Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 septembre 2010, 09-15.583, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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Le Petit Juriste · 6 décembre 2016

La société Leclerc a progressivement conquis de nouveaux marchés. Après avoir développé une activité de station essence, elle souhaite depuis quelques années s'implanter dans le domaine de la vente de médicaments non remboursés. Or, le secteur pharmaceutique, qui a le monopole sur cette activité, s'y oppose fermement. Pour autant, Leclerc ne désarme pas et souhaite mettre fin à ce monopole. Les juges de la Cour de cassation ont eu, par deux fois, à statuer sur ce litige au travers d'actions en concurrence déloyale. Soucieuses de préserver leurs créations et/ou activités, les …

 

Dimeglio Avocat · 5 juin 2014

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 28 sept. 2010, n° 09-15.583
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 09-15.583
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Rennes, 25 mai 2009
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000022881305
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2010:CO00897
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que la société Sagelec, qui fabrique et commercialise, notamment auprès des collectivités publiques territoriales, des sanitaires, s’estimant victime d’actes de dénigrement émanant la société Michel Plante Systèmes (MPS) qui exerce la même activité, a saisi le juge en cessation du trouble manifestement illicite causé par ces agissements ;

Attendu que le moyen unique, pris en sa première branche, ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article 873 du code de procédure civile, ensemble l’article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter les demandes de la société Sagelec, l’arrêt, après avoir constaté que la société MPS a écrit à plusieurs municipalités qu’il « n’est pas difficile à la société Sagelec d’être moins chère si elle ne respecte pas les normes imposées », retient qu’en raison des incertitudes relatives à l’interprétation des normes applicables aux produits en cause, la teneur de ces courriers ne constitue pas un acte de concurrence déloyale générateur d’un trouble manifestement illicite ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher, si fût-elle même exacte, l’allégation litigieuse n’était pas constitutive d’un dénigrement fautif, de nature à jeter le discrédit sur la société Sagelec, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 mai 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne la société Michel Plante Systèmes aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Sagelec la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils pour la société Sagelec.

En ce que l’arrêt infirmatif attaqué a dit n’y avoir lieu à référé et a en conséquence rejeté les demandes de la société Sagelec destinées à faire cesser le trouble manifestement illicite qu’elle subissait du fait de la campagne de dénigrement dont elle était victime de la part de la société Michel plante systèmes ;

Aux motifs que dans le corps de son assignation, la société Sagelec vise tour à tour le dénigrement, le mensonge et la diffamation pour terminer sur le terrain de la responsabilité civile délictuelle (article 1382 du code civil) ; (…) que force est de constater les contradictions de la société Sagelec qui fait mention dans son assignation « de procédés odieux» et de «propos diffamatoires », tout en évitant la voie procédurale habituelle propre à cette matière qui permettrait à la société MPS de faire valoir son « exception de vérité » ; qu’outre les contestations sérieuses, la société MPS démontre l’absence de trouble manifestement illicite ; que si le trouble licite sic peut se définir « comme toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation de la règle de droit à laquelle le juge des référés peut mettre fin de manière provisoire (Solus et Perrot n°1289 – Picot : Dalloz 1999 – sommaire page 107) ; que donc, le trouble manifestement illicite procède de la méconnaissance d’un droit ; qu’en l’espèce l’illicéité du trouble – à savoir les termes employés par la société MPS sur ces courriers – repose exclusivement sur l’interprétation des normes en matière de toilettes publiques accessibles aux handicapés ; que la mention écrite dans les courriers MPS serait constitutive d’un trouble manifestement illicite si lesdites mentions portaient une appréciation fausse de la norme NFP 99-611, de l’arrêté du 1er août 2006 faisant application des articles R.111-19-3 et R.111-19-6 du code de la construction et de l’habitation ainsi que de la circulaire DGUHC 2007-53 du 30 novembre 2007 ; qu’en l’espèce et aux termes même de l’exposé de la société Sagelec, le litige porte ainsi sur une mention épistolaire et sur un site internet faisant état d’une non conformité à une norme ; qu’il s’agit concrètement d’apprécier si constitue un acte déloyal le fait de mentionner : « il est évident qu’il n’est pas difficile à la société Sagelec d’être moins chère si elle ne respecte pas les normes imposées » ; que les normes visées sont toujours aux termes de l’assignation Sagelec « la norme NFP 99-611 relative aux sanitaires publics entrant dans la catégorie du mobilier urbain» ; que pour être plus précis, le cadre légal qui doit être apprécié par le juge pour qualifier un éventuel acte déloyal, est complexe ;

