Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 8 juin 2017, n° 15/01159

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 11e ch., 8 juin 2017, n° 15/01159
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 15/01159
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Chartres, 17 février 2015, N° 14/00062
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 JUIN 2017

R.G. N° 15/01159

SB/CA

AFFAIRE :

SAS R INTERIM,

C/

A X

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Février 2015 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CHARTRES

N° RG : 14/00062

Copies exécutoires délivrées à :

Me Carine CHATELLIER

la SELARL TREMBLAY AVOCATS ASSOCIES

Copies certifiées conformes délivrées à :

SAS R INTERIM,

A X

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT JUIN DEUX MILLE DIX SEPT,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre : SAS R INTERIM,

XXX

XXX

représentée par Me Carine CHATELLIER, avocat au barreau de RENNES

APPELANTE

****************

Madame A X

XXX

XXX

comparante en personne, assistée de Me Séverine DUCHESNE de la SELARL TREMBLAY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 48 – N° du dossier 37506 substituée par Me Dominique JUGIEAU, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000048 – N° du dossier 37506

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 Mars 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sylvie BOSI, Président chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie BOSI, Président,

Madame Marie-Christine PLANTIN, Conseiller,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de chartres en date du 18 février 2015 ayant ;

— dit que la transaction datée du 14 novembre 2014 et signée des deux parties est nulle,

— dit que le licenciement de Madame A X est sans cause réelle et sérieuse,

— condamner la société R INTERIM à payer à Madame A X les sommes suivantes:

avec intérêts au taux légal à compter du jugement

*4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif (12 000 euros – 8 000 euros correspondant au chèque encaissé par Madame X),

avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2014

*4 002,10 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

*400,21 euros au titre des congés pays incidents

— fixé le salaire moyen de Madame A X à la somme de 2001,05 euros,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire autre que celle de droit,

— condamner la société R INTERIM à payer à Madame A X la somme de 1000euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté Madame A X du surplus de ses demandes,

— débouté la société R INTERIM de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— s’est déclaré incompétent pour connaître de la demande de la société R INTERIM au titre de la concurrence déloyale,

— renvoyé les parties à mieux se pourvoir devant la juridiction compétente,

— condamné la société R INTERIM aux entiers dépens.

Vu l’appel de la société R INTERIM .

Vu les dernières conclusions écrites de la société R INTERIM , soutenues oralement à l’audience de la cour par son avocat, qui demande de :

— dire et juger que le protocole transactionnel a autorité de la chose jugée au principal et à ce titre déclarer irrecevables les demandes formulées par Madame A X ,

— en toute hypothèse,

— déclarer l’action de Madame A X mal fondée,

— débouter Madame A X de toutes ses demandes,

— dire que Madame A X a engagé sa responsabilité pour des faits de concurrence déloyale,

— allouer à la société R INTERIM une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi pour les faits de concurrence déloyale,

— allouer à la société R INTERIM la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de Madame A X , soutenues oralement à l’audience de la cour par son avocat, qui demande de :

— débouter la société R INTERIM de ses demandes, – confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

* prononcé la nullité de la transaction du 14 novembre 2014,

* dit le licenciement de Madame A X sans cause réelle et sérieuse et donc abusif,

* condamné la société R INTERIM à payer les sommes de 4002,10 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et de 400,21 euros au titre des congés payés y afférents,

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a limité le montant du préjudice subi par Madame A X du fait du caractère abusif de son licenciement,

— statuant à nouveau, condamner la société R INTERIM à payer à Madame A X la somme de 16 000 euros en réparation du préjudice subi pour licenciement abusif,

y ajoutant,

— condamner la société R INTERIM à payer à Madame A X la somme de

5 000euros pour appel abusif,

en tout état de cause,

— condamner la société R INTERIM à payer à Madame A X la somme de

4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société R INTERIM aux entiers dépens,

— déduire des sommes mises à la charge de la société R INTERIM la somme de 8 000 euros correspondant au chèque de ce montant que Madame A X a encaissé.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour l’exposé des moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et soutenues oralement à l’audience.

CECI ETANT EXPOSE

La société R INTERIM est une entreprise de travail temporaire relevant de la convention collective du personnel permanent des entreprises de travail temporaire.

Par contrat de travail à durée indéterminée du 25 mai 2009, Madame A X a été engagée par la société R INTERIM en tant qu’assistante d’agence.

Elle est devenue par la suite attachée commerciale, niveau III, coefficient 160 et a travaillé à l’agence de Luisant.

Le salaire mensuel de base de Madame X est de 1750 euros bruts. Il est majoré d’une commission égale à 3% de la marge brute.

Il n’y avait pas eu de recrutement de responsable d’agence avant le 2 septembre 2013.

