Cour de cassation, Chambre sociale, 20 janvier 2016, 14-18.718, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 20 janv. 2016, n° 14-18.718
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 14-18.718
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 1er avril 2014, N° 11/08112
Textes appliqués :
Article L. 7111-3 du code du travail.

Article L. 1221-1 du code du travail.

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000031901933
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2016:SO00108
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Texte intégral

SOC.

CB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 20 janvier 2016

Cassation partielle

M. FROUIN, président

Arrêt n° 108 F-D

Pourvoi n° K 14-18.718

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société [4], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ la société [4], société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société [1], venue aux droits de la société [9],

contre l’arrêt rendu le 2 avril 2014 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige les opposant à Mme [C] [Q], domiciliée [Adresse 3],

défenderesse à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 2 décembre 2015, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Vallée, conseiller rapporteur, M. Schamber, conseiller, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Vallée, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat des sociétés [4] et [4], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [Q], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Soc., 6 juillet 2011, n° 09-69.689), que Mme [Q] a été engagée par contrats à durée déterminée du 9 novembre 2000 au mois de septembre 2001 par la société [2], aux droits de laquelle vient la société [4], puis, du 1er octobre 2001 jusqu’en décembre 2005, par la société [9] aux droits de laquelle sont venues successivement la société [1] et la société [4] ; que la salariée a saisi la juridiction prud’homale ;

Sur le premier moyen :

Vu l’article L. 7111-3 du code du travail ;

Attendu, selon ce texte, qu’est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources ; que dans le cas où l’employeur n’est pas une entreprise de presse ou une agence de presse, la qualité de journaliste professionnel peut être retenue si la personne exerce son activité dans une publication de presse disposant d’une indépendance éditoriale ;

Attendu que pour accorder à la salariée la qualité de journaliste professionnelle et l’application de la convention collective nationale des journalistes du 1er novembre 1976, l’arrêt retient qu’au sein de [4], Mme [C] [Q] s’est, manifestement, trouvée en charge du contenu éditorial d’une série de magazines d’information institutionnelle d’entreprises telles que [6], [7], [8], [5], [10], [3]… pour lesquelles elle assurait l’ensemble des tâches habituellement dévolues à un journaliste, de la recherche et collecte des informations sur le sujet à traiter, à la mise au point des interventions des participants et la préparation des interviews, la rédaction de la proposition de structure du magazine et la coordination des interventions des différents professionnels y contribuant, jusqu’à l’enregistrement du magazine et la rédaction de la jaquette, que s’il s’agit, ce qui n’est pas discuté, de « communication institutionnelle », il ne s’agissait pas de travail exclusivement pour des revues internes à destination des seuls salariés et donc de « communication interne », les émissions et différentes « publications » de nature audiovisuelle, produites grâce à l’intervention de Mme [C] [Q] étant destinées à un public auquel elles sont supposées apporter des « informations », peu important qu’elles soient diffusées gratuitement ou aient un contenu à visée publicitaire, que ce faisant, Mme [C] [Q] exécutait bien des prestations relevant du « journalisme », étant en charge de « publications quotidiennes et/ou périodiques », assurant une « communication institutionnelle », notion qui déborde celles de la « communication interne » mais aussi de simple « publicité », et peu important que l’entreprise qui la salariait soit une agence de publicité, qu’il en résulte que Mme [C] [Q], salariée de filiales de [4], sociétés de communication audiovisuelle, qu’aucune disposition n’empêche d’employer des journalistes, sociétés qui l’avaient recrutée pour son savoir-faire de journaliste et que ses employeurs successifs mettaient en avant pour leur propre publicité à destination de leurs clients, a effectivement exercé au nom de chacune de ces deux sociétés, filiales de [4], et pour le compte des entreprises auprès desquelles elle était missionnée des fonctions de journaliste ;

Qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si les publications auxquelles était affectée la salariée disposaient d’une indépendance éditoriale, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l’article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu que, hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l’égard du personnel employé par une autre que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ;

