CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 17 octobre 2023, 23MA00240, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 4e ch.-formation à 3, 17 oct. 2023, n° 23MA00240
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 23MA00240
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 4 décembre 2022, N° 2009152
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 25 octobre 2023
Identifiant Légifrance : CETATEXT000048247134

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A C a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler la décision du 1er octobre 2020 par laquelle le président-directeur général du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle et de mettre à la charge de cet établissement la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2009152 du 5 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 27 janvier, 2 mai et 26 juin 2023, Mme C, représentée par Me Freichet, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 décembre 2022 ;

2°) d’annuler cette décision du président-directeur général du CNRS du 1er octobre 2020 ;

3°) d’enjoindre au CNRS, en application des dispositions des articles L. 911-1, L. 911-1-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, de procéder à la reconstitution de sa carrière ;

4°) de mettre à la charge du CNRS la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le tribunal administratif de Marseille a commis une erreur d’appréciation en considérant que c’était de manière fondée que le président-directeur général du CNRS avait retenu que sa manière de servir depuis 2007 avait révélé son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions ;

— la décision contestée du 1er octobre 2020, prise sur la base d’un rapport de la

section 34 qui contient de nombreuses carences et inexactitudes, est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 avril et 31 mai 2023, le CNRS, représenté par la société d’avocats Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un courrier du 25 avril 2023, adressé aux parties en application des dispositions de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d’appeler l’affaire à l’audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l’instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 613-1 et le dernier alinéa de l’article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 24 juillet 2023, la clôture de l’instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l’article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la recherche ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Lombart,

— les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

— et les observations tant de Me Freichet, représentant Mme C, que de cette dernière.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C a été recrutée le 1er août 1992 par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), dans le corps des chargés de recherche de 2ème classe. Elle a été affectée au sein du laboratoire « Parole et Langage » (UMR 7309), à Aix-en-Provence. Le 1er octobre 1996, Mme C a été promue chargée de recherche de 1ère classe puis reclassée chargée de recherche de classe normale à compter du 1er septembre 2017, en sciences du langage, au sein de l’Institut des sciences humaines et sociales. Par une décision du 1er octobre 2020, le président-directeur général du CNRS a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle. Mme C relève appel du jugement du 5 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D’une part, le licenciement pour insuffisance professionnelle d’un fonctionnaire ne peut être fondé que sur des éléments manifestant son inaptitude à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l’exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l’insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l’agent, ni qu’elle ait persisté après qu’il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées (Conseil d’Etat, 1er juin 2016, n° 392621, B).

3. D’autre part, aux termes de l’article L. 411-1 du code de la recherche, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les personnels de la recherche concourent à une mission d’intérêt national. Cette mission comprend : / a) Le développement des connaissances ; / b) Leur transfert et leur application dans les entreprises, et dans tous les domaines contribuant au progrès de la société ; / c) La diffusion de l’information et de la culture scientifique et technique dans toute la population, et notamment parmi les jeunes ; / d) La participation à la formation initiale et à la formation continue ; / e) L’administration de la recherche ; / f) L’expertise scientifique. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que, le 17 décembre 2019, la section n° 34 « Sciences du langage » du comité national de la recherche scientifique, soit l’instance d’évaluation compétente du CNRS, a voté en faveur de l’insuffisance professionnelle de M. C. Cette section a procédé à ce vote après avoir rappelé que l’intéressée était en suivi post-évaluation depuis l’année 2010 et qu’elle avait fait l’objet, s’agissant de ses activités scientifiques, et malgré un avis favorable en 2009, de quatre avis réservés, en 2007, 2011, 2014 et 2017, et d’une alerte en 2012. La section n° 34 a également indiqué que la production scientifique de l’appelante était « extrêmement faible », que cette dernière ne participait plus depuis plusieurs années à la vie scientifique de son unité de recherche et n’était pas présente au sein de son laboratoire, et que, dépourvue d’habilitation à diriger des recherches (HDR), elle n’avait pas encadré de thèses, ni n’avait mené d’activités d’enseignement. Les éléments apportés devant la Cour par Mme C, et en particulier les publications dont elle se prévaut, qui concernent essentiellement la période antérieure à l’année 2007, ne sont pas de nature à établir que les constats auxquels s’est ainsi livrée la section n° 34 du comité national de la recherche scientifique seraient erronés. Au contraire, ces insuffisances dans ses activités scientifiques et d’enseignement sont corroborées par les pièces versées aux débats, dont les rapports susmentionnés établis par la section n° 34 du comité national de la recherche scientifique et les fiches dénommées « recueil d’informations pour un observatoire des activités de recherche » (RIBAC) en sciences humaines et sociales, et y compris dans l’avis, pourtant défavorable à son licenciement pour insuffisance professionnelle, émis le 4 septembre 2020, par la commission administrative paritaire (CAP). En effet, dans cet avis, les membres de la CAP reconnaissent que « la production scientifique de Mme C est très faible, depuis une douzaine d’années » et que cette dernière « s’est faiblement investie dans la vie scientifique de son unité ». Si lesdits membres relèvent toutefois que « des éléments médicaux comme les nombreux arrêts de travail qui figurent à son dossier administratif expliquent une partie de la situation » et que l’appelante reprend cette argumentation dans ses écritures, elle n’établit toutefois pas davantage devant la Cour que devant le tribunal administratif de Marseille que l’ensemble de ses carences serait imputable à son état de santé. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que les différents rédacteurs des rapports et évaluations de l’appelante auraient fait preuve à son encontre, et dans un contexte de concurrence scientifique, d’une animosité particulière ou auraient entaché leurs appréciations de partialité. Par conséquent, en pointant l'« extrême faiblesse de son dossier de publication et un manque d’investissement dans la vie scientifique de l’unité », le président-directeur général du CNRS s’est fondé, pour prononcer le licenciement de Mme C pour insuffisance professionnelle, sur des faits qui n’étaient pas matériellement inexacts et qui étaient de nature à justifier légalement une telle décision qui n’est pas entachée d’une erreur d’appréciation.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme C n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué du 5 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

6. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d’annulation présentées par Mme C n’implique aucune mesure d’exécution. Ses conclusions à fin d’injonction doivent donc également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent et le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. ».

8. D’une part, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du CNRS, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme C et non compris dans les dépens.

9. D’autre part, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions par le CNRS.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le CNRS tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A C et au Centre national de la recherche scientifique (CNRS).

Délibéré après l’audience du 3 octobre 2023, où siégeaient :

— M. Marcovici, président,

— M. Revert, président assesseur,

— M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2023.

No 23MA00240

ot

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