CAA de BORDEAUX, 4ème chambre - formation à 3, 22 décembre 2017, 15BX03093, Inédit au recueil Lebon

  • Règles générales d'établissement de l'impôt·
  • Impôts sur les revenus et bénéfices·
  • Abus de droit et fraude à la loi·
  • Revenus et bénéfices imposables·
  • Plus-values des particuliers·
  • Contributions et taxes·
  • Plus-values mobilières·
  • Règles particulières·
  • Généralités·
  • Pénalité

Chronologie de l’affaire

Commentaires2

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Patrick Michaud · Études fiscales internationales · 11 avril 2019

Pour recevoir la lettre EFI inscrivez vous en haut à droite Les lettres fiscales d'EFI Pour lire les tribunes antérieures cliquer La procédure de l'abus de droit de l'article L64 du LPF a été profondément modifiée en 2018 :- -d'une part il est devenu une infraction de fraude fiscale dénoncée automatiquement au parquet financier pour les impositions supérieures à 100.000 en principal ;et - d'autre part, la preuve reste toujours à la charge de l'administration et ce même en cas d'avis du comité favorable au fisc, le renversement de la charge de la preuve a été supprimé ABUS DE DROIT …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 4e ch. - formation à 3, 22 déc. 2017, n° 15BX03093
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 15BX03093
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Contentieux fiscal
Décision précédente : Tribunal administratif de Guadeloupe, 15 juillet 2015, N° 1301776, 1301777
Identifiant Légifrance : CETATEXT000036314920

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première requête, M. E… a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy, à titre principal, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l’impôt sur le revenu assortie des pénalités et intérêts de retard à laquelle il a été assujetti au titre de l’année 2007 pour un montant total de 1 081 324 euros et, subsidiairement, de réduire à 40 % le taux des pénalités. Par une seconde requête, il a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations sociales qui lui ont été réclamées au titre de 2007 pour un montant total de 743 758 euros et, à titre subsidiaire, de réduire à 40 % le taux des pénalités qui lui ont été infligées.

Par ordonnance du 3 décembre 2013, le dossier des requêtes a été transmis au tribunal administratif de la Guadeloupe.

Par un jugement n° 1301776, 1301777 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 septembre 2015, 23 décembre 2015, 30 mai 2016 et 2 novembre 2016, M. E…, représenté par Me D…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 16 juillet 2015 ;

2°) à titre principal, de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des prélèvements sociaux à concurrence de 351 837 euros ;

4°) à titre subsidiaire, de réduire à 40 % le taux des pénalités qui lui ont été infligées ;

5°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 10 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – le prix d’acquisition des titres de la société Nextedia n’a pas fait l’objet de minoration ;

 – ce prix et la quotité des actions cédées résultent d’un accord juridique du 13 juillet 2005 entre les parties qui les engageait contractuellement en application des articles 1583 et 1179 du code civil, s’agissant d’une vente parfaite, sous condition suspensive ; la procédure pénale pour fraude fiscale diligentée à son encontre, qui a été classée sans suite, le confirme ; le délai qui s’est écoulé entre le 13 juillet 2005 et le 15 décembre 2005 ne résulte que du temps nécessaire à la réalisation de l’opération ;

 – le terme de comparaison adopté par l’administration, soit la valeur des titres à la date de l’augmentation de capital de la société Nextedia, n’est pas pertinent car cette valeur traduit, non la valeur réelle des titres à cette date, mais les profits escomptés par la société ESA ;

 – l’expertise effectuée à sa demande par le cabinet RSM confirme que le prix de cession des titres de la société Nextedia correspond objectivement à la valeur réelle de ces titres ;

 – l’allégation de l’administration selon laquelle la minoration de la valeur des titres aurait eu pour objet le placement dans un PEA est erronée ;

 – au moment de l’inscription des titres sur son PEA, la plus-value de revente était hypothétique ;

 – postérieurement à la cession des titres en litige, il a effectué des retraits sur son PEA qui ont donné lieu à des prélèvements sociaux faisant double emploi avec les rappels en litige de sorte que dans l’hypothèse où le bien fondé des impositions en litige serait confirmé en appel, il serait en droit d’obtenir la restitution des prélèvements sociaux qu’il a acquittés pour un montant de 351 837 euros ; à cet égard, le débat sur l’origine des sommes prélevées n’a pas lieu d’être : le PEA étant considéré comme rétroactivement clos au 15 décembre 2005, les banques n’avaient pas à prélever les prélèvements sociaux lors des retraits, quels que soient les dates de ces retraits et les titres concernés ;

 – l’application de la majoration au taux de 80 % n’est pas correctement motivée du fait de l’erreur commise par l’administration dans la citation de l’article 1729 du code général des impôts dans une version qui n’était pas applicable à la date de la proposition de rectification du 6 août 2009 ; cette erreur l’a privé de la possibilité de solliciter l’application du taux de 40 % ;

 – en outre, l’application de la majoration de 80 % en lieu et place du taux de 40 % n’est pas justifiée dès lors qu’il n’était pas le seul bénéficiaire de l’abus de droit supposé ;

-la majoration de 80 % méconnaît le droit au respect de la présomption d’innocence garanti par l’article 6§ 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. E… ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 novembre 2016, la clôture d’instruction a été fixée au 4 janvier 2017 à 12h00.

Vu :

 – les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008, en son article 35 ;

-le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Marianne Pouget,

 – les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,

 – et les observations de Me A… B…, représentant M. E….

