Cour d'appel de Versailles, 14e chambre, 19 mars 2020, n° 19/04974
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CA Versailles, 14e ch., 19 mars 2020, n° 19/04974 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Versailles |
Numéro(s) : | 19/04974 |
Décision précédente : | Tribunal de commerce de Nanterre, 19 juin 2019, N° 2019R00494 |
Dispositif : | Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée |
Sur les parties
- Président : Nicolette GUILLAUME, président
- Avocat(s) :
- Parties :
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 59B
14e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 MARS 2020
N° RG 19/04974 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TKDB
AFFAIRE :
SAS DUVAL DEVELOPPEMENT MEDITERRANEE
…
C/
SAS IFC3
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 20 Juin 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° chambre :
N° Section :
N° RG : 2019R00494
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Christophe DEBRAY
Me Julie GOURION
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
SAS DUVAL DÉVELOPPEMENT MÉDITERRANÉE prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité
[…]
[…]
SCCV C D prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
[…]
[…]
Représentées par Maître Christophe DEBRAY, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 19310 et par Maître Jean-Y LORIZON de la SELARL RACINE, avocat plaidant au barreau de PARIS, vestiaire : L0301 -
APPELANTES
****************
SAS IFC3 agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 479 470 270
[…]
[…]
Représentée par Maître Julie GOURION, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 – N° du dossier 219824 et par Maître Gilbert ALLEMAND, avocat plaidant au barreau de MARSEILLE
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Janvier 2020, Madame Marina IGELMAN, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Nicolette GUILLAUME, Présidente,
Madame Marie LE BRAS, Conseiller,
Madame Marina IGELMAN, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN
EXPOSÉ DU LITIGE
La SAS IFC3, gérée par M. Y A, est spécialisée dans le conseil en projets immobiliers.
La SAS Duval Développement Méditerranée (la société DDM), anciennement dénommée la société
CFA Méditerranée, est une filiale du groupe Duval, spécialisée dans le montage de projets
immobiliers dans l’arc méditerranéen.
A compter de l’année 2007, Mme B X a occupé la fonction de directrice régionale
'promotion immobilière’ du groupe Duval et de la société CFA Méditerranée, devenue la société
DDM.
Par acte du 1er février 2011, la société DDM, alors sous son ancienne dénomination, représentée par
Mme B X, et la société IFC3, représentée par M. Y A, ont signé une
'convention d’assistance commerciale et de conseil', la société IFC3 étant chargée d’assister et de
conseiller la société DDM afin pour celle-ci de 'cibler et de développer de nouvelles opérations'
immobilières dans les Bouches-du-Rhône, le Vaucluse, le Gard et le Var.
L’article 4 de la convention, au titre des 'honoraires', prévoyait à titre de rémunération de la société
IFC3 une avance mensuelle de 2 000 euros HT et des 'honoraires sur opérations développées’ (article
4.2), payables par fractions 'à la signature des promesses foncières', 'à l’obtention de l’ensemble des
autorisations administratives purgées de tout recours', 'à la délivrance de l’ordre de service de
démarrage des travaux', enfin 'à la livraison', l’article 4.1 stipulant quant à lui que : 'toute
rémunération calculée en application de l’article 4.2 (…) devra être réduite des avances sur
rémunération versées n’ayant pas fait l’objet d’une imputation'.
Entre les années 2011 et 2017, la convention a été suivie de plusieurs avenants conclus entre la
société DDM, anciennement CFA Méditerranée, et la société IFC3, afférents à diverses opérations
immobilières spécifiques, la société CFA Méditerranée étant toujours représentée par Mme
B X.
L’avenant n°6 en date du 20 avril 2016 était relatif à une mission d’assistance aux opérations et
présence aux réunions pour une opération de construction de logements à Bormes-les-Mimosas, au
titre de laquelle la société CFA Méditerranée a versé à la société IFC3 la somme de 300 000 euros
HT.
Par avenant n°7 du 31 janvier 2017, la société CFA Méditerranée a confié à la société IFC3 une
mission d’assistance pour une opération de construction de logements à C.
