Cour d'appel de Versailles, 4e ch. expropriations, 14 septembre 2021, n° 20/01832
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CA Versailles, 4e ch. expropriations, 14 sept. 2021, n° 20/01832 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Versailles |
Numéro(s) : | 20/01832 |
Décision précédente : | Tribunal judiciaire de Nanterre, EXPRO, 26 janvier 2020, N° 19/00040 |
Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
- Président : Agnès BODARD-HERMANT, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties :
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 70H
4ème chambre expropriations
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 14 SEPTEMBRE 2021
N° RG 20/01832 – N° Portalis DBV3-V-B7E-T2OX
AFFAIRE :
C/
COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Janvier 2020 par le juge de l’expropriation de NANTERRE
RG n° : 19/00040
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Martine DUPUIS
Me Emmanuel DESPORTES
Mme X Y Commissaire du Gouvernement
+
Parties
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATORZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Ayant son siège […]
[…]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant,au barreau de VERSAILLES, vestiaire 625
Représentant : Maître Vincent LAFARGE, avocat plaidant, au barreau de PARIS, vestiaire : A0780
APPELANTE
****************
COMMUNE DE BOULOGNE-BILLANCOURT
[…]
92100 BOULOGNE-BILLANCOURT
Représentant : Maître Emmanuel DESPORTES de la SCP BROCHARD & DESPORTES, avocat postulant, au barreau de VERSAILLES – N° du dossier 20040 – vestiaire : 243
Représentant : Maître Mégane SCHVARTZ Substituant Maître Eric SAGALOVITSCH de la SCP SARTORIO LONQUEUE SAGALOVITSCH & ASSOCIE, avocat plaidant, au barreau de PARIS, vestiaire : P0482
INTIMEE
****************
Les fonctions du COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT étant exercées par Madame X Y, direction départementale des finances publiques.
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Juin 2021, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Agnès BODARD-HERMANT, présidente.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Agnès BODARD-HERMANT, Présidente,
Madame Pascale CARIOU, Conseillère,
Madame Valentine BUCK, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
FAITS ET PROCEDURE,
La société Tipayo est propriétaire des lots n°5, 6 et 9 d’un ensemble immobilier situé […]
Peupliers à Boulogne-Billancourt (92) édifié sur la parcelle cadastrée […].
L’opération d’aménagement des sente et placette piétonnes « Sente fief » située au […] et
33 à […], devant conduire à la démolition de ce bien, a été déclarée d’utilité publique
au profit de la Commune de Boulogne-Billancourt suivant arrêté préfectoral du 27 novembre 2018
qui a déclaré immédiatement cessibles les parcelles nécessaires à la réalisation du projet.
Le transfert de propriété du bien au profit de la Commune de Boulogne-Billancourt a été prononcé
suivant ordonnance du 7 janvier 2019.
Par mémoire valant offre d’indemnisation du 17 mai 2019, la Commune de Boulogne-Billancourt a
proposé une somme de 372.000 € au titre de l’indemnité de dépossession due à la société Tipayo.
A défaut d’accord intervenu entre les parties, la Commune de Boulogne-Billancourt a saisi le juge de
l’expropriation le 21 juin 2019 aux fins de fixation de l’indemnité de dépossession à cette somme.
Par jugement du 27 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
— fixé à la somme totale de 497.251,72 euros l’indemnité totale en valeur occupée due par la
Commune de Boulogne-Billancourt à la SARL TIPAYO pour la dépossession des lots n°5, 6 et 9 de
la copropriété sise […] peupliers à Boulogne-Billancourt (92100) sur la parcelle cadastrée BQ
n°95, se décomposant comme suit :
* indemnité principale : 438.865,20 euros ;
* indemnité pour frais de remploi : 44.886,52 euros ;
* indemnité pour perte de loyers : 13.500 euros ;
— rejeté le surplus des demandes ;
— condamné la Commune de Boulogne-Billancourt aux dépens.
La société Tipayo, expropriée a interjeté appel de ce jugement suivant déclaration du 17 mars
2020 à l’encontre de la Commune de Boulogne-Billancourt.
