Cour de cassation, Chambre sociale, 30 novembre 2016, 15-25.162, Inédit

  • Affection·
  • Opéra·
  • Convention collective·
  • Maladie·
  • Commission·
  • Traitement·
  • Congé·
  • Salarié·
  • Employeur·
  • Durée

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 30 nov. 2016, n° 15-25.162
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 15-25.162
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 8 juillet 2015
Textes appliqués :
Article R. 1455-7 du code du travail.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000033532148
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2016:SO02220
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

SOC.

LM

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 30 novembre 2016

Cassation

Mme VALLÉE, conseiller le plus ancien

faisant fonction de président

Arrêt n° 2220 F-D

Pourvoi n° K 15-25.162

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par le Théâtre national de l’Opéra comique, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 9 juillet 2015 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l’opposant à M. W… E…, domicilié […] ,

défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 2 novembre 2016, où étaient présents : Mme Vallée, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Brinet, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Brinet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat du Théâtre national de l’Opéra comique, de la SCP Boullez, avocat de M. E…, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Vu l’article R. 1455-7 du code du travail ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, statuant en référé, que M. E…, engagé le 14 septembre 2000 par l’association du Théâtre de l’Opéra comique, devenu un établissement public à caractère industriel et commercial, en qualité de chef du service intérieur, exerçait en dernier lieu les fonctions d’intendant-responsable des bâtiments et des procédures de marchés publics ; que son contrat de travail était régi par la convention collective du théâtre de l’Opéra de Paris ; qu’il s’est trouvé en arrêt de travail à compter du 18 mars 2013 ; que la caisse primaire d’assurance maladie lui a notifié le 2 février 2014 une prise en charge de sa maladie au titre d’une affection de longue durée à compter du 14 mai 2014 ; que l’employeur lui ayant refusé le bénéfice d’un congé maladie longue durée avec plein traitement, il a saisi la juridiction prud’homale ;

Attendu que pour condamner l’employeur à accorder au salarié le bénéfice d’un congé avec versement d’un plein traitement avec effet rétroactif à compter du 14 mai 2014 et le condamner à payer des provisions au salarié, l’arrêt retient que l’urgence est caractérisée dès lors que le salarié ne perçoit qu’un demi-traitement alors qu’il aurait perçu son entière rémunération dans l’hypothèse de l’application du cas 2 de l’article 29 de la convention collective, qu’il résulte d’un certificat médical établi par son psychiatre le 20 juin 2014 que « la non-application ou la non-prise en compte de cette disposition serait de nature à aggraver considérablement son état de santé », que l’application du cas 2 de l’article 29 n’est pas subordonnée à l’avis préalable de la commission médicale, contrairement à l’application du cas 3, que l’article 32 ne prévoit quant à lui l’avis de la commission médicale que pour la mise en congé de longue durée et la réintégration du salarié, et non au cours de sa prise en charge, que l’application alternative des dispositions prévues par les cas 2 et 3 de l’article 29 de la convention collective applicable ne saurait dépendre d’une commission médicale dont l’employeur reconnaît qu’elle n’existe pas dans les faits ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la demande se heurtait à la contestation sérieuse tirée du caractère obligatoire ou non de l’avis de la commission médicale pour l’admission du salarié au régime du congé pour maladie de longue durée avec plein traitement, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les deuxième et troisième moyens :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 juillet 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles ;

Condamne M. E… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille seize.MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour le Théâtre national de l’Opéra comique