'Si Duval Développement Méditerranée parvient à développer cette opération’ l’avenant prévoyait des
honoraires pour la société IFC3 à hauteur de la somme de 400 000 euros HT à verser de la manière
suivante :
— 4 000 euros HT par mois pendant une période de 12 mois à compter du 31 janvier 2017,
— 52 000 euros HT à l’obtention de l’arrêté du permis modificatif,
— 80 000 euros HT à la purge des arrêtés de permis de construire modificatif et de leur transfert,
— 40 000 euros HT à la prorogation des arrêtés de permis de construire,
— 160 000 euros HT à l’acquisition des terrains,
— 20 000 euros HT à l’ouverture du chantier.
Selon statuts en date du 9 mars 2017, la SCCV C D a été constituée par le groupe Duval
dans le cadre du projet immobilier de construction d’un immeuble à usage de résidence de tourisme à
C (Var).
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 10 septembre 2018, la société DDM a
révoqué la délégation de pouvoirs accordée à Mme B X.
Par courrier du 26 décembre 2018, la société DDM a mis fin à l’ensemble des missions confiées à la
société IFC3, à effet au 31 janvier 2019.
Le 30 janvier 2019, le conseil de la société IFC3 a mis en demeure la société DDM de lui verser la
somme de 232 000 euros HT en application de l’avenant n°7 à la convention du 1er février 2011,
considérant que la somme de 8 000 euros avait d’ores et déjà été versée et que la somme de 160 000
euros n’était pas encore exigible.
Par acte d’huissier du 6 mai 2019, la société IFC3 a fait assigner en référé les sociétés Duval
Développement Méditerranée et C D afin d’obtenir principalement leur condamnation
provisionnelle conjointe et solidaire au paiement de la somme de 232 000 euros HT avec intérêts au
taux légal à compter de la mise en demeure du 30 janvier 2019, ainsi que la somme de 5 000 euros
au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance contradictoire rendue le 20 juin 2019, le juge des référés du tribunal de commerce de
Nanterre a :
— condamné les sociétés Duval Développement Méditerranée et C D conjointement et
solidairement à payer à la société IFC3 la somme provisionnelle de 232 000 euros, outre les intérêts
au taux de l’intérêt légal à compter du 30 janvier 2019,
— condamné les sociétés Duval Développement Méditerranée et C D conjointement et
solidairement à payer à la société IFC3 la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du
code de procédure civile,
— condamné les sociétés Duval Développement Méditerranée et C D conjointement et
solidairement aux dépens,
— rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Par déclaration reçue au greffe le 8 juillet 2019, les sociétés Duval Développement Méditerranée et
C D ont interjeté appel par un acte visant l’ensemble des chefs du dispositif de la décision.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 9 août 2019, auxquelles il convient de se reporter pour
un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les sociétés Duval Développement Méditerranée
et C D demandent à la cour, au visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile,
de :
— infirmer l’ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Nanterre le 20 juin 2019
en toutes ses dispositions ;
et, statuant à nouveau :
'- constater que la condition d’urgence exigée par l’article 872 du code de procédure civile n’est pas
remplie ;
— constater que les demandes de la société IFC3 se heurtent à des contestations sérieuses ;
— constater que les factures litigieuses ont été libellées à l’ordre de la société C D, alors
que la convention sur laquelle elles sont fondées a été conclue avec la société CFA Méditerranée,
aux droits de laquelle se trouve la société Duval Développement Méditerranée ;
— constater que les conventions n’ont pas reçu l’accord de la direction générale du groupe ;
— constater que la validité de ces conventions au regard de la délégation de pouvoir de Mme X
doit être débattue devant le juge du fond ;
— constater que les avances sur honoraires n’ont pas été imputées sur la rémunération au titre des
opérations ;
— constater que les relations entre Mme X, signataire des conventions et courriers pour le
compte de la société CFA Méditerranée, et la société IFC3, sont sujettes à des discussions relevant
de la compétence des juges du fond ;'
en conséquence,
— rejeter les demandes de la société IFC3 ;
— dire n’y avoir lieu à référé ;
— renvoyer la société IFC3 à se pourvoir au fond ;
— condamner la société IFC3 à verser aux sociétés concluantes la somme de 2 000 euros chacune au
titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et
d’appel, qui seront recouvrés directement par Maître Christophe Debray, en application des
dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions déposées le 23 octobre 2019 auxquelles il convient de se reporter
pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société IFC3, intimée, demande à la cour, au
visa des articles 872 et 873 du code de procédure civile, de :
— confirmer dans toutes ses dispositions l’ordonnance dont appel ;
— débouter la société Duval Développement Méditerranée et la société C D en toutes leurs
demandes, fins et conclusions ;
— condamner en conséquence la société Duval Développement Méditerranée et la société C
D conjointement et solidairement à lui payer la somme de 232 000 euros HT avec intérêts de
droit à compter de la mise en demeure du 30 janvier 2019, et capitalisation des intérêts ;
— condamner ces dernières au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code
de procédure civile et aux entiers dépens ;
— dire qu’ils pourront être directement recouvrés par Maître Julie Gourion, avocat au barreau de
Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2020.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour rappelle, à titre liminaire, qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constater’ qui
ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles
d’emporter des conséquences juridiques.
