Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 19 mars 2020, n° 15/05642

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 16e ch., 19 mars 2020, n° 15/05642
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 15/05642
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 16 juillet 2015, N° 15/07307
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78K

16e chambre

JARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 MARS 2020

N° RG 15/05642 – N° Portalis DBV3-V-B67-P7XO

AFFAIRE :

G K Z

C/

X-L M F N A

Monsieur B A

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Juillet 2015 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° RG : 15/07307

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 19 03 2020

à :

Me Oriane DONTOT de l’AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame G K Z

Venant aux droit de Y A, en sa qualité de légataire universelle

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Oriane DONTOT de l’AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 633 – Représentant : Me N-K ISERN-REAL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0994

APPELANTE

****************

Monsieur X-L M F N A

Agissant en qualité d’héritier venant aux droits de Madame E A

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Claire DES BOSCS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0642 – Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20150393

Monsieur B A

Agissant en qualité d’héritier de Madame E A

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 15447 – Représentant : Me Katy BONIXE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E2021

INTIMÉS

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Février 2020, Madame Caroline DERYCKERE, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Patricia GRASSO, Président,

Madame G GUYON-NEROT, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO

EXPOSÉ DU LITIGE

Après son époux F A décédé le […], Mme E A est décédée le […]

2010 en laissant pour lui succéder ses fils X-L et B A, et sa fille Y

A, à qui elle avait consenti donation le 15 décembre 1999, de la nue-propriété de l’immeuble sis

[…] à Paris 6e. Y A avait quant à elle institué légataire

universel Mme G Z par testament du 20 mai 2007. Au décès de Y A le 10

mars 2012, Mme Z a dûment obtenu son envoi en possession par ordonnance du 8 juin 2012.

Depuis, elle exploite l’immeuble sis […], dont les locaux commerciaux étaient

loués à la société LA H I et la société SUSHI ROYAL.

Dans le cadre du règlement très conflictuel de ces successions, X-L et B A ont

notamment attaqué la donation de 1999, et poursuivent l’exhérédation de leur s’ur au titre d’un recel

successoral. Dans la perspective du succès de ces instances, ils font valoir le principe d’un droit au

rapport à la succession de E A, d’une indemnité à raison des loyers perçus par

Y A jusqu’à son décès, puis par G Z aux droits de leur s’ur, au titre de la

location de cet immeuble.

Par ordonnance du juge de l’exécution de Nanterre en date du 5 mai 2015, MM X-L et

B A ont été autorisés à saisir conservatoirement les sommes détenues par la société LA

H I et la société SUSHI ROYAL pour le compte de madame Z, pour

sauvegarde d’une créance évaluée à la somme de 349 853 €. Deux procès-verbaux de saisie

conservatoire ont été dressés par actes d’huissier en date du 6 mai 2015, et dénoncés à la débitrice le

12 mai 2015.

Statuant sur la contestation avec demande de mainlevée de ces mesures conservatoires, le juge

de l’exécution de Nanterre par jugement contradictoire du 17 juillet 2015, a :

• Rejeté l’exception d’irrecevabilité pour défaut d’intérêt et de qualité à agir de MM A en leur nom personnel.

• Rejeté l’exception de nullité des saisies conservatoires du 6 mai 2015,

• Constaté la validité de ces saisies à hauteur de 233.235 euros et ordonné le cantonnement des saisies à ce montant,

• Ordonné la mainlevée des saisies conservatoires pour le surplus,

• Rappelé que l’exécution provisoire est de droit,

• Rejeté le surplus des demandes,

• Condamné madame Z aux dépens.

Mme G Z a formé appel du jugement par déclaration du 27 juillet 2015.

Une médiation a été tentée entre 2016 et 2018, qui n’a pas permis de trouver une issue amiable au

litige.