Elle demande à la cour, par conclusions reçues au greffe de la cour le 12 juin 2020, notifiées à
l’expropriant et au commissaire du gouvernement (AR signés le 17 juin 2020), de :
— déclarer la société Tipayo recevable et bien fondée en son appel et en conséquence ;
— réformer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à la somme totale de 497.251,72 euros l’indemnité
totale en valeur occupée due par la Commune de Boulogne-Billancourt à la SARL Tipayo pour la
dépossession des lots n°5, 6 et 9 de la copropriété sise […] peupliers à Boulogne-Billancourt
(92100) sur la parcelle cadastrée […], se décomposant comme suit :
* indemnité principale : 438.865,20 euros ;
* indemnité pour frais de remploi : 44.886,52 euros ;
* indemnité pour perte de loyers : 13.500 euros ;
Statuant à nouveau,
— condamner la commune de Boulogne-Billancourt à régler à la société Tipayo au titre des
indemnités d’expropriation pour la dépossession des lots n°5, 6 et 9 de l’ensemble immobilier en
copropriété sis à Boulogne-Billancourt, […], édifié sur la parcelle cadastrée section
[…] appartenant à la société Tipayo :
* indemnité principale : 675.000 euros ;
* indemnité de remploi : 68.500 euros ;
* indemnité réparant la perte de revenus locatifs : 29.000 euros ;
Soit une indemnité globale de 772.500 euros.
— condamner la commune de Boulogne-Billancourt à verser à la société Tipayo, en outre les dépense,
qui seront recouvrés par la SELARL Lexavoue Paris-Versailles agissant par Me Dupuis, avocat aux
offres de droit, dans les conditions de l’article 699 du CPC, 6.000 euros sur le fondement de l’article
700 du code de procédure civile.
La Commune de Boulogne-Billancourt, expropriante, par conclusions reçues au greffe de la cour
le 24 juillet 2020, notifiées à l’expropriée et au commissaire du gouvernement (AR signés le 21 aout
2020), demande à la cour de :
A titre principal par la voie de l’appel incident,
— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à 497.251,72 euros les indemnités d’expropriation,
toutes causes confondues, dues à la SARL TIpayo pour la dépossession des parcelles cadastrées BQ
n°95 ' lots n°5, 6 et 9 ' sise […] à Boulogne-Billancourt ;
— fixer les indemnités d’expropriation, toutes causes confondues à 352.000 euros décomposées
comme suit :
* indemnité principale : 317.305,82 euros ;
* indemnité de remploi : 34.230,85 euros.
A titre subsidiaire
— débouter la SARL Tipayo de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
— confirmer le jugement entrepris ;
En tout état de cause
— condamner la SARL Tipayo à verser à la Commune de Boulogne-Billancourt la somme de 3.000
euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
— condamner la SARL Tipayo aux entiers dépens de l’instance.
Le commissaire du gouvernement, par conclusions reçues au greffe de la cour le 4 septembre
2020, notifiées à l’expropriée (date non renseignée sur l’AR), et à l’expropriante (AR signé le 8
septembre 2020) sollicite la fixation de l’indemnité principale à la somme de 483.752 €, frais de
remploi inclus, sous réserve du montant de l’indemnité pour perte de loyer.
La société Tipayo, appelante expropriée, par conclusions reçues au greffe de la cour le 22 octobre
2020, notifiées à l’expropriant et au commissaire du gouvernement (AR signés le 26 octobre 2020)
répond aux conclusions de l’expropriante, porte le montant de sa demande au titre de l’indemnité
réparant la perte de revenus locatifs à 40.700 € (11.700 € pour la période comprise entre la
libération des lieux et la prise de possession et 29.000 € pour la période postérieure à la prise de
possession), portant sa demande d’indemnité globale à 784.200 euros. Elle produit en outre 5
nouvelles pièces (n°23 courriel officiel de Me Chocron du 24-2-20, n°24 courriel Me Lafarge du
28-2-20, n°25 virement du règlement de l’indemnité, n°26 circulaire relative à l’entrée en vigueur du
décret n°2005/467 du 13-5-2005 et n°27 annonce century 21 appartement de 2 pièces 31m²).
