Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 4 février 2021, n° 19/00174

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 5e ch., 4 févr. 2021, n° 19/00174
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 19/00174
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Versailles, 4 décembre 2018, N° 15-02043
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88G

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 FEVRIER 2021

N° RG 19/00174

N° Portalis DBV3-V-B7D-S42G

AFFAIRE :

F X

C/

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE SUD CHAMPAGNE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Décembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VERSAILLES

N° RG : 15-02043

Copies exécutoires délivrées à :

Me Michael GABAY

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE SUD CHAMPAGNE

LE TRESOR PUBLIC

Copies certifiées conformes délivrées à :

F X

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE SUD CHAMPAGNE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame F X

[…]

[…]

représentée par Me Michael GABAY, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, vestiaire : PC95

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/000011 du 22/06/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANTE

****************

CAISSE DE MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE SUD CHAMPAGNE

[…]

[…]

[…]

représentée par Mme H I (Représentant légal) en vertu d’un pouvoir général

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Décembre 2020, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Olivier FOURMY, Président,

Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller,

Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Morgane BACHE,

EXPOSE DU LITIGE

Mme F X a été embauchée en emploi saisonnier en qualité de vendangeur par la société SAS Champagne D. Massin (ci-après, la 'Société').

Le 17 septembre 2012, la Société a souscrit une déclaration d’accident du travail au profit de Mme X auprès de la caisse de mutualité sociale agricole Sud Champagne (ci-après, la

'Caisse’ ou 'MSA') dans les termes suivants :

'Date : 17 09'2012 Heure : non renseigné

Circonstances détaillées de l’accident et tâche de la victime : Un des collègues en chahutant a renversé sur le pied le contenu de la cafetière et a donc brûlé le dessus du pied

Siège des lésions : Pied

Nature des lésions : Brûlure'.

Le certificat médical initial, en date du 17 septembre 2012, constate une 'Brûlure du second degré superficielle du pied et de la cheville G' et prescrit un arrêt de travail jusqu’au 30 septembre 2012.

La caisse de mutualité sociale agricole Sud Champagne (ci-après la 'Caisse’ ou 'MSA') a pris en charge l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Par courrier du 21 novembre 2013, la MSA a d’abord considéré Mme X comme guérie le 17 septembre 2013.

Mme X a alors informé la Caisse de son changement d’adresse et adressé un certificat final de consolidation avec séquelles.

Le 8 août 2014, la Caisse a estimé, après avis du médecin conseil, que l’état de Mme X était consolidé à la date du 29 novembre 2013.

Le 20 novembre 2014, la MSA a informé Mme X que la commission des rentes des salariés agricoles avait proposé, dans sa séance du 13 novembre 2014 de fixer son taux d’incapacité permanente partielle (ci-après, 'IPP') à la somme à 2 % lui permettant de bénéficier d’une indemnité en capital de 666,88 euros.

Le 4 décembre 2015, Mme X a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (ci-après le 'TASS') afin de contester la décision de la Caisse.

Par jugement en date du 8 février 2017, le TASS a ordonné une expertise médicale confiée au docteur Y afin qu’il se prononce sur la date de guérison et le taux d’IPP retenus par la Caisse.

Le docteur Y a déposé son rapport le 12 avril 2017 et retient que : 'l’état de la victime pouvait être considéré comme consolidé à la date retenue par la caisse d’assurance maladie, le 29 novembre 2013. La date du 13 septembre 2013 est la date de guérison initialement fixée par la caisse reconsidérée du fait de la délivrance d’un certificat de consolidation par le docteur Z le 29 novembre 2013' et que 'le taux d’incapacité de 2 % fixé par la caisse peut être retenu'.

Par jugement contradictoire en date du 5 décembre 2018, le TASS a :

— déclaré Mme X recevable mais mal fondée en son recours ;

— homologué le rapport d’expertise du docteur Y ;

— dit que l’état de santé de Mme X consécutif à l’accident du 17 septembre 2012 pouvait être considéré comme consolidé à la date du 29 novembre 2013 ;

— fixé le taux d’incapacité permanente qui en est résulté à 2 % ;

— dit que les frais d’expertise seront supportés par la Caisse ;

— déclaré irrecevable la demande de Mme X relative à la rechute du mois de novembre 2015.

Pour l’essentiel le tribunal a tout d’abord considéré que Mme X n’apportait aucun élément probant postérieur à l’expertise du docteur Y permettant d’une part de procéder à une contre-expertise et d’autre part de conduire à une expertise psychologique ou psychiatrique.

Ensuite, le rapport du docteur Y étant clair, précis et motivé, le tribunal en a repris les termes et a considéré que l’état de santé de Mme X était consolidé au 29 novembre 2013 et a fixé le taux d’IPP à hauteur de 2 %.

