Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 19 octobre 2021, n° 20/02780

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 1re ch. 1re sect., 19 oct. 2021, n° 20/02780
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 20/02780
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 4 septembre 2019, N° 17/03547
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

1re chambre 1re section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A

DU 19 OCTOBRE 2021

N° RG 20/02780

N° Portalis DBV3-V-B7E-T44M

AFFAIRE :

X-H, Y B

C/

Association COMITE FRANCAIS POUR LE FONDS DES NATIONS UNIES POUR L’ENFANCE (UNICEF)

A, Y, Z, J G

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 17/03547

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

— Me M N,

— Me Caroline VARELA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF OCTOBRE DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur X-H, Y B

né le […] à […]

de nationalité

82 rue du Président-Kennedy

[…]

représenté par Me M N, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 – N° du dossier 24912

Me Didier FRAGASSI, avocat – barreau de LISIEUX

APPELANT

****************

Association COMITE FRANCAIS POUR LE FONDS DES NATIONS UNIES POUR L’ENFANCE (UNICEF) formée sous le régime de la loi du 1er juillet 1901

N° SIRET : 784 671 695

3 rue Duguay-Trouin

[…]

représentée par Me Caroline VARELA, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 282
- N° du dossier 2020.26

Me Solenn GRALL, avocat – barreau de PARIS

INTIMÉE

****************

Monsieur A, Y, Z, J G ès qualités de représentant légal de son fils mineur, M. L G né le […] au […], ayant-droit de Mme C B, décédée le […].

né le […] à […]

de nationalité Française

Le Bourg

[…]

représenté par Me M N, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 – N° du dossier 24912

Me Didier FRAGASSI, avocat – barreau de LISIEUX

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 01 Juillet 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame C LELIEVRE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame C LELIEVRE, Conseiller,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

Vu le jugement rendu le 5 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :

— débouté Mme C B et M. X-H B de l’ensemble de leurs demandes,

— constaté la validité du testament olographe rédigé par X-T B le 22 mars 2016,

— dit que Mme C B et M. X-H B délivreront à l’association Comité français pour le fonds des Nations Unies pour l’enfance (dite « Unicef ») le legs consenti par feu X-T U B, décédé le […], suivant testament olographe en date du 22 mars 2016, et qu’à défaut d’une telle délivrance dans les quinze jours de la signification du présent jugement celui-ci en tiendra lieu,

— condamné Mme C B et M. X-H B à payer à l’association Comité français pour le fonds des Nations Unies pour l’enfance (dite « Unicef ») la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné Mme C B et M. X-H B aux dépens,

— dit que le présent jugement est placé au rang des minutes du greffe qui délivre toutes expéditions nécessaires ;

Vu l’appel de ce jugement interjeté le 25 juin 2020 par M. X-H B et Mme C B ;

Vu l’ordonnance d’interruption d’instance rendue le 3 septembre 2020 par le magistrat chargé de la mise en état au motif du décès de C B survenu le […] ;

Vu les conclusions d’intervention volontaire et en reprise d’instance de M. A G agissant ès qualités de représentant légal de son fils mineur L G, unique héritier de sa mère, C B notifiées le 1er décembre 2020 ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 février 2021 par lesquelles M. X-H B et M. A G ès qualités de représentant légal de son fils mineur L G, demandent à la cour de :

Vu les articles 414-1, 464, 414-2 alinéa 2, 901, 1240 du code civil,

Vu le rapport médical,

Vu la saisine du juge des tutelles,

Vu les autres pièces,

— déclarer M. X-H B recevable et bien fondé en son appel,

— déclarer M. A G, ès qualités de représentant légal de son fils mineur, M. L G ès qualités d’ayant-droit d’C B, décédée le […], recevable et bien fondé en son intervention volontaire et en reprise d’instance,

— infirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué,

Et statuant à nouveau :

— ordonner l’annulation du testament olographe fait par X-T B au profit de l’Unicef, portant sur le don d’un appartement sis à […], en raison de l’altération de ses facultés mentales et de sa prodigalité

— condamner l’Unicef à verser, à chacun des appelants, les sommes de :

• 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel du fait que la succession est en attente de règlement,

• 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

• 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner l’Unicef aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par Mme M N, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 29 avril 2021 par lesquelles l’association Comité français pour le fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) demande à la cour de :

