CAA de BORDEAUX, 6ème chambre - formation à 3, 5 novembre 2018, 16BX03252, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 6e ch. - formation à 3, 5 nov. 2018, n° 16BX03252
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 16BX03252
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulouse, 28 août 2016, N° 1602351
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037563242

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté d’agglomération Castres-Mazamet a demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler une délibération du 8 avril 2016 du comité syndical du syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés dénommé « Trifyl ».

Par une ordonnance n° 1602351 du 29 août 2016, le président du tribunal administratif de Toulouse, statuant sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 29 septembre 2016 et 14 mars 2017, la communauté d’agglomération Castres-Mazamet, représentée par Me B…, demande à la cour :

1°) d’annuler cette ordonnance du 29 août 2016 du président du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d’annuler la délibération du 8 avril 2016 susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge du syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés Trifyl la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – l’ordonnance attaquée est insuffisamment motivée au regard de l’article L. 9 du code de justice administrative dès lors qu’elle se borne à indiquer que la délibération du 8 avril 2016 aurait « le caractère d’un acte préparatoire insusceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir » sans apporter aucun élément d’explication sur une telle qualification ;

 – c’est à tort que l’auteur de l’ordonnance a considéré que cette délibération ne revêt pas un caractère décisoire alors que les délibérations des organes collégiaux des collectivités territoriales et de leurs groupements constituent des actes faisant grief et pouvant faire l’objet d’un recours en annulation ;

 – en l’espèce, il s’infère des termes de la délibération attaquée qu’il est décidé, d’une part, de réaliser l’objet social de la structure par la voie d’une prise de participations financières dans une société d’économie mixte (SEM), et d’autre part de confier au Président du syndicat mixte Trifyl le soin de fixer les modalités de création de la SEM ;

 – sur le fond, elle entend reprendre en appel l’ensemble des moyens qu’elle a soulevés en première instance à l’encontre de la délibération du Trifyl du 8 avril 2016 ;

 – à cet égard, la délibération est entachée d’un vice de procédure dès lors qu’il n’est pas établi que le Trifyl aurait fait parvenir une convocation régulière au domicile des membres du comité syndical dans un délai de cinq jours francs avant la séance du 8 avril 2016, conformément aux dispositions de l’article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, applicables au Trifyl en vertu de l’article L. 5211-1 du même code, ce qui explique probablement pourquoi seuls 18 des 33 membres du comité syndical étaient présents lors de cette séance ;

 – en outre, les membres du comité syndical n’ont a fortiori pas reçu la note de synthèse prévue par les dispositions de l’article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, ce qui constitue un vice substantiel les ayant privé d’une garantie, puisqu’ils n’ont pu disposer d’une information suffisante afin d’exercer pleinement leurs prérogatives, alors que l’externalisation des compétences du Trifyl constitue une décision majeure impactant fondamentalement ses conditions de fonctionnement ;

 – en tout état de cause, à supposer même que les membres du comité syndical auraient reçu une convocation assortie de la note de présentation produite par le Trifyl, cette note ne peut être regardée comme ayant apporté une information suffisante des conseillers concernés, dès lors qu’elle se borne à rappeler les conditions procédurales relatives à la réalisation de l’objet social du Trifyl par la prise de participation dans une SEM et ne contient aucune information sur les enjeux majeurs liés à la réalisation de l’objet social du Trifyl par la voie d’une externalisation, qui entre en contradiction avec les objectifs fixés par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;

 – le comité syndical du Trifyl ne pouvait décider, par une simple modification des statuts, de la réalisation de l’objet du syndicat mixte par une prise de participation financière dans une SEM, sans méconnaître les dispositions de l’article L. 5721-5 du code général des collectivités territoriales, dès lors que de telles modalités doivent nécessairement être fixées par la décision institutive du syndicat mixte et qu’en vertu de la règle du parallélisme des formes et des procédures, l’ensemble des membres du Trifyl devaient, par le biais de leurs organes délibérants respectifs, se prononcer sur ce point ;

 – cette même délibération a été édictée par une autorité incompétente dès lors qu’ainsi qu’il vient d’être dit, la prise de participations dans une SEM devait être inscrite dans l’acte institutif du syndicat mixte, après délibération des différents membres du Trifyl, et ne pouvaitrésulter d’une simple délibération du comité syndical ;