Les sociétés DDM et C D sollicitent l’infirmation de l’ordonnance du 20 juin 2019 aux
motifs que le premier juge n’a ni caractérisé l’urgence attachée à une demande formée en référé, ni
tenu compte des contestations sérieuses qu’elles opposent.
Les appelantes soutiennent que la condition de l’urgence n’est nullement démontrée, ni même
évoquée par la société IFC3, et que le premier juge n’a pas tenu compte de ce grief, ce pourquoi sa
décision devra être infirmée.
Les sociétés DDM et C D font ensuite valoir que la demande de provision de la société
IFC3 se heurte à trois contestations sérieuses.
Elles indiquent en premier lieu que les factures ont été adressées à la société C D alors
que cette dernière n’est pas partie à la convention du 1er février 2011 qui a été conclue avec la
société DDM. Elles font valoir que les stipulations contractuelles sont très claires sur le fait que les
factures doivent être adressées à la 'CFA MED’ et que jusqu’à la facture litigieuse concernant
l’avenant n°7, l’ensemble des factures émanant de la société IFC3 a été adressé à la société CFA
Méditerranée.
En deuxième lieu, les sociétés DDM et C D concluent à la nécessité d’un examen par le
juge du fond aux fins d’apprécier la validité des conventions et de faire le compte entre les parties.
Elles rappellent que la convention du 1er février 2011 prévoit, outre des honoraires à fixer par
avenant pour chaque opération développée, un honoraire mensuel de 2 000 euros HT à titre
d’avances sur rémunération qui sera ensuite déduit des honoraires sur opérations développées. Elles
prétendent avoir verser à la société IFC3 depuis 2011 au titre des honoraires mensuels la somme
totale de 152 000 euros, qui doit être déduite des sommes réclamées par la société IFC3. En réponse
à l’argumentation de la partie adverse qui argue d’un courrier du 17 mars 2015, les appelantes
soutiennent que d’une part, ce courrier a été signé par Mme B X qui n’avait pas le
pouvoir d’engager la société CFA Méditerranée sans l’accord préalable des comités d’engagement et
que d’autre part, ce courrier est relatif à l’opération 'Carpentras’ et est limité aux sommes perçues
jusqu’en 2015. Elles font encore valoir que le courrier du 22 septembre 2017, dont se prévaut
l’intimée, dans lequel Mme B X écrit à la société IFC3 que les factures litigieuses
seront réglées 'dès l’acquisition du terrain et le démarrage des travaux', n’a jamais été porté à la
connaissance de la direction générale de la société DDM, et qu’en outre, ce courrier pose comme
condition l’acquisition du terrain de l’opération, condition qui n’est pas remplie.
En troisième et dernier lieu, les appelantes soulèvent une contestation sérieuse en arguant d’une
collusion d’intérêts entre Mme B X et M. Y A qui gère la société IFC3.
Elles soutiennent que chacun d’eux avait un intérêt à la conclusion des conventions et notamment de
l’avenant n°7 particulièrement rémunérateur. Elles ajoutent que dès que la société DDM a été alertée
de ces agissements frauduleux en 2017, elle a suspendu les relations avec la société IFC3 puis a
révoqué la délégation de pouvoir de Mme B X et indiquent que la société DDM à
déposer une plainte contre X pour des faits d’abus de confiance et de complicité d’abus de confiance.