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR déclaré recevable l’appel interjeté par M. E… et d’avoir, réformant la décision entreprise, ordonné au Théâtre National de l’Opéra-Comique d’accorder à M. E… le bénéfice d’un congé à plein traitement avec effet rétroactif au 14 mai 2014 en application des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable ainsi que de l’avoir condamné à payer par provision à M. W… E… les sommes de 16 644 € à titre de rappel de salaire pour la période du 16 mai 2014 au 4 décembre 2014 et 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la demande tendant à imposer à l’employeur l’application du cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable : l’article R. 1455-5 du code du travail dispose que dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend ; l’urgence est suffisamment caractérisée en l’espèce dès lors que d’une part, M. W… E… ne perçoit qu’un demi-traitement depuis le 14 mai 2014 alors qu’il aurait perçu son entière rémunération dans l’hypothèse de l’application du cas 2 de l’article 29 de la convention collective TNOP dont il revendique le bénéfice en se considérant atteint d’une affection nerveuse ou mentale et que d’autre part, il résulte d’un certificat médical établi par son psychiatre le 20 juin 2014 que « la non-application ou la non prise en compte de cette disposition serait de nature à aggraver considérablement son état de santé » (pièce n° 12) ; les parties s’accordent à dire que la relation de travail est régie par la convention collective TNOP, conformément au contrat de travail conclu entre elles ; les dispositions conventionnelles dont l’application pose difficulté aux parties sont ainsi rédigées – article 29 de la convention collective TNOP : « ‘les membres titulaires ou stagiaires du TNOP ont les droits suivants, sauf dérogation inscrite dans les annexes en matière de congé maladie, congé de longue durée, disponibilité pour raison de santé’ : 1) Dans la limite d’une période quelconque de 365 jours, trois mois de congé de maladie ordinaire à plein traitement et trois mois de congé pour maladie ordinaire à demi-traitement ; 2) En cas de tuberculose, de maladie nerveuse ou mentale, d’affection cardio-vasculaire ou cancéreuse ou de poliomyélite, 3 ans de congé pour maladie de longue durée à plein traitement suivi d’un congé de deux ans à demi-traitement ; 3) Pour les autres cas de longue maladie, reconnus comme tels par la sécurité sociale, et après avis de la commission médicale, un an à plein traitement, un an à demi-traitement (…)' » – article 32 de la convention collective TNOP : « 'les congés de maladie ordinaire sont contrôlés par le médecin agréé par l’administration. La mise en congé de longue durée et la mise en disponibilité à demi-traitement pour maladie ainsi que la réintégration sont prononcées par la commission médicale du TNOP dont la composition et le fonctionnement sont fixés par un arrêté du ministre de la culture’ » ; c’est en vain tout d’abord que l’employeur développe un long argumentaire pour contester la nature professionnelle de l’affection dont souffre M. W… E…, cette nature ne conditionnant pas l’application des dispositions du cas 2 de l’article 29 précité dont celui-ci sollicite le bénéfice ; ensuite, cette application n’est pas subordonnée à l’avis préalable de la commission médicale, contrairement à l’application du cas 3 ; l’article 32 ne prévoit quant à lui l’avis de la commission médicale que pour la mise en congé de longue durée et la réintégration du salarié, et non au cours de sa prise en charge ; en tout état de cause, d’une part, l’application alternative des dispositions prévues par les cas 2 et 3 de l’article 29 de la convention collective applicable ne saurait dépendre d’une commission médicale dont l’Opéra Comique reconnaît qu’elle n’existe pas dans les faits (page 13 de ses conclusions) ; d’autre part, l’Opéra Comique lui-même a renoncé à l’avis de ladite commission, une première fois en août 2013 lorsqu’il s’est fondé sur la décision prise le 04 juillet 2013 par la caisse d’assurance maladie ayant reconnu l’affection de longue durée de M. W… E… pour maintenir le plein traitement de celui-ci après le 14 août 2013, et une seconde fois lorsqu’il a informé l’intéressé par lettre du 09 mai 2014 (pièce n° 6 de l’appelant) que ce dernier relevait selon lui du cas 3 de l’article 29 au regard de cette décision de la caisse ; l’employeur ayant ainsi pris ses propres décisions sans l’avis préalable de la commission médicale, il n’est plus recevable à se prévaloir de l’absence de celui-ci, en prétendant désormais, se contredisant donc au détriment du salarié concerné, que cet avis serait obligatoire ; il doit donc être suppléé à cet avis par tout autre avis médical autorisé, pour déterminer la nature de l’affection de longue durée, qui fait débat ; a cet égard, il ressort des pièces médicales communiquées que M. W… E… ne souffre manifestement d’aucune des affections physiques de longue durée listées à l’article D. 322-1 du code de la sécurité sociale en application de l’article L. 322-3. 3° du même code, de sorte que la décision prise par la caisse d’assurance maladie, qui ne vise pas les dispositions de l’arrêté du 19 juin 1947 relatif aux soins 'en rapport avec une affection grave ne figurant pas sur la liste mentionnée au 3° de l’art. L. 322-3', repose nécessairement sur le seul autre cas d’affection de longue durée prévu par l’article D. 322-1, à savoir les 'affections psychiatriques de longue durée', ce que confirme le protocole de soins auquel est soumis l’intéressé (pièce n° 7) ; dans ces conditions, M. W… E… est bien atteint d’une maladie nerveuse ou mentale au sens des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 précité ; à supposer qu’un doute subsiste, ce dernier est levé par le courrier adressé le 06 mai 2014 au médecin du travail (pièce n° 7) et le certificat médical précité du 20 juin 2014 (pièce n° 12), tous deux établis par le docteur F…, médecin psychiatre qui confirme que M. W… E…. se trouve en arrêt de travail de longue durée pour une affection mentale ; c’est en vain à cet égard que l’employeur se prévaut de la circonstance que M. W… E… a fait état d’un 'burn out’ dans un courriel du 10 avril 2013 envoyé au cours de son hospitalisation (pièce n° 29 de l’intimé), dès lors que le docteur A… a motivé l’avis d’arrêt de travail initial par un état dépressif grave et un épuisement professionnel (pièce n° 15 de l’appelant), le 'burn out’ n’étant donc pas incompatible avec l’installation d’un état dépressif grave, et que ce praticien spécialisé a par la suite prolongé l’arrêt de travail à plusieurs reprises au seul motif que le patient souffrait d’un état dépressif grave (pièces n° 27 de l’appelant) ; il importe peu par ailleurs que le médecin du travail ait cru ne pas pouvoir se prononcer sur ce point, l’employeur disposant d’éléments médicaux suffisants à compter de la réception du second écrit du docteur A… pour accorder à son salarié le bénéfice des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 précité ; la cour relève encore que contrairement à ses affirmations sur ce point, l’employeur était prévenu dès le mois de juillet 2013, par un courrier dont il est justifié qu’il en a accusé réception, que M. W… E… entendait solliciter le bénéfice des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable ; enfin, l’employeur laisse entendre que M. W… E…, âgé de 61 ans, a choisi, à l’occasion d’un accident du travail, de poursuivre sa carrière sous le régime des affections de longue durée, alors qu’il résulte du certificat médical établi cette fois-ci par le médecin traitant de l’intéressé que ce praticien le suivait depuis plusieurs années pour un état de stress lié à des contraintes professionnelles vécues comme excessives ; il s’ensuit que l’Opéra Comique, qui n’a de surcroît pas accepté la proposition de M. W… E… de se soumettre à une expertise médicale amiable – le courrier adressé par l’avocat de ce dernier en ce sens étant resté lettre morte (pièce n° 26 de l’appelant) – n’oppose aucune contestation sérieuse à la demande de son salarié, de sorte que cette insinuation prêtant au salarié un comportement moralement répréhensible ne repose sur aucun fondement ; en conséquence, la décision entreprise sera réformée en toutes ses dispositions et il sera ordonné à l’opéra Comique d’accorder à M. W… E… le bénéfice d’un congé à plein traitement avec effet rétroactif au 14 mai 2014 en application des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable, dans les quinze jours de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant trois mois, sans qu’il soit nécessaire que la cour s’en réserve la liquidation ; sur les demandes en paiement : les demandes en paiement présentées à la cour par M. W… E… doivent être examinées au regard des dispositions de l’article R. 1455-7 du code du travail, en vertu desquelles dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire – sur le rappel de salaire : il ressort des développements qui précèdent que l’obligation de l’employeur à ce titre n’est pas sérieusement contestable ; selon son propre décompte (pièce n° 68), l’employeur reconnaît que le rappel de salaire correspondant au plein traitement de M. W… E… pour la période du 16 mai 2014 au 04 décembre 2014 s’élève à la somme de 16 644 euros, le bulletin de paie du mois de mai 2014 faisant état du règlement d’un demi-traitement à compter du 16 (pièce n° 9 de l’appelant) l’Opéra Comique sera en conséquence condamné à payer par provision à M. W… E… la somme de 16 644 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 16 mai 2014 au 04 décembre 2014, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2014, date de réception de la mise en demeure qui lui a été adressée » ;

