employeur et, par extension, en cas de transfert d’une partie de l’activité de l’entreprise sous quelque forme que ce soit, les contrats de travail du personnel appartenant à l’activité transférée sont pris en charge par le nouvel employeur avec les garanties et obligations de droit prévues par les articles L. 1224-1 et L. 1224-2 du code du travail. La permanence des contrats ainsi transférés implique le maintien des avantages individuels acquis et le bénéfice d’une ancienneté décomptée de la date d’effet du contrat d’origine pour l’application des dispositions conventionnelles en vigueur chez le nouvel employeur » ;

Que les sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ne sauraient sérieusement contester que la convention collective nationale de l’Immobilier, dont elles ne mettent pas en cause l’application en l’espèce, procède expressément à une ' extension ' des cas de transfert automatique des contrats de travail des salariés concernés par le transfert, même partiel et sous quelque forme que ce soit, de l’activité de l’entreprise, se référant seulement aux dispositions légales en ce qui concerne les effets du transfert ; que la circonstance que d’autres conventions collectives soient différemment rédigées est inopérante et que le transfert des contrats de travail des salariés de l’entité exerçant la gestion du centre commercial SQY OUEST s’imposait de plus fort ;

Considérant qu’il convient, en conséquence, nonobstant les tempéraments apportés au mandat du nouveau gestionnaire afin de faire échec au transfert de plein droit des contrats de travail, de confirmer le jugement en ce qu’il a estimé que le contrat de travail de Madame [Z] devait être repris conjointement par la SCI ESPACE PLUS et la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX auxquelles l’activité de gestion du centre commercial QSY OUEST avait été transférée ;

Considérant, sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, qu’il appartient au juge, saisi par le salarié d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail d’apprécier s’il établit à l’encontre de l’employeur des manquements suffisamment graves pour justifier cette mesure ; que dans ce cas, la résiliation judiciaire du contrat de travail, prononcée aux torts de l’employeur, produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu’au cas contraire, le juge qui estime que les manquements reprochés à l’employeur ne sont pas établis ou ne justifient pas la rupture du contrat doit débouter le salarié de sa demande ;

Que la fourniture du travail et le paiement du salaire convenus constituant les obligations premières de l’employeur et la SCI ESPACE PLUS et la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, auxquelles le transfert du contrat de travail de Madame [Z] s’imposait, ayant exprimé l’intention de ne pas la reprendre à leur service, ne lui ayant jamais fourni de travail et ne lui ayant réglé ses salaires que sur décision judiciaire, il convient également de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [Z] aux torts des sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX ;

Considérant, sur les rappels de salaires et congés payés afférents, que la résiliation judiciaire du contrat de travail prenant effet à la date de son prononcé par le conseil de prud’hommes, soit le 22 mars 2012, Madame [Z], dont le contrat de travail n’était pas rompu et qui s’était tenue à la disposition des repreneurs, est fondée à solliciter le paiement de ses salaires du 1er avril 2011 au 22 mars 2012 ;

Que, sur la base du salaire perçu à compter du mois de janvier 2011 et non de la moyenne des salaires des douze derniers mois comme le prétend à tort la SIC ESPACE PLUS, et tenant compte de la 13ème mensualité et de la prime de vacances équivalente à un demi-mois prévues à son contrat de travail, le salaire moyen de Madame [Z] s’établit à 2 860,94 euros ; qu’il convient, rectifiant l’erreur matérielle commise par le jugement, de faire droit aux demandes de la salariée de ces chefs, sauf à prononcer les condamnations en deniers ou quittance pour tenir compte des sommes versées au titre de l’exécution provisoire des décisions du conseil de prud’hommes ;

Considérant, sur la demande aux titres du prorata de 13ème mois et prime de vacances,

que, dès lors que la cour l’a suivie en sa demande de rappel de salaire calculé sur la base d’un salaire moyen tenant compte de la 13ème mensualité et de la prime de vacances équivalente à un demi-mois de salaire prévues à son contrat de travail, Madame [Z] a été remplie de ses droits ;

Que, pour ce motif, il y a lieu de confirmer le jugement qui l’a déboutée de ce chef de demande ;