La société Tipayo, appelante expropriée, par conclusions reçues au greffe de la cour le 23 octobre
2020, notifiées à l’expropriant (AR signé le 27 octobre 2020) et au commissaire du gouvernement
(AR signé le 28 octobre 2020) reprend ses conclusions n°2 et indique l’identité de l’avocat constitué
dans l’intérêt de la commune.
La Commune de Boulogne-Billancourt, intimée expropriante, par conclusions reçues au greffe de
la cour le 30 novembre 2020, notifiées à l’expropriée (date non renseignée sur l’AR) et au
commissaire du gouvernement (AR signé le 2 décembre 2020), soulève l’irrecevabilité partielle des conclusions de l’appelant comportant une demande nouvelle et 5 nouvelles pièces, répond à ces
dernières et demande à la cour, à titre liminaire, de :
— déclarer partiellement irrecevables les conclusions de la SARL TIPAYO figurant dans son
mémoire d’appelant n°2 notifié le 23 octobre 2020 par le greffe de la Cour d’appel de céans à la
Commune de Boulogne-Billancourt, ainsi que les pièces nouvelles produites à l’appui de ce
mémoire, en tant qu’elles font référence à des pièces, demandes, moyens et termes nouveaux non
développés dans ses conclusions d’appelant et notamment :
* Page 5 (se rapportant à la demande nouvelle d’indemnisation pour perte de loyers entre la libération
des locaux et le paiement de l’indemnité d’expropriation et fondée sur les pièces nouvelles n°23 à 25)
* Page 9 (production d’un terme de comparaison nouveau, en lien avec la pièce n°27),
* Page 12 (production d’une pièce nouvelle n°26 à l’appui de l’argumentaire relatif à la recevabilité
des termes de référence),
* Pages 15 et 16 (moyen nouveau tenant à la libération des lieux tendant à la suppression de
l’abattement pour occupation)
* Page 17 (demande nouvelle d’indemnisation pour perte de loyers entre la libération des locaux et le
paiement de l’indemnité d’expropriation et fondée sur les pièces nouvelles n°23 à 25)
* Page 20 (demande nouvelle d’indemnisation pour perte de loyers entre la libération des locaux et le
paiement de l’indemnité d’expropriation ; augmentation de l’indemnité globale)
* les pièces n°23 à 27.
La société Tipayo, appelante expropriée, par conclusions reçues au greffe de la cour le 3
décembre 2020, notifiées à l’expropriante et au commissaire du gouvernement (AR signés le 7
décembre 2020) répond au moyen de l’expropriante tendant à voir déclarer partiellement irrecevables
ses conclusions et pièces.
Conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé à la décision et aux
conclusions susvisées pour plus ample exposé du litige, notamment quant au transport sur les lieux
du 8 octobre 2019 pour la consistance matérielle du bien exproprié.
SUR CE LA COUR
Vu l’article R. 311-26 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, selon lequel :
A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, l’intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses
conclusions et les documents qu’il entend produire dans un délai trois mois à compter de la
notification des conclusions de l’appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai
et sous la même sanction.
L’intimé à un appel incident dispose, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, d’un délai de trois
mois à compter de la notification qui lui en est faite pour conclure.
Le commissaire du Gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et
l’ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même
sanction que celle prévue au deuxième alinéa.
Vu les articles 1 et 2 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020, modifiée par l’ordonnance
n°2020-427 du 14 avril 2020 et l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020, prorogeant de deux mois ce
délai, s’il expire entre le 12 mars et le 23 juin 2020,
L’intimée expropriante soulève l’irrecevabilité des conclusions de l’expropriée reçues le 23 octobre
2020, en ce qu’elle comporte, en violation de ces textes, une demande d’indemnisation pour perte de
loyers pour une période nouvelle soit entre la libération des lieux et le paiement de l’indemnité
d’expropriation (p.5, 17 et 20), ainsi qu’un moyen nouveau tendant à la suppression de l’abattement
pour occupation (p. 15-16) et 5 pièces nouvelles n° 23 à 27.