 – le comité syndical, en laissant au président du Trifyl le soin de fixer les modalités de participation du syndicat mixte au capital social de la SEM, alors qu’elles devaient être fixées dans l’acte institutif du Trifyl, a méconnu l’étendue de sa propre compétence ;

 – en tout état de cause, si la Cour de céans venait à considérer que le comité syndical pouvait, par le biais d’une simple modification des statuts, décider de la réalisation de l’objet du Trifyl par voie d’une prise de participation financière dans une SEM, il n’en demeurerait pas moins qu’il ne pouvait abandonner au président du Trifyl la fixation des modalités de participation.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 décembre 2016, le syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés, représenté par Me A…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la communauté d’agglomération Castres-Mazamet sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

 – il résulte de l’application combinée des articles L. 5721-5 et L. 5721-2-1 du code général des collectivités territoriales que la modification des statuts d’un syndicat mixte ouvert ne peut intervenir que par un arrêté préfectoral au vue de la délibération de l’assemblée délibérante, ce qui a été le cas en l’espèce par arrêté préfectoral du 16 juin 2016, si bien qu’ainsi que l’a relevé à juste titre le premier juge, la délibération du Syndicat mixte Trifyl du 8 avril 2016 constituait bien un acte préparatoire audit arrêté ;

 – s’agissant de la légalité de la délibération litigieuse proprement dite, une convocation a été adressée le 1er avril 2016 à l’ensemble des membres, titulaires et suppléants, du comité syndical, ainsi qu’à tous les Présidents qui ne siègent pas au Comité syndical et qui ont des délégués, en vue de la séance du 8 avril 2016, convocation qui présentait l’ordre du jour et était accompagnée d’un CD comprenant l’ensemble des projets de délibération et leurs annexes ;

 – en outre, la convocation de l’ensemble des membres de l’assemblée délibérante du conseil syndical était accompagnée de la note de synthèse imposée par l’article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ;

 – la délibération du 8 avril 2016 n’a jamais eu pour objet d’approuver une quelconque externalisation du financement et de l’exploitation d’une unité de valorisation et de traitement des déchets ménagers résiduels, une telle décision devant faire l’objet d’une délibération particulière du comité syndical qui devra approuver l’ensemble des conditions juridiques et financières d’un éventuelle externalisation du projet et délibérer, le cas échéant, sur toute participation dans une société d’économie mixte, voire une société publique locale, voire même le lancement d’une procédure de délégation de service public, conformément aux articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales ;

 – ainsi, cette délibération constitue uniquement une modification des statuts approuvée par le comité syndical, effectuée dans des conditions dérogatoires au droit commun de l’intercommunalité dont relèvent les syndicats mixtes ouverts ;

 – à cet égard, alors qu’un syndicat mixte ouvert peut choisir soit de laisser ses statuts muets sur la procédure de modification des statuts et donc se voir appliquer les dispositions de l’article L. 5721-2-1 du code général des collectivités territoriales, soit de prévoir une procédure spécifique, les membres du syndicat mixte Trifyl ont décidé, lors de la rédaction des statuts de l’établissement public, de prévoir à son article 7.3 que le comité syndical était compétent pour réformer les présents statuts par délibération de la majorité des deux tiers conformément à cet article L. 5721-2-1 ;

 – la modification contestée des statuts, approuvée par la délibération du 8 avril 2016, porte uniquement sur les modalités éventuelles de gestion d’une partie du service public confié par les collectivités territoriales, ainsi que la possibilité de prendre des participations dans une société d’économie mixte locale ou tout autre organisme et n’a pas pour effet, pour les collectivités membres, de transférer de nouvelles compétences au profit du syndicat mixte, ni de modifier son périmètre d’intervention, de sorte que cette modification ne présente aucune conséquence patrimoniale et financière pour les collectivités ;

 – contrairement à ce que soutient la communauté d’agglomération Castres-Mazamet, l’article L. 5721-5 du code général des collectivités territoriales a seulement pour objet de préciser que le transfert de compétences au profit d’un syndicat mixte ouvert n’entraîne pas ipso facto une liberté de fixer les modalités de gestion du service public qui lui est confié, de sorte que les modalités de gestion doivent être prévues dans les statuts ;