Par arrêt avant dire droit statuant sur une demande de désignation de séquestre, du 5 septembre 2019,

la cour a décidé que pour parer à une éventuelle incapacité des locataires saisis, à restituer les loyers

dont ils ont été institués gardiens par les saisies conservatoires contestées, il était de l’intérêt des

héritiers et indivisaires, de faire séquestrer ces sommes et a désigné pour cette mission, Me

Guilbaud, qui est l’administrateur provisoire de la succession de E A. Les Fonds

correspondant aux loyers saisis devaient lui être transférés dans le mois de la signification de l’arrêt

avant dire droit, puis bloqués sur le compte de l’étude jusqu’à l’issue de la présente procédure.

La clôture de la procédure a été prononcée le 28 janvier 2020.

Par conclusions du 4 février 2020, MM A ont respectivement demandé que soient écartés des

débats ces conclusions du 22 janvier 2020 et les deux pièces nouvelles produites par Mme Z.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe le 22 janvier 2020, auxquelles il

est expressément renvoyé, Mme G Z demande à la cour de :

• Infirmer le jugement sus énoncé en toutes ses dispositions,

• Déclarer irrecevables les demandes de saisie conservatoire, faute de qualité pour agir au nom de l’indivision successorale des consorts A,

• Déclarer nulle et non avenue la requête en saisie conservatoire du 6 mai 2015 en ce que les requérants ont agi à titre personnel et non en qualité de coïndivisaires,

• Dire et juger que l’administrateur de l’indivision successorale a la charge de garantir les intérêts de l’indivision,

• Dire et juger que les biens personnels de Y A, outre ses droits dans la succession garantissent suffisamment le rapport d’une indemnité,

• Dire et juger que la décision de la Cour d’appel de Paris en date du 18 juin 2015 a autorité de la chose jugée,

• Dire et juger au fond que la créance n’est fondée ni dans son principe ni dans son montant,

• Ordonner par conséquent la mainlevée totale des saisies conservatoires du 6 mai 2015,

• Condamner in solidum les consorts A à payer les intérêts sur les sommes à restituer portant sur la période entre la signification de la saisie et le paiement effectif, exigible à compter de la signification de l’arrêt à venir et ordonner le cas échéant la capitalisation dans

• les conditions de l’article 1154 du Code civil, Condamner in solidum les consorts A au paiement d’une somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance incluant les frais de saisie conservatoire et mainlevée, dont distraction pour ceux-la concernant au profit de Maître Oriane DONTOT, AARPI-JRF AVOCATS, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

A l’appui de ses prétentions, elle fait valoir que par arrêt du 18 juin 2015, la cour d’appel de Paris a

désigné un administrateur de la succession de E A qui a notamment reçu mission de

procéder aux actes conservatoires, et actes d’administration urgents, et de représenter l’indivision

dans les procédures judiciaires qui s’y rapportent, tant en demande qu’en défense ; Elle ajoute que des

saisies conservatoires identiques pratiquées deux ans auparavant, ont été levées par arrêt de la cour

d’appel de Paris du 19 décembre 2013 pour défaut de principe d’une créance, qui sera susceptible

d’être évaluée uniquement lors du règlement définitif des successions encore loin d’être acquis. Il

demeure à ce jour trop d’inconnues à trancher pour dire si un jour les consorts A auront une

créance à faire valoir contre Mme Z, étant observé que si la donation consentie à Y

A était annulée pour insanité d’esprit de leur mère, alors les donations dont les consorts A

ont bénéficié subiront le même sort, et que ces donations feront aussi l’objet d’un rapport à la

succession avant de déterminer le montant de la réserve héréditaire et de la quotité disponible. Or,

MM A ont ruiné leur mère, et s’emploient désormais à alourdir considérablement le passif

indivis. Ce n’est pas au juge de l’exécution qu’il appartient de faire les comptes d’une succession. Elle

se défend des accusations d’organisation de son insolvabilité, alors que les multiples procédures

intentées contre elle par les consorts A l’ont privée de tous ses revenus, obligée à consigner des

sommes, en puisant dans son épargne et en demandant l’aide de sa famille. Cette saisie indue

constitue un abus qui lui est préjudiciable, mais aussi à l’indivision tout entière. Enfin, les droits

qu’elle tient de Y A seule et insusceptibles d’être remis en cause suffisent à couvrir le

montant hautement contestable auquel les consorts A évaluent leur créance contre elle.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 26 septembre 2016 auxquelles il est

expressément renvoyé, M X-L A demande à la cour de :

