CAA de MARSEILLE, 6ème chambre, 21 décembre 2020, 19MA03939, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 6e ch., 21 déc. 2020, n° 19MA03939
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 19MA03939
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 17 juin 2019, N° 1506966
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000042712939

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Fos-sur-Mer et M. G… ont demandé au tribunal administratif de Marseille, d’une part, d’annuler la délibération n° FCT 015-1104/15/CC du 3 juillet 2015 par laquelle la communauté urbaine Marseille Provence métropole a approuvé l’avenant n° 4 à la convention de délégation de service public conclu entre cet établissement et la société EVERE, d’autre part, d’enjoindre à la communauté urbaine Marseille Provence métropole de ne pas signer cet avenant et, dans l’hypothèse où cet avenant serait signé avant que le tribunal statue, de prononcer sa résolution.

Par un jugement n° 1506966 du 18 juin 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 août 2019, la commune de Fos-sur-Mer, représentée par Me D…, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d’annuler la délibération n° FCT 015-1104/15/CC du 3 juillet 2015 ;

3°) d’annuler l’avenant n° 4 à la convention de délégation de service public ;

4°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la métropole Aix-Marseille Provence en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – sa demande devant le tribunal était recevable dès lors que la conclusion du contrat approuvé par la délibération litigieuse était postérieure au 4 avril 2014 ;

 – elle avait intérêt à agir en sa qualité de futur membre de l’établissement public de coopération intercommunale ;

 – les conseillers communautaires n’ayant pas été convoqués dans les conditions prévues par l’article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales et n’ayant pas reçu la note de synthèse prévue par les dispositions des articles L. 5211-1 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, la procédure suivie a été irrégulière ;

 – le rapport de présentation de la délibération et le préambule de l’avenant sont de nature à induire les membres de l’assemblée délibérante en erreur car ils présentent l’avenant comme n’apportant que des modifications limitées alors que ses articles 2, 6, 20, 25 et 28 modifient en profondeur les obligations contractuelles ;

 – le rapport de présentation de la délibération et le préambule de l’avenant sont de nature à induire les membres de l’assemblée délibérante en erreur sur la portée des modifications introduites par le protocole transactionnel approuvé par délibération du 10 avril 2015 ;

 – la délibération est illégale car l’article 6 de l’avenant prévoit la réalisation d’une tranche supplémentaire alors que l’option le permettant dans le contrat initial était caduque depuis le 5 juillet 2011 et il modifie ainsi le contrat dans des conditions qui imposaient une nouvelle mise en concurrence ;

 – la délibération est illégale car les modifications introduites par le protocole transactionnel, la création d’une part proportionnelle au sein de la redevance d’exploitation, la création d’une clause de progrès, la suppression de l’intéressement de la communauté urbaine Marseille Provence métropole et les modifications introduites dans les modalités de révision de la rémunération du délégataire modifient le contrat dans des conditions qui imposaient une nouvelle mise en concurrence ;

 – la délibération est illégale car l’avenant modifie la convention de délégation de service public initiale qui, n’ayant pas été modifiée après l’annulation des actes détachables qui l’approuvaient initialement, demeure illégale, de telle sorte qu’elle est entachée des mêmes illégalités que la délibération du 19 février 2009 ;

 – pour ces motifs, l’avenant lui-même est illégal.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2020, la métropole Aix-Marseille Provence, représentée par Me A…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Fos-sur-Mer en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – la requête d’appel est irrecevable car la commune de Fos-sur-Mer ne soulève aucun moyen d’appel ;

 – la requête d’appel est irrecevable car elle est dirigée contre un projet de contrat et un acte détachable autorisant sa conclusion et non contre un contrat ;

 – la commune de Fos-sur-Mer n’a pas intérêt à agir contre le contrat ;

 – les moyens soulevés par la commune de Fos-sur-Mer ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 septembre 2020, la société EVERE, représentée par Me I…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Fos-sur-Mer en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – les conclusions d’appel dirigées contre l’avenant n° 4 sont nouvelles et dès lors irrecevables en appel ;

 – la commune de Fos-sur-Mer n’a pas intérêt à agir contre l’avenant n° 4 ;

 – la requête d’appel est irrecevable car la commune de Fos-sur-Mer ne produit pas le contrat qu’elle entend attaquer ;

 – à supposer que la demande de première instance puisse être regardée contre le contrat, ces conclusions étaient prématurées ;

 – les moyens soulevés par la commune de Fos-sur-Mer ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 1er octobre 2020, la clôture de l’instruction a été fixée au 10 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. F… Grimaud, rapporteur,

 – les conclusions de M. C… Thielé, rapporteur public,

 – et les observations de Me E…, représentant la commune de Fos-sur-Mer, de Me B…, représentant la métropole Aix-Marseille Provence et de Me J…, représentant la société EVERE.