Enfin, le tribunal a estimé que Mme X ne faisait pas état, dans les courriers qu’elle a envoyés, d’une rechute qui serait intervenue au mois de novembre 2015, le tribunal n’étant pas saisi de la demande de prise en charge de la rechute, la demande est irrecevable.

Par déclaration reçue le 4 janvier 2020, Mme X a interjeté appel. Après plusieurs renvois, l’affaire a été plaidée à l’audience du 17 décembre 2020.

Par conclusions écrites et soutenues à l’audience, Mme X demande à la cour :

— qu’elle infirme le jugement entrepris ;

en conséquence,

— à titre principal, qu’elle ordonne une nouvelle expertise médicale afin de pouvoir déterminer la date de sa consolidation ainsi que son taux d’IPP, au regard des séquelles physiques et psychologiques existantes ;

— à titre subsidiaire, qu’elle fixe un taux d’IPP à hauteur de 10 % compte tenu de ses séquelles physiques et psychologiques ainsi que l’existence d’un coefficient professionnel.

Par conclusions écrites et reprises oralement à l’audience, la Caisse demande à la cour de :

— confirmer le jugement en date du 5 décembre 2018 ;

— retenir la date du 29 novembre 2013 comme date de consolidation de l’accident du travail du 17 septembre 2012 ;

— valider le taux d’IPP de 2 % ;

— dire que Mme X supportera tous les dépens d’instance.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées et soutenues à l’audience.

MOTIFS

Sur une nouvelle expertise judiciaire

Mme X conteste le rapport d’expertise judiciaire. Elle l’estime lacunaire et imprécis concernant le motif de la fixation d’un taux d’IPP aussi faible que 2 % et concernant la date de

consolidation, eu égard aux séquelles physiques (lésions et brûlures au dos du pied et cheville gauches avec douleurs persistantes et chroniques) ainsi que la non prise en compte des séquelles psychologiques (dépression, perte de confiance, angoisse) persistantes depuis l’accident. Elle joint divers certificats médicaux pour confirmer les séquelles et rechute.

Subsidiairement, elle soutient qu’il n’a pas été pris en compte, pour le taux d’IPP, un coefficient professionnel ou a minima les répercussions des séquelles sur son activité professionnelle, n’ayant pas pu retrouver de travail stable depuis l’accident de travail, exerçant le métier d’auteur compositeur et ne bénéficiant que de faibles ressources.

En réponse, la MSA expose qu’elle a reçu, le 5 décembre 2013, un certificat médical de consolidation en date du 23 novembre 2013 et que son service médical a validé cette date. Elle a ensuite notifié à Mme X le taux d’IPP le 6 février 2015 et la somme de 666,88 euros lui a été versée. Les voies de recours étaient indiquées sur le courrier et Mme X n’a saisi le TASS que le 27 novembre 2015. Elle sollicite la confirmation de la date de consolidation au 29 novembre 2013 et le taux de 2 % au regard de l’expertise réalisée.

Sur ce,

Aux termes de l’article L. 141-1 du code de la sécurité sociale,

Les contestations d’ordre médical relatives à l’état du malade ou à l’état de la victime, et notamment à la date de consolidation cas d’accident du travail et de maladies professionnelles et celles relatives à leur prise en charge thérapeutique, à l’exclusion des contestations régies par l’article L. 143-1, donne lieu à une procédure d’expertise médicale dans les conditions fixées par décret en conseil d’État.

L’article L. 141-2 précise que :

Quand l’avis technique de l’expert ou du comité prévu dans certains cas a été pris dans les conditions fixées par le décret auxquelles il est renvoyé à l’article L. 141-1, il s’impose à l’intéressé comme à la caisse. Néanmoins, au vu de l’avis

technique, le juge peut sur demande d’une partie ordonner une nouvelle expertise

.

En droit, la consolidation doit s’entendre de la stabilisation de l’état de la victime c’est-à-dire du moment où tous les soins lui ayant été donnés et toutes les ressources de la technique médicale ayant été utilisées en sa faveur, il n’est plus possible d’envisager aucune évolution des lésions, celles-ci présentant un caractère stable et permanent.

En l’espèce, la MSA a pris en compte la date de consolidation fixée par le certificat médical final fourni par l’assurée elle-même sans la contester et n’a donc pas sollicité d’expertise.

Ce n’est qu’ensuite que Mme X a contesté la date de consolidation qu’elle avait elle-même invoquée.

L’expert judiciaire désigné a confirmé la date de consolidation au 29 novembre 2013 ainsi que le taux d’IPP à 2 % fixé par la Caisse.

Pour s’opposer aux conclusions de l’expert et solliciter une autre expertise judiciaire, Mme X produit plusieurs pièces.

— Une attestation de Mme A, psychologue, en date du 31 mars 2017 comporte une seule phrase : 'Je reçois X F en consultation depuis le 23 décembre 2015'.