• Le déclarer recevable et bien fondé;

• Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

• Rejeter l’ensemble des demandes de G Z

• Constater que la créance de X-L A et de B A est évaluée provisoirement à la somme de 233 235 € en principal outre les frais et intérêts, sauf à parfaire ;

• Maintenir la mesure conservatoire pratiquée en exécution de l’ordonnance du 5 mai 2015 en garantie du paiement de la somme cantonnée à 233 235 € ;

• Dire et juger régulière et bien fondée la saisie conservatoire pratiquée le 6 mai 2015 et dénoncée le 12 mai 2015;

• Condamner G Z au paiement d’une somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Franck LAFON, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

Il précise qu’alors que la bonne entente a toujours régné dans la famille, son frère et lui ont découvert

après le décès de leur mère, que leur s’ur avait depuis 1992 lourdement endetté leur mère, falsifié sa

signature sur ses chéquiers et sur des lettres de change, et qu’elle s’était fait consentir dans des

conditions douteuses, des donations et testaments à leur insu, pour, après avoir promis que le

patrimoine resterait dans la famille, se dépouiller finalement au profit d’une simple collègue de

travail. Les rapports des experts médicaux, graphologue et comptable sont très défavorables à

Y A et à G Z, qui tout comme leur s’ur organise son insolvabilité. Après la

mainlevée d’une précédente saisie des loyers, elle a dilapidé le montant restitué sans distraire la part

rapportable, et sans parvenir à régler complètement ses propres dettes, notamment sa quote-part des

charges de copropriété dans la succession A, tout en engageant des procédures qui ont toutes

tourné en sa défaveur après constatation de sa mauvaise foi, ce qui démontre qu’ils auront les plus

grandes peines à lui faire rapporter à la succession sa quote-part des loyers perçus sur l’immeuble,

dont elle reconnaît le principe. En leur qualité d’héritiers réservataires ils ont un droit propre et

indépendant de l’administrateur de la succession, à poursuivre Mme Z qui est seule débitrice

de l’indemnité de rapport des loyers perçus. La précédente procédure qui a abouti à la mainlevée

d’une autre saisie n’a aucune autorité de close jugée eu égard aux circonstances ultérieures qui ont

pour effet le doublement des sommes sont elle doit le rapport et la disparition de ces sommes, étant

précisé que ces loyers litigieux s’avèrent constituer sa seule source de revenus, et qu’elle ne dispose

plus d’un actif suffisant dans les successions pour s’acquitter de l’indemnité de réduction sur la

donation de l’immeuble, et de l’indemnité de rapport sur les loyers encaissés, sans compter les droits

fiscaux de 60% la concernant sur la succession de Y A en tant que tiers à la famille.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 3 octobre 2016 auxquelles il est expressément

renvoyé, M B A demande à la cour de :

• Débouter G Z de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

• Confirmer en toutes ses dispositions le jugement querellé ;

• Condamner Madame G Z au paiement d’une somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

• Condamner Madame G Z aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître DEBRAY pour ceux le concernant.

Il offre de détailler les éléments sur lesquels il fonde le principe de la créance en s’appuyant sur la

motivation du juge de l’exécution de Nanterre qui conclut que la remise en cause de la donation de

l’immeuble n’est pas hypothétique, alors que Mme Z, qui est susceptible de n’avoir droit à rien,

dans les successions dont il s’agit, ne peut tabler sur le soi-disant actif successoral pour prétendre à

une garantie de paiement suffisante.

