Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 décembre 2010, 09-69.829, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Par rodolphe Bigot · Dalloz · 25 mai 2020
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Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 16 déc. 2010, n° 09-69.829
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 09-69.829
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 15 juillet 2009
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000023253242
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2010:C202250
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Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 16 juillet 2009), que la société Financière de l’archipel (la société) a souscrit auprès de la société MAAF assurances (l’assureur) un contrat d’assurance garantissant notamment le risque « vol » de son automobile ; que, la société ayant déclaré le vol du véhicule à son assureur, celui-ci a refusé sa garantie au motif que le vol avait été commis avec les clés du véhicule et sans effraction ; que la société a fait assigner l’assureur en garantie ;

Attendu que la société fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande d’indemnisation, alors, selon le moyen :

1°/ que la clause qui prive l’assuré de la garantie des risques de vol en considération de circonstances particulières de réalisation du risque s’analyse en une exclusion de garantie, et non en une définition du risque ; qu’en l’espèce, par un jeu de renvois multiples au sein des conditions générales de la police d’assurance, l’assuré se retrouvait privé de la garantie du risque « vol du véhicule » uniquement en considération de circonstances particulières de réalisation du sinistre, tenant à ce que le vol aurait ou non été commis par effraction ; que, dès lors, en qualifiant, cependant, ces stipulations contractuelles de définition du risque, et non d’exclusion de garantie, la cour d’appel a violé l’article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l’article 1134 du code civil ;

2°/ que, par un jeu de renvois et de redéfinitions multiples au sein des conditions générales, le rédacteur de la police d’assurance avait entendu réduire la définition du risque « vol du véhicule » en lui donnant un sens, à la fois, dérogatoire à sa définition initiale, ainsi qu’à l’acception qui, tant en droit commun que selon le sens courant des termes, entrait pourtant dans la définition d’un « vol » ; qu’en ayant, toutefois, jugé que ce jeu de renvois et de redéfinitions multiples ne s’analysait pas en une exclusion de garantie mais en une définition du risque, la cour d’appel a violé l’article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l’article 1134 du code civil ;

3°/ que la garantie du risque « vol du véhicule » visée en page 41 des conditions générales de la police d’assurance, laquelle renvoyait à une « définition » figurant en toute fin de la brochure, comportait une inexactitude terminologique dans la mesure où la notion de « vol » était, en réalité, conditionnée par les modalités, particulièrement limitée, de commission du délit ; que cette limitation apportée à la « définition » du vol en fonction des seuls modes opératoires que l’assureur acceptait ou non de garantir constituait, en réalité, une exclusion des autres modes opératoires du même sinistre, lesquels pouvaient pourtant être tout autant qualifiés de « vol » tant au regard de la définition initiale que de l’acception générale du terme ; que la « définition » du vol ainsi mentionnée aux conditions générales n’avait ainsi pour effet que d’apporter une limitation dite « contractuelle » à la notion même du vol garanti et, partant, une exclusion de garantie lorsque le sinistre se réalisait dans d’autres circonstances que celles limitativement envisagées ; que, dès lors, en l’ayant qualifiée de définition du risque, et non d’exclusion de garantie, la cour d’appel a violé l’article L. 113-1 du code des assurances, ensemble l’article 1134 du code civil ;

4°/ que lorsque l’assureur subordonne sa garantie à la réalisation, par l’assuré, d’une condition particulière, il doit rapporter la preuve qu’il a précisément porté cette condition à la connaissance de l’assuré ; qu’en l’espèce, en n’ayant pas recherché, comme elle y était pourtant invitée, si la condition tirée du mode opératoire particulier et des circonstances du vol du véhicule, laquelle subordonnait la garantie de la MAAF, avait été précisément portée par cette dernière à la connaissance de la société, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 112-2 du code des assurances ;

5°/ que la preuve du sinistre étant libre, il résulte de l’article 1315 du code civil et de l’article 6 § 1er de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que les juges du fond ne sauraient, pour rejeter l’action en garantie dirigée contre un assureur, faire application de causes contractuelles qui limitent la preuve du sinistre à certains indices prédéterminés et cumulatifs ; que, dès lors, en l’espèce, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de ces textes, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si, par le jeu des renvois et des redéfinitions figurant aux conditions générales du contrat d’assurance, l’assureur n’exigeait pas de l’assuré une preuve spécifique, à savoir celle d’une effraction telle que définie au lexique desdites conditions générales, de sorte que la preuve du sinistre « vol du véhicule », qui aurait dû être libre, se trouvait limitée par le contrat ;

Mais attendu que l’arrêt retient que le contrat définit le vol garanti comme étant : « la soustraction frauduleuse du véhicule commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel est stationné le véhicule ou consécutive à un acte de violence à l’encontre du gardien ou du conducteur du véhicule » ; que cette clause qui figure dans les conditions générales de la police d’assurance est claire, compréhensible et non sujette à interprétation ; qu’en l’espèce, l’assuré ne rapporte pas la preuve que les conditions de la garantie sont réunies dès lors que le vol du véhicule a été perpétré alors qu’il venait d’être stationné et que ses clés avaient, selon les déclarations de sa conductrice, été posées dans le tiroir du bureau, qu’il a donc été commis avec les clés de son véhicule lesquelles se trouvaient dans un local facilement accessible et sans aucune effraction ;