 – il en résulte que le principe du parallélisme des formes ne trouvait pas à s’appliquer et que les délibérations des collectivités membres du syndicat n’étaient pas nécessaires ;

 – enfin, la délibération du 8 avril 2016 n’a pas pour effet de permettre au président du syndicat mixte de décider des modalités de participation dans une société d’économie mixte ou de tout autre organisme mais de l’autoriser à poursuivre les discussions avec les autres partenaires potentiels pour l’établissement du projet de statuts d’une future société d’économie mixte (SEM), voire d’une société publique locale, éventuellement d’un projet de pacte d’actionnaires, du montant du capital social et de la part respective des participations financières de chacun.

Par ordonnance du 5 avril 2018, la clôture de l’instruction a été fixée au 25 avril 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des collectivités territoriales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Axel Basset,

 – et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés dénommé « Trifyl », institué par arrêté du préfet du Tarn du 11 juin 1999, est composé du département du Tarn, de cinq communes, de 16 communautés de communes du département du Tarn, de trois syndicat intercommunaux de traitement et de collecte des ordures ménagères (SICTOM), deux syndicat intercommunaux pour les ordures ménagères (SIPOM) et la communauté d’agglomération Castres Mazamet. Par une délibération du 8 avril 2016, le comité syndical syndicat mixte Trifyl a décidé, à la majorité, de modifier l’article 2 de ses statuts pour lui permettre de réaliser son objet tant par voie d’exploitation directe de services que par le biais de la concession ou de prises de participations financières dans des sociétés d’économie mixte locales ou autres organismes (article 1), puis d’autoriser son président à « réaliser au nom de Trifyl toutes les démarches nécessaires et à prendre tous contacts utiles en vue de la création de la société d’économie mixte locale envisagée » (article 2) et « à déterminer avec les autres partenaires potentiels, le niveau d’implication au capital social de la structure à créer, ainsi qu’à préciser son objet et son champ d’intervention » (article 3). Par cette même délibération, le comité syndical a décidé de mettre à jour la liste, annexée aux statuts, des collectivités adhérentes à Trifyl afin de tenir compte de la fusion du SICTOM du Causse et Ségala-Carmausin et du SICTOM de Pampelonne, au profit de la communauté de communes Ségala-Carmausin (article 4). La communauté d’agglomération Castres Mazamet, qui doit être regardée comme ne contestant que les trois premiers articles de cette délibération du 8 avril 2016, relève appel de l’ordonnance du 11 mars 2016 par laquelle le président du tribunal administratif de Toulouse, statuant sur le fondement des dispositions du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ces dispositions comme manifestement irrecevable.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. D’une part, aux termes de l’article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales : « Un syndicat mixte peut être constitué par accord entre des institutions d’utilité commune interrégionales, des régions, des ententes ou des institutions interdépartementales, des départements, la métropole de Lyon, des établissements publics de coopération intercommunale, des communes, des syndicats mixtes définis à l’article L. 5711-1 ou à l’article L. 5711-4, des chambres de commerce et d’industrie territoriales, d’agriculture, de métiers et d’autres établissements publics, en vue d’oeuvres ou de services présentant une utilité pour chacune de ces personnes morales. / Le syndicat mixte doit comprendre au moins une collectivité territoriale ou un groupement de ces collectivités. (…) / La création du syndicat mixte peut être autorisée par arrêté du représentant de l’Etat dans le département siège du syndicat. / La décision d’autorisation approuve les modalités de fonctionnement du syndicat mixte. (…) ». Aux termes de l’article L. 5721-2-1 de ce code : « Lorsque les statuts n’ont pas prévu une procédure spécifique, les modifications statutaires sont décidées à la majorité des deux tiers des membres qui composent le comité syndical. ». L’article L. 5721-5 dudit code dispose : « Le syndicat mixte peut réaliser son objet notamment par voie d’exploitation directe ou par simple participation financière dans des sociétés ou organismes dans les mêmes conditions que les départements ou les communes. / Dans ce dernier cas, les modalités de cette participation sont fixées par la décision institutive. ».