Elles rappellent que Mme B X vient d’introduire une procédure prud’homale contre la
société DDM et que son conseil se trouve être justement le même que celui de l’intimée dans la
présente instance. Elles font encore état d’un courriel émanant de Mme B X dans
lequel celle-ci indique que M. Y A est ami avec le président du conseil des prud’hommes
d’Aix-en-Provence et de ce que l’assistante de Mme B X a effectué des réservations
de billets d’avion pour la femme de M. Y A.
La société IFC3 répond en premier lieu s’agissant de la personne morale à laquelle les factures ont
été adressées qu’il est d’usage que le groupe Duval créée une filiale à 100 % directement reliée au
projet sous la forme d’une société civile de construction et qu’à la demande de la direction financière
du groupe, les factures soient adressées à cette société de construction. Elle fait valoir qu’elle a donc
justement assigné les deux sociétés avec une demande de condamnation solidaire.
L’intimée rétorque en deuxième lieu que la délégation de pouvoirs consentie par la société CFA
Méditerranée, devenue la société DDM, à Mme B X, n’est pas sérieusement
contestable. Elle indique verser aux débats la délégation de pouvoirs particulièrement étendue du 2
décembre 2009, et renouvelée par la société DDM le 14 octobre 2016, en soulignant qu’en son
application, la délégataire pouvait engager la société à hauteur de 10 millions d’euros. Elle ajoute
encore qu’elle communique également une lettre du 22 septembre 2017 dans laquelle la société
DDM, qui a alors régulièrement reçu les factures litigieuses sans formuler la moindre remarque,
l’informe du règlement retardé de ces factures compte tenu du décalage de l’opération et des
incertitudes qui subsistent, en précisant que l’opération ne sera validée que lorsque le permis de
construire sera obtenu et purgé, et lorsque le terrain aura été acquis et les travaux démarrés.
S’agissant de la troisième contestation soulevée par les appelantes relative à la collusion frauduleuse,
la société IFC3 répond que M. Y A collaborait avec le groupe Duval avant l’arrivée au sein
de celui-ci de Mme B X. Elle rappelle également que la collaboration de M. Y
A et de la société IFC3 avec le groupe Duval depuis 2010 a permis de mener à bien six
opérations d’envergure totalisant un chiffre d’affaires pour le groupe Duval de 152 284 000 euros.
Sur ce,
Aux termes de l’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal de
commerce, statuant en référé, peut dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement
contestable, accorder une provision au créancier.
En application de ce texte, le montant de la provision qui peut être allouée en référé n’a d’autre limite
que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.
Aux termes de l’article du 1315 du code civil, c’est à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de
la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit lextinction
de son obligation.
En vertu de l’article L. 110-3 du code de commerce, la preuve en matière commerciale peut se faire
par tous moyens.
Sur le moyen tiré de l’absence de démonstration du critère d’urgence
Les dispositions de l’article 873 alinéa 2 relativent à la demande d’octroi d’une provision n’exigent
pas la constatation de l’urgence mais uniquement celle de l’existence d’une obligation non
sérieusement contestable à la charge de la partie contre laquelle elle est invoquée.
Le moyen tiré de l’absence d’urgence est en conséquence inopérant.
Sur le moyen tiré de l’existence de contestations sérieuses
S’agissant de la contestation soulevée au regard de la personne morale à qui ont été adressées les
factures pour lesquelles l’intimée demande l’allocation d’une provision, il doit être relevé que s’il est
constant que la convention d’assistance commerciale et de conseil du 1er février 2011 prévoit que les
règlements des honoraires sur opérations développées interviendront sur production de factures
adressées à la société CFA MED, devenue la société DDM, il est tout aussi constant qu’il résulte des
statuts en date du 9 mars 2017 que le capital social de la société SCCV C D est détenu à
99 % par la société DDM, à 1 % par la SAS Duval Développement, que son gérant est la société
DDM et qu’elle a pour objet d’acquérir les terrains et de faire procéder à la construction de la
résidence de tourisme sur la commune de C.
Par ailleurs, l’intervention et les démarches effectuées par la société IFC3 pour le projet immobilier
faisant l’objet de l’avenant n°7 ne sont pas contestées par les appelantes, qui discutent principalement
les pouvoirs détenus par Mme B X pour formaliser des accords au nom de la société
DDM, mais ne remettent pas en cause l’exécution par la société IFC3 de sa mission en application de
l’avenant n°7.