Considérant, sur l’indemnité compensatrice de préavis et l’indemnité conventionnelle de licenciement, que Madame [Z] est également en droit d’obtenir paiement de l’indemnité compensatrice du préavis conventionnel de deux mois, des congés payés afférents et de l’indemnité conventionnelle de licenciement dont elle a été privée, dûment calculés sur la base du même salaire moyen intégrant le prorata de 13ème mois et la prime de vacances, conformément aux dispositions des articles 32 et 33 de la convention collective ;

Que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a alloué à Madame [Z] les sommes dues de ces chefs ;

Considérant, sur l’indemnisation de la rupture, que la résiliation judiciaire aux torts de l’employeur produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Madame [Z], qui avait au moins deux années d’ancienneté dans une entreprise qui employait habituellement au moins 11 salariés, a droit, en vertu de l’article L. 1235-3 du code du travail, dont les conditions d’application ne sont pas contestées, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ;

Qu’engagée le 23 février 1977 par la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, en qualité de « sténo dactylo », elle avait 55 ans au moment de la rupture et comptait 35 ans d’ancienneté dans l’entreprise ; qu’elle justifie n’avoir pas retrouvé d’emploi et, faute de procédure de licenciement, être restée privée de toutes ressources pendant plusieurs mois ; qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il lui a alloué la somme de 75 000 euros qui réparera le préjudice tant matériel que moral résultant pour elle de la perte de son emploi ;

Que les conditions dans lesquelles elle aurait été contrainte de quitter son lieu de travail le 1er avril 2011 n’étant pas établies, elle ne justifie pas d’un préjudice moral distinct de la perte de son emploi et doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ;

Considérant, sur la condamnation des sociétés ESPACE PLUS et SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX, que la SCI ESPACE PLUS soutient que les fonctions de Madame [Z] étaient très majoritairement afférentes à la gestion quotidienne du centre commercial aujourd’hui dévolues à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX de sorte que les condamnations prononcées au profit de Madame [Z] ne devraient pas être mises à sa charge à hauteur de plus de 50% ; que, cependant, la SCI ne peut utilement se prévaloir des dispositions du contrat de gestion consenti à la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX qui stipule que cette dernière mettra à sa disposition ' une secrétaire principale à mi-temps dont la totalité du coût salarial sera incluse dans les honoraires ' dès lors qu’un tel aménagement, emportant modification du contrat de travail, est inopposable à la salariée ; que la société ESPACE PLUS sera, en conséquence, déboutée de cette demande et, le jugement étant réformé de ce chef, condamnée in solidum avec la SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX au paiement des sommes allouées à Madame [Z] tant au titre de la poursuite du contrat de travail du 1er avril 2011 au 22 mars 2012 que de la rupture ;

Considérant, sur le solde de congés payés, qu’il résulte du bulletin de salaire de Madame [Z] pour le mois de mars 2011 qu’il lui restait à cette date 34 jours de congés payés non pris ;

Qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société ACCESSITE à lui payer à ce titre la somme de 3 890,87 euros ;

PAR CES MOTIFS

STATUANT PUBLIQUEMENT ET CONTRADICTOIREMENT,

ORDONNE la jonction des procédures enregistrées sous les n° 12/02094 et 13/02456, pour être désormais suivies sous le seul n° 12/02094,

INFIRMANT PARTIELLEMENT le jugement,

CONDAMNE in solidum la SCI ESPACE PLUS et la SAS SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX à payer à Madame [C] [Z] les sommes de :

. 75 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 25 748,46 euros bruts au titre des salaires des mois d’avril à décembre 2011, outre 2 574,84 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 7 752,22 euros bruts au titre des salaires du 1er janvier au 22 mars 2012 outre 775,22 euros au titre des congés payés afférents,

. 5 721,88 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 572,19 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 25 033,22 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

CONFIRME pour le surplus le jugement,

DEBOUTE les parties de toutes leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

CONDAMNE la SCI ESPACE PLUS et la SAS SOCIETE DES CENTRES COMMERCIAUX aux dépens d’appel et au paiement, en application de l’article 700 du code de procédure civile, d’une somme complémentaire de 2 000 euros à Madame [C] [Z] au titre des frais non compris dans les dépens par elle exposés en cause d’appel et déboute les autres parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, conformément à l’avis donné aux parties à l’issue des débats en application de l’article 450, alinéa 2, du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle Lacabarats, président et Madame Christine Leclerc, greffier.

Le greffierLe président

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Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 4 juin 2014, n° 12/02094