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance le 5 septembre 2019

Vu le testament en date du 22 mars 2016,

Vu l’article 414-1 du code civil,

Vu l’article 464 du code civil,

Vu l’article 470 du code civil,

— confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté les consorts B de l’ensemble de

leurs demandes,

— confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a constaté la validité du testament olographe rédigé par X-T B le 22 mars 2016, et a ordonné aux consorts B de délivrer le legs consenti par X-T B à l’Unicef,

— condamner M. X-H B à verser à l’Unicef la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— le condamner aux entiers dépens ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 20 mai 2021 ;

FAITS ET PROCÉDURE

X-T B est décédé le […], laissant pour lui succéder ses deux enfants C et X-H B, héritiers réservataires, suivant acte d’inventaire reçu par M. O P, notaire à Dives-sur-Mer (14160), le 5 octobre 2016.

Par testament olographe en date du 22 mars 2016 déposé à l’office de M. Q R, notaire à […], X-T B a institué l’Unicef légataire universel de sa plus large quotité disponible. Ce legs portait sur un appartement sis 17, rue Duchesnay à Asnières-sur-Seine (92600).

A la demande de ses enfants, le médecin psychiatre S D, exerçant à Gennevilliers et inscrit sur la liste d’aptitude établie auprès du procureur de la République, avait examiné X-T B chez lui en vue d’une mesure de protection judiciaire. Le médecin avait établi le 6 février 2016 un rapport à l’intention du juge des tutelles du tribunal d’Asnières-sur-Seine, au vu duquel ce dernier rendait en date du 30 mars 2016 une ordonnance d’ouverture d’une procédure de protection de X-T B.

Par acte d’huissier en date du 21 mars 2017, C B et M. X-H B ont fait assigner l’Unicef France devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de voir annuler le testament de leur père en date du 22 mars 2016, invoquant notamment l’insanité d’esprit du testateur.

C’est dans ces circonstances qu’a été rendu le jugement déféré ayant :

— débouté C B et M. X-H B de l’ensemble de leurs demandes,

— constaté la validité du testament olographe rédigé par X-T B le 22 mars 2016,

— dit que C B et M. X-H B délivreront à l’Unicef le legs consenti par X-T B suivant testament olographe en date du 22 mars 2016, et qu’à défaut d’une telle délivrance dans les quinze jours de la signification du présent jugement celui-ci en tiendra lieu,

— condamné C B et M. X-H B à payer à l’Unicef la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné C B et M. X-H B aux dépens.

C B et M. X-H B ont interjeté appel dudit jugement le 25 juin 2020.

C B est décédée en cours d’instance, le […].

L’acte de décès ayant été notifié à la juridiction, par ordonnance en date du 3 septembre 2020, la cour d’appel de Versailles a constaté l’interruption d’instance et renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 10 décembre 2020 pour reprise d’instance.

M. A G, ès qualités de représentant légal de son fils mineur L G, ayant droit d’C B, a signifié des conclusions d’intervention volontaire et en reprise d’instance le 1er décembre 2020.

SUR CE, LA COUR,

Sur les limites de l’appel

Il résulte des écritures ci-dessus visées que le débat en cause d’appel se présente dans les mêmes termes qu’en première instance, chacune des parties maintenant ses prétentions telles que soutenues devant les premiers juges.

Sur la demande en nullité du testament pour insanité d’esprit du testateur

Moyens des parties

Au soutien de leur appel, M. X-H B et M. A G ès qualités, font valoir que les actes accomplis par une personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d’ouverture de la mesure de protection peuvent être annulés sur le fondement de l’article 464 du code civil. Ils relèvent que les premiers juges leur ont reproché de n’avoir pas justifié de la publicité du jugement d’ouverture de la mesure de protection de X-T B. Or, ils rappellent que ce dernier est décédé trois semaines après que l’ordonnance sur requête prononçant l’ouverture d’une mesure de protection a été rendue, de sorte que la mesure n’a pu être mise en place.

Par ailleurs, les appelants indiquent que le placement d’un majeur sous une mesure de protection judiciaire nécessite que soit constatée une altération de ses facultés mentales. Ils considèrent que le testament olographe en date du 22 mars 2016, par lequel le de cujus a légué la plus large quotité disponible de sa succession à l’Unicef, doit être annulé en raison de l’insanité d’esprit de son auteur. Ils rappellent que ce dernier a été examiné par un médecin qui, dans un rapport du 6 février 2016, a préconisé une mesure de curatelle renforcée en raison de son incapacité à assumer ses intérêts patrimoniaux. Ils ajoutent qu’une mesure de protection judiciaire a été ordonnée le 30 mars 2016 et que X-T B est décédé le […].