L’expropriée fait cependant, justement valoir qu’elle n’a fait que répliquer aux conclusions adverses
sur l’abattement pour occupation , au regard de l’élément nouveau tenant selon elle au paiement de
l’indemnité d’expropriation, soit en septembre 2020, six mois après la réception en février 2020 du
RIB demandé avec insistance , paiement intervenu après le délai de trois mois ci-dessus et fondant au
surplus sa demande nouvelle d’indemnisation de la perte de loyers subis pendant ces six mois
supplémentaires.
En revanche, le terme de comparaison produit en pièce 27 est irrecevable comme tardif dès lors que
le délai de l’article L311-26 précité s’applique aux conclusions comme aux pièces produites et qu’il
n’est pas allégué que cette production n’a pas été matériellement possible avant, pour une raison
indépendante de la volonté de l’appelante.
La cour déclare donc irrecevable la pièce 27 de la société Tipayo mais recevables ses conclusions et
pièces pour le surplus.
***
Les parties s’accordent sur la date de référence, soit le 19 décembre 2018 et la situation en petite
copropriété du bien exproprié, ancien, d’une surface habitable de 71 m², composé de deux
appartements au premier étage d’un immeuble en R+1 sur sous-sol, sans ascenceur et situé en zone
UBa du PLU de la ville à cette date, soit en périphérie de centre ville, dans un quartier résidentiel
calme et proche de plusieurs transports en commun comme du périphérique.
Elles s’opposent en appel quant à l’évaluation de l’indemnité principale et à l’indemnité pour perte de
revenus locatifs.
1 – Sur l’évaluation de l’indemnité principale
Vu les articles L321-1 et L322-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique,
• Sur les références à retenir pour déterminer le ratio unitaire
L’expropriante le fixe à 6.572,20 €/m² sur la base de cinq termes de comparaison, que le jugement
entrepris rejette, comme trop éloignés et situés dans des voies différentes. Elle se prévaut également
d’une estimation des domaines à 465.000 € en valeur libre (pièces 2 et 3).
L’expropriée revendique un ratio de 9.500 €/m² sur la base de divers éléments dont un rapport de
l’expert Colomer (pièce 12), tous rejetés par le jugement entrepris.
Le commissaire du gouvernement fixe ce ratio à 7.116 €/m² sur la base de trois termes de
comparaison relatifs à des biens situés dans la même rue et de surface similaire.
Le jugement entrepris retient exactement, par des motifs dont ni l’expropriante ni l’expropriée ne
remet en cause la pertinence, le ratio médian résultant de ces trois derniers termes de comparaison,
soit 7.272 €/m².
Il suffira d’ajouter ce qui suit.
La société Tipayo ne fournit ni les références de publication pourtant sollicitées par l’expropriante et
le premier juge ni le détail des termes de comparaison retenus par l’expertise Colomer qu’elle a
sollicitée non contradictoirement. Elle ne conteste donc pas utilement le rejet de ce rapport,
notamment quant à sa seconde approche, ni la préférance donnée à juste titre par le premier juge à la
méthode par comparaison du bien exproprié à des cessions de biens équivalents ayant eu lieu
récemment sur le marché local, communiquées par les parties.
Il en est de même du rejet de ses termes de comparaison dont deux, d’une superficie de plus de 100
m² alors que celle du bien exproprié est de 71 m² – soit 38 et 33 m² pour chacun des deux
appartements – ne concernent pas le même segment de marché, le bien exproprié étant un immeuble
de rapport. Quant au troisième, il n’est pas comparable quant à sa facture et son état, ce dont la
société Tipayo ne disconvient pas.
S’agissant des références du commissaire du gouvernement, la moindre similarité des deux dernières
(50 et 44 rues des peupliers à Boulogne-Billancourt) est contrebalancée par le fait que la première (
au 36 de cette rue) est de bien meilleure facture, le bien exproprié ne comportant globalement pas
davantage complémentaire par rapport à ces références.
