Cour administrative d'appel de Nancy, 15 décembre 2023, n° 23NC03600

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 15 déc. 2023, n° 23NC03600
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 23NC03600
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Strasbourg, 20 juillet 2023, N° 2202468-2207727
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 20 décembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2023, Mme B A, représentée par Me Boukara, demande à la cour :

1°) de l’admettre au bénéfice de l’aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) de suspendre l’exécution de la décision implicite refusant le renouvellement de sa carte de résident et de la décision du 4 mars 2022 réitérant ce refus de renouvellement et refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ;

3°) d’enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de résident ou une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ou, à défaut, de lui délivrer sous huit jours une autorisation provisoire l’autorisant à travailler, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 400 euros TTC euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l’article 37 de loi du 10 juillet 1991 du code de justice administrative ou à elle-même, à défaut d’admission au bénéfice de l’aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

sur la condition d’urgence :

— la condition d’urgence est présumée remplie lorsqu’il est demandé la suspension d’un refus de renouvellement de titre de séjour ;

— sa situation personnelle, au regard de sa durée de présence en France et de sa vie privée et familiale mais également de la perte de ses droits aux prestations sociales, caractérise l’urgence ;

sur le doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :

— la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;

— elle a été prise sans que ne soit respectée la procédure contradictoire prévue par l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration ;

— la commission du titre de séjour n’a pas été consultée ;

— le refus de renouvellement de sa carte de résident méconnait l’article L. 424-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la confirmation de ce refus est illégale en conséquence de l’illégalité du refus initial ;

— le préfet ne pouvait lui opposer l’absence de preuve de son état civil et de sa nationalité ;

— la menace à l’ordre public ne peut faire échec au renouvellement de la carte de résident ;

— elle ne constitue pas une menace pour l’ordre public ;

Vu :

— la requête n° 23NC03581 par laquelle Mme A fait appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg nos 2202468-2207727 du 21 juillet 2023 qui a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision implicite refusant le renouvellement de sa carte de résident et de la décision du 4 mars 2022 réitérant ce refus de renouvellement et refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ;

— les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le code des relations entre le public et l’administration ;

— le code de justice administrative.

La présidente de la cour administrative d’appel de Nancy a désigné Mme Kohler, présidente-assesseure, comme juge des référés en application de l’article L. 511-2 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A est entrée en France en 2004 et s’est vu reconnaître le statut de réfugié en considération du principe d’unité familiale, son concubin bénéficiant de ce statut. Elle a alors bénéficié d’une carte de résident, valable jusqu’en 2016, dont elle a demandé le renouvellement à sa date d’expiration. Le préfet du Haut-Rhin, par une décision du 5 mars 2019 a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». Mme A a, en novembre 2021, réitéré sa demande de renouvellement de sa carte de résident, à titre rétroactif depuis 2016. Par une décision du 4 mars 2022, le préfet du Haut-Rhin a confirmé le refus implicite de renouvellement de cette carte de résident et a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». Par un jugement nos 2202468-2207727 du 21 juillet 2023 le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ces décisions. Par la présente requête, Mme A demande la suspension de l’exécution de ces décisions.

Sur les conclusions relatives à l’aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : « Dans les cas d’urgence (), l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ».

3. En raison de l’urgence résultant de l’application des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, et alors qu’il n’a pas encore été statué sur sa demande d’aide juridictionnelle, il y a lieu d’admettre Mme A au bénéfice de l’aide juridictionnelle à titre provisoire, sur le fondement de ces dispositions.

Sur les autres conclusions de la requête :

4. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ». Aux termes de l’article L. 522-3 du même code : « Lorsque la demande ne présente pas un caractère d’urgence ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu’il y ait lieu d’appliquer les deux premiers alinéas de l’article L. 522-1 ». Et aux termes de l’article R. 522-1 du même code : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit contenir l’exposé au moins sommaire des faits et moyens et justifier de l’urgence de l’affaire. () ».

5. La condition d’urgence à laquelle est subordonnée le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Cette condition d’urgence est, en principe, constatée dans le cas d’un refus de renouvellement ou d’un retrait de titre de séjour. Dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d’une mesure provisoire dans l’attente de la décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse.

6. En l’espèce, d’une part, Mme A soutient que l’urgence doit être regardée comme présumée dès lors qu’elle conteste un refus de renouvellement de sa carte de résident. Elle a initialement demandé le renouvellement de sa carte de résident en qualité de réfugiée en 2016, demande qui a donné lieu à la délivrance de récépissés de demande de titre de séjour à compter du 12 juillet 2016. Dans ces conditions, la décision implicite refusant le renouvellement dont elle demande la suspension de l’exécution est née, au plus tard en novembre 2016. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le statut de réfugié lui a été retiré par une décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides du 18 octobre 2018 en considération du retrait du statut de réfugié opposé à son concubin le 9 août 2018. Le préfet du Haut-Rhin a, alors, refusé de lui délivrer un titre de séjour le 5 mars 2019. Dans ces conditions particulières, et quand bien même elle a demandé en 2021, le renouvellement de sa carte de résident valable de manière rétroactive à compter de juillet 2016, la condition d’urgence ne peut être regardée comme présumée remplie.

7. D’autre part, pour justifier de l’urgence, Mme A se prévaut de la durée de sa présence en France et de sa vie privée et familiale. Ces seuls éléments ne sont pas de nature à caractériser une situation d’urgence dans la mesure où la décision de refus de titre de séjour en litige, qui n’est pas assortie d’une mesure d’éloignement, n’a ni pour objet ni pour effet de la séparer de ses enfants vivant en France. Par ailleurs, si Mme A invoque également la perte de son droit aux prestations sociales et la situation de précarité dans laquelle elle se trouve, cette situation est née du refus de titre de séjour qui lui a été opposé en 2019 et l’intéressée ne produit aucune pièce récente de nature à établir sa situation financière actuelle. Dans ces conditions, Mme A ne justifie pas de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour elle de bénéficier à très bref délai d’une mesure provisoire dans l’attente de la décision juridictionnelle statuant sur la légalité des décisions qu’elle conteste.

8. Il résulte de tout ce qui précède que, la conclusion d’urgence n’étant pas remplie, la requête de Mme A doit être rejetée, en toutes ses conclusions, en application de l’article L. 522-3 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : Mme A est admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle à titre provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à B A.

Fait à Nancy, le 15 décembre 2023.

La juge des référés,

Signé : J. Kohler

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

A. Heim

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