CAA de BORDEAUX, 4ème chambre (formation à 3), 26 février 2015, 13BX00856, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Conformément aux articles 4 et 13 de la loi du 17 juillet 1978, le département est tenu de ménager aux usagers un accès aux documents figurant dans ses archives, et d’autoriser leur réutilisation, sous réserve du droit qu’il tient, en tant que service culturel, de l’article 11 de cette loi de fixer les conditions de cette réutilisation. Toutefois, dès lors qu’il est producteur d’une base de données, un service culturel peut interdire la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu de cette base de données en faisant état des droits que lui confère l’article L. 342-1 du code de la propriété intellectuelle. N’est par suite pas entachée d’illégalité la décision du directeur général des services du département de la Vienne rejetant la demande de la société NotreFamille.com tendant à l’abrogation de la délibération du 18 décembre 2009 par laquelle le département de la Vienne a limité la réutilisation des fonds figurant dans la base de données des archives départementales à leur cession dans le cadre d’une mission de service public.

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Commentaires9

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CMS Bureau Francis Lefebvre · 2 juin 2017

Depuis la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 relative au droit de communication et de réutilisation des informations publiques, certaines données publiques comme les archives départementales peuvent être utilisées ou exploitées par des personnes privées. La société Notrefamille.com, qui propose en accès payant une base généalogique générée à partir des éléments d'état civil et des recensements des départements, a déjà, sur ce fondement, introduit un certain nombre d'actions visant à faire annuler par le juge administratif le refus de certaines collectivités de communiquer leurs archives. …

 

Village Justice · 7 janvier 2016

Depuis quelques années, le Gouvernement manifeste sa volonté de favoriser la pratique de l'open data, c'est-à-dire le processus de libéralisation des données publiques. En effet, une telle ouverture des données ne concerne en France que le secteur public, bien qu'elle soit également mise en œuvre par certaines entreprises en situation de quasi-monopoles telles que la SNCF ou la RATP. L'open data a initialement été motivée par la volonté de réinscrire les gouvernés dans les institutions administratives et dans l'action de l'État, plus spécifiquement via l'idée de participation du citoyen …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 4e ch. (formation à 3), 26 févr. 2015, n° 13BX00856
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 13BX00856
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Poitiers, 30 janvier 2013, N° 1002347
Identifiant Légifrance : CETATEXT000030310335

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête enregistrée par télécopie le 20 mars 2013 et régularisée par la production de l’original le 22 mars 2013, présentée pour la société NotreFamille.com, dont le siège social est situé 1 bis avenue de la République à Paris (75011), par Me B… ;

La société NotreFamille.com demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1002347 du 31 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du directeur des services départementaux de la Vienne du 1er juillet 2010 rejetant sa demande d’abrogation de la délibération du conseil général de la Vienne du 18 décembre 2009 fixant les conditions de réutilisation par des tiers des archives publiques conservées par les archives départementales ;

2°) d’annuler ces deux décisions ;

3°) d’enjoindre au département de la Vienne d’abroger la délibération du 18 décembre 2009 en application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative dans le délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département de la Vienne la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

— --------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public ;

Vu la loi du n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la propriété intellectuelle ;

Vu le code du patrimoine ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 15 janvier 2015 :

— le rapport de M. Antoine Bec, président-assesseur ;

 – les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

 – les observations de Me A…, pour la société NotreFamille.com ;

 – les observations de Me C…, pour le département de la Vienne ;

1. Considérant que, par délibération du 18 décembre 2009, le conseil général du département de la Vienne a fixé les conditions de réutilisation des informations contenues dans les documents d’archives publiques en décidant qu’étaient réutilisables les documents consultés en salle de lecture sous forme papier ou numérique, ou sur le site internet des archives départementales pour les documents numérisés ; qu’en revanche la réutilisation des fichiers numériques constitués par le service des archives départementales à partir de certains fonds d’archives publiques n’était autorisée que sur cession de ces fichiers dans le cadre d’une mission de service public ; que, par lettre en date du 29 avril 2010, la société NotreFamille.com, estimant que ces règles étaient trop restrictives et faisaient obstacle à la mise en oeuvre de « techniques d’aspiration des données à partir du site internet du département », a demandé au président du conseil général d’abroger cette délibération, ce qu’il a refusé par une décision en date du 1er juillet 2010 ; que la société NotreFamille.com fait appel du jugement du 31 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d’annulation de cette dernière décision ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le département de la Vienne :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 20 de la loi du 17 juillet 1978 : « La commission d’accès aux documents administratifs est une autorité administrative indépendante. /(…)/Elle émet des avis lorsqu’elle est saisie par une personne à qui est opposé (…) une décision défavorable en matière de réutilisation d’informations publiques. /La saisine pour avis de la commission est un préalable obligatoire à l’exercice d’un recours contentieux » ;

3. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que seules les décisions individuelles défavorables en matière de réutilisation de données publiques sont soumises à l’obligation de saisine préalable de la commission d’accès aux documents administratifs ; qu’en l’espèce, la délibération par laquelle le conseil général de la Vienne a adopté son règlement relatif à la réutilisation de ses archives revêt le caractère d’une décision règlementaire ; que la décision refusant d’abroger une décision réglementaire est également réglementaire ; que, dès lors, le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête de première instance pour défaut de saisine préalable de la commission d’accès aux documents administratifs doit être écarté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Considérant que pour reconnaître au département de la Vienne des droits de propriété intellectuelle en tant que producteur de base de données, le tribunal administratif s’est fondé sur les articles L. 341-1 et L. 342-1 du code la propriété intellectuelle, et sur les articles 10 et suivants de la loi du 17 juillet 1978 relatifs au droit de réutilisation des données publiques ; que les premiers juges ont ainsi statué sur la possibilité pour les personnes publiques détentrices de données publiques d’opposer leur droit de propriété intellectuelle aux demandes de réutilisation de ces données ; que, dès lors, le moyen tiré de l’ insuffisante motivation du jugement doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision du 1er juillet 2010 du directeur général des services :

5. Considérant qu’aux termes de l’article 16-1 de la loi du 12 avril 2000 : « L’autorité administrative est tenue, d’office ou à la demande d’une personne intéressée, d’abroger expressément tout règlement illégal ou sans objet, que cette situation existe depuis la publication du règlement ou qu’elle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date » ;

6. Considérant que, par décision du 1er juillet 2010, le directeur général des services départementaux de la Vienne a rejeté la demande d’abrogation de la délibération du 18 décembre 2009 par laquelle le département de la Vienne a fixé les conditions de réutilisation des informations contenues dans les documents d’archives publiques présentée par la société NotreFamille.com ; qu’il n’était tenu de faire droit à cette demande que si cette délibération était entachée d’irrégularité ;

7. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 4 de la loi du 17 juillet 1978 : " L’accès aux documents administratifs s’exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l’administration : a) Par consultation gratuite sur place, (…); b) (…) par la délivrance d’une copie sur un support identique à celui utilisé par l’administration ou compatible avec celui-ci (…) ; /c) Par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique » ; que l’article 13 de la loi du 17 juillet 1978, modifiée prévoit que les informations publiques comportant des données à caractère personnel peuvent faire l’objet d’une réutilisation notamment si une disposition législative ou réglementaire le permet ; que selon l’article 10 de cette même loi les informations figurant dans des documents produits ou reçus par les administrations peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite dans les limites et conditions fixées par la loi ; que selon l’article 11 de la même loi, " les conditions dans lesquelles les informations peuvent être réutilisées sont fixées, le cas échéant, par les administrations mentionnées aux a et b du présent article lorsqu’elles figurent dans des documents produits ou reçus par : a) Des établissements et institutions d’enseignement et de recherche ; b) Des établissements, organismes ou services culturels. "; qu’enfin, l’article 15 de cette même loi ajoute que « La réutilisation d’informations publiques peut donner lieu au versement de redevances » ;

8. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article L. 342-1 du code de la propriété intellectuelle : " Le producteur de bases de données a le droit d’interdire : /1° L’extraction, par transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support, par tout moyen et sous toute forme que ce soit ; /2° La réutilisation, par la mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, quelle qu’en soit la forme. /Ces droits peuvent être transmis ou cédés ou faire l’objet d’une licence. /Le prêt public n’est pas un acte d’extraction ou de réutilisation » ;

9. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que l’article 11 de la loi du 17 juillet 1978 permet aux services culturels de fixer les conditions dans lesquelles les informations qu’ils détiennent dans l’exercice de leur mission peuvent être réutilisées, sous réserve de ne pas porter atteinte au droit à l’accès aux documents administratifs reconnu aux administrés ; que, toutefois, un service culturel producteur d’une base de données peut interdire la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu de cette base de données en faisant état des droits que lui confère l’article L. 342-1 du code de la propriété intellectuelle ;

10. Considérant en premier lieu qu’en autorisant la réutilisation des informations obtenues par le biais soit de la consultation des archives sur place, pouvant donner lieu à délivrance d’une copie papier ou numérique, soit par consultation sur le site internet, qui ne permet d’obtenir qu’une copie papier, la délibération litigieuse n’a pas porté atteinte au droit que les usagers tiennent des articles 4 et 10 de la loi du 17 juillet 1978 précitée de pouvoir réutiliser les informations contenues dans des documents figurant dans les archives du département, dans le format sous lequel ils sont détenus ;

11. Considérant en deuxième lieu que le département de la Vienne a créé un ensemble de fichiers numériques permettant le stockage permanent d’archives et l’accès à celles-ci par l’intermédiaire du site internet des archives départementales, particulièrement en ce qui concerne les registres d’état civil et les registres paroissiaux des communes du département de la fin du 17e siècle jusqu’au 19e siècle, ainsi que les listes nominatives des recensements de la population de la Vienne et les registres matricules des militaires pour une partie du 19e siècle ; que les informations contenues dans les documents originaux ont été classées et structurées de façon à permettre notamment, à partir du nom d’une commune ou d’une paroisse en ce qui concerne l’état civil, d’un patronyme ou d’une profession en ce qui concerne les recensements, d’accéder à l’un des documents archivés et numérisés ; que cet ensemble présente ainsi le caractère d’une base de données ; que l’investissement financier, matériel et technique réalisé par le département de la Vienne permet de le qualifier de producteur de base de données ; qu’en cette qualité, il tire de l’article L. 342-1 du code de la propriété intellectuelle précité le droit d’interdire l’extraction de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu de cette base de données, ou sa réutilisation ; que la possibilité pour le producteur de base de subordonner la réutilisation d’informations publiques au versement de redevances, prévue par l’article 15 précité de la loi du 17 juillet 1978, ne saurait être le corollaire d’une obligation d’autoriser l’extraction ; qu’ainsi, par le second alinéa de la délibération litigieuse, le département de la Vienne pouvait légalement interdire l’extraction, sous forme de fichiers numériques complets, de tout ou partie du contenu de la base de données dont il est propriétaire et leur réutilisation par la mise à disposition du public ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu’en limitant la cession des fichiers numériques constitués à partir de fonds d’archives publiques aux nécessités de l’accomplissement d’une mission de service public, et en la rendant gratuite, le département de la Vienne ne commercialise pas les informations publiques contenues dans le site internet du service des archives départementales, ni ne les réserve à un opérateur commercial ; qu’ainsi, sa délibération du 18 décembre 2009 n’a pas pour effet de placer une entreprise en situation d’abuser de sa position dominante ; que, par suite, la société requérante n’est pas fondée à soutenir que la délibération litigieuse serait illégale au regard du considérant 47 de la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 1996 selon lequel la protection des producteurs de bases de données ne doit pas s’exercer de manière à faciliter les abus de position dominante ;

13. Considérant que la délibération du 18 décembre 2009 n’étant pas entachée d’irrégularité, le département de la Vienne n’était pas tenu de faire droit à la demande d’abrogation présentée par la société Notre famille.com ;

14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Notre famille.com n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d’injonction présentées par la société NotreFamille.com :

15. Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de la société Notre famille.com n’implique aucune mesure d’exécution; que les conclusions de la société Notre famille.com tendant à ce que le département de la Vienne abroge sous astreinte la délibération du 18 décembre 2009, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, doivent par suite être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

16. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département de la Vienne, qui n’est pas dans la présente instance la partie qui succombe, soit condamnée à payer à la société NotreFamille.com la somme que cette dernière demande à ce titre ; que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société NotreFamille.com la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le conseil général de la Vienne et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la société NotreFamille.com est rejetée.

Article 2 : La société NotreFamille.com versera au département de la Vienne la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°13BX00856

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