En outre, ils font grief aux premiers juges d’avoir dénaturé le rapport du médecin expert en déduisant de cette pièce que le de cujus était libre de rédiger son testament. Ils précisent que le médecin avait attiré l’attention sur le fait que le testateur n’était pas capable de gérer seul ses intérêts patrimoniaux.

Enfin, les appelants reprochent au Comité français pour l’Unicef d’avoir accepté le legs alors qu’il avait été informé de la situation de faiblesse de X-T B, et qu’il avait été mis en demeure, par courrier du 23 décembre 2016, de renoncer au legs litigieux.

Les appelants exposent également que l’altération des facultés mentales de X-T B s’évince de sa prodigalité. Ils soutiennent que la prodigalité s’accompagne souvent d’une altération des facultés mentales et notamment des fonctions cognitives. Ils précisent que la requête en ouverture de curatelle pour prodigalité et celle présentée sur le fondement d’une altération des facultés mentales tendent aux mêmes fins, à savoir la protection des intérêts patrimoniaux du majeur protégé. Ils indiquent à cette fin que X-T B, outre le testament litigieux, avait donné d’importantes sommes d’argent à une tierce personne et avait contracté un prêt bancaire dont il n’avait

nul besoin.

Ils soulignent que le médecin psychiatre, le Dr S D, a conclu à l’impossibilité pour le de cujus de pourvoir seul à ses intérêts patrimoniaux et à la nécessité pour lui d’être assisté dans les actes importants de la vie civile.

Les appelants sollicitent donc que le testament litigieux soit frappé de nullité en raison de la prodigalité de son auteur, laquelle traduit l’altération de ses facultés mentales.

Le Comité français pour l’Unicef réplique que la nullité du testament pour insanité d’esprit du testateur ne peut être prononcée que si sont rapportées la preuve d’un trouble mental ayant affecté le discernement du testateur et la preuve que ce trouble existait lors de la rédaction de l’acte litigieux.

En premier lieu, l’intimé estime que la preuve de l’altération des facultés mentales de X-T B n’est pas établie. Il relève que le certificat médical circonstancié établi à la demande des héritiers du testateur conclut que ce dernier présente une « hypomanie dans le cadre d’un trouble bipolaire ». Il précise que cette affection n’altère pas les facultés cognitives de celui qui en souffre et qu’elle est susceptible d’amélioration. Il constate en outre que la schizophrénie dont aurait souffert le testateur, selon ses héritiers, n’est pas mentionnée dans ce certificat médical. Il en déduit que X-T B n’était pas atteint de schizophrénie, ou que celle-ci était stabilisée lors de son examen par le médecin, de sorte qu’elle ne peut justifier l’annulation du testament litigieux.

En deuxième lieu, l’intimé considère que le médecin psychiatre S D n’a pas jugé le testateur incapable de manifester sa volonté. Le médecin notait que l’état du de cujus était susceptible d’amélioration et se prononçait en faveur d’une mesure de sauvegarde judiciaire, laquelle permet au majeur protégé de tester valablement sans assistance.

L’Unicef fait valoir que la preuve n’est en aucun cas rapportée de l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte.

Il ajoute que la demande d’annulation du testament litigieux ne saurait pas davantage prospérer sur le fondement de l’article 464 du code civil ; il précise que si ce texte protège le majeur incapable pour tout acte accompli dans les deux ans qui ont précédé la mesure de protection, la nullité de l’acte est soumise à certaines conditions, qui ne sont pas réunies en l’espèce.

En dernier lieu, l’intimé se prévaut de la qualité rédactionnelle du testament et de sa clarté qui excluent tout signe d’affaiblissement des facultés mentales de son auteur lors de sa rédaction, faisant observer que le document ne comporte aucune rature. Il soutient que la présentation du document et son contenu sont significatifs de la clairvoyance intellectuelle de son auteur.

Il objecte enfin que la prodigalité ne suffit pas à établir, à elle seule, l’altération des facultés mentales, citant sur ce point un arrêt de la cour d’appel de Paris. Il rappelle que l’altération des facultés mentales doit exister au moment de la réalisation de l’acte attaqué. Il considère que la preuve de l’altération des facultés mentales du testateur lors de la rédaction du testament n’est pas établie, de sorte que celui-ci ne ne doit pas être annulé.

Appréciation de la cour

Il résulte de l’article 414-1 du code civil que pour faire un acte valable il faut être sain d’esprit et que c’est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte.

