Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2 février 2010, n° 09B00505

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 2 févr. 2010, n° 09B00505
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 09B00505
Décision précédente : Tribunal administratif de Bordeaux, 21 janvier 2009

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE BORDEAUX

XXX

________

M. Y Z X

________

M. Zapata

Président

________

M. Bentolila

Rapporteur

________

M. Gosselin

Rapporteur public

________

Audience du 5 janvier 2010

Lecture du 2 février 2010

________

C sb

XXX

AU NOM DU PEUPLE Français

La cour administrative d’appel de Bordeaux

(6e Chambre)

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 23 février 2009, présentée pour M. Y Z X, élisant domicile chez ASTI, XXX à XXX, par Me Aymard, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du 22 janvier 2009 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de la Gironde en date du 18 août 2008 portant refus de titre de séjour avec obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi ;

2°) d’annuler la décision du 18 août 2008 du préfet de la Gironde ;

3°) de condamner l’Etat au paiement d’une somme de 1 300 € au bénéfice de son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que c’est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande, dès lors que son arrêt méconnait les dispositions de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l’article L. 1132-1 du code du travail, ainsi que celles des articles 225-1 et 225-2 du code pénal ; qu’une délibération de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) du 15 septembre 2008 a considéré que la circulaire du 20 décembre 2007 implique de mettre en œuvre une procédure d’embauche en fonction de l’origine nationale des candidats, et ce en violation des dispositions du code du travail et du code pénal ; que les arrêtés du 18 janvier 2008 qui édictent deux listes distinctes introduisent une véritable discrimination à l’embauche en fonction de l’appartenance à une nation contraire à la directive n° 2000/43/CE du conseil, du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique ; que le métier qu’il souhaite exercer figure dans la liste des métiers ouverts aux nouveaux ressortissants de l’Union européenne et non dans la liste ouverte aux Etats tiers ; qu’en conséquence, l’employeur qui souhaite l’embaucher devra lui préférer quelqu’un d’une autre nationalité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 27 mars 2009, présenté par le préfet de la Gironde, qui conclut au rejet de la requête en se référant à son mémoire annexé déposé en première instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2000/43/CE du conseil de l’Union européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu le code pénal ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 ;

Vu l’arrêté interministériel du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne, d’un autre Etat partie à l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu l’arrêté interministériel du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux ressortissants des Etats de l’Union européenne soumis à des dispositions transitoires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 5 janvier 2010 :

— le rapport de M. Bentolila, premier conseiller ;

— et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que M. X, de nationalité indienne, interjette appel du jugement, en date du 22 janvier 2009, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de la Gironde, en date du 18 août 2008, portant refus de séjour avec obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Considérant, qu’aux termes de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « La carte de séjour temporaire mentionnée à l’article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l’article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, à l’étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l’admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu’il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 311-7. (…). » ; qu’aux termes de l’article L. 313-10 du même code : «… Pour l’exercice d’une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l’autorité administrative… l’étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l’emploi sur le fondement du même article L. 341-2… » ;

Considérant que M. X s’est vu opposer par la décision de refus de séjour contestée, le fait que l’emploi dans la restauration pour lequel il sollicitait un titre de séjour en qualité de salarié, n’était pas au nombre des métiers connaissant des difficultés d’embauche, visés par l’arrêté du 18 janvier 2008, pris pour l’application des dispositions précitées et relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l’emploi, des autorisations de travail aux étrangers ; qu’il soulève, par la voie de l’exception, la discrimination entre les ressortissants de l’union européenne relevant du régime transitoire et les ressortissants des états tiers non-communautaires qui serait opérée par l’arrêté interministériel du 18 janvier 2008, au regard de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de l’article 1132-1 du code du travail et des articles 225-1 et 225-2 du code pénal ainsi que de la directive du conseil des communautés européennes du 29 juin 2000 ;

Considérant, toutefois, que les ressortissants des Etats de l’Union européenne soumis à des dispositions transitoires relèvent d’un régime juridique spécifique et se trouvent dans une situation objectivement différente de celle des autres étrangers en ce qui concerne l’accès au travail salarié, dès lors notamment que les traités d’adhésion de ces pays prévoient que, pour l’accès à leur marché du travail, les Etats membres doivent instaurer un régime préférentiel pour les travailleurs issus de ces pays par rapport aux ressortissants issus de pays tiers ; que, par suite, l’arrêté du 18 janvier 2008 pouvait légalement établir des listes de métiers pour l’exercice desquels la situation de l’emploi n’est pas opposable, qui soient différentes dans leur contenu selon que le demandeur d’emploi est un ressortissant d’un Etat de l’Union européenne soumis à des dispositions transitoires ou un ressortissant d’un Etat tiers ; qu’en effet, cette différence de traitement résulte d’une différence de situation qui est la conséquence nécessaire des traités d’adhésion et des dispositions de droit interne prises pour leur application ; qu’il suit de là que l’arrêté du 18 janvier 2008 dont l’illégalité et l’inconventionnalité sont soulevées par la voie de l’exception ne méconnaît ni les dispositions relatives à la non-discrimination contenues dans le code du travail et le code pénal, ni l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ni la directive du conseil des communautés européennes du 29 juin 2000 ;

Considérant qu’il résulte des dispositions de la loi n° 2004-1486 susvisée du 30 décembre 2004 que, lorsqu’elle, comme en l’espèce, émet des recommandations sans faire usage de la possibilité dont elle dispose de leur assurer une publicité particulière, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) n’énonce pas des règles qui s’imposeraient aux personnes privées ou aux autorités publiques, mais recommande aux personnes concernées les mesures qui lui semblent de nature à remédier à tout fait ou à toute pratique qu’elle estime être discriminatoire ou à en prévenir le renouvellement et que par suite, ces recommandations ne constituent pas, par elles-mêmes, des décisions administratives dont les tiers sont susceptibles de se prévaloir au contentieux ; que, dès lors, M. X ne peut pas utilement se prévaloir de la délibération de la HALDE du 15 septembre 2008 qui est dépourvue de toute valeur normative ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 9 juillet 1991 font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au requérant la somme qu’il demande sur le fondement de ces dispositions ;

décide :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y Z X et au ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire. Une copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l’audience du 5 janvier 2010 à laquelle siégeaient :

M. Zapata, président,

M. Bec, président-assesseur,

M. Bentolila, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 février 2010.

Le rapporteur, Le président,

P.-M. BENTOLILA F. ZAPATA

Le greffier,

V. EPINETTE

La République mande et ordonne au ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt. Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Véronique EPINETTE

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