1. ALORS QU’il n’appartient pas au juge des référés, dont les pouvoirs impliquent l’évidence du droit revendiqué, de se livrer à l’interprétation de dispositions conventionnelles lorsque celle-ci fait difficulté ; qu’il en résulte que le juge des référés ne peut se livrer à l’interprétation d’une convention collective lorsque celle-ci suppose de se prononcer sur le rôle attribué à une commission et de déterminer, en l’absence de cette commission, les conditions d’application de ses dispositions ; qu’en l’espèce, l’employeur faisait valoir qu’il résultait de la combinaison des articles 29 et 32 de la convention collective du TNOP que « seul un avis de la commission pouvait déterminer si le salarié entrait dans le cadre des dispositions 2 ou 3 de la convention collective du TNOP » et qu’en l’absence de cette commission et de toute indication donnée par le ministère de la culture, des difficultés sérieuses se posaient sur l’interprétation du texte conventionnel (conclusions p. 12) ; qu’en jugeant, pour ordonner à l’employeur d’accorder au salarié le bénéfice d’un congé à plein traitement avec effet rétroactif au 14 mai 2014, que l’application du cas 2 de l’article 29 n’était pas subordonnée à l’avis préalable de cette commission et qu’il devait « être suppléé à cet avis par tout autre avis médical autorisé », la cour d’appel a tranché une contestation sérieuse tirée de l’interprétation de la convention collective litigieuse et violé les articles R. 1455-5 et R. 1455-7 du code du travail ;