Attendu que pour condamner in solidum les sociétés [4] et [1], aux droits de laquelle vient la société [4], à payer à la salariée diverses sommes en qualité de coemployeurs, l’arrêt retient que les deux sociétés sont des filiales à 100 % du groupe [4], que leurs intérêts en termes de développement sont donc étroitement intriqués avec ceux du groupe, mais également nécessairement impactés par les succès ou les échecs des différentes filiales du groupe, que l’objet de [2] était « la publicité, gestion du budget publicitaire de toute industrie, activités de production de films publicitaires », que l’objet de la société [9] était « la conception de tout support de formation et d’information, la réalisation de campagnes de publicité, de relations publiques, la conception et la réalisation de films institutionnels », que l’objet de la société [1] est « la création et la production pour tous médias et supports, l’édition et l’utilisation de productions publicitaires, conception et réalisation de tous documents audiovisuels ainsi que tous supports de formation et d’information, conseil en publicité, communication et relations publiques, qu’au-delà, les objets sociaux de ces différentes sociétés démontrent une évidente confusion d’activité à tout le moins pour une partie de celles-ci, étant en particulier indiqué que ces différentes sociétés ont en réalité eu un certain nombre de clients communs, notamment [6], auprès de qui Mme [C] [Q] est intervenue à plusieurs titres, que M. [Z] [X] a dirigé tout à la fois, ou successivement, [2] comme président et membre du directoire (premier employeur de Mme [C] [Q] ) puis a été le dirigeant de la société [1], dernier employeur de Mme [C] [Q], que M. [U] [L] a été membre du directoire de [2], et à ce titre supérieur hiérarchique direct de Mme [C] [Q] chez son premier employeur, et président-directeur général de la société [9], qui, à partir de l’année 2001, a signé les contrats à durée déterminée avec Mme [C] [Q], avant d’être absorbée par la société [1], que la société [4], était membre du conseil de surveillance de [2], qu’en sus des convergences déjà relevées par la cour d’appel de Paris dans sa première formation, ces trois critères de confusion sont, tout à la fois, la cause et l’effet des modifications successives des raisons sociales des différentes sociétés du groupe, que ces modifications successives ont abouti à ce que, en quatre ans, Mme [C] [Q] ait successivement, de CDD en CDD, eu deux employeurs initiaux aux droits desquels viennent désormais les deux sociétés SAS [4] et [1], elle-même entre-temps devenue [4], que cette succession de contrats à durée déterminée, ayant été, de manière définitive, requalifiée ab initio en contrat à durée indéterminée, Mme [C] [Q] ayant dépendu, dans un lien de subordination qui n’est pas discuté, de ces différentes sociétés ;

Qu’en statuant ainsi, sans caractériser une immixtion dans la gestion économique et sociale entre les sociétés concernées, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il soit nécessaire de statuer sur le troisième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il décide que Mme [Q] était titulaire d’un emploi de journaliste, que la convention collective nationale des journalistes était applicable aux relations de travail et en ce qu’il condamne in solidum les sociétés [1], aux droits de laquelle vient la société [4], et [4] à lui payer diverses sommes sur ces fondements, l’arrêt rendu le 2 avril 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne Mme [Q] aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille seize.MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour les sociétés [4] et [4]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR confirmé la décision du Conseil des prud’hommes de PARIS en date du 1er août 2006, en ce qu’il a reconnu le statut de journaliste avec application de la convention collective des journalistes à Madame [Q] et d’AVOIR, en conséquence, condamné les exposantes à verser à la salariée les sommes de 15.207 € au titre du rappel de 13e mois et de 14.977 € à titre d’indemnité de licenciement,