Une note en délibéré présentée pour la commune de Fos-sur-Mer a été enregistrée le 8 décembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 20 décembre 2003, le conseil communautaire de la communauté urbaine Marseille Provence métropole a approuvé, d’une part, le principe de la gestion déléguée comme mode de gestion du service public de traitement des déchets par incinération ainsi que les principales caractéristiques de la délégation de service public, et d’autre part, l’option technique de traitement des déchets par incinération ainsi que la localisation géographique des futures installations sur un terrain appartenant au Port autonome de Marseille et situé sur la commune de Fos-sur-Mer. Par une délibération du 13 mai 2005, cette assemblée délibérante a approuvé le choix du délégataire du service public, le contrat de délégation de service public et ses annexes, la cession du contrat de délégation de service public au profit de la société dédiée que le groupement d’entreprises délégataires s’engageait à créer, a autorisé le président de la communauté urbaine à signer le contrat de délégation de service public et ses annexes, et a accepté la cession de créance consentie par le délégataire à un organisme de crédit-bail. Par une convention de délégation de service public en date du 18 juillet 2005, la communauté urbaine Marseille Provence métropole a confié à un groupement d’entreprises composé des sociétés Urbaser et Valorga International, la réalisation d’un centre de traitement des déchets. La société EVERE, créée par les sociétés Urbaser et Valorga International en vue de l’exploitation du site en qualité de délégataire, s’est ensuite vu céder ce contrat. A la suite de l’annulation de la délibération du 13 mai 2005 par le tribunal administratif de Marseille, le conseil communautaire a adopté le 19 février 2009 une délibération AGER n° 001 réitérant l’approbation du choix du délégataire du service public, le contrat de délégation de service public et ses annexes, la cession du contrat de délégation de service public au profit de la société dédiée et autorisant le président de la communauté urbaine à signer le contrat de délégation de service public et ses annexes ainsi que la cession de créance consentie par le délégataire à un organisme de crédit-bail. A la suite de différends nés de difficultés d’exécution de cet ensemble contractuel, la communauté urbaine Marseille Provence métropole et la société EVERE ont négocié un protocole transactionnel destiné à remédier à ces litiges pour la période courant jusqu’au 31 décembre 2014. Afin de remédier aux différends subsistant pour la période postérieure au 31 décembre 2014, les parties ont convenu de les régler pour l’avenir dans le cadre d’un avenant n° 4. Par délibération du 3 juillet 2015, le conseil communautaire a approuvé cet avenant à la convention de délégation de service public.

Sur la régularité du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la délibération approuvant le contrat :

2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’État dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité. Ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d’un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer ne peut être contestée qu’à l’occasion du recours ainsi défini.

3. Le recours ci-dessus défini ne peut être exercé par les tiers qui n’en bénéficiaient pas et selon les modalités précitées qu’à l’encontre des contrats signés à compter du 4 avril 2014.

4. Il résulte de l’instruction que l’avenant a été conclu après le 3 juillet 2015. Il en résulte que tant ce contrat que la délibération l’approuvant n’étaient susceptibles d’être contestés que par la voie du recours de plein contentieux défini au 2 ci-dessus. Il s’ensuit que la commune de Fos-sur-Mer n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à l’annulation de la délibération du 3 juillet 2015.

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le contrat :

5. En premier lieu, aux termes des dispositions du I de l’article L. 5218-1 du code général des collectivités territoriales : « Par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 5217-1, la métropole d’Aix-Marseille-Provence regroupe l’ensemble des communes membres de la communauté urbaine Marseille Provence métropole, de la communauté d’agglomération du Pays d’Aix-en-Provence, de la communauté d’agglomération Salon Étang de Berre Durance, de la communauté d’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Etoile, du syndicat d’agglomération nouvelle Ouest Provence et de la communauté d’agglomération du Pays de Martigues. ». En vertu du II de l’article 42 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles « La métropole d’Aix-Marseille-Provence visée à l’article L. 5218-1 du code général des collectivités territoriales est créée au 1er janvier 2016. ».