L’article 901 va dans le même sens en indiquant que pour faire une libéralité il faut être sain d’esprit.

Selon l’article 464 du même code, les obligations résultant des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d’ouverture de la mesure de protection peuvent être réduites sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts par suite de l’altération de ses facultés personnelles était notoire ou connue du cocontractant à l’époque où les actes ont été passés.

Ces actes peuvent, dans les mêmes conditions, être annulés s’il est justifié d’un préjudice subi par la personne protégée.

L’article 470 du code civil dispose enfin que la personne en curatelle peut librement tester sous réserve des dispositions de l’article 901.

C’est par d’exacts motifs, qui sont adoptés, que le tribunal a rejeté la demande d’annulation du testament sur le fondement de l’article 464 du code civil précité dont les conditions d’application ne sont pas réunies. Le tribunal a, en effet, justement relevé d’une part qu’il n’était pas justifié de la publicité du jugement d’ouverture de la mesure de protection et d’autre part que les consorts B ne caractérisaient pas le préjudice subi par la personne protégée.

La cour ajoute qu’il résulte de l’analyse de la pièce n° 6 des appelants que l’ordonnance rendue le 30 mars 2016 par le juge des tutelles d’Asnières ne prononce pas une mesure de protection à l’égard de X-T B mais est intitulée ' ordonnance de saisine sur requête’ et se borne à ' déclarer régulièrement introduite la procédure d’ouverture d’un régime de protection sans autre indication de X-T B', ce qui signifie que la requête présentée par M. B était recevable mais qu’il restait encore à l’instruire avant de prononcer une mesure spécifique de protection au profit de X-T B, étant relevé que ce dernier n’avait pas encore été entendu par le juge.

Ainsi l’ordonnance de saisine ne pouvait donner lieu à la publicité requise par l’article susvisé lequel n’est pas applicable au litige.

Au regard de l’article 414-1 du code civil, il incombe aux appelants de rapporter la preuve de l’altération des facultés mentales de X-T B d’une manière générale et plus spécialement à la date d’établissement de son testament olographe, le 22 mars 2016.

Le certificat médical établi le 6 février 2016 par le Dr D, psychiatre des hôpitaux et chef de pôle, inscrite sur la liste du procureur de la République du tribunal de grande instance de Nanterre, mentionnait en substance que :

— X-T B ne présentait pas d’atteinte invalidante sur le plan purement cognitif, mais des troubles de l’attention (soutenue) plus en lien avec son trouble bipolaire.

— X-T B a indiqué être suivi par un psychiatre et par un psychologue mais ce suivi n’était peut être plus effectif à la date de son examen.

— X-T B comprenait ses interlocuteurs, était en mesure de lire, écrire et compter et se repérait dans le temps et l’espace.

— il avait récemment connu des difficultés de gestion de ses revenus et de ses besoins, ayant été mis en difficulté par un prêt de 12 945 euros et de 5 000 euros (somme empruntée par lui auprès de sa banque) consenti à la fille de ses anciens voisins avec qui il disait avoir une relation sentimentale.

— une mesure temporaire, comme une sauvegarde de justice, apparaissait justifiée avec des missions de curatelle renforcée portant sur les actes patrimoniaux.

Il résulte de ce rapport que les troubles bi-polaires diagnostiqués par le médecin n’entraînaient qu’une

faible altération des facultés mentales de X-T B, susceptible d’être améliorée avec la reprise du suivi thérapeutique.

Comme les premiers juges l’ont relevé, les contestations émises par les appelants relatives au diagnostic posé, lesquels soutiennent que X-T B souffrait de schizophrénie et non de troubles bi-polaires ne sont étayées par aucun certificat médical allant à l’encontre du seul versé aux débats, alors que selon l’ex-épouse de X-T B, Mme E, mère de M. B et grand-mère de L G, le défunt était suivi par plusieurs médecins, dont son généraliste à Asnières. Pour autant les appelants, plutôt que de solliciter un certificat médical de l’un des médecins ayant prodigué des soins à X-T B sur une période supposée longue, produisent une ordonnance médicale, établie le 17 mars 2015 par le Dr F, médecin traitant, à partir de laquelle la cour serait supposée faire un diagnostic médical retenant la pathologie qu’ils invoquent, en se fondant sur l’analyse de documents en provenance de sites médicaux visités sur internet décrivant les pathologies susceptibles d’être soignées par certains médicaments prescrits sur ladite ordonnance. La cour ne peut cependant faire aucun diagnostic médical à partir des pièces produites, qui irait à l’encontre de celui, parfaitement circonstancié, du Dr D, psychiatre. Il est en outre rappelé que C B était présente aux côtés de son père lorsque le Dr D a examiné et parlé avec ce dernier et qu’aucun d’eux n’a alors évoqué la pathologie de schizophrénie.