2.ALORS QU’aux termes de l’article R. 1455-5 du code du travail, le juge des référés peut, dans tous les cas d’urgence, ordonner des mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu’en l’espèce, l’employeur soutenait qu’une réelle incertitude existait sur la nature de la pathologie du salarié dès lors qu’il n’avait affirmé souffrir d’une maladie mentale que quelques semaines avant le début de la procédure (conclusions p. 11), que dans un mail daté du 10 mai 2014 ce dernier avait indiqué effectuer un séjour dans une clinique spécialisée « dans le sevrage », que dans ses écritures il déclarait souffrir d’un épuisement professionnel et d’un « burn out » et qu’enfin, aux termes de l’attestation établie par son médecin traitant, le docteur S… , la situation de santé du salarié ne semblait résulter que de ses propres déclarations unilatérales (conclusions p. 15) ; qu’en relevant, pour dire que le salarié était atteint d’une maladie nerveuse et mentale, qu’il résultait des pièces médicales produites qu’il ne souffrait d’aucune affection physique, que la décision prise par la Caisse d’assurance maladie ne visait pas les dispositions de l’arrêté du 19 juin 1947 relatif aux soins en rapport avec une affection grave ne figurant pas sur la liste mentionnée au 3° de l’article L. 322-3 du code de la sécurité sociale et que cette décision reposait donc « nécessairement » sur le seul autre cas d’affection de longue durée prévue par l’article D. 322-I du même code – à savoir les affections psychiatriques de longue durée –, ce que confirmait le protocole de soins, et que « tout doute subsistant » était levé par le courrier et le certificat médical établis par le docteur F…, la cour d’appel a tranché une contestation sérieuse tirée de la nature de la nature de la pathologie du salarié et a violé l’article 1455-5 du code du travail ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR déclaré recevable l’appel interjeté par M. E… et d’avoir, réformant la décision entreprise, ordonné au Théâtre National de l’Opéra-Comique d’accorder à M. E… le bénéfice d’un congé à plein traitement avec effet rétroactif au 14 mai 2014 en application des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable ainsi que de l’avoir condamné à payer par provision à M. W… E… les sommes de 16 644 € à titre de rappel de salaire pour la période du 16 mai 2014 au 4 décembre 2014 et 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la demande tendant à imposer à l’employeur l’application du cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable : l’article R. 1455-5 du code du travail dispose que dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend ; l’urgence est suffisamment caractérisée en l’espèce dès lors que d’une part, M. W… E… ne perçoit qu’un demi-traitement depuis le 14 mai 2014 alors qu’il aurait perçu son entière rémunération dans l’hypothèse de l’application du cas 2 de l’article 29 de la convention collective TNOP dont il revendique le bénéfice en se considérant atteint d’une affection nerveuse ou mentale et que d’autre part, il résulte d’un certificat médical établi par son psychiatre le 20 juin 2014 que « la non-application ou la non prise en compte de cette disposition serait de nature à aggraver considérablement son état de santé » (pièce n° 12) ; les parties s’accordent à dire que la relation de travail est régie par la convention collective TNOP, conformément au contrat de travail conclu entre elles ; les dispositions conventionnelles dont l’application pose difficulté aux parties sont ainsi rédigées – article 29 de la convention collective TNOP : « ‘les membres titulaires ou stagiaires du TNOP ont les droits suivants, sauf dérogation inscrite dans les annexes en matière de congé maladie, congé de longue durée, disponibilité pour raison de santé’ : 1) Dans la limite d’une période quelconque de 365 jours, trois mois de congé de maladie ordinaire à plein traitement et trois mois de congé pour maladie ordinaire à demi-traitement ; 2) En cas de tuberculose, de maladie nerveuse ou mentale, d’affection cardio-vasculaire ou cancéreuse ou de poliomyélite, 3 ans de congé pour maladie de longue durée à plein traitement suivi d’un congé de deux ans à demi-traitement ; 3) Pour les autres cas de longue maladie, reconnus comme tels par la sécurité sociale, et après avis de la commission médicale, un an à plein traitement, un an à demi-traitement (…)' » – article 32 de la convention collective TNOP : « 'les congés de maladie ordinaire sont contrôlés par le médecin agréé par l’administration. La mise en congé de longue durée et la mise en disponibilité à demi-traitement pour maladie ainsi que la réintégration sont prononcées par la commission médicale du TNOP dont la composition et le fonctionnement sont fixés par un arrêté du ministre de la culture’ » ; c’est en vain tout d’abord que l’employeur développe un long argumentaire pour contester la nature professionnelle de l’affection dont souffre M. W… E…, cette nature ne conditionnant pas l’application des dispositions du cas 2 de l’article 29 précité dont celui-ci sollicite le bénéfice ; ensuite, cette application n’est pas subordonnée à l’avis préalable de la commission médicale, contrairement à l’application du cas 3 ; l’article 32 ne prévoit quant à lui l’avis de la commission médicale que pour la mise en congé de longue durée et la réintégration du salarié, et non au cours de sa prise en charge ; en tout état de cause, d’une part, l’application alternative des dispositions prévues par les cas 2 et 3 de l’article 29 de la convention collective applicable ne saurait dépendre d’une commission médicale dont l’Opéra Comique reconnaît qu’elle n’existe pas dans les faits (page 13 de ses conclusions) ; d’autre part, l’Opéra Comique lui-même a renoncé à l’avis de ladite commission, une première fois en