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme [C] [Q] soutient qu’elle exerçait un emploi de journaliste relevant en tant que telle de la convention collective applicable aux journalistes ; qu’elle plaide, sans être utilement contredite : – que l’emploi qu’elle exerçait, succédait à de précédentes fonctions en qualité de journaliste, auprès de différents médias tels que France télévisions, RTL, le Figaro…, – qu’elle détenait la carte de journaliste depuis 1998, – qu’elle avait d’ailleurs été recrutée par [2] parce quelle était journaliste (P 10 et 11) et apparaissait sur les plannings de travail comme « journaliste » (P9), – que ce statut de journaliste lui avait été attribué conventionnellement et avait été porté par son premier employeur pendant une année sur ses bulletins de salaire, – qu’elle était présentée en tant que journaliste par ses deux employeurs successifs ; que les employeurs contestent cette revendication en indiquant qu’en fait elle était « intermittente du spectacle », relevait de la convention collective de la production cinématographique, et n’a invoqué son statut de journaliste qu’au moment où a éclaté le conflit pour obtenir des indemnités plus avantageuses ; que l’employeur, après avoir porté la mention de « journaliste » sur les bulletins de salaire, a ensuite usé de la qualification de « réalisateur » ; que les deux sociétés employeurs soutiennent en effet que Mme [C] [Q] était investie de missions de réalisatrice et non pas de journaliste, travaillait sur des briefs donnés par les clients, se bornant à mettre en forme ce que le client lui demandait, ses fonctions n’étant pas des fonctions de journaliste mais visant à la promotion et la publicité d’un produit ou d’une entreprise ; que le conseil de prud’hommes, tout comme la cour d’appel qui l’a confirmé sur ce point, a jugé que Mme [C] [Q] exerçait un emploi de journaliste et relevait à ce titre de la convention collective nationale des journalistes ; que la Cour de Cassation, visant les articles L.7111-3 du code du travail, et article 93 de la loi du 29 juillet 1982 portant sur la communication audiovisuelle, a cassé cette décision au motif qu’est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale régulière et rétribuée l’exercice de sa profession dans une des plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques, agence de presse et en tire le principal de ses ressources et qu’il résulte du second texte visé que les journalistes exerçant leur profession dans une ou plusieurs entreprises de communication audiovisuelle ont la qualité de journaliste au même titre que leurs confrères de la presse écrite ; qu’or en l’espèce, s’il est établi que la collaboration de Mme [C] [Q], successivement avec les deux sociétés susvisées, constituait son activité principale, voire en l’espèce exclusive, régulière et rétribuée, et que les deux sociétés successives pour lesquelles elle a travaillé étaient des entreprises de communication audiovisuelle, auxquelles s’appliquent les mêmes règles qu’en matière de-presse écrite pour la reconnaissance du statut de journaliste professionnel, pour autant, la reconnaissance de ce statut de journaliste à Mme [C] [Q] est critiquée par la Cour de Cassation ; que rappelant que l’objet social des deux entreprises qui l’ont successivement employée, est pour la société [2], aux droits de laquelle vient la SAS [4], la publicité et la gestion de budgets publicitaires et qu’elle a une activité de production de films publicitaires, alors que l’objet social de la société [9], aux droits de laquelle vient la société [1], avait pour objet la conception de tout support de formation et d’information, la réalisation de campagnes de publicité ou de relations publiques, la conception et la réalisation de tout document audiovisuel qu’elle avait pour activité la réalisation et la production de films institutionnels et publicitaires, la Cour de Cassation en déduit que l’activité principale des sociétés était donc la publicité, ce qui selon elle ne permettait pas à Mme [C] [Q] de revendiquer la qualité de journaliste ; que pour la présente juridiction, aux termes de l’article L.7111-2 du code du travail « est nulle toute convention contraire aux dispositions du présent chapitre, du chapitre deux ainsi qu’à celle de l’article L.7113-1 » ; qu’il en résulte que, ni la mention de « journaliste » portée sur les bulletins de salaire de Mme [C] [Q], pendant toute la première période de collaboration de celle-ci avec ses employeurs sus nommés, ni le fait qu’elle apparaisse comme journaliste sur les plannings établis par son employeur, ni le fait que le groupe [4] auquel appartenaient et appartiennent les différentes sociétés concernées par la présente procédure garantisse à ses clients de mettre à leur disposition des « équipes d’éditorialistes et de journalistes » (P 11 site Internet, P 10 brochures de la SAS [4]), ne suffisent à établir que Mme [C] [Q] relevait conventionnellement du statut de journaliste, ceci