Madame A X a été arrêtée pour maladie du 9 septembre au 11 octobre 2013. La possibilité de la rupture conventionnelle de la relation de travail existant entre Madame A X et la société R INTERIM a été évoquée au cours du mois d’octobre 2013.

Le projet n’a pas eu de suite.

Les tâches dévolues à Madame A X ont donné lieu à des discussions.

Le 29 octobre 2013, Monsieur Y, dirigeant de la société R INTERIM , a remis en mains propres à Madame A X une convocation à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 7 novembre 2013 ainsi qu’un courrier la dispensant de venir travailler jusqu’à cette date.

La lettre de licenciement est datée du 12 novembre 2013.

SUR LE LICENCIEMENT

Par lettre datée du 12 novembre 2013 signée par la salariée, sa signature étant précédée de la mention manuscrite 'remis en main propre le 12 novembre 2013", la société R INTERIM a licencié Madame A X dans les termes suivants : ' (…) Votre manque d’investissement, votre démotivation dans votre travail ainsi que vos difficultés relationnelles avec votre supérieur hiérarchique nuisent au développement de l’agence de Luisant et portent préjudice au bon fonctionnement de l’entreprise. Dans ces conditions votre maintien au sein de l’agence de Luisant est devenu impossible.'

La cour relève que cette lettre manque de précision sur les motifs retenus par l’employeur pour justifier sa décision de licencier la salariée.

Dès lors le licenciement de Madame A X est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

SUR LA TRANSACTION

Suivant la transaction datée du 14 novembre 2013, signée par l’employeur, d’une part, et par la salariée, d’autre part, la signature de chaque partie étant précédée de la mention manuscrite ' lu et approuvé bon pour accord transactionnel et renonciation sans réserve', les parties se sont rapprochées après la réception de la lettre de licenciement par la salariée, pour faire des concessions réciproques et parvenir à un accord. Le départ de la salariée de l’entreprise est fixé au 14 novembre 2013. L’employeur s’est engagé à lui verser la somme de 8 000 euros en net à titre d’indemnité transactionnelle, forfaitaire, globale et définitive en réparation du préjudice humain occasionné par la rupture du contrat de travail. La salariée s’est reconnue rempli de l’ensemble de ses droits et a renoncé à toute action prud’homale à l’encontre de l’employeur qu’elle avait envisagée.

Madame A X soulève la nullité de la transaction au motif qu’elle a été en réalité conclue avant son licenciement.

Il ressort du constat d’huissier du 13 novembre 2013 que Madame A X s’est présentée dans son étude en possession :

— d’une lettre datée du 29 octobre 2013 que la société R INTERIM lui avait adressée avec la mention 'lettre remise en main propre contre décharge-objet : convocation à un entretien préalable au licenciement’ ;

— d’une lettre du 12 novembre 2013 que la société R INTERIM lui avait adressée avec la mention 'lettre remise en main propre contre décharge-objet : notification de licenciement’ ; – d’un document intitulé 'transaction’ établi entre la société R INTERIM et Madame A X avec la mention 'fait à Montgermont le 14 novembre 2013" ;

— d’un chèque n°9649628, daté du 14 novembre 2013, tiré par la société R INTERIM sur BNP PARIBAS pour un montant de 8 000 euros.

Il s’ensuit que la transaction a été antidatée par les parties puisqu’elle est porte la date du 14 novembre 2013 alors que Madame A X l’a présentée à l’huissier le 13 novembre 2013.

Par ailleurs, il résulte d’un courriel du 9 novembre 2013, que Madame A X attribue à son père, que ce jour là, l’adresse de 'farth @aol.com’ a été utilisée pour envoyer un dossier joint à 'stefarth@aol.com', le dit dossier comportant des fichiers joints dénommés 'notification de licenciement', 'transactionnel’ et 'chèque.'

Cet envoi conforte le fait que Madame A X née ARTH a communiqué, avant son licenciement daté du 12 novembre 2013, la transaction à son père.

En conséquence, il ne saurait être valablement soutenu que la transaction est intervenue après la décision de l’employeur de licencier la salariée.

Dès lors, le jugement, qui a annulé la transaction, sera confirmé.

SUR LES DEMANDES PECUNIAIRES

Sur la demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

A la date de la rupture du contrat de travail, l’ancienneté de Madame A X était supérieure à 2 ans et l’entreprise employait habituellement plus de 10 salariés.

En application de l’article L1235-3 du code du travail, Madame A X peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure à ses six derniers mois de salaire soit 11525,72 euros suivant les données constantes figurant sur les attestations Pôle Emploi.

Pour obtenir davantage il lui appartient de justifier d’un préjudice supplémentaire.

Madame A X fait valoir que les circonstances de la rupture de son contrat de travail et la privation de ressources qu’elle a subie justifient sa demande d’indemnité de 16 000 euros.