qu’il ressort essentiellement de la combinaison des deux normes : l’arrêté du 1er août 2006 fixant les dispositions prises pour application des articles R.111-19 à R.111-19-3 et R.111-19-6 du code de la construction et de l’habitation, relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public lors de leur construction ou de leur création ; qu’il existe également une circulaire interministérielle n° DGUHC 2007-53 du 30 novembre 2007 relative à l’accessibilité des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des bâtiments d’habitation ; que l’interprétation de ces normes est conflictuelle entre les parties au litige, les normes étant complexes et faisant l’objet d’interprétations divergentes ; (…) qu’ainsi l’ordonnance déférée fait explicitement mention d’une décision sur le fond du dossier, ce qui vient en contradiction flagrante avec la définition de la compétence du juge des référés ; que par ailleurs, c’est de manière inopérante que le juge des référés prétend que « n’a nul besoin d’être un technicien averti pour interpréter cette norme » ; qu’en effet, contrairement à cet exposé lapidaire, la matière est complexe ; (…) que l’avis des experts est en contradiction avec l’appréciation du juge des référés qui expose dans les motifs de sa décision « que le maître de l’ouvrage et le maître de l’oeuvre ont fait le choix de réaliser cet espace de manoeuvre à l’extérieur, donc en respect de la norme » ; qu’en effet il ne s’agirait pas d’un choix mais d’une contrainte normative et que ce n’est qu’à défaut de possibilité interne que l’espace peut être prévu à l’extérieur ; qu’enfin le premier juge a commis une erreur d’appréciation sur la nature des produits, objet du litige ; qu’il s’agit de constructions industrielles préfabriquées dans les usines de production de la société MPS et de la société Sagelec, alors que dans sa motivation, le premier juge fait expressément référence à la réalisation d’une construction de type unitaire entre le maître d’oeuvre et le maître de l’ouvrage ; (..) que la société MPS, qui apporte des éléments de preuve très sérieux sur l’absence de dénigrement et de diffamation dans les courriers qu’elle a adressés et dans la mention sur son site internet, établit la présence de contestation sérieuse et l’absence de trouble manifestement illicite ; qu’en conséquence, la cour réformera l’ordonnance du Président du tribunal de commerce de Nantes et déboutera la société Sagelec de l’ensemble de ses fins, moyens et conclusions ; qu’il convient de dire n’y avoir lieu à référé, les conditions d’une telle procédure n’étant pas réunies en l’espèce (arrêt attaqué, p. 5 à 8) ;

1°/ Alors que les critiques touchant les produits d’une entreprise industrielle ou commerciale n’entrent pas dans les prévisions de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, dès lors qu’elles ne concernent pas la personne physique ou morale, de sorte qu’elles ne peuvent donner lieu qu’à une action en responsabilité délictuelle pour dénigrement et non à une action en diffamation ; qu’en faisant grief à la société Sagelec de « renoncer à la voie habituelle en matière de diffamation sur internet » et de faire « mention dans son assignation « de procédés odieux » et de « propos diffamatoires », tout en évitant la voie procédurale habituelle propre à cette matière qui permettrait à la société MPS de faire valoir son « exception de vérité » », cependant que les faits reprochés à la société MPS concernant des propos dénigrants relatifs aux produits fabriqués par sa concurrente ne constituaient pas une diffamation et ne relevaient pas du droit de la presse, la cour d’appel a violé l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 et l’article 1382 du code civil ;

2°/ Alors que le trouble manifestement illicite réside dans l’atteinte portée aux droits de celui qui en est victime ; que le dénigrement d’un concurrent constitue une faute même si les faits allégués sont exacts ; qu’en subordonnant la constatation d’un trouble manifestement illicite causé à la société Sagelec à la démonstration de la fausseté de l’interprétation par la société MPS des normes applicables aux produits fabriqués par sa concurrente, cependant que le dénigrement des produits fabriqués par cette société constituait en lui-même une faute à l’origine d’un trouble manifestement illicite qu’il lui appartenait de faire cesser, la cour d’appel a violé les articles 873 du code de procédure civile et 1382 du code civil ;

3°/ Et alors, en toute hypothèse, que le juge peut, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu’en écartant l’existence d’un tel trouble en considération d’un doute sur la portée des normes applicables aux produits fabriqués par la société Sagelec, normes dont l’imputation de violation formulée par la société MPS dans les écrits litigieux était dénoncée par celle-ci, alors qu’il lui incombait de trancher en référé la contestation, même sérieuse, en examinant la réalité de cette violation, la cour d’appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et a violé l’article 873 du code de procédure civile.

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