août 2013 lorsqu’il s’est fondé sur la décision prise le 04 juillet 2013 par la caisse d’assurance maladie ayant reconnu l’affection de longue durée de M. W… E… pour maintenir le plein traitement de celui-ci après le 14 août 2013, et une seconde fois lorsqu’il a informé l’intéressé par lettre du 09 mai 2014 (pièce n° 6 de l’appelant) que ce dernier relevait selon lui du cas 3 de l’article 29 au regard de cette décision de la caisse ; l’employeur ayant ainsi pris ses propres décisions sans l’avis préalable de la commission médicale, il n’est plus recevable à se prévaloir de l’absence de celui-ci, en prétendant désormais, se contredisant donc au détriment du salarié concerné, que cet avis serait obligatoire ; il doit donc être suppléé à cet avis par tout autre avis médical autorisé, pour déterminer la nature de l’affection de longue durée, qui fait débat ; a cet égard, il ressort des pièces médicales communiquées que M. W… E… ne souffre manifestement d’aucune des affections physiques de longue durée listées à l’article D. 322-1 du code de la sécurité sociale en application de l’article L. 322-3. 3° du même code, de sorte que la décision prise par la caisse d’assurance maladie, qui ne vise pas les dispositions de l’arrêté du 19 juin 1947 relatif aux soins 'en rapport avec une affection grave ne figurant pas sur la liste mentionnée au 3° de l’art. L. 322-3', repose nécessairement sur le seul autre cas d’affection de longue durée prévu par l’article D. 322-1, à savoir les 'affections psychiatriques de longue durée', ce que confirme le protocole de soins auquel est soumis l’intéressé (pièce n° 7) ; dans ces conditions, M. W… E… est bien atteint d’une maladie nerveuse ou mentale au sens des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 précité ; à supposer qu’un doute subsiste, ce dernier est levé par le courrier adressé le 06 mai 2014 au médecin du travail (pièce n° 7) et le certificat médical précité du 20 juin 2014 (pièce n° 12), tous deux établis par le docteur F…, médecin psychiatre qui confirme que M. W… E…. se trouve en arrêt de travail de longue durée pour une affection mentale ; c’est en vain à cet égard que l’employeur se prévaut de la circonstance que M. W… E… a fait état d’un 'burn out’ dans un courriel du 10 avril 2013 envoyé au cours de son hospitalisation (pièce n° 29 de l’intimé), dès lors que le docteur A… a motivé l’avis d’arrêt de travail initial par un état dépressif grave et un épuisement professionnel (pièce n° 15 de l’appelant), le 'burn out’ n’étant donc pas incompatible avec l’installation d’un état dépressif grave, et que ce praticien spécialisé a par la suite prolongé l’arrêt de travail à plusieurs reprises au seul motif que le patient souffrait d’un état dépressif grave (pièces n° 27 de l’appelant) ; il importe peu par ailleurs que le médecin du travail ait cru ne pas pouvoir se prononcer sur ce point, l’employeur disposant d’éléments médicaux suffisants à compter de la réception du second écrit du docteur A… pour accorder à son salarié le bénéfice des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 précité ; la cour relève encore que contrairement à ses affirmations sur ce point, l’employeur était prévenu dès le mois de juillet 2013, par un courrier dont il est justifié qu’il en a accusé réception, que M. W… E… entendait solliciter le bénéfice des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable ; enfin, l’employeur laisse entendre que M. W… E…, âgé de 61 ans, a choisi, à l’occasion d’un accident du travail, de poursuivre sa carrière sous le régime des affections de longue durée, alors qu’il résulte du certificat médical établi cette fois-ci par le médecin traitant de l’intéressé que ce praticien le suivait depuis plusieurs années pour un état de stress lié à des contraintes professionnelles vécues comme excessives ; il s’ensuit que l’Opéra Comique, qui n’a de surcroît pas accepté la proposition de M. W… E… de se soumettre à une expertise médicale amiable – le courrier adressé par l’avocat de ce dernier en ce sens étant resté lettre morte (pièce n° 26 de l’appelant) – n’oppose aucune contestation sérieuse à la demande de son salarié, de sorte que cette insinuation prêtant au salarié un comportement moralement répréhensible ne repose sur aucun fondement. ; en conséquence, la décision entreprise sera réformée en toutes ses dispositions et il sera ordonné à l’opéra Comique d’accorder à M. W… E… le bénéfice d’un congé à plein traitement avec effet rétroactif au 14 mai 2014 en application des dispositions prévues par le cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable, dans les quinze jours de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant trois mois, sans qu’il soit nécessaire que la cour s’en réserve la liquidation ; sur les demandes en paiement : les demandes en paiement présentées à la cour par M. W… E… doivent être examinées au regard des dispositions de l’article R. 1455-7 du code du travail, en vertu desquelles dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire – sur le rappel de salaire : il ressort des développements qui précèdent que l’obligation de l’employeur à ce titre n’est pas sérieusement contestable ; selon son propre décompte (pièce n° 68), l’employeur reconnaît que le rappel de salaire correspondant au plein traitement de M. W… E… pour la période du 16 mai 2014 au 04 décembre 2014 s’élève à la somme de 16 644 euros, le bulletin de paie du mois de mai 2014 faisant état du règlement d’un demi-traitement à compter du 16 (pièce n° 9 de l’appelant) l’Opéra Comique sera en conséquence condamné à payer par provision à M. W… E… la somme de 16 644 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 16 mai 2014 au 04 décembre 2014, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 2014, date de réception de la mise en demeure qui lui a été adressée » ;

