CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 17 février 2022, 20BX00232, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 1re ch., 17 févr. 2022, n° 20BX00232
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 20BX00232
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Poitiers, 18 novembre 2019, N° 1701854, 1702592, 1900218
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045188666

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’association Stand angoumoisin a demandé au tribunal administratif de Poitiers d’annuler la délibération du 30 mars 2017 par laquelle la communauté d’agglomération du Grand Angoulême l’a autorisée à occuper temporairement le complexe de tir situé lieu-dit des Trois-Chênes à Angoulême, moyennant une redevance de 1 500 euros par an, d’annuler le titre exécutoire émis le 31 août 2017 pour un montant de 524,03 euros correspondant au premier acompte de la redevance pour occupation du domaine public de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême au titre de l’année 2017 et de prononcer la décharge de l’obligation de payer cette somme, et d’annuler le titre exécutoire émis le 14 décembre 2018 pour un montant de 1 500 euros correspondant à la redevance pour occupation du domaine public de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême au titre de l’année 2018 et de prononcer la décharge de l’obligation de payer cette somme.

Par un jugement n° 1701854, 1702592, 1900218 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 16 janvier 2020 et le 5 mai 2020, l’association Stand angoumoisin, représentée par la SCP KPL Avocats, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 novembre 2019 ;

2°) d’annuler la délibération de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême du 30 mars 2017 ;

3°) d’annuler le titre exécutoire du 31 août 2017 et de la décharger de l’obligation de payer la somme de 524,03 euros ;

4°) d’annuler le titre exécutoire du 9 avril 2019 et de la décharger de l’obligation de payer la somme de 1 500 euros ;

5°) de mettre à la charge de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – la délibération du 30 mars 2017 ne peut être regardée comme étant un acte réglementaire, et la date de sa publication n’a pas fait courir les délais de recours contentieux ; elle n’a par ailleurs jamais reçu la lettre de notification de cette délibération, qui ne mentionnait pas les voies et délais de recours ;

 – les conseillers communautaires n’ont pas été régulièrement convoqués, dès lors qu’il n’est pas établi que les conseillers qui ont reçu la convocation à une adresse différente de leur domicile avaient donné leur accord ou que les personnes qui les ont reçues étaient mandatées pour ce faire ;

 – en l’absence de note explicative de synthèse, le projet de délibération adressé aux conseillers communautaires ne leur a pas permis d’appréhender le contexte factuel et juridique relatif à l’occupation du stand de tir par l’association ;

 – la délibération a été adoptée par une autorité incompétente, dès lors que seul le président de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême pouvait délivrer une autorisation d’occupation temporaire du domaine public ;

 – la délibération du 30 mars 2017 est illégale dès lors que la délibération du conseil municipal d’Angoulême du 5 octobre 1934 autorisait l’association Stand angoumoisin à occuper cet équipement sportif ;

 – le titre exécutoire du 31 août 2017 se fonde sur la délibération de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême du 30 mars 2017, qui est illégale ;

 – le titre exécutoire du 9 avril 2019 se fonde sur la délibération de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême du 30 mars 2017, qui est illégale.

Par un mémoire, enregistré le 3 mars 2020, le directeur départemental des finances publiques de la Charente fait valoir qu’étant seulement chargé du recouvrement des créances, il ne peut intervenir qu’en qualité d’observateur.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er avril 2020, la communauté d’agglomération du Grand Angoulême, représentée par Me Mokhtar, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de l’association Stand angoumoisin la somme de 8 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

 – le recours dirigé contre la délibération du 30 mars 2017 est tardif, dès lors que cette délibération a été affichée le 6 avril 2017, et a été notifiée à l’association Stand angoumoisin le 28 avril 2017 par un courrier du 21 avril 2017 ;

 – les moyens de l’association Stand angoumoisin ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l’arrêt était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office, tiré de l’irrecevabilité des conclusions dirigées contre la délibération du 30 mars 2017 en tant qu’elle « accorde » une autorisation d’occupation temporaire du domaine public, dès lors que cette délibération, qui se borne à approuver le principe d’une autorisation d’occupation temporaire du domaine public, ne constitue pas un acte faisant grief.