même si, de manière évidente, ces deux employeurs successifs, qui en tant que sociétés de communication audiovisuelle en avaient le droit, l’ont manifestement recrutée à cause de son statut de journaliste, et si elle-même a pris ces fonctions en considérant qu’il s’agissait d’activités de journaliste ; qu’il s’agit, en effet, d’un statut d’ordre public auquel il ne peut être dérogé par de simples conventions ; qu’en revanche, l’article L.7111-3 dispose que « est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée l’exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources » ; que la rédaction de l’article sus visé, qui après avoir évoqué des « entreprises de presse », et avant de parler d'« agence de presse », évoque « des publications quotidiennes et périodiques » sans autre précision quant au type d’entreprise assurant ces publications, et sans préciser davantage le type de contenu desdites publications, doit en revanche amener la cour à considérer, sous cet angle, la revendication du statut de journaliste de Mme [C] [Q], au regard des fonctions qu’elle exerçait véritablement au sein des sociétés du groupe [4] qui l’ont successivement employée ; qu’or, au sein de [4], Mme [C] [Q] s’est, manifestement, trouvée en charge du contenu éditorial d’une série de magazines d’information institutionnelle d’entreprises telles que [6], [7], [8], [5], [10], [3], pour lesquelles elle assurait l’ensemble des taches habituellement dévolues à un journaliste, de la recherche et collecte des informations sur le sujet à traiter, à la mise au point des interventions des participants et la préparation des interviews, la rédaction de la proposition de structure du magazine et la coordination des interventions des différents professionnels y contribuant, jusqu’à l’enregistrement du magazine et la rédaction de la jaquette ; que s’agissant, par exemple, de la prestation fournie par [4] au client [6], les fonctions de Mme [C] [Q] étaient décrites par [4], comme suit (P10) « le journaliste-rédacteur… est responsable de la ligne éditoriale et du contenu des émissions. Il rédige : le contenu des émissions, les commentaires des sujets, les questions des interviews en respectant le cahier des charges qui lui a été exposé. Il joue également un rôle de conseil sur le parti pris éditorial et le traitement de l’information [6] dans les émissions… et a un rôle de veille, de recherche continue et d’information sur [6] et sur le monde automobile en général » ; que cette description de tâches, qui n’est pas contestée, exigeait bien évidemment de la part de Mme [C] [Q] qu’elle apporte une contribution intellectuelle et de création à l’entreprise à laquelle il lui était demandé d’apporter son concours ; que d’autre part, s’il s’agit, ce qui n’est pas discuté, de « communication institutionnelle », il ne s’agissait pas de travail exclusivement pour des revues internes à destination des seuls salariés et donc de « communication interne », les émissions et différentes « publications » de nature audiovisuelle, produites grâce à l’intervention de Mme [C] [Q] étant destinées à un public auquel elles sont supposées apporter des « informations », peu important qu’elles soient diffusées gratuitement ou aient un contenu à visée publicitaire ; que ce faisant, Mme [C] [Q] exécutait bien des prestations relevant du « journalisme », étant en charge de « publications quotidiennes et/ou périodiques », assurant une « communication institutionnelle », notion qui déborde celles de la « communication interne » mais aussi de simple « publicité », et peu important que l’entreprise qui la salariait soit une agence de publicité ; qu’il est précisé que, par ailleurs, l’employeur pour la production des magazines d’information auxquels était affectée Mme [C] [Q], recourait également à un « réalisateur », comme cela ressort des plannings (P9), et que Mme [C] [Q] n’est pas utilement contredite quand elle affirme qu’elle n’a jamais reçu aucun droit d’auteur, pourtant légalement dû par tout employeur sollicitant les services d’un réalisateur ; qu’elle n’était donc pas « réalisateur » en dépit de la mention portée sur ses bulletins de salaire dans un second temps ; qu’il en résulte que Mme [C] [Q], salariée de filiales de [4], sociétés de communication audiovisuelle, qu’aucune disposition n’empêche d’employer des journalistes, sociétés qui l’avaient recrutée pour son savoir-faire de journaliste et que ses employeurs successifs mettaient en avant pour leur propre publicité à destination de leurs clients, a effectivement exercé au nom de chacune de ces deux sociétés, filiales de [4], et pour le compte des entreprises auprès desquelles elle était missionnée des fonctions de journaliste ; qu’elle peut en conséquence prétendre à ce statut et à l’application de la convention collective des journalistes ; que la cour confirmera donc sur ce premier point la décision du conseil de prud’hommes de Paris, d’ailleurs reprise par la cour d’appel de Paris dans son premier arrêt,