3. D’autre part, aux termes de l’article 1 des statuts du syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés Trifyl, révisés en dernier lieu par délibération du comité syndical du 11 mai 2015 : « Conformément aux dispositions des articles L. 5721-1 et suivants du code général des collectivités territoriales régissant les syndicats mixtes, il est institué entre les communes, les établissements publics de coopération intercommunale dont la liste est annexée, et le Département du Tarn, un syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers prenant la dénomination » Trifyl «   ». Aux termes de l’article 2 de ces statuts : " Dans le cadre du plan départemental d’élimination des déchets ménagers et assimilés du Tarn, Trifyl a pour objet, d’une part toutes études relatives à la valorisation et au traitement des déchets et, d’autre part, la valorisation multifilières et le traitement des déchets collectés par les collectivités membres qui s’engagent à lui confier à la fois leurs déchets destinés à la valorisation matière et organique et leurs déchets destinés à la valorisation énergétique. / Pour l’exercice de ses compétences, Trifyl assurera en lieu et place des communes et établissements publics de coopération intercommunale membres, la maîtrise d’ouvrage et l’exploitation : A – de plates-formes de valorisation de déchets principales et secondaires, rattachées fonctionnellement aux précédentes (…) / B – d’une ou plusieurs unités de valorisation énergétique mettant en oeuvre des technologies non polluantes en vue de la production de ressources renouvelables comme le biogaz et tous ses dérivés (méthane, hydrogène, etc….), le combustible bois, et toute autre ressource renouvelable, et de leur exploitation dans le but de produire de l’énergie renouvelable (électricité notamment), permettant d’une part d’atténuer les coûts de traitement des déchets, et d’autre part de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique et l’effet de serre dans le cadre d’une politique raisonnée de développement durable. (…) / C – de centres de stockage pour les besoins de la période transitoire comprise entre la création du syndicat mixte et la mise en service du dispositif de valorisation énergétique mentionnée au paragraphe précédent ; / D – du transport des déchets depuis les quais de transfert vers les installations de valorisation énergétique ou de stockage ; E – de centres de stockage de résidus ultimes. « . Aux termes de l’article 7.1 desdits statuts : » Trifyl est administré par un comité syndical composé des délégués élus par les collectivités membres et de personnalités qualifiées répartis au sein de trois collèges : le collège des collectivités disposant de la compétence déchets (…) / Le collège du département du Tarn (…) / Le collège des personnalités qualifiées (…) « . En vertu de l’article 7.3 de ces mêmes statuts : » Le comité syndical est compétent pour réformer les présents statuts par délibération à la majorité des deux tiers de ses membres conformément aux dispositions de l’article L. 5721-2-1 du code général des collectivités territoriales. « . Enfin, aux termes de l’article 14 de ces statuts : » Pour tout ce qui n’est pas expressément prévu dans les présents statuts, seront appliquées les dispositions des articles L. 5211-1 à L. 5212-34 du code général des collectivités territoriales. ".

4. Ainsi qu’il l’expose lui-même dans ses écritures, le syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés « Trifyl » a souhaité, à la suite de l’entrée en vigueur de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, déléguer la réalisation et l’exploitation d’une future usine de traitement et de valorisation des déchets ménagers résiduels, dans le cadre d’une concession de service public, auprès d’une structure dont le statut juridique resterait à déterminer, sous la forme d’une société d’économie mixte (SEM) locale ou de tout autre organisme, au sein de laquelle le syndicat mixte serait amené à prendre des participations financières. A cet effet, le comité syndical a décidé, par l’article 1 de la délibération litigieuse du 8 avril 2016, de modifier l’article 2 des statuts de Trifyl, en précisant que : « Trifyl peut réaliser son objet par tout moyen et notamment par voie d’exploitation directe de services, de concession ou par la voie de prise de participations financières dans des sociétés d’économie mixte locales ou autres organismes, lorsqu’une telle participation est rendue possible par des dispositions légales ou réglementaires », puis d’autoriser son président, d’une part, à réaliser au nom de Trifyl toutes les démarches nécessaires et à prendre tous contacts utiles en vue de la création de la société d’économie mixte locale envisagée « (article 2) et, d’autre part, » à déterminer avec les autres partenaires potentiels, le niveau d’implication au capital social de la structure à créer, ainsi qu’à préciser son objet et son champ d’intervention " (article 3).