Que de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a dit à bon droit que la clause litigieuse, qui formulait des exigences générales et précises auxquelles la garantie était subordonnée, instituait les conditions de celle-ci, et non une exclusion de garantie et a pu en déduire que l’assuré n’établissait pas que ces conditions étaient réalisées ;

D’où il suit que le moyen qui ne tend, en sa quatrième branche, qu’à remettre en cause le pouvoir souverain d’appréciation par les juges du fond des éléments de fait et de preuve produits, n’est pas fondé en ses autres branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi :

Condamne la société Financière de l’archipel aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour la société Financière de l’archipel

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté la société FINANCIERE DE L’ARCHIPEL de sa demande d’indemnisation du sinistre « vol du véhicule » déclaré le 7 janvier 2006 auprès de son assureur, la société MAAF ;

Aux motifs que « la S.A. MAAF fait grief au jugement de l’avoir condamnée à paiement alors que le contrat définit le vol comme « la soustraction frauduleuse du véhicule commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel est stationné le véhicule ou consécutive à un acte de violence à l’encontre du gardien ou du conducteur du véhicule », qu’elle fait valoir qu’en l’espèce, le véhicule a été volé alors qu’il se trouvait dans l’enceinte d’une propriété ouverte, que les clefs avaient été déposées dans un bureau ouvert dont les vitrages permettent de voir ce qui se passe à l’intérieur, que le véhicule a été volé en l’absence de toute effraction ;

Qu’elle soutient qu’il ne s’agit pas d’une clause d’exclusion, mais que l’événement garanti doit être défini et précisé, qu’aux termes du contrat, la garantie s’étend aux vols avec effraction ou violence, que ces exigences générales et précises constituent les conditions d’application de la garantie, mais que les circonstances selon lesquelles le vol est commis par un membre de la famille ou un préposé ou lorsque les précautions élémentaires ne sont pas prises, constituent une exclusion de la garantie ;

Qu’elle fait valoir que la définition pénale du vol n’interfère pas dans un contrat d’assurance privé, que le vol par ruse n’est pas garanti par le contrat, qu’il résulte du formulaire de déclaration rempli lors de la souscription du contrat, le 31 octobre 2005, que la S.A.R.L. FINANCIERE DE L’ARCHIPEL a bien reçu un exemplaire du contrat auto référence A 07 2003, qu’il ne s’agit pas d’une clause limitative de responsabilité ;

Que la S.A.R.L. FINANCIERE DE L’ARCHIPEL ne rapporte pas la preuve que les conditions d’application de la garantie sont remplies ;

… que la S.A.R.L. FINANCIERE DE L’ARCHIPEL fait valoir en réplique qu’il y avait quelqu’un dans la propriété lorsque le vol a été commis, que les clefs du véhicule étaient dans un tiroir ; qu’elle soutient que la clause d’exclusion n’apparaît pas dans les conditions particulières qui lui ont été remises, que les clauses d’exclusion doivent être précisément portées à la connaissance de l’assuré, que le simple renvoi aux conditions générales ne suffit pas, qu’aux termes de l’article L 112-2 du code des assurances, l’assureur doit rapporter la preuve de la connaissance par l’assuré des conditions particulières auxquelles il subordonne la garantie ;

Qu’elle estime que la limitation apportée à la garantie vol est telle qu’elle constitue une exclusion de garantie et devait être mentionnée en caractères très apparents ;

Qu’à titre subsidiaire, elle soutient qu’aucune négligence ne saurait lui être reprochée puisque les voleurs ont agi avec ruse, les clefs n’étant pas dans un endroit facilement accessible, que l’introduction par ruse peut être assimilée au vol avec effraction en vertu de l’article 1315 du code civil, 6-1 de la CEDH et du principe de liberté du moyen de preuve d’un fait juridique, que la preuve du vol doit pouvoir être rapportée par tous moyens et que la garantie lui est donc bien due ;

… qu’aux termes des conditions générales de la police d’assurance le vol du véhicule est visé dans les événements garantis, qu’il est expressément mentionné par une * attirant l’attention du souscripteur et une note en base de page, que sa qualification figure en pages 108 et 109 des conditions générales, qu’aux termes de cette définition le vol du véhicule correspond à la soustraction frauduleuse du véhicule commise par effraction du véhicule et des organes de direction ou du garage dans lequel est stationné le véhicule ou consécutive à un acte de violence du gardien ou du conducteur du véhicule ;