1. ALORS QU’aux termes de l’article 32 de la convention collective du TNOP la mise en congé longue durée doit être prononcée par la commission médicale du TNOP dont la composition et le fonctionnement sont fixés par un arrêté du ministère de la culture ; qu’il en résulte que l’application de l’article 29-2 qui prévoit, en cas de maladie mentale ou nerveuse, « 3 ans de congé pour maladie de longue durée à plein traitement suivi d’un congé de deux ans à demi traitement », ne peut être envisagée qu’à la condition que la mise en congé longue durée ait préalablement été prononcée par la commission du TNOP ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la mise en congé longue durée devait être prononcée par la commission du TNOP mais a néanmoins considéré que l’application du cas 2 de l’article 29 n’était pas subordonnée à l’avis préalable de cette commission ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé les articles 29 et 32 de la convention collective du TNOP ;

2. ALORS en tout état de cause QUE pour l’application de dispositions d’une convention collective qui subordonne, au bénéfice du salarié, l’octroi d’un avantage en cas de maladie longue durée liée à certaines pathologies, seule une autorité médicale et indépendante peut se prononcer sur la nature de la maladie dont souffre le salarié qui en revendique l’application ; qu’en l’espèce, l’employeur soutenait qu’en l’absence de toute commission, pour l’application des dispositions de l’article 29 2° de la convention collective qui prévoyait, au bénéfice du salarié, un maintien de salaire à plein traitement pendant 3 ans en cas de maladie mentale ou nerveuse, la pathologie du salarié devait être établie par une autorité médicale neutre et indépendante ; qu’en jugeant qu’il pouvait être suppléé à l’avis de la commission par la décision de la CPAM de prendre en charge la maladie du salarié au titre des affections longue durée, par le protocole de soins qui y était attaché et par les certificats médicaux établis dans le seul but d’obtenir l’application des dispositions litigieuses de la convention collective par le médecin traitant de ce dernier, la cour d’appel a violé l’article 29 2° de la convention collective ;