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l’instruction que M. E… a acquis, le 15 décembre 2005, 44 706 titres de la société Nextedia pour un prix de 82 259 euros, soit 1,84 euros le titre, et qu’il les a inscrits sur son plan d’épargne en actions ouvert auprès du Crédit Agricole. Il les a cédés les 26 et 27 juillet 2007 pour un montant de 3 725 281 euros. En application des dispositions de l’article 157 5° bis du code général des impôts, M. E… n’a pas pris en compte, pour la détermination de son revenu net global, la plus-value de 3 643 022 euros réalisée lors de la cession de ces titres. Estimant que l’intéressé avait bénéficié d’une minoration de la valeur des titres de la société Nextedia lors de leur acquisition, l’administration fiscale a prononcé le rehaussement au titre de l’année 2007 de son revenu imposable en y intégrant la plus-value de 3 643 022 euros réalisée à l’occasion de la cession, au cours de cette année, des titres de la société Nextedia. Il en est résulté une cotisation supplémentaire à l’impôt sur le revenu, assortie des intérêts de retard et de pénalités, s’élevant à la somme totale de 1 081 324 euros et des rappels de contributions sociales afférentes assorties de pénalités pour un montant total de 743 758 euros.

2. M. E… relève appel du jugement n° 131776,131777 du 16 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses demandes tendant, à titre principal, à la décharge des impositions en litige et des pénalités y afférentes, à titre subsidiaire, à la réduction du taux des pénalités à hauteur de 40 % et à la restitution des prélèvements sociaux acquittés pour un montant de 351 837 euros.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires à l’impôt sur le revenu et des rappels de contributions sociales :

3. M. E… conteste la mise en oeuvre par l’administration de la procédure de l’abus de droit fiscal prévue par l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, à l’origine des impositions en litige et reprend en appel les moyens qu’il avait invoqués devant le tribunal administratif. Toutefois, il n’apporte sur ce point aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l’appréciation portée par les premiers juges. Il y a lieu, dès lors, d’écarter ces moyens par adoption des motifs qu’ils ont retenus à bon droit.

Sur la demande de restitution de la somme de 351 837 euros :

4. Le requérant demande le remboursement de la somme de 351 837 euros au titre de prélèvements sociaux qu’il aurait acquittés à tort à la suite de retraits effectués en 2011 et 2012 sur son plan d’épargne en actions, postérieurement à la date à laquelle est intervenu le manquement ayant entraîné sa clôture à compter du 15 décembre 2007 en application de l’article 1740 septies du code général des impôts alors en vigueur.

5. Toutefois, les attestations des établissements bancaires qu’il produit ne permettent pas d’établir, en tout état de cause, que les retraits en litige ont été effectués sur le plan épargne action ouvert auprès du Crédit Agricole et qui a été clos à compter du 15 décembre 2005 à la suite du manquement à l’une des conditions de fonctionnement du plan d’épargne en actions régulièrement constaté par l’administration.

Sur les pénalités :

6. Aux termes de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public alors applicable : « Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. – A cet effet doivent être motivées les décisions qui :(…) – infligent une sanction… ». Les pénalités consécutives à un abus de droit prévues à l’article 1729 du code général des impôts sont au nombre des sanctions auxquelles s’appliquent les dispositions précitées.

7. Le VI de l’article 35 de la loi de finances rectificative pour 2008 a substitué aux dispositions de l’article 1729 du code général des impôts, dans leur rédaction applicable aux propositions de rectification notifiées avant le 1er janvier 2009, qui prévoyaient une majoration de 80 % si le contribuable s’était rendu coupable d’abus de droit, les dispositions suivantes : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : (…) / b. 80 % en cas d’abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ; elle est ramenée à 40 % lorsqu’il n’est pas établi que le contribuable a eu l’initiative principale du ou des actes constitutifs de l’abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire (…). "

8. Sous le titre « majorations », la proposition de rectification notifiée à M. E…, en date du 6 août 2009, cite les dispositions du b) de l’article 1729 du code général des impôts dans leur rédaction antérieure à la modification précitée introduite par le VI de l’article 35 de la loi de finances rectificative pour 2008 et indique que l’irrégularité dans l’utilisation du plan d’épargne en actions « entraîne l’application de la pénalité de 80 % prévue à l’article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvres ou d’abus de droit destinés à profiter de manière indue des avantages fiscaux qui y sont attachés ».

9. La motivation des pénalités par référence à l’ancienne rédaction du b) de l’article 1729 du code général des impôts a conduit le vérificateur à faire une application automatique du taux de 80 % qui était la seule majoration applicable en cas d’abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2008. Dès lors, M. E… est fondé à soutenir que l’administration, qui du fait de cette erreur n’a pas indiqué s’il avait eu l’initiative du ou des actes constitutifs de l’abus de droit ou en avait été le principal bénéficiaire, ce qui aurait justifié qu’il n’était pas fait application du taux de 40 %, n’a pas correctement motivé l’application des pénalités au taux de 80 %. Par suite, il y a lieu de lui accorder la décharge des pénalités qui lui ont été infligées sur le fondement des dispositions précitées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. E… est seulement fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses conclusions tendant à être déchargés des pénalités qui lui ont été infligées à raison de la mise en oeuvre de la procédure de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une quelconque somme au titre des frais exposés par M. E… et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : M. E… est déchargé des pénalités appliquées aux impositions supplémentaires d’impôt sur le revenu et aux rappels de contributions sociales résultant de la mise en oeuvre de la procédure de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales.

Article 2 : Le jugement n° 131776, 131777 du 16 juillet 2015 du tribunal administratif de la Guadeloupe est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E… est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C… E… et au ministre de l’action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal Ile de France Est.

Délibéré après l’audience du 1er décembre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
Mme Sylvande Perdu, premier conseiller,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 décembre 2017.


Le premier assesseur,

Sylvande Perdu

Le président,

Marianne PougetLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de l’action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

2

N° 15BX03093

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de BORDEAUX, 4ème chambre - formation à 3, 22 décembre 2017, 15BX03093, Inédit au recueil Lebon