ET AUX MOTIFS PARTIELLEMENT ADOPTES QUE la société [9] a expressément indiqué durant plus d’une année, sur les bulletins de salaire de Madame [Q], sa qualité de journaliste qui sera transformée par la suite en réalisatrice et alors qu’elle est incapable de produire les éléments ayant concouru à ce changement dans les fonctions réellement exercées par la salariée depuis le début de la relation, le doute s’instaurant d’autant plus qu’elle se refuse à communiquer les moyens de preuve de la réalité de l’emploi de réalisatrice dans la société [6] ; que Madame [Q] n’a pas été engagée pour assurer des missions spécifiques et temporaires, mais opérait sur une activité de rédaction et de conception des journaux internes réguliers dans la société [6] dont les plannings déterminent très exactement la nature de ses besoins pour l’emploi de Madame [Q] (journaliste),

1- ALORS QUE la convention collective nationale des journalistes n’est pas applicable aux personnes qui exercent leur activité dans une entreprise dont l’activité principale est la publicité ; qu’en l’espèce, la Cour d’appel, a expressément rappelé que le premier employeur avait une activité de production de films publicitaires et que le second employeur avait pour objet la conception de tous supports de formation et d’information, la réalisation de campagnes de publicité ou de relations publiques, la conception et la réalisation de tous documents audiovisuels, relevant à ce titre que l’employeur était une « agence de publicité » ; qu’en jugeant pourtant que les deux employeurs étaient des entreprises de communication audiovisuelle qui, comme telles, pouvaient embaucher des journalistes, la Cour d’appel a violé les articles L.7111-3 du Code du travail et 93 de la loi n°82-652 du juillet 1982 portant sur la communication audiovisuelle, dans sa rédaction antérieure à 2008.

2- ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les conclusions des parties ; qu’en l’espèce, pour étayer son affirmation selon laquelle la salariée aurait effectué « l’ensemble des tâches habituellement dévolues à un journaliste, de la recherche et collecte des informations sur le sujet à traiter, à la mise au point des interventions des participants et la préparation des interviews, la rédaction de la proposition de structure du magazine et la coordination des interventions des différents professionnels y contribuant, jusqu’à l’enregistrement du magazine et la rédaction de la jaquette », la Cour d’appel s’est référée à une pièce unique, une brochure de la société [4], qui décrirait ainsi les tâches de Madame [Q] et ne serait « pas contestée » ; qu’en statuant ainsi quand la réalité des tâches invoquées par la salariée était expressément contestée par les écritures des exposantes (p.13) et que celles-ci soutenaient que la brochure litigieuse n’était qu’une proposition faite au client [6] en 2005 qui n’avait jamais été suivie d’effet, la société employeur ayant alors perdu le marché (p.14), la Cour d’appel a dénaturé ces conclusions, violant ainsi l’article 4 du Code de procédure civile.

3- ALORS QUE n’a pas la qualité de journaliste professionnel la personne qui se borne à intervenir dans la réalisation de films de communication institutionnelle demandés par un client de son employeur aux fins d’assurer la promotion des activités de ce client ; qu’en jugeant le contraire, sans caractériser la moindre indépendance éditoriale qu’aurait eue la salariée, la Cour d’appel a violé l’article L.7111-3 du Code du travail.

4- ALORS QUE le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu’en jugeant, s’agissant des films réalisés par Madame [Q], qu’il ne s’agissait pas d’un travail exclusivement à destination des seuls salariés et donc de « communication interne », mais de travaux destinés à un public auquel ils apportaient des « informations », sans justifier plus avant cette pétition de principe quant au public visé qui serait plus large que les salariés et concessionnaires du groupe [6] et quant aux informations apportées qui seraient autre chose que des messages de pure promotion du groupe [6], la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.7111-3 du Code du travail.

5- ALORS QUE le juge ne peut pas statuer par des motifs inopérants ; qu’en relevant que les employeurs auraient eu recours à un autre « réalisateur » pour la production des films de promotion auxquels était affectée Madame [Q] et qu’elle ne serait pas utilement contredite lorsqu’elle affirmait n’avoir reçu aucun droit d’auteur de sorte qu’elle ne serait pas « réalisateur », motifs radicalement inopérants à caractériser sa qualité de journaliste professionnel pouvant, comme tel, bénéficier de la convention collective nationale des journalistes, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.7111-3 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que, la société [9] étant mise hors de cause, les deux sociétés (la société [4] et la société [1] aux droits de qui vient désormais la société [4]) sont tenues in solidum au versement à la salariée de l’ensemble des sommes qui lui sont octroyées,

