Cour de cassation, Chambre criminelle, 8 janvier 2019, 17-86.430, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 8 janv. 2019, n° 17-86.430
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-86.430
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Colmar, 18 octobre 2017
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038069802
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CR03031
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Sur les parties

Texte intégral

N° X 17-86.430 F-D

N° 3031

CK

8 JANVIER 2019

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

— La société Eiffage génie civil,

contre l’arrêt de la cour d’appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 19 octobre 2017 qui, pour blessures involontaires, l’a condamnée à 20 000 euros d’amende, et pour infractions à la réglementation relative à l’hygiène et la sécurité des travailleurs, à deux amendes de 3 000 euros, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 13 novembre 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. X…, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire X…, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général Y… ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-2, 121-3, 223-1, 223-2 du code pénal, 463, 509, 551 et 593 du code de procédure pénale, 6-3 de la CESDH, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ;

« en ce que la cour d’appel a déclaré la société Eiffage Génie Civil coupable des délits de mise à la disposition de travailleurs d’équipements ne permettant pas de préserver la sécurité, d’emploi de travailleurs non autorisés à la conduite de certains équipements, et l’a condamnée à deux amendes de 3 000 euros pour chacun de ces délits, et en outre, l’a déclarée coupable de blessures involontaires par personne morale par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité, la condamnant de ce dernier chef à une amende de 20 000 euros ;

« aux motifs qu’après l’accident, les différents protagonistes avaient été entendus par la gendarmerie assistés de deux contrôleurs du travail de la DIRECCTE

que dans leur procès-verbal n° 14-080 (

), les contrôleurs du travail retenaient deux causes (

) ; qu’ils relevaient plusieurs infractions imputées à M. Patrick Z…, dont des négligences dans l’organisation du travail ayant permis l’utilisation sans autorisation d’un équipement de travail muni d’un dispositif de sécurité défaillant par du personnel non formé à cet effet occasionnant un accident grave du travail ; qu’ils estimaient que la délégation de pouvoir établie par M. Z… devait être considérée comme inopérante ; que la société Eiffage génie civil et M. Z… faisaient l’objet de poursuites devant le tribunal correctionnel de Strasbourg, au titre des faits datés du 4 avril 2014 et situés à Vendenheim, des chefs de :

— blessure involontaire avec incapacité supérieure à 3 mois par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail sur la personne de M. J… D… F… , travailleur temporaire,

— mise à disposition de travailleur d’équipement de travail ne permettant pas de préserver sa sécurité,

— emploi de travailleur non autorisé à la conduite d’équipement de travail présentant des risques particuliers

;

que sur la validité de la délégation de pouvoir donnée le 2 janvier 2013

par M. Z… à M. Rémi A… ; que (…) ; que cette délégation de pouvoir portait notamment sur l’établissement des consignes particulières de sécurité et de protection de la santé relatives à la conduite des engins et à l’utilisation des équipements de travail sur les sites de son périmètre, sur la vérification des autorisations de conduite des engins et équipements de travail et les habilitations requises par la réglementation en vigueur ; que le fait que le 2 janvier 2013, date de la délégation litigieuse, l’intéressé n’était pas encore cadre B2 et le fait qu’il n’avait pas écrit qu’il l’acceptait expressément sont inopérants, la délégation de pouvoir n’étant pas soumise à une forme particulière pour être valable ; que c’est donc à tort que les premiers juges ont considéré cette délégation de pouvoir comme dénuée de toute validité (