Les sociétés appelantes ne contestent pas davantage s’être acquittées, dans le cadre de cet avenant, de
deux premiers versements correspondants, aux termes de la convention du 1er février 2011, aux
avances mensuelles prévues au titre des honoraires de la société IFC3.
Or il résulte des pièces versées aux débats que les deux premiers versements ainsi effectués, sans
qu’aucune contestation ne soit alors élevée par les appelantes, l’ont été en vertu de factures émises
par la société IFC3 à l’adresse de la société SCCV C D, quand bien même ces factures
auraient dû être établies au nom de la société DDM.
En outre, les relations commerciales des sociétés DDM et IFC3, continues et renouvelées entre les
années 2011 et 2018, et l’exécution non contestée de sa mission par la société IFC3 au titre de
l’avenant n°7, suffisent pour justifier du caractère non sérieusement contestable des honoraires dus
par la société DDM à la société IFC3.
En revanche, si la SCCV C D est une filiale du groupe Duval, créée pour les besoins de
l’opération immobilière objet de l’avenant n°7, il apparaît sérieusement contestable que les honoraires
dus à la société IFC3 puissent être mis à sa charge, puisqu’elle n’est par ailleurs directement liée par
aucun contrat à cette dernière.
L’ordonnance entreprise sera donc infirmée en ce qu’elle a condamné la SCCV C D
'conjointement et solidairement', avec la société DDM.
Le sérieux des autres contestations soulevées par les appelantes seront donc examinées au regard des
seuls engagements de la société DDM à l’égard de la société IFC3.
S’agissant de la délégation de pouvoirs octroyée le 2 décembre 2009 par Mme Z E, en
qualité de directrice de la société CFA, présidente de la société CFA Méditerranée, à Mme
B X, il résulte des termes de celle-ci qu’elle est particulièrement large, prévoyant
notamment une délégation de représentation générale de la société et de ses filiales à l’égard des tiers
'et notamment (…), auprès de tous clients, fournisseurs ou sous-traitants', ainsi que des délégations en
matière commerciale et en matière d’exécution des chantiers.
Par ailleurs, par avenant daté du même jour, il est précisé que cette délégation emporte pouvoir
conféré à Mme B X de signer pour les opérations de promotion immobilière réalisées
par la société et/ou ses filiales, dans la limite des comités d’engagement de la société CFA statuant
préalablement sur chacune des opérations immobilières, notamment 'tous contrats de travaux dont le
montant cumulé est inférieur à dix millions d’euros'.
Or il ne résulte d’aucune pièce du dossier qu’entre le 2 décembre 2009 et le 10 septembre 2018, date
de sa révocation, que cette délégation de pouvoirs octroyée à Mme B X ait fait l’objet
de la moindre critique ou remise en cause par le groupe Duval.
Pourtant, il est tout aussi constant que durant cette période, et en application de la convention
d’assistance commerciale et de conseil du 1er février 2011, la société IFC3 a effectué, avant la
mission litigieuse, six missions en vertu de six avenants différents, lesquels ont donné lieu à des
rémunérations pour un montant total de 583 000 euros.
Les relations commerciales en toute connaissance de cause entre les parties sont encore démontrées
par le courriel versé aux débats par la société IFC3, daté du 13 avril 2012, dans lequel Mme Z
E s’adresse à son interlocuteur en ses termes : '(…) il semble que des factures de IFC3 soient
bloquées depuis novembre dernier, peux-tu débloquer les plus anciennes au moins et rapidement car
c’est un apporteur d’affaire important…'. Ce courriel a en outre généré plusieurs échanges au sujet de
la rémunération de l’intimée entre des personnes des deux sociétés en cause et notamment un écrit de
Mme F G, directeur financier holding du groupe Financière Duval, faisant le point
sur le règlement par le groupe Duval des factures des années 2011 et 2012 émises par la société
IFC3.
Il s’en déduit que les appelantes ne peuvent sérieusement prétendre que la convention d’assistance
commerciale et de conseil du 1er février 2011 n’a jamais été soumise à la direction générale du
groupe Duval et qu’elle n’a jamais reçu son accord.
De la même manière, les sociétés DDM et C D ne peuvent sérieusement remettre en cause
la validité de la délégation de pouvoirs octroyée à Mme B X à travers laquelle, la
société DDM, anciennement CFA Méditerranée, a maintenu des relations commerciales avec la
société IFC3 entre le 1er février 2011 et la date de dénonciation de la convention, soit le 26
décembre 2018.