Par un mémoire enregistré le 10 décembre 2021, l’association Stand angoumoisin, représentée par la SCP KPL Avocats, a présenté des observations en réponse à ce moyen.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des collectivités territoriales ;

 – le code général de la propriété des personnes publiques ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Charlotte Isoard,

 – les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

 – et les observations de Me Kolenc, représentant l’association Stand angoumoisin, et de Me Bajn, représentant la communauté d’agglomération du Grand Angoulême.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte notarié des 29 janvier et 1er février 1935, l’association Stand angoumoisin a cédé à la commune d’Angoulême un ensemble immobilier situé lieu-dit des Trois Chênes, rue Paul Vieille à Angoulême, d’une superficie d’environ quatre hectares, comprenant plusieurs stands de tir et des bâtiments annexes. La gestion de cet équipement a été transférée à la communauté d’agglomération du Grand Angoulême à la suite du transfert de la compétence « gestion des équipements culturels et sportifs d’intérêt communautaire » opéré par un arrêté du 18 décembre 1999 et à la reconnaissance de l’intérêt communautaire du stand de tir par la délibération du conseil communautaire du 28 janvier 2000. L’association Stand angoumoisin relève appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant à l’annulation de la délibération du 30 mars 2017 en tant qu’elle lui « accorde » une autorisation d’occupation temporaire du domaine public, à l’annulation du titre exécutoire émis le 31 août 2017 pour un montant de 524,03 euros correspondant au premier acompte de la redevance au titre de l’année 2017 et à la décharge de cette somme, et à l’annulation du titre exécutoire émis le 9 avril 2019 pour un montant de 1 500 euros correspondant au montant de la redevance au titre de l’année 2018 ainsi qu’à la décharge de cette somme.

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la délibération du 30 mars 2017 :

2. Il ressort des pièces du dossier que la délibération du conseil communautaire du Grand Angoulême du 30 mars 2017, d’une part, se borne à approuver le principe d’une autorisation d’occupation temporaire du domaine public, constitué par le stand de tir, au bénéfice de l’association Stand angoumoisin et, d’autre part, fixe le montant de la redevance d’occupation pour cet ensemble sportif. Par ailleurs, le président de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême a ultérieurement accordé, par une décision du 7 avril 2017, l’autorisation temporaire d’occupation du domaine public à l’association Stand angoumoisin. Par suite, le conseil communautaire du Grand Angoulême ne peut être regardé comme ayant, par cette délibération, malgré sa rédaction maladroite, accordé ladite autorisation. Dès lors, les conclusions de l’association requérante dirigées contre la délibération du 30 mars 2017 en tant qu’elle « accorde » une autorisation d’occupation du domaine public sont irrecevables.

Sur la légalité des titres de perceptions émis le 31 août 2017 et le 9 avril 2019 :

3. L’association Stand angoumoisin invoque, par la voie de l’exception, l’illégalité de la délibération du 30 mars 2017 du conseil communautaire de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême, sur laquelle se fondent les titres de perception litigieux. Contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, cette délibération, qui vise expressément l’association requérante et fixe un montant de redevance de 1 500 euros au regard de ses conditions d’occupation du domaine public, ne revêt pas un caractère réglementaire.

4. En premier lieu, aux termes de l’article L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales : « Les dispositions du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au fonctionnement du conseil municipal sont applicables au fonctionnement de l’organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu’elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. (…) ». Aux termes de l’article L. 2121-10 de ce code : « Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l’ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est transmise de manière dématérialisée ou, si les conseillers municipaux en font la demande, adressée par écrit à leur domicile ou à une autre adresse. ». Et aux termes de l’article L. 2121-12 du même code : « Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. (…) Le délai de convocation est fixé à cinq jours francs. (…) ».

5. Il ressort des pièces du dossier que tous les conseillers communautaires étaient présents ou représentés lors de la séance du 30 mars 2017 et que la délibération en cause a été adoptée à l’unanimité. Ainsi, à supposer que la convocation des membres du conseil communautaire ait été irrégulière, cette circonstance ne peut être regardée, en l’espèce, comme ayant été susceptible d’avoir exercé une influence sur le sens de la délibération.

6. En deuxième lieu, il est constant que la convocation du 23 mars 2017 n’était pas assortie de la note explicative de synthèse prévue à l’article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, mais, en ce qui concerne l’équipement sportif en cause, d’un projet de délibération. Au regard de la nature et de l’importance de l’affaire, ce projet de délibération a permis aux conseillers communautaires d’appréhender le contexte, les motifs de fait et de droit des mesures envisagées, et de mesurer les implications de leur décision, alors même que ce projet ne mentionnait pas que l’association Stand angoumoisin contestait être occupante sans titre de cet équipement. Ainsi, l’obligation prévue par l’article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales doit être regardée comme étant remplie.