3. ALORS QUE le fait que l’employeur ait accepté, dans le seul intérêt du salarié, de renoncer à l’avis d’une commission pour octroyer au salarié, qui a été reconnu en longue maladie par la sécurité sociale, le bénéfice du maintien de son salaire à plein traitement pendant un an, prévu dans ce cas par la convention collective applicable, ne le prive pas de la faculté de se prévaloir de l’obligation d’obtenir la reconnaissance, par cette commission, de la nature de la pathologie du salarié pour lui accorder le bénéfice d’un maintien de salaire à plein traitement pendant une durée de trois ans ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la convention collective du TNOP ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné le Théâtre National de l’Opéra-Comique au paiement par provision de la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts, 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « – sur les dommages et intérêts : ainsi que l’établit suffisamment le certificat médical du 20 juin 2014 précité, le refus de l’employeur de maintenir le plein traitement de M. W… E… après le 15 mai 2014 a constitué un facteur aggravant de l’état de santé de ce dernier ; en revanche, le préjudice allégué relatif au montant de la future retraite de l’intéressé n’a plus à être pris en compte dès lors que celui-ci est rétabli par le présent arrêt dans son droit à percevoir son plein traitement par application des dispositions du cas 2 de l’article 29 de la convention collective ; en cet état de référé, le montant non sérieusement contestable de l’obligation de l’employeur au titre des dommages et intérêts sollicités doit donc être fixé à la somme provisionnelle de 2 000 euros, que l’Opéra Comique sera condamné à payer à M. W… E… ; il n’y a pas lieu d’assortir le paiement de ces sommes de l’astreinte sollicitée ; sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens : il est équitable que l’Opéra Comique contribue à hauteur de 3 000 euros aux frais irrépétibles que M. W… E… a été contraint d’engager depuis l’introduction de la procédure prud’homale pour faire valoir ses droits, en application de l’article 700 du code de procédure civile ; l’Opéra Comique, qui succombe, ne saurait obtenir une quelconque indemnité sur ce fondement et supportera les entiers dépens de première instance et d’appel » ;

1. ALORS QU’une cassation à intervenir sur la condamnation du Théâtre National de l’Opéra-Comique à payer au salarié une provision au titre d’un rappel en application du cas 2 de l’article 29 de la convention collective applicable entraînera celle du chef de dispositif critiqué dans le présent moyen ayant condamné le Théâtre National de l’Opéra Comique à verser au salarié la somme de 2 000 € au titre de dommages intérêts au titre du préjudice subi par le salarié du fait du refus de l’employeur de maintenir le plein traitement.

2. ALORS QUE seul le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ; qu’en l’espèce la cour d’appel qui a condamné l’employeur à verser, par provision, la somme de 2 000 € à titre dommages et intérêts a retenu que le refus de l’employeur de maintenir le plein traitement du salarié après le 15 mai 2014 avait constitué un facteur aggravant de son état de santé ; qu’en statuant ainsi, sans constater que ce préjudice aurait été causé par la mauvaise foi de l’employeur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1153 alinéa 4 du code civil ;

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour de cassation, Chambre sociale, 30 novembre 2016, 15-25.162, Inédit