Il sera souligné à cet égard que la convention signée avec la société IFC3 n’a été dénoncée que plus
de trois mois après la révocation de la délégation de pouvoirs de Mme B X ce dont il
s’infère qu’il n’existait pas de lien particulier entre les deux événements.
S’agissant de la prétendue nécessité de faire un compte entre les parties, l’argument n’apparaît pas là
non plus suffisamment sérieux dans la mesure où les termes de la convention du 1er février 2011
sont dénués de toute ambiguïté sur le fait que les avances sur commission (soit la somme de 2 000
euros versée mensuellement) seront déduites des rémunérations et honoraires dus pour chaque
avenant, soit pour chacune des différentes opérations dans lesquelles la société IFC3 est intervenue.
Ces modalités de paiement sont corroborées par la lettre du 17 mars 2015 adressée par Mme
B X en sa qualité de directeur régional de la société CFA Méditerranée, au
représentant de la société IFC3, M. Y A, dans laquelle elle évoque le fait que les
honoraires mensuels versés dans le cadre de l’opération de Carpentras (ayant donné lieu à une
assistance pendant 4 années) sont définitivement acquis pour rémunérer les prestations de la société
IFC3 sur ce projet.
Il découle de l’ensemble de ces éléments que la deuxième série d’arguments soulevés par les
appelantes ne peuvent remettre en cause le caractère non sérieusement contestable de l’obligation à
paiement de la société DDM à l’égard de la société IFC3.
S’agissant de la troisième série d’arguments avancés par les appelantes, ils sont tout aussi inopérants
dans la mesure où si les faits relatés permettent de caractériser une certaine proximité dans les
relations entre Mme B X et le représentant de la société IFC3, ils ne permettent en
rien de démontrer 'une collusion frauduleuse’ qui aurait existé entre eux, au détriment de la société
DDM.
Il découle de tout ce qui précède que l’existence d’une créance à hauteur de la somme de 232 000
euros détenue par la société IFC3 à l’égard de la société DDM n’est sérieusement contestable, ni dans
son principe, ni dans son montant.
L’ordonnance entreprise sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a condamné la société DDM à
payer à la société IFC3 la somme provisionnelle de 232 000 euros, outre les intérêts au taux légal à
compter du 30 janvier 2019, mais infirmée en ce qu’elle a condamné solidairement la société SCCV
C D des mêmes chefs comme il a été ci-dessus jugé.
Dans le dispositif de ses conclusions, la société IFC3 sollicite que soit ordonnée la capitalisation des
intérêts.
En application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts échus,
dus au moins pour une année entière, est de droit à compter de la demande en justice.
En l’espèce, la société IFC3 a formé la première fois cette demande par conclusions déposées le 23
octobre 2019 de sorte qu’il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts courant sur la
provision allouée pour ceux dus pour une année entière à compter de cette date.
Sur les demandes accessoires
L’ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première
instance sauf en celles condamnant la société C D de ces chefs.
Partie perdante, la société DDM ne saurait prétendre à l’allocation de frais irrépétibles. La société
DDM devra en outre supporter les dépens d’appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice
de l’avocat qui en a fait la demande.
Il est en outre inéquitable de laisser à la société IFC3 la charge des frais irrépétibles exposés en cause
d’appel. La société DDM sera en conséquence condamnée à lui verser la somme de 4 000 euros sur
le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande en revanche de débouter la SCCV C D de sa demande sur le
fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,
Confirme l’ordonnance entreprise en date du 20 juin 2019 sauf en ce qu’elle a condamné la SCCV
C D,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Ordonne la capitalisation des intérêts courant sur la provision,
Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de provision à l’encontre de la société SCCV C
D,
Dit que la SAS Duval Développement Méditerranée supportera les dépens d’appel, qui pourront être
recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Duval Développement Méditerranée à payer à la société IFC3 la somme de 4 000
euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute les autres parties de leur demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de
procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été
préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de
procédure civile et signé par Madame Marie LE BRAS, Conseiller, pour le président empêché, et par
Monsieur Alexandre GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le
magistrat signataire.
Le greffier, Le conseiller,
Textes cités dans la décision