7. En troisième lieu, en l’absence de réglementation particulière, toute autorité gestionnaire du domaine public est compétente, sur le fondement des dispositions des articles L. 2122-1, L. 2125-1 et L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, pour fixer le tarif de la redevance due en contrepartie de cette occupation, en tenant compte des avantages de toute nature que le titulaire de l’autorisation est susceptible de retirer de cette occupation.

8. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le conseil communautaire de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême s’est borné, dans la délibération du 30 mars 2017, à autoriser le principe de la délivrance d’une autorisation temporaire du domaine public au Stand angoumoisin, sans toutefois délivrer lui-même cette autorisation. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence du conseil communautaire pour délivrer une telle autorisation doit être écarté comme inopérant. En revanche, le conseil communautaire était compétent, en vertu des articles du code général de la propriété des personnes publiques cités ci-dessus, pour fixer un prix de redevance pour l’occupation du domaine public constitué par l’équipement sportif en cause de 1 500 euros par an.

9. Enfin, ainsi que l’ont relevé les premiers juges, avant l’entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques le 1er juillet 2006, l’appartenance d’un bien au domaine public était, sauf si ce bien était directement affecté à l’usage du public, subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné.

10. Les parcelles acquises par la commune d’Angoulême les 29 janvier et 1er février 1935, qui supportaient avant cette date des équipements pour la pratique du tir, ont été affectées, dès leur acquisition, au service public d’activités sportives et de loisirs, ainsi qu’en témoigne la délibération du conseil municipal du 5 octobre 1934 qui envisageait que le terrain devienne, en passant dans le domaine de la commune, un « stand municipal » et soit affecté à la pratique du tir et de l’éducation sportive, notamment pour les enfants des écoles. Ainsi, dès la vente de 1935, le terrain en litige, qui était affecté à un service public et était spécialement aménagé pour l’exécution de ce service public, a été incorporé au domaine public de la commue d’Angoulême.

11. Dans ces conditions, à supposer que les procès-verbaux des réunions du 21 mars 1934 et du 21 janvier 1935 de l’association Stand angoumoisin, qui ont été annexés à l’acte de vente du 29 janvier et 1er février 1935 et selon lesquels il avait été convenu que l’association conserve la jouissance du complexe cédé à la commune, puissent être regardés comme constituant une clause du contrat de vente, une telle clause, qui emporte pour l’association un droit d’utilisation perpétuel des installations, serait incompatible avec le régime de la domanialité publique, notamment en ce qui concerne le caractère précaire et révocable des titres d’occupation du domaine public. Par suite, l’association n’est pas fondée à se prévaloir de l’existence de cette clause pour soutenir qu’elle disposait, en vertu du contrat de vente, d’un droit d’occuper le complexe sportif en cause à titre gratuit.

12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 à 11 que l’association Stand angoumoisin n’est pas fondée à soulever, par la voie de l’exception, l’illégalité de la délibération du 30 mars 2017 à l’encontre des titres exécutoires du 31 août 2017 et du 9 avril 2019.

13. Il résulte de tout ce qui précède que l’association Stand angoumoisin n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant à l’annulation de la délibération du 30 mars 2017, à l’annulation des titres exécutoires du 31 août 2017 et du 9 avril 2019, ainsi qu’à la décharge des sommes correspondantes.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d’agglomération du Grand Angoulême, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l’association Stand angoumoisin demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de cette association une somme 1 500 euros à verser à la communauté d’agglomération du Grand Angoulême, en application de ces mêmes dispositions.


DECIDE :


Article 1er : La requête de l’association Stand angoumoisin est rejetée.


Article 2 : L’association Stand angoumoisin versera à la communauté d’agglomération du Grand Angoulême une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l’association Stand Angoumoisin et à la communauté d’agglomération du Grand Angoulême.

Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques de la Charente.


Délibéré après l’audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.


Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2022.


La rapporteure,


Charlotte IsoardLa présidente,


Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier


La République mande et ordonne au préfet de la Charente en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

N° 20BX00232 2

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