CAA de NANTES, 3ème chambre, 23 décembre 2016, 15NT01079, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 3e ch., 23 déc. 2016, n° 15NT01079
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 15NT01079
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 22 janvier 2015, N° 1304228, 1304331
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033695196

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D… E… a demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler les deux décisions du 25 mars 2013 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire a réduit de 100 % les aides soumises à conditionnalité allouées pour les campagnes 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1304228, 1304331 du 23 janvier 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 avril 2015 et 3 mai 2016 M. D… E…, représenté par Me G…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 23 janvier 2015 ;

2°) d’annuler les décisions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

 – le jugement du 23 janvier 2015 est insuffisamment motivé ;

 – le signataire des décisions du 25 mars 2013 ne disposait pas d’une délégation de signature régulière ;

 – le caractère contradictoire de la procédure administrative a été méconnu ;

 – les décisions contestées sont entachées d’erreur de droit ;

 – ces décisions sont entachées d’erreur de fait et d’erreur dans la qualification juridique des faits ;

 – elles sont entachées d’erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 décembre 2015, le ministre de l’agriculture de l’agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. E… ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 mai 2016, la clôture d’instruction a été fixée au 3 juin 2016 à 12h00 en application de l’article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le règlement (CE) n° 796/2004 de la Commission du 21 avril 2004 portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par le règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs ;

 – le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) n° 1290/2005, (CE) n° 247/2006 et (CE) n° 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) n° 1782/2003 ;

 – le règlement (CE) n° 1122/2009 de la Commission du 30 novembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole ;

 – le code rural et de la pêche maritime ;

 – la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Gauthier,

 – les conclusions de M. Giraud, rapporteur public

 – et les observations de Me A…, représentant M. E….

1. Considérant que M. E… a repris une exploitation agricole laitière au lieu-dit « La Boisdonnerie », sur le territoire de la commune de Cossé-d’Anjou (Maine-et-Loire), qu’il a réorientée vers l’élevage de vaches allaitantes ; qu’à la suite de signalements de maltraitance animale, la direction départementale des services vétérinaires de Maine-et-Loire a effectué au cours de l’année 2009 deux inspections qui ont permis de relever de graves infractions dans la conduite de l’élevage ; qu’à la suite de ces inspections, la direction départementale de la protection de la population (DDPP) de Maine-et-Loire a réalisé le 25 novembre 2009 un contrôle de conditionnalité au cours duquel de nombreuses anomalies ont été constatées qui ont donné lieu, au titre de l’année 2009, à une réduction de 20 % du montant des aides agricoles européennes (aides PAC) ; que de nouveaux contrôles ont été effectués le 25 octobre 2010 et les 14 et 21 novembre 2011 par des agents de la DDPP, lesquels ont constaté de nouvelles anomalies ; que, par deux décisions du 25 mars 2013, le préfet de Maine-et-Loire a réduit de 100 % les aides PAC allouées à M. E… au titre des campagnes 2010 et 2011 ; que M. E… relève appel du jugement du 23 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant que les décisions contestées ont été signées par M. C… B…, directeur départemental des territoires, qui avait reçu délégation du préfet du Maine-et-Loire par un arrêté n° 2012240-0031 du 27 août 2012, publié au recueil spécial n° 55 des actes administratifs de la préfecture du Maine-et-Loire « à l’effet de signer (…) 4. Toutes décisions se rapportant aux pouvoirs détaillés dans l’annexe jointe au présent arrêté », annexe qui mentionne au point 11 « Economie agricole – a) Production agricole : régime d’aide et de soutien aux agriculteurs – 5° décisions relatives à la conditionnalité des aides » ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire des décisions contestées manque en fait et doit être écarté ;

3. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 25 du Règlement (CE) n° 796/2004 de la Commission du 21 avril 2004 : « Principes généraux – 1. Les contrôles sur place sont effectués de manière inopinée (…) » ; qu’aux termes du § 92 du règlement (CE) n° 1122/2009 de la Commission du 30 novembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement : « En ce qui concerne les obligations en matière de conditionnalité, en complément de la détermination des réductions ou exclusions en fonction du principe de proportionnalité, il convient de prévoir qu’à partir d’un certain moment, des infractions répétées à la même obligation en matière de conditionnalité soient traitées, après mise en garde préalable de l’agriculteur, comme un cas de non-conformité intentionnelle. » ; qu’aux termes de l’article 47 de ce même règlement : « 1. Aux fins du présent chapitre, on entend par non-conformité »répétée« le non-respect d’une même exigence, norme ou obligation visée à l’article 4 lorsqu’il est constaté plus d’une fois au cours d’une période de trois années civiles consécutives, dès lors que l’agriculteur a été informé du précédent cas de non-conformité et a eu, le cas échéant, la possibilité de prendre les mesures nécessaires pour y remédier./ 2. L' »étendue« d’un cas de non-conformité est déterminée en examinant, notamment, s’il a eu une incidence de grande portée ou si ses conséquences se limitent à l’exploitation concernée./ 3. La »gravité« d’un cas de non-conformité dépend en particulier de l’importance de ses conséquences, compte tenu des objectifs de l’exigence ou de la norme concernée./ 4. Le caractère »persistant« ou non du cas de non conformité dépend en particulier de la durée pendant laquelle ses effets perdurent ou des possibilités d’y mettre un terme par la mobilisation de moyens raisonnables. » ; qu’aux termes de l’article 70 de ce même règlement : « (…) 4. Sont considérés comme »constatés« les cas de non-conformité établis à la suite de tout contrôle effectué conformément au présent règlement ou ayant été portés à la connaissance de l’autorité de contrôle compétente ou, le cas échéant, de l’organisme payeur, de quelque autre manière.(…) »; qu’aux termes de l’article 72 de ce même règlement : « 1. Sans préjudice de l’article 77, si le cas de non-conformité déterminé est dû à un acte intentionnel de l’agriculteur, la réduction à appliquer au montant total visé à l’article 70, paragraphe 8, est fixée, de manière générale, à 20 % dudit montant total./ Toutefois, l’organisme payeur peut décider, sur la base des résultats de l’évaluation présentés par l’autorité de contrôle compétente dans la partie »évaluation« du rapport de contrôle conformément à l’article 54, paragraphe 1, point c), de réduire ce pourcentage jusqu’à 15 % au minimum ou, le cas échéant, de l’accroître à concurrence de 100 % du montant total./ 2. Si le cas de non-conformité intentionnelle concerne un régime de soutien particulier, l’agriculteur est exclu de ce régime pour l’année civile concernée. Dans les cas extrêmes au regard de leur étendue, de leur gravité ou de leur persistance, ou lorsque qu’une répétition de la situation de non-conformité intentionnelle a été constatée, l’agriculteur est en outre exclu du régime de soutien concerné pour l’année civile qui suit. »;

4. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 6 du règlement CE du Conseil du 29 septembre 2003 susvisé : « 1. Lorsque les exigences réglementaires en matière de gestion ou les bonnes conditions agricoles et environnementales ne sont pas respectées en raison d’un acte ou d’une omission directement imputable à l’agriculteur concerné, le montant total des paiements directs à octroyer au titre de l’année civile au cours de laquelle le non respect est constaté, est réduit ou supprimé (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 212-15 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction en vigueur à la date des décisions contestées : « Les établissements de l’élevage établissent et tiennent à jour un fichier des animaux qu’ils identifient. Ils communiquent aux services vétérinaires départementaux et ceux-ci leur communiquent les informations relatives à l’identification des animaux dans les zones qui leur sont communes (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 212-16 du même code : " Les établissements de l’élevage assurent, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’agriculture, l’immatriculation des cheptels ou ensembles de cheptels auxquels appartiennent les animaux qu’ils identifient ; ils établissent et tiennent à jour un répertoire des cheptels immatriculés. » ;