L’audience de plaidoirie a été fixée au 5 février 2020 et le prononcé de l’arrêt au 19 mars 2020

par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les

conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande tendant à écarter les conclusions de Mme Z en date du 22 janvier 2020

Il doit être rappelé qu’au stade de la mise en état, après le prononcé de l’arrêt avant dire droit du 5

septembre 2019 ayant désigné un séquestre, la procédure a été renvoyée pour clôture au 3 décembre

2019. Un report de la clôture a été autorisé jusqu’au 28 janvier 2020, afin de permettre aux parties de

prendre connaissance de deux nouvelles pièces communiquées le 2 décembre 2019 par B

A, consistant en un jugement du 26 octobre 2018 et un arrêt de la cour d’appel de Paris du 29

mai 2019.

Mme Z a conclu en dernier lieux le 22 janvier 2020, sans faire d’observations sur ces pièces,

mais pour justifier le dépôt de deux pièces relatives à la cession d’un des fonds de commerce ayant

justifié la mesure de séquestre, et la signification de l’arrêt avant dire droit, donc dans incidence sur

le fond du litige. Par ailleurs, elle n’a pas modifié le dispositif de ses précédentes conclusions du 9

septembre 2016, sauf pour y ajouter une demande de nullité de la requête en saisie conservatoire,

comprise dans les motifs de ses précédentes conclusions mais qu’elle avait omise à son dispositif.

La cour observe que Mme Z a présenté conformément aux prescriptions de l’article 954 alinéa

2 du code de procédure civile, de manière formellement distincte, à savoir en caractère gras et en

italique les modifications apportées à ses précédentes conclusions du 9 septembre 2016, tant sur

l’ajout des nouvelles pièces qui tendent à informer la cour des suites qui ont été données à l’arrêt de

mise sous séquestre, que sur le complément apporté au dispositif , sans modification des moyens s’y

rapportant dans la partie discussion relativement à la qualité à agir des demandeurs à la requête,

auxquels les consorts A ont respectivement répondu dans leur conclusions.

Dans ces conditions, le délai de 6 jours qui s’est écoulé entre la transmission de ces conclusions et

pièces était largement suffisant pour leur permettre de se convaincre que les modifications apportées

aux précédentes conclusions de Mme Z n’appelaient pas de réponse.

La demande tendant à ce que les dernières conclusions de Mme Z transmises le 22 janvier

2020, et les pièces nouvelles communiquées par la même occasion sera donc rejetée.

Sur la recevabilité des demandes de saisie conservatoire et la validité de la requête en mesure

conservatoire

A moins de faire annuler le legs universel de Y A au profit de Mme Z, les

consorts A n’ont droit à rien dans la succession de leur s’ur.

Seule la donation en avancement d’hoirie et donc rapportable de l’immeuble litigieux par E

A à sa fille Y A est susceptible de faire naitre dans la succession de E

A une créance d’indemnité de réduction éventuelle au cas ou la valeur de l’immeuble excéderait

celle de la quotité disponible, et une indemnité de rapport des fruits à hauteur de la part des héritiers

réservataires co-partageant.

En qualité d’héritiers réservataires de MM A ont un intérêt à toute mesure destinée à garantir le

retour dans l’actif de succession de toutes les valeurs prévues par la loi.

Par ailleurs, tout héritier C a qualité pour solliciter ces mesures conservatoires, étant observé

qu’à la date de présentation de la requête, l’administrateur provisoire de la succession de Mme

E A n’avait pas encore été désigné.

La cour confirme donc le jugement en ce qu’il a déclaré les demandes de mesure conservatoire des

consorts A recevables, et rejeté l’exception de nullité. En effet, en admettant qu’ils n’ont pas

précisé expressément dans l’entête de la requête qu’ils agissaient en qualité d’héritiers, et pour le

compte de la succession, celle-ci ressortait suffisamment clairement de leurs développements sur le

principe de cette créance particulière d’indemnité de rapport des fruits, dont les mesures contestées

tendent à sauvegarder le recouvrement ultérieur. Et Mme Z qui est opposée à MM A

depuis le décès de Y A et s’est opposée à des mesures identiques qui avaient été

autorisées par le juge de l’exécution de Paris n’ignore nullement en quelle qualité ils poursuivent la

sauvegarde ce cette somme et ne peut donc invoquer aucun grief.