6. A la date de l’introduction de la demande de la commune de Fos-sur-Mer devant le tribunal administratif de Marseille, la métropole Aix-Marseille Provence, ultérieurement substituée à la communauté urbaine Marseille Provence métropole en qualité d’autorité délégante, n’avait pas été instituée, et la requérante, alors membre du syndicat d’agglomération nouvelle Ouest Provence, n’en était que l’un des futurs membres. La commune de Fos-sur-Mer est toutefois devenue membre de cet établissement public de coopération intercommunale en cours d’instance. Si cette seule qualité, qui n’est pas assimilable à celle de membre de l’assemblée délibérante de cet établissement, ne saurait en elle-même lui donner intérêt à agir à l’encontre de l’avenant attaqué, la commune peut utilement faire état, pour établir son intérêt à agir, de la dégradation de ses relations financières avec la métropole Aix-Marseille Provence, inhérente selon elle à la conclusion de l’avenant en cause. Néanmoins, alors qu’elle appartient à la métropole Aix-Marseille Provence depuis plus de quatre ans à la date à laquelle la Cour statue, la requérante se borne sur ce point à invoquer cette dégradation sans établir ni la nature, ni l’ampleur de l’incidence de l’exécution de ce contrat sur les finances de l’établissement, ni les conséquences éventuelles ou effectives de cette incidence sur ses propres finances dans le cadre de ses relations budgétaires avec la métropole, dont le budget n’est au demeurant pas alimenté par des dotations apportées par les communes membres mais par une fiscalité propre à l’établissement, en vertu des dispositions de l’article L. 5215-32 du code général des collectivités territoriales, rendues applicables aux métropoles par l’article L. 5217-2 du même code. La commune de Fos-sur-Mer n’est donc pas fondée à soutenir qu’elle aurait, pour ce motif, intérêt à agir contre le contrat attaqué.

7. En deuxième lieu, si la commune de Fos-sur-Mer fait valoir que les modifications introduites au sein du contrat de délégation de service public par les articles 6, 38 et 39 ont une incidence sur l’environnement sur le territoire communal, il résulte de l’instruction que l’article 6 de l’avenant se borne à modifier l’article 9 du contrat de délégation de service public en vue d’assurer que la création d’une unité de traitement supplémentaire, qui demeurait possible à la date de conclusion de l’avenant, puisse être assurée par le délégant. S’agissant de la modification introduite par l’article 38 au sein de l’article 4.2.2 de l’annexe 6 du contrat de délégation de service public, il résulte de l’instruction qu’elle substitue deux modes de mesure de la teneur des gaz de combustion de l’usine en monoxyde de carbone qui ne diffèrent que par la durée de mesure de cette teneur au cours d’une période de référence moyenne. Enfin, si l’article 39 du contrat supprime les stipulations de l’article 4.2.3 de l’annexe 6 relative à l’absence de panache en sortie des cheminées de l’installation, il résulte de l’instruction que cette modification n’a aucune incidence sur la consistance des fumées ou leur teneur mais simplement sur leur apparence visuelle. Il en résulte que la commune de Fos-sur-Mer n’est pas susceptible d’être lésée dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par ces clauses.

8. Si, en troisième lieu, la commune de Fos-sur-Mer a fait valoir dans la demande présentée devant le tribunal qu’une commune ayant la qualité contribuable départemental a intérêt à agir contre une délibération du conseil départemental, elle ne précise pas, en l’espèce, de quelle personne morale et de quel impôt elle serait la débitrice et en quoi cette circonstance serait de nature à lui conférer un intérêt à agir contre le contrat attaqué.

9. En dernier lieu, la commune de Fos-sur-Mer ne démontre nullement que les clauses de l’avenant n° 4 au contrat de délégation de service public auraient une incidence sur le produit ou les modalités de perception de la taxe sur les déchets ménagers réceptionnés dans une installation de stockage ou d’incinération de déchets ménagers instaurée par la commune de Fos-sur-Mer. Son intervention ne lèse donc pas davantage, sur ce point, les intérêts de la commune.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Fos-sur-Mer n’est pas recevable à demander l’annulation de l’avenant n° 4. Elle n’est dès lors pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté ses conclusions dirigées contre ce contrat. Sa requête d’appel ne peut donc être que rejetée, sans qu’il soit besoin de statuer sur sa recevabilité.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative s’opposent à ce que la somme réclamée par la commune de Fos-sur-Mer sur leur fondement soit mise à la charge de la métropole Aix-Marseille Provence, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance engagée devant le tribunal. Il y a lieu en revanche de mettre une somme de 500 euros à la charge de la commune de Fos-sur-Mer en application de ces mêmes dispositions, à verser d’une part à la métropole Aix-Marseille Provence et, d’autre part, à la société EVERE.


D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Fos-sur-Mer est rejetée.

Article 2 : La commune de Fos-sur-Mer versera une somme de 500 euros à la métropole Aix-Marseille Provence et une somme de 500 euros à la société EVERE en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fos-sur-Mer, à la métropole Aix-Marseille Provence et à la société EVERE.

Délibéré après l’audience du 7 décembre 2020, où siégeaient :

— M. Guy Fédou, président,

 – Mme H… K…, présidente assesseure,

 – M. F… Grimaud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 décembre 2020.

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N° 19MA03939

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