5. Considérant, en premier lieu, que si M. E… soutient qu’il n’était pas présent lors du contrôle effectué le 25 octobre 2010, l’article 25 du règlement (CE) n° 796/2004 du 21 avril 2004 prévoit que les contrôles sur place sont effectués de manière inopinée, et aucune disposition ne prescrit la présence de l’exploitant lors du contrôle ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que les résultats de ce contrôle ont été communiqués à l’intéressé qui a été mis en mesure de présenter ses observations à la suite de deux lettres de fin d’instruction que lui a adressées le préfet le 19 décembre 2012 et dont il a accusé réception le 27 décembre 2012 ; qu’enfin il ressort des pièces du dossier que M. E… était présent lors du contrôle effectué les 14 et 21 novembre 2011 et qu’il a signé les comptes-rendus des constatations sans présenter d’autres observations ; que, dans ces conditions, le requérant n’est pas fondé à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure administrative aurait été méconnu ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que les deux décisions contestées ont été prises après constatation de nombreuses anomalies relatives à l’identification individuelle des bovins et à la notification de leurs mouvements ; qu’il n’est pas contesté que, déjà lors du contrôle réalisé au titre de l’année 2009, l’anomalie d'« absence de notification de mouvement constatée le jour du contrôle » portait sur plus de 50 % des animaux et a entraîné l’application d’une pénalité de 20 % ; que cette anomalie a été à nouveau constatée lors du contrôle du 25 octobre 2010 pour plus de 50 % des animaux ainsi que lors du contrôle du 14 novembre 2011 dans une proportion moindre ; que ces infractions répétées à la même obligation en matière de conditionnalité pouvaient dans ces conditions être regardées et traitées comme un cas de non-conformité intentionnelle, conformément aux dispositions rappelées au point 2 du règlement (CE) n° 1122/2009 de la Commission du 30 novembre 2009 ; qu’il suit de là que les décisions contestées ne sont pas entachées d’erreur de droit ;

7. Considérant, en troisième lieu, que les constatations réalisées sur place par les agents chargés du contrôle ont fait apparaître qu’en 2010, sur 186 bovins présents d’après l’inventaire de la base de données nationales d’identification (BDNI), 1 seul bovin était présent physiquement mais absent de l’inventaire BDNI et seulement 25 bovins étaient physiquement présents et mentionnés à l’inventaire, et qu’en 2011 sur 44 bovins présents d’après l’inventaire BDNI, 1 bovin présent physiquement était absent de l’inventaire et, surtout, que les notifications de mouvement des bovins avaient été faites hors délai dans 47 % des cas ; que ces constatations, qui révélaient ainsi des anomalies susceptibles de remettre en cause le versement des aides soumises à la conditionnalité, n’ont pas été sérieusement contredites par M. E… dans sa lettre d’observation du 10 janvier 2013 ni devant le tribunal ou la cour ; que le requérant ne peut utilement, pour en contester désormais la réalité, se prévaloir des résultats du contrôle opéré par le bureau Véritas le 1er juin 2010 dans le cadre d’une mission relative à la transformation de son exploitation en agriculture biologique, qui n’a pas le même objet et ne peut avoir la même portée que le contrôle exercé par les agents assermentés de la direction départementale de la protection de la population dans le cadre de la conditionnalité des aides ; que, par suite, les décisions contestées ne sont pas entachées d’erreur de fait et n’ont pas été prises en méconnaissance des dispositions du règlement (CE) n° 796/2004 du 21 avril 2004 citées au point 3 ;

8. Considérant, enfin, qu’eu égard au caractère grave et répété des anomalies constatées, au titre des campagnes 2010 et 2011, le préfet de Maine-et-Loire, en réduisant les aides litigieuses à concurrence de 100 %, n’a pas commis d’erreur d’appréciation ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. E… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative s’opposent à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante, la somme que le requérant demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D… E… et au ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

Délibéré après l’audience du 8 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

— Mme Perrot, président de chambre,

 – M. Coiffet, président-assesseur,

 – M. Gauthier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 décembre 2016.


Le rapporteur,

E. GauthierLe président,

I. Perrot

Le greffier,
M. F…


La République mande et ordonne au ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 15NT01079

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Textes cités dans la décision

  1. Règlement (CE) 73/2009 du 19 janvier 2009 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs
  2. Règlement (CE) 1122/2009 du 30 novembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) n o 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) n o 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole
  3. Règlement (CE) 796/2004 du 21 avril 2004 portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par le règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs
  4. Règlement (CE) 1782/2003 du 29 septembre 2003 établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs
  5. Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000
  6. Code de justice administrative
  7. Code rural
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