Sur l’exception d’autorité de la chose jugée par l’arrêt du 19 décembre 2013 (et non pas 18 juin

2015 comme indiqué par erreur au dispositif des conclusions) :

La cour d’appel de Paris a eu à statuer sur le bien-fondé de mesures conservatoires pratiquées en

janvier 2013 sur les mêmes loyers, mais pour garantir le rapport à succession d’une indemnité qui

avait été estimée alors à 133 093,02 €. La cour a apprécié le principe de créance et les menaces sur le

recouvrement sur la base des éléments qui étaient connus à cette époque.

Le premier juge a parfaitement relevé que postérieurement à cet arrêt, des éléments nouveaux étaient

apparus, susceptibles de modifier l’appréhension du litige au regard des conditions posée par l’article

L511-1 dommages et intérêts code des procédures civiles d’exécution. L’arrêt précité ne peut donc

pas avoir d’autorité de la chose jugée, les conditions posées par l’article 1351 du code civil n’étant pas

remplies.

Sur le principe de la créance

La demande est fondée sur l’article 856 du code civil qui dispose que les fruits des choses sujettes à

rapport sont dus à compter du jour de l’ouverture de la succession.

Mme Z ne conteste ni le fait que l’immeuble situé […] à Paris qu’elle ne

tient de Y A qu’en vertu de la donation dont celle-ci avait été gratifiée en avancement

d’hoirie le 15 décembre 1999, doit faire l’objet d’un rapport en valeur à la succession de E

A, ni qu’elle doit faire le rapport des fruits au titre de cet immeuble sujet au rapport.

Lorsque la requête a été déposée, 5 années s’étaient écoulées depuis l’ouverture de la succession. En

avril 2015, une déclaration de la société LA H I et la société SUSHI ROYAL a

permis de déterminer qu’elles avaient versé sur cette période au titre des loyers, la somme totale de

349 853 €.

Les fruits s’entendent du bénéfice net d’exploitation de l’immeuble, puisque si l’immeuble n’était pas

sorti du patrimoine successoral, la succession aurait elle aussi dû payer les charges (charges de

co-propriété, entretien, impôts sur les revenus commerciaux et fonciers..).

Les consorts A prétendent que Y A puis Mme Z après elle, ont encaissé

ces loyers sans s’acquitter des charges de l’immeuble.

Mme Z prétend au contraire qu’elle n’a jamais perçu une telle somme, car elle n’a cessé de

régler des charges de la succession. A cet égard, pour faire l’estimation du montant des fruits à

rapporter, c’est à Mme Z qu’il appartient d’apporter la preuve des sommes qu’elle entend voir

déduire des loyers, soient les montants qu’elle a affectés aux règlements des charges de l’immeuble

dont il s’agit et non pas des charges de la succession qui se compenseront dans un décompte distinct,

ni de ses droits de succession qui lui resteront propres.

Or dans ses écritures, elle se défend uniquement sur le fait que trop d’inconnues font encore obstacle

à la détermination exacte de la quotité disponible et donc à la détermination de l’indemnité de

rapport, qui aura à se compenser avec ses propres créances sur la succession. Cependant, si

l’indemnité de réduction de la donation de l’immeuble est en effet soumise à l’évaluation de la quotité

disponible, le rapport des loyers sera dû quelles que soient les circonstances, pour abonder l’actif. Et

c’est uniquement sur cette indemnité là que les consorts A fondent le principe de leur créance.