Elle fait valoir qu’elle n’a encaissé le chèque de 8 000 euros qu’à la limite de validité du chèque; qu’elle n’a retrouvé un emploi qu’en février 2014 ; qu’elle n’a pas bénéficié d’un préavis de licenciement et qu’elle a été privée de l’assurance perte d’emploi jusqu’en février 2014 compte tenu du délai de carence appliqué par Pôle Emploi ; que la société R INTERIM a rédigé des attestations de complaisance pour Pôle Emploi, l’une signée ne tenant pas compte de l’indemnité transactionnelle accordée et l’autre non signée en tenant compte.

La cour relève que Madame A X a également signé les actes antidatés.

Par contre au regard de l’âge de la salariée, de son ancienneté dans le poste perdu, de son expérience professionnelle, du temps dont elle a eu besoin pour retrouver un emploi et de la diminution de ses revenus avant février 2014 que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être évaluée à 13 000 euros.

Après déduction de la somme de 8 000 euros déjà perçue par Madame A X , la société R INTERIM devra payer à Madame A X le solde de 5 000 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande d’indemnité de préavis et de congés payés incidents

La transaction étant annulée, la renonciation de la salariée à son préavis, qui s’inscrivait dans le contexte de cette transaction, ne saurait produire effet.

Compte tenu de son ancienneté et de son salaire, elle a droit à une indemnité compensatrice de préavis de 2 mois soit de 4 002,10 euros outre les congés payés incidents soit 400,21 euros.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour appel abusif

Il n’est pas établi que la société R INTERIM a abusé de son droit d’ester en justice.

Madame A X sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.

Sur les intérêts de retard.

Les créances indemnitaires sont productives d’un intérêt de retard au taux légal à compter de la décision qui les fixe.

Les créances salariales et assimilées sont productives d’un intérêt de retard au taux légal à

compter de la remise à l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation soit en l’espèce le 28 janvier 2014.

Le jugement entrepris sera confirmé sur les intérêts de retard.

SUR LA DEMANDE RELATIVE A LA CONCURRENCE DELOYALE

Le contrat de travail du 25 mai 2009 signé par Madame A X et la société R INTERIM comporte une clause de non-concurrence. L’action de la société R INTERIM envers son ancienne salariée, Madame A X, pour méconnaissance de l’interdiction de concurrence déloyale, se rattache au contrat de travail et relève de la compétence du conseil de prud’hommes.

La société R INTERIM s’appuie sur la seule attestation de M Z pour établir que le salarié, qu’elle avait placé en intérim dans une société, a signé par la suite un contrat avec la société concurrente START PEOPLE sur la demande de l’utilisatrice.

Le contrat avec la société START PEOPLE couvre la période du 11 août 2014 au 6 septembre 2014.

Madame X avait déjà été recrutée par la société START PEOPLE en tant que responsable d’agence lorsque les faits relatés par Monsieur Z se sont produits. Par ailleurs son contrat de travail avec la société R INTERIM avait cessé de produire des effets depuis 8 mois environs.

Après des recherches d’emploi, Madame X a été embauchée par la société START PEOPLE en février 2014 soit plusieurs mois après son licenciement ce qui exclut le fait qu’elle ait organisé son départ chez ce concurrent.

La société R INTERIM n’établit pas davantage que la cliente évoquée par Monsieur Z était l’une de ses clientes habituelle.

Au contraire, Madame X affirme que la société R INTERIM avait travaillé de manière ponctuelle avec cette cliente qui était par ailleurs référencée chez START PEOPLE avant qu’elle ne soit elle-même embauchée.

Au surplus, dans la lettre de licenciement, la société R INTERIM avait renoncé à l’application de la clause de non-concurrence à Madame X.

En conséquence, au vu de l’ensemble de ces éléments, la société R INTERIM sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

SUR LES FRAIS IRREPETIBLES DE PROCEDURE ET LES DEPENS

L’équité commande d’allouer à Madame A X une indemnité pour frais irrépétibles de procédure pour la première instance et l’appel.

Le jugement, qui a bien apprécié le montant de cette indemnité pour la première instance, sera confirmé pour 1 000 euros.

Il lui sera ajouté une indemnité de 1 000 euros en cause d’appel qui sera également mise à la charge de la société R INTERIM .

La société R INTERIM qui succombe à l’action sera déboutée de sa demande d’indemnité pour frais irrépétibles de procédure et condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur la demande reconventionnelle pour concurrence déloyale,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne la société R INTERIM SAS à payer à Madame A X la somme de 5.000euros à titre de solde d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute la société R INTERIM SAS de sa demande de dommages et intérêts pour concurrence déloyale,

Y ajoutant,

Condamne la société R INTERIM SAS à payer à Madame A X la somme de 1.000euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles de procédure en cause d’appel,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société R INTERIM SAS aux entiers dépens.

Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2 ème alinéa de l’art 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Sylvie BOSI, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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