AUX MOTIFS QUE Mme [C] [Q] soutient à l’appui de son argumentation quant à la solidarité entre les deux sociétés qui l’ont successivement employée, qu’elle a exercé les mêmes fonctions et que, dès lors, ses relations de travail contractuelles doivent entraîner une solidarité à l’encontre des deux entreprises dans la mesure où elles seraient par ailleurs toutes les deux filiales du groupe [4] ; que l’arrêt de la cour d’appel de Paris, cassé partiellement par la Cour de Cassation, mettant hors de cause la société [9], avait condamné in solidum les sociétés [4] et [1] à un ensemble de sommes dues pour requalification du contrat de travail, en exécution puis à la suite de la rupture de celui-ci ; que la cour d’appel fondait sa décision sur le fait que ces deux sociétés avaient, selon elle, la qualité de co-employeurs comme appartenant au même groupe, la salariée y ayant accompli les mêmes tâches pour les mêmes clients avec les mêmes interlocuteurs et les relations avec la seconde société [1] ayant immédiatement succédé à celles avec la première, les changements de raison sociale des sociétés et la proximité de leur dénomination démontrant l’imbrication étroite entre celles-ci, qui, pour la cour d’appel dans l’arrêt partiellement cassé, constituaient un seul et unique employeur ; que la Cour de cassation a toutefois jugé qu’en se déterminant ainsi par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d’intérêts, d’activité et de direction, la cour d’appel n’avait pas donné de base légale à sa décision ; que cependant, devant la formation de renvoi, la salariée étaye sa thèse relative à une confusion d’intérêts, d’activité et de direction : – confusion d’intérêts : les deux sociétés sont des filiales à 100 % du groupe [4], leurs intérêts en termes de développement sont donc étroitement intriqués avec ceux du groupe, mais également nécessairement impactés par les succès ou les échecs des différentes filiales du groupe, – confusion d’activité : l’objet de [2] était « la publicité, gestion du budget publicitaire de toute industrie, activités de production de films publicitaires », l’objet de la société [9] était « la conception de tout support de formation et d’information, la réalisation de campagnes de publicité, de relations publiques, la conception et la réalisation de films institutionnels », l’objet de la société [1] est « la création et la production pour tous médias et supports, l’édition et l’utilisation de productions publicitaires, conception et réalisation de tous documents audiovisuels ainsi que tous supports de formation et d’information, conseil en publicité, communication et relations publiques » ; que la cour relèvera d’ailleurs au vu de ces différents objets sociaux que ceux-ci confirment l’hypothèse d’une production à caractère journalistique confiée à Mme [C] [Q] ; qu’au-delà, les objets sociaux de ces différentes sociétés démontrent une évidente confusion d’activité à tout le moins pour une partie de celles-ci, étant en particulier indiqué que ces différentes sociétés ont en réalité eu un certain nombre de clients communs, notamment [6], auprès de qui Mme [C] [Q] est intervenue à plusieurs titres ; – confusion de direction, la confusion à ce niveau est établie par plusieurs éléments précis : M. [Z] [X] a dirigé tout à la fois, ou successivement, [2] comme président et membre du directoire (premier employeur de Mme [C] [Q]) puis a été le dirigeant de la société [1], dernier employeur de Mme [C] [Q] (Kbis P4), M. [U] [L] a été membre du directoire de [2], et à ce titre supérieur hiérarchique direct de Mme [C] [Q] chez son premier employeur, et président-directeur général de la société [9], qui, à partir de l’année 2001, a signé les contrats à durée déterminée avec Mme [C] [Q], avant d’être absorbée par la société [1] ; que la société [4], était membre du conseil de surveillance de [2] (P3) ; qu’en sus des convergences déjà relevées par la cour d’appel de Paris dans sa première formation, ces trois critères de confusion sont, tout à la fois, la cause et l’effet des modifications successives des raisons sociales des différentes sociétés du groupe ; que ces modifications successives ont abouti à ce que, en quatre ans, Mme [C] [Q] ait successivement, de CDD en CDD, eu deux employeurs initiaux aux droits desquels viennent désormais les deux sociétés SAS [4] et [1], elle-même entre-temps devenue [4] ; que cette succession de contrats à durée déterminée, ayant été, de manière définitive, requalifiée ab initio en contrat à durée indéterminée, Mme [C] [Q] ayant dépendu, dans un lien de subordination qui n’est pas discuté, de ces différentes sociétés, amèneront la cour à prononcer in solidum, vis-à-vis les deux sociétés qui subsistent, – société [1], devenue [4] et la SAS [4] les condamnations à verser diverses sommes à Mme [C] [Q] en exécution de son contrat de travail puis du fait de la rupture de celui-ci,