Enfin, l’expropriante qui admet que ses termes de comparaison concernent des biens situés de 400
mètres à 1 km du bien exproprié, ne conteste pas utilement leur rejet comme ne se situant pas
suffisamment à proximité, ce que cette distance ne suffit pas à étayer. Pour le surplus, elle n’étaye
pas non plus précisément son propos relatif aux caractéristiques similaires de ses références qui ne se
résument pas à leur surperficie. (Ses conclusions p. 31-35).
• Sur l’application d’un abattement pour occupation et pour vétusté
Le jugement entrepris retient exactement un taux d’abattement pour occupation de 15% que la
société Tipayo ne conteste pas utilement au vu de la libération des lieux début 2020, dès lors que la
consistance du bien exproprié s’apprécie, en application du second des textes précités, à la date de
l’ordonnance d’expropriation le 7 janvier 2019 soit antérieurement.
Il rejette de même la demande d’abattement pour vétusté que ne justifie pas l’état du bien exproprié,
certes à raffraichir mais rénovés en 2005 et en bon état d’entretien, peu important dès lors à cet égard
les quelques traces d’humidité et moisissure relevées lors du transports sur les lieux et abstraction
faite de la contradiction de motifs justement relevée par l’expropriante quant à ces traces de
moisissure (jugement entrepris p.8-9/13).
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a admis le premier et rejeté le second, fixant
l’indemnité principale à la somme de 438.865,20 €.
Le calcul de l’indemnité de remploi n’étant pas contestée, le sens de l’arrêt conduit à la confirmation
du jugement entrepris en ce qu’il l’a fixée à 44.886,52 €.
2 – Sur l’indemnité pour perte de revenus locatifs et frais de relocation
Il est constant que la perte des revenus locatifs est indemnisable, compte tenu de l’existence d’un lien
de causalité entre l’expropriation et la perte de revenus locatifs, qui génère un préjudice direct et
distinct accessoire de celui résultant de la dépossession foncière. Ce préjudice correspond au délai
nécessaire à l’exproprié, habituellement fixé à six mois, pour acquérir un bien et trouver un locataire
équivalents. Elle ne peut être écartée qu’à condition de démontrer l’absence de lien de causalité entre
l’expropriation et la perte de revenus locatifs subie pendant le délai nécessaire pour acquérir un autre
bien et le donner à bail.
La société Tipayo sollicite un an de loyers et 2.000 € de frais de relocation.
C’est cependant par des motifs pertinents que la cour adopte, et auxquels la société Tipayo n’apporte
aucun élément nouveau de discussion, que le jugement entrepris a limité à six mois la durée
nécessaire à celle-ci pour acquérir un autre bien et le donner à bail et pour exclure tous préjudice
résultant de frais, non établis, de relocation.
Il suffira d’ajouter, sur la demande nouvelle relative à la période antérieure à la prise de possession
du bien en cause par l’expropriante le 7 octobre 2020, qu’il n’est démontré aucun lien nécessaire entre
la libération spontanée des lieux par les locataires dont fait état la société Tipayo et l’expropriation.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ces deux points et la demande supplémentaire de la
société Tipayo rejetée.
3 – Sur les demandes accessoires
Le jugement entrepris a mis les dépens de première instance à la charge de l’expropriant
conformément à l’article L. 312-1 du code de l’expropriation.
La société Tipayo et l’expropriante, dont les recours respectifs échouent, supporteront leurs dépens
d’appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire,
Déclare irrecevable la pièce 27 de la société Tipayo et recevables ses conclusions et pièces pour le
surplus ;
Confirme le jugement entrepris ;
Y ajoutant,
Laisse à la société Tipayo et à la Commune de Boulogne-Billancourt la charge de leurs propres
dépens d’appel et rejette toute autre demande.
— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été
préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de
procédure civile.
— signé par Madame Agnès BODARD-HERMANT, Présidente, et par M. Z A,
Greffier lors du délibéré, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,
Textes cités dans la décision