Le sort de la donation elle-même du 15 décembre 1999 est susceptible d’affecter non pas le principe

de la créance mais seulement la détermination du quantum de l’indemnité en fonction de la

redéfinition des vocations successorales de chacun. A ce jour aucune décision définitive n’est encore

intervenue. Par conséquent la cour approuve le premier juge d’avoir limité l’estimation provisoire de

cette créance aux 2/3 du montant des loyers perçus qui correspondrait à la part des consorts A

en cas d’annulation de la donation. Le principe de créance au titre de l’indemnité de rapport des fruits

de l’immeuble a donc à bons droits été fixée à la somme de 233 235 €.

Sur la menace sur le recouvrement

Pas plus en appel qu’en première instance Mme Z n’a offert de justifier de ses revenus ni de

son patrimoine. Elle se contente de se prévaloir des biens qu’elle a reçus de Y A pour

soutenir qu’ils suffisent à garantir le paiement de la dette. Or, elle occulte les charges qu’elle aura a

assumer au moment du partage, en particulier le montant des droits de succession au taux de 60% sur

la transmission du patrimoine de Y A, et le montant de la soulte qui risque d’être

particulièrement élevée après rapport de l’immeuble dont la valeur est nécessairement très importante

dans ce quartier de Paris et qui risque de grever la totalité de ses autres biens ou liquidités.

Et par ailleurs, B A a produit deux condamnations de Y A pour recel

successoral dans les successions de ses deux parents, qui ont pour effet par répercussion, de priver

Mme Z de l’avantage supplémentaire par rapport à ses frères que Y A devait

retirer du testament de sa mère de 2004 (jugement du Tribunal de Grande Instance de paris en date

du 26 octobre 2018), et de l’avantage qu’elle devait retirer du testament de son père de 1979 (arrêt de

la cour d’appel de Paris en date du 29 mai 2019). Ces décisions ne la privent pas de tous droits mais

en l’état réduisent significativement la masse successorale devant finir par entrer dans son patrimoine

définitivement.

La menace sur le recouvrement de la créance est donc suffisamment établie pour asseoir le

bien-fondé des mesures conservatoires pratiquées le 6 mai 2015 et confirmer le jugement à ce titre.

Sur la demande de mainlevée et la restitution des sommes

La cour observe que pour autant que la mesure se soit exécutée convenablement durant presque 5

années, le montant saisi devant être remis entre les mains de Me Guilbaud en sa qualité de séquestre

en vertu de l’arrêt du 5 septembre 2019, devrait avoir atteint le montant pour lequel les mesures ont

été autorisées. Cependant à ce jour, aucune information n’a pu être donnée par les parties sur les

sommes que le séquestre à pu recouvrer.

La mainlevée des présentes saisies conservatoires ne pourra être opérée que dès que le séquestre aura

recueilli la somme de 233 235 €. Pour le cas où il serait déjà en possession d’un excédent, il sera tenu

de s’en libérer dès la signification du présent arrêt, entre les mains de Mme Z, et de conserver

les sommes saisies pour les affecter au règlement de l’indemnité de rapport sur les fruits.

Ils n’y a pas matière à prononcer les autres condamnations demandées par Mme Z sur les

intérêts des sommes à restituer, et leur capitalisation, qui sont sans objet compte tenu de la teneur de

la solution résultant du présent arrêt.

Mme Z qui échoue en son appel supportera les dépens d’appel mais aucune considération

d’équité ne commande de faire une nouvelle application des dispositions de l’article 700 du code de

procédure civile au titre de la procédure en appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DIT que la mainlevée des saisies conservatoires sera opérée dès que le séquestre aura recueilli la

somme de 233 235 € et que pour le cas où il serait déjà en possession d’un excédent, il sera tenu de

s’en libérer dès la signification du présent arrêt, entre les mains de Mme G Z et de

conserver les sommes saisies pour les affecter au règlement de l’indemnité de rapport sur les fruits ;

DÉBOUTE M X-L A et M B A de leurs demandes au titre de l’article 700

du code de procédure civile relativement à la procédure d’appel ;

CONDAMNE Mme G Z aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés directement

dans les conditions posées par l’article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement

avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller pour le Président empêché et par Madame

Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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