5. En premier lieu, il ressort des termes mêmes des articles 2 et 3 de la délibération du 8 avril 2016, qui sont divisibles de son article 1, qu’ils ont pour seul objet de permettre au président du syndicat mixte d’effectuer les démarches nécessaires et conduire les discussions avec les partenaires susceptibles d’être concernés par le projet de mise en place de la future usine de traitement et de valorisation des déchets ménagers résiduels envisagée dans le cadre d’une concession de service public, et non de l’habiliter à valider et entériner seul ce projet, qui ne pourra l’être que par des décisions ultérieures, dans le respect des règles de compétence et de procédure définies tant par le code général des collectivités territoriales que les statuts de Trifyl. Dès lors, les articles 2 et 3 contenus dans cette délibération ne constituent que des actes préparatoires aux décisions à venir et, partant, sont insusceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Il s’ensuit que les conclusions tendant à leur annulation sont irrecevables et doivent être rejetées pour ce motif.

6. En second lieu, si l’article 1 de la délibération du 8 avril 2016 n’emporte pas, par lui-même, la création d’une société d’économie mixte ou d’une quelconque structure à qui seraient confiées les missions que le syndicat mixte s’est donné vocation à exercer, en revanche, cet article a pour objet et pour effet, ainsi que le reconnaît le syndicat intimé, de modifier les stipulations de l’article 2 des statuts, précitées au point 3, afin de lui permettre de réaliser son objet autrement que par voie d’exploitation directe, soit par la voie de la concession, soit par la voie de prise de participations financières dans des sociétés d’économie mixte locales ou autres organismes. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que pour procéder de lui-même à une telle modification statutaire, le comité syndical s’est fondé sur l’article 7.3 des statuts, en adoptant une délibération à la majorité des deux tiers de ses membres, conformément aux dispositions de l’article L. 5721-2-1 du code général des collectivités territoriales. Contrairement à ce qu’a relevé le premier juge, en se fondant d’ailleurs à tort sur les dispositions de l’article L. 5211-17 du même code relatif aux transferts de tout ou partie des compétences des communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale au profit de celui-ci, l’article 1 formalise la décision du comité syndical de modifier les statuts de Trifyl et revêt donc, par lui-même, des effets juridiques. Dès lors, il est susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. D’ailleurs, l’arrêté du préfet du Tarn du 16 juin 2016 produit pour la première fois en appel par le syndicat mixte se borne, en son article 1, à " [prendre] acte de la modification de l’article 2 de l’arrêté susvisé du 13 avril 1999 (…) " déjà adoptée par la délibération du 8 avril 2016, et non à autoriser une telle modification. Il s’ensuit que l’appelante est fondée à soutenir que c’est à tort que le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté comme irrecevables ses conclusions dirigées contre l’article 1 de la délibération du 8 avril 2016. Par suite, et sans qu’il soit besoin de statuer sur l’autre moyen relatif à sa régularité, et tiré de son caractère insuffisamment motivé, l’ordonnance attaquée doit être annulée dans cette mesure.

7. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le tribunal administratif de Toulouse afin que la requérante bénéficie du double degré de juridiction et qu’il soit statué à nouveau sur la demande de la communauté d’agglomération Castres-Mazamet en tant qu’elle tend à l’annulation de l’article 1 de la délibération du 8 avril 2016.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d’agglomération Castres-Mazamet, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés « Trifyl » demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du syndicat mixte intimé la somme que la communauté d’agglomération Castres-Mazamet demande sur le fondement de ces mêmes dispositions.


DECIDE :


Article 1er : L’ordonnance n° 1602351 du 29 août 2016 du président du tribunal administratif de Toulouse est annulée est tant qu’elle a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre l’article 1 de la délibération du 8 avril 2016.

Article 2 : L’affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Toulouse dans cette mesure.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions du syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés « Trifyl » tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d’agglomération Castres-Mazamet et au syndicat mixte départemental pour la valorisation des déchets ménagers et assimilés « Trifyl ». Copie en sera transmise au préfet du Tarn.

Délibéré après l’audience du 8 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président assesseur,
M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2018.


Le rapporteur,

Axel BassetLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

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N° 16BX03252

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