… que l’appelant soutient à bon droit que cette clause constitue précisément la définition des conditions de la garantie et non une exclusion de garantie, qu’elle est claire, compréhensible et non sujette à interprétation, qu’elle définit précisément les conditions posées par l’assuré pour mettre en jeu la garantie lequel est en droit d’accepter ou non de contracter, qu’elle ne saurait être qualifiée d’abusive en ce qu’elle met à la charge de l’assuré la preuve de l’événement garanti et des conditions posées pour la mise en jeu de la garantie ;

… qu’en l’espèce, l’intimée ne rapporte pas la preuve que les conditions de la garantie sont réunies dès lors que le vol du véhicule a été perpétré alors qu’il venait d’être stationné et que ses clés avaient, selon les déclarations de sa conductrice, été posées dans le tiroir du bureau, qu’il a donc été commis avec les clés de son véhicule lesquelles se trouvaient dans un local facilement accessible et sans aucune effraction de celui-ci ou du local ou du meuble dans lesquels les clés se trouvaient ;

… que le jugement doit en conséquence être infirmé » ;

1. Alors que, d’une part, la clause qui prive l’assuré de la garantie des risques de vol en considération de circonstances particulières de réalisation du risque s’analyse en une exclusion de garantie, et non en une de définition du risque ; qu’en l’espèce, par un jeu de renvois multiples au sein des conditions générales de la police d’assurance, l’assuré se retrouvait privé de la garantie du risque « vol du véhicule » uniquement en considération de circonstances particulières de réalisation du sinistre, tenant à ce que le vol aurait ou non été commis par effraction ; que, dès lors, en qualifiant, cependant, ces stipulations contractuelles de définition du risque, et non d’exclusion de garantie, la Cour d’appel a violé l’article L. 113-1 du Code des Assurances, ensemble l’article 1134 du Code civil ;

2. Alors que, d’autre part, par un jeu de renvois et de redéfinitions multiples au sein des conditions générales, le rédacteur de la police d’assurance avait entendu réduire la définition du risque « vol du véhicule » en lui donnant un sens, à la fois, dérogatoire à sa définition initiale, ainsi qu’à l’acception qui, tant en droit commun que selon le sens courant des termes, entrait pourtant dans la définition d’un « vol» ; qu’en ayant, toutefois, jugé que ce jeu de renvois et de redéfinitions multiples ne s’analysait pas en une exclusion de garantie mais en une définition du risque, la Cour d’appel a violé l’article L. 113-1 du Code des Assurances, ensemble l’article 1134 du Code civil ;

3. Alors que, par ailleurs, en l’espèce, la garantie du risque « vol du véhicule » visée en page 41 des conditions générales de la police d’assurance, laquelle renvoyait à une « définition » figurant en toute fin de la brochure, comportait une inexactitude terminologique dans la mesure où la notion de « vol » était, en réalité, conditionnée par les modalités, particulièrement limitée, de commission du délit ; que cette limitation apportée à la « définition » du vol en fonction des seuls modes opératoires que l’assureur acceptait ou non de garantir constituait, en réalité, une exclusion des autres modes opératoires du même sinistre, lesquels pouvaient pourtant être tout autant qualifiés de « vol » tant au regard de la définition initiale que de l’acception générale du terme ; que la « définition » du vol ainsi mentionnée aux conditions générales n’avait ainsi pour effet que d’apporter une limitation dite « contractuelle » à la notion même du vol garanti et, partant, une exclusion de garantie lorsque le sinistre se réalisait dans d’autres circonstances que celles limitativement envisagées ; que, dès lors, en l’ayant qualifiée de définition du risque, et non d’exclusion de garantie, la Cour d’appel a violé l’article L. 113-1 du Code des Assurances, ensemble l’article 1134 du Code civil ;

4. Alors qu’en outre et en tout état de cause, lorsque l’assureur subordonne sa garantie à la réalisation, par l’assuré, d’une condition particulière, il doit rapporter la preuve qu’il a précisément porté cette condition à la connaissance de l’assuré ; qu’en l’espèce, en n’ayant pas recherché, comme elle y était pourtant invitée, si la condition tirée du mode opératoire particulier et des circonstances du vol du véhicule, laquelle subordonnait la garantie de la MAAF, avait été précisément portée par cette dernière à la connaissance de la société FINANCIERE DE L’ARCHIPEL, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 112-2 du Code des Assurances ;

5. Alors qu’enfin et toujours en tout état de cause, la preuve du sinistre étant libre, il résulte de l’article 1315 du Code civil et de l’article 6, § 1er de la Convention européenne des Droits de l’Homme que les juges du fond ne sauraient, pour rejeter l’action en garantie dirigée contre un assureur, faire application de causes contractuelles qui limitent la preuve du sinistre à certains indices prédéterminés et cumulatifs ; que, dès lors, en l’espèce, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de ces textes, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si, par le jeu des renvois et des redéfinitions figurant aux conditions générales du contrat d’assurance, l’assureur n’exigeait pas de l’assuré une preuve spécifique, à savoir celle d’une effraction telle que définie au lexique desdites conditions générales, de sorte que la preuve du sinistre « vol du véhicule », qui aurait dû être libre, se trouvait limitée par le contrat.

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