ALORS QUE hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l’égard du personnel employé par une autre, que s’il existe entre elles une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion de l’une dans la gestion économique et sociale de l’autre ; qu’en l’espèce, pour retenir que les deux employeurs successifs étaient co-employeurs et devaient être condamnés solidairement, la Cour d’appel s’est d’abord appropriée les motifs de l’arrêt cassé ayant relevé que les employeurs appartenaient au même groupe, que la salariée y avait accompli successivement les mêmes tâches pour les mêmes clients avec les mêmes interlocuteurs, que les relations avec le second employeur avaient immédiatement succédé aux relations avec le premier employeur et que les changements de raison sociale des sociétés et la proximité de leur dénomination démontrait l’imbrication étroite entre celles-ci ; que la Cour d’appel a ajouté, par motifs propres, que la confusion d’intérêts était caractérisée par le fait que les deux sociétés soient des filiales à 100% du même groupe avec dès lors des intérêts étroitement imbriqués, que la confusion d’activités était caractérisée par le caractère identique ou du moins semblable de l’objet social des sociétés, surtout en présence de clients communs, et que la confusion de direction était caractérisée, les sociétés ayant plusieurs dirigeants en commun ; qu’en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser que les deux sociétés avaient exercé en même temps un lien de subordination sur la salariée ou, à défaut, à établir l’existence d’une immixtion de l’une des sociétés dans la gestion économique et sociale de l’autre, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L.1221-1 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné les exposantes à verser à Madame [Q] « les sommes d’ores et déjà allouées par les premiers juges et non remises en cause par la décision de la Cour de cassation »,

AUX MOTIFS QUE la plupart des sommes allouées par les premiers juges et confirmées, par la cour d’appel dans sa décision partiellement cassée du 1er juillet 2009, l’ont été de manière indépendante par rapport au statut de journaliste de la salariée ; qu’elles n’ont pas été remises en cause dans leur quantum par la décision de la Cour de Cassation et seront donc purement et simplement confirmées, étant rappelé que la cour d’appel dans sa première formation avait, mettant hors de cause la société [9], aux droits de laquelle venait la société [1], retenu la moyenne mensuelle de référence des salaires de Mme [C] [Q] de 2765 € bruts, moyenne calculée, avant la baisse unilatérale de rémunération imposée à Mme [C] [Q], quelques mois avant l’interruption de la collaboration ; que rappel de salaire de mai 2004 à août 2005, avec congés payés afférents, indemnité de préavis avec congé-payés afférents, indemnité de requalification et indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse sont donc acquis définitivement,

1- ALORS QUE l’arrêt de la Cour de cassation ayant cassé les arrêts antérieurs avait expressément énoncé que la cassation prononcée sur le fondement du premier moyen, relatif à l’absence d’application de la convention collective nationale des journalistes, entraînait par voie de conséquence la cassation sur le second moyen du pourvoi, relatif à l’indemnité de préavis et aux congés payés afférents ; qu’en jugeant pourtant que la somme antérieurement allouée au titre de l’indemnité de préavis et aux congés payés afférents n’aurait pas été remise en cause par la décision de la Cour de cassation, la Cour d’appel a violé les articles 624 et 625 du Code de procédure civile.

2- ALORS QUE l’arrêt de la Cour de cassation ayant cassé les arrêts antérieurs « en ce qu’ils ont condamné in solidum les sociétés [1] et [4] » à payer diverses sommes à la salariée, le quantum de l’intégralité des condamnations prononcées par ces arrêts au titre du rappel de salaire, de l’indemnité de requalification et de l’indemnité pour licenciement abusif, qui dépendait nécessairement du caractère « in solidum » de la condamnation, était atteint par la cassation ; qu’en jugeant pourtant que les sommes antérieurement allouées n’auraient pas été remises en cause par la décision de la Cour de cassation, la Cour d’appel a violé les articles 624 et 625 du Code de procédure civile.

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Cour de cassation, Chambre sociale, 20 janvier 2016, 14-18.718, Inédit