S’agissant de la prodigalité invoquée par les appelants, qui seraient la marque de l’altération des facultés mentales de X-T B, il convient de considérer que peu d’éléments concrets sont produits pour illustrer ce qui ne repose que sur la main courante déposée par M. B et sur les déclarations mêmes de X-T B au Dr D. Le comportement prodigue de X-T B consiste dans un prêt qu’il aurait consenti à la fille de ses anciens voisins avec laquelle il s’est vantée auprès de sa fille d’avoir une relation sentimentale. Le prêt invoqué, dont l’on ne sait en définitive s’il a été remboursé, n’était ainsi pas dépourvu de cause pour X-T B.

Il apparaît qu’avant ce qui a constitué une alerte pour ses enfants, survenue juste avant le dépôt de la requête saisissant le juge des tutelles, X-T B gérait lui-même ses comptes sans difficultés notoires. Il n’est pas démontré l’existence d’autres dépenses exorbitantes et répétées, disproportionnées avec ses revenus qui auraient pu faire suspecter une perte totale de discernement de X-T B s’agissant de la gestion de ses revenus et de ses charges.

Ainsi, ni la prodigalité invoquée, ni les éléments médicaux produits, ajoutés à l’étude du testament litigieux qui, tant dans sa forme que dans son contenu, apparaît parfaitement clair et cohérent, ne permettent de retenir que X-T B n’était pas sain d’esprit au moment de la rédaction du testament querellée et n’en aurait pas saisi la portée, alors qu’il fournit des précisions sur les conséquences du legs fait à l’Unicef de la plus large quotité disponible en indiquant que ses enfants ne recevront que leur part réservataire. L’écriture en est régulière et sans rature ni surcharge.

Il convient au vu de l’ensemble de ces éléments et des motifs adoptés du jugement, de confirmer celui-ci en ce qu’il a constaté la validité du testament établi par X-T B le 22 mars 2016 et débouté les héritiers de leurs demandes en annulation de celui-ci.

La décision entreprise sera également confirmée en ce qu’elle a ordonné la délivrance de son legs par M. B à l’Unicef.

Sur la demande de dommages et intérêts

M. B et M. G sollicitent la condamnation de l’Unicef à leur verser à titre de dommages et intérêts les sommes de 5 000 euros pour préjudice matériel résultant de ce que la succession est en attente de règlement et 2 500 euros en réparation de leur préjudice moral.

Le Comité français pour l’Unicef indique à la cour que, pour obtenir gain de cause en première instance, le conseil des appelants avait sollicité la presse et tenu des propos mensongers s’agissant de la mesure de protection judiciaire envisagée par le médecin psychiatre S D et s’agissant de l’ordonnance rendue par le juge des tutelles le 30 mars 2016.

Par ailleurs, l’intimé considère avoir défendu la mémoire du défunt en sollicitant le respect de ses dernières volontés. Il s’oppose donc à la demande de dommages et intérêts des appelants.

Le sens de la présente décision conduit à débouter les appelants de leur demande de dommages et intérêts.

Le tribunal a exactement statué sur les dépens de première instance. En revanche, l’équité ne commandait pas de faire droit aux demandes de l’Unicef présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Le jugement sera infirmé sur ce point.

M. B et M. G ès qualités, parties perdantes, doivent être condamnés aux dépens d’appel. Il n’y a pas davantage lieu en cause d’appel de faire droit aux demandes de l’Unicef fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Celles-ci sont rejetées.

Les demandes des appelants au même titre sont également rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

CONSTATE la reprise d’instance initiée par C B par M. G agissant ès qualités de représentant légal de son fils mineur L G, ayant-droit de celle-ci,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions sauf en celles relatives à l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement entrepris,

REJETTE les demandes de l’Unicef fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE M. B et M. G agissant ès qualités de représentant légal de son fils mineur L G de leurs demandes au même titre,

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

CONDAMNE M. B aux dépens d’appel.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Madame C LELIEVRE, Conseiller, pour le président empêché, et par Madame Natacha BOURGUEIL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller,

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