Cette attestation ne permet pas de modifier la date de consolidation ni le taux d’IPP, aucun lien avec l’accident du travail du 17 septembre 2012 n’étant mentionné.

— Un électromyogramme du 16 février 2015 conclut, après avoir mentionné une brûlure du 3e degré de la cheville gauche en 2012 avec troubles sensitifs séquellaires : 'ENMG des membres inférieurs ne trouvant qu’un allongement isolé des latences des ondes F des nerfs SPE et SPI gauches sans anomalie de la conduction sensitive et motrice et avec une détection normale.

Ces anomalies pourraient correspondre à une petite souffrance radiculaire sans signe d’évolutivité. Absence d’argument électrophysiologique objectivé pour une neuropathie des grosses fibres ou atteinte tronculaire en particulier au membre inférieur gauche.'

Le médecin n’a donc rien constaté en lien avec l’accident du travail de 2012 qui serait en évolution depuis le 29 novembre 2013.

En outre, aucun élément ne démontre l’existence d’une brûlure du troisième degré, le certificat médical initial constatant une brûlure du second degré superficielle, de même que le certificat des urgences du centre hospitalier de Montbard du 19 septembre 2012.

— Un certificat médical de rechute du 1er décembre 2015 est illisible et il n’est pas possible de le relier à l’accident de travail du 19 septembre 2012.

En tout état de cause, la cour n’est pas saisie d’une demande de prise en charge d’une rechute et Mme X n’établit pas avoir formé une telle demande à la MSA.

— Un certificat du docteur B du 11 juillet 2016 prescrit un soin pour une mycose récidivante du pied, sans justificatif d’un lien avec l’accident du travail, la localisation du pied n’étant même pas précisée.

— Le 20 novembre 2017, le docteur C écrit à un confrère dermatologue pour lui adresser Mme X 'qui présente des lésions récidivantes du visage (rosacée ' Et une onchomycose du gros orteil G. A noter une brûlure du coup de pied G en 2012 (café brûlant).' Ce médecin ne fait aucun lien entre la mycose et l’accident du travail de 2012, situant la brûlure à un endroit différent de la mycose.

— Le 7 mars 2018, le docteur D, de l’Institut Pasteur prescrit un prélèvement pour sa mycose des pieds (et non d’un seul).

— deux certificats du docteur Le Donne des 14 janvier et 6 juillet 2020 constatent notamment une maigreur avec un BMI à 16,8, un mauvais état bucco-dentaire et un aspect de mycose unguéale des deux premiers orteils.

Aucune séquelle des brûlures de 2012 n’est mentionnée, là encore.

Les autres pièces sont relatives à l’activité professionnelle de Mme X.

Ainsi, aucun élément ne permet de contester les conclusions du rapport du docteur E long et détaillé, reprenant l’ensemble des pièces produites par Mme X et les analysant pour arriver à sa conclusion.

L’expertise judiciaire n’étant pas destinée à pallier la carence d’une partie selon l’article 146 du code de procédure civile et en l’absence du moindre élément permettant de repousser la date de consolidation ou d’augmenter le taux d’IPP, le jugement, qui avait déjà longuement repris les éléments du rapport d’expertise pour maintenir le taux d’IPP à 2 %, sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur l’abus de procédure

L’alinéa 1er de l’article 559 du code de procédure civile dispose que

En cas d’appel principal dilatoire ou abusif, l’appelant peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages intérêts qui lui seraient réclamés.

Si la loi permet à tout citoyen de saisir la justice aux fins de faire trancher des contestations, ce droit ne doit pas dégénérer en abus.

En l’espèce, Mme X a elle-même communiqué à la CPAM le certificat médical de consolidation avant de le contester dans le cadre d’une seule demande d’expertise sans produire de pièces réellement justificatives à l’appui de sa demande et après avoir demandé plusieurs renvois.

Les pièces qu’elle produit pour contester l’expertise réalisée à sa demande ne sont pas davantage pertinentes et, pour la plupart, ont déjà été écartées par les premiers juges.

Cette attitude traduit sans conteste un abus de procédure qui de surcroît désorganise les Caisses qui doivent assurer leur représentation en justice et, alors qu’il s’agit d’organismes à but non lucratif, engager d’importants frais de procédure.

En conséquence, Mme X doit être sanctionnée par le prononcé d’une amende civile que la cour fixera à la somme de 500 euros.

Sur les dépens

Mme X, qui succombe à l’instance, est condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en voir délibéré, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 5 décembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Yvelines (n° 15-02043/V) en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme F X aux dépens éventuellement exposés depuis le 1er janvier 2019 ;

Condamne Mme F X à payer une amende civile d’un montant de 500 euros ;

Dit qu’une copie de la présente décision sera adressée au Trésor Public.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Olivier Fourmy, Président, et par Madame Morgane Baché, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRÉSIDENT,

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