) ; que les risques particuliers de chute de la charge, de déstabilisation et de basculement de ce type d’engin sont particulièrement élevés et notoires qui plus est dans une entreprise des travaux publics qui utilise habituellement ces équipements de travail ; que compte tenu de ces risques, les règles de sécurité en vigueur pour la conduite de ce genre d’engin, au premier rang desquels l’habilitation de son conducteur sous forme de possession du CACES adapté, constituent des règles fondamentales et connues de la prévenue, ce que la société Eiffage TP reconnaissait elle même dans les termes de la lettre de licenciement qu’elle avait notifiée le 18 avril 2014 à M. Julien B… ; que compte tenu de ce risque, le conducteur de travaux devait encadrer de manière effective les équipiers placés sous sa responsabilité, d’une part en vérifiant les habilitations dont disposaient ou pas les opérateurs, dès leur accueil sur le chantier (le contrat de mission temporaire de M. Helder G… précisait que son contact dans l’entreprise cliente de la société Fomas Sud était M. A…), d’autre part, en donnant des interdictions formelles à la conduite de l’engin litigieux présent sur le chantier à ceux des opérateurs qui n’étaient pas titulaires des habilitations permettant de conduire ce type d’engin ; que le conducteur M. G… était dépourvu de cette habilitation et, à la question de l’enquêteur : "avez-vous bonne connaissance des sécurités … ?« répondait : »Non je ne regarde pas bien ça je prends l’engin et l’utilise" ; qu’au cas présent, le conducteur de travaux, garant de la stricte application des règles de sécurité avait manqué à ses obligations d’encadrement de son équipe, ce que la société Eiffage TP avait également reconnu elle-même puisque à raison de cet accident et de ce manquement, elle avait décerné à M. A… un avertissement le 18 avril 2014, pièce qu’elle produit devant la cour dans son dossier, et elle lui reproche précisément ce manquement comme motif de sanction ; que M. Stéphane C…, second chef d’équipe, confirmait que M. B… avait demandé à M. G… de déplacer les plaques avec l’engin ; il n’avait ''pas souvenir" que M. G… avait conduit précédemment cet engin mais pensait que M. B… avait voulu gagner du temps et il faisait observer qu’il était prévu que les deux chefs d’équipe auraient chacun le CACES pour travailler chacun sur un site et pour être autonomes ; que ce manquement était d’autant plus important que ce n’était pas la première fois que M. G… conduisait cet engin sur ce chantier : l’accident s’était produit le vendredi 4 avril 2014 mais que M. G… avait reconnu devant les enquêteurs qu’il avait commencé sur le chantier de Vendenheim le 24 mars 2014 et qu’il avait déjà eu des problèmes avec l’engin : « le premier jour de mon travail… il y avait un problème de levage à chaud. Il manquait de puissance et il était lente. Un technicien est venu le vérifier. En tout cas j’ai continué à l’utiliser jusqu’à aujourd’hui » ; que l’enquête avait d’ailleurs confirmé qu’il y avait bien eu une vérification le 24 mars 2014, ce qui étaye ce témoignage ; qu’au demeurant le chef de chantier lui-même, M. B…, avait déclaré lors de l’enquête qu’il avait déjà vu l’intéressé conduire le même engin le mercredi précédent, où il effectuait d’ailleurs la même tâche ; que M. B… n’avait aucun intérêt à mentir sur ce point, cet élément étant d’ailleurs plutôt de nature à aggraver sa propre situation qu’à l’exonérer ; que M. G… , mis à la disposition de la société Eiffage dans le cadre de son contrat de travail avec la société d’intérim Fomas Sud de Toulouse du 15 mars 2014, affecté sur ce chantier le 24 mars 2014 comme chef d’équipe, qui reconnaissait qu’il n’était pas titulaire du certificat d’aptitude à la conduite en sécurité exigé pour la conduite de ce type d’engin comme celui en cause, indiquait qu’il devait remplir les formalités pour l’obtenir par le biais de son agence d’intérim ; que malgré les contestations sur ce point de la société Eiffage (qui soutient que M. B… avait commis un acte de désobéissance sur un temps très court de 45 minutes entre le début du travail à 7 heures et l’accident à 7 heures 45 empêchant tout contrôle), les deux déclarations citées ci avant démontrent que M. G… avait conduit cet engin au moins deux fois avant l’accident (dont un mercredi) ; que M. A… avait déclaré que lui-même était présent sur le chantier de mardi à jeudi ; que le nombre des équipiers présents sur le chantier était peu élevé (en tout 6 : le chef M. B…, les deux chefs d’équipe MM. G… et C…, le maçon coffreur M. J… D…, deux manoeuvres MM. H… et E… des fins) ; qu’il était donc d’autant plus facile pour le conducteur de travaux, qui savait que seul MM. C… et B… avaient une autorisation de conduire le Manitou, de constater qu’en pratique l’un des intérimaires et son chef de chantier s’affranchissaient du respect des règles de sécurité concernant la conduite de cet engin et le laissaient conduire à l’intéressé ; que la vigilance devait être d’autant plus grande que, peu de temps avant l’accident ce Manitou modèle MT 1740 loué par la société Eiffage à l’entreprise Richard Manutention et mis à disposition de la société Eiffage le 28 février 2013, avait présenté un problème hydraulique qui affectait le déploiement des patins stabilisateurs, donc un organe de sécurité, ce qui avait nécessité une vérification par le dépanneur Altodis le 24 mars 2014 (

) ; que cet équipement de travail ne permettait donc pas de préserver la sécurité des travailleurs dès lors que son système de sécurité était défaillant et non conforme au fonctionnement prévu par les règles techniques de conception applicables et qu’il n’était pas doté de toute la documentation prévue par les mêmes règles ; que le cumul de telles défaillances, à savoir :

— la tolérance qu’un chef d’équipe non habilité conduise, en infraction avec les dispositions des articles L. 4141-2, L. 4142-2, R. 4323-55 et suivants du code du travail, un équipement de travail présentant des risques particuliers à savoir un chariot manuscopique de levage permettant de lever des charges de 4 tonnes, nécessitant un CACES, qui plus est dont le schéma technique associé à l’abaque nécessite une formation appropriée,

— le dysfonctionnement du limiteur de moment de renversement, constituant le système de stabilisation et de sécurité d’un engin,

— l’absence au poste de conduite de l’engin d’une partie de la documentation de sécurité (abaque de charge avec stabilisateurs), absence pourtant relevée dans un rapport de vérification antérieur à l’accident, caractérise une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ; que ces manquements ont bien un rapport causal direct avec l’accident puisque l’engin avait basculé lorsqu’il était conduit par un opérateur non habilité, puisque le limiteur de moment de renversement n’avait pas fonctionné pour empêcher matériellement la poursuite d’une mauvaise manoeuvre qui allait entraîner le basculement, puisque l’opérateur n’avait pas été mis en mesure de voir dans le poste de conduite l’abaque des charges et donc de vérifier la réalisation en sécurité de sa manoeuvre ; que la personne morale poursuivie a conclu devant la cour sur les circonstances de l’accident et sur les rôles respectifs de MM. Z…, A… et B… ; que la question du rôle joué par M. A… était dans les débats, précisément en raison de la contestation de l’invalidation de la délégation de pouvoirs ; qu’il apparaît que les manquements litigieux n’ont pas été commis par M. Z… mais par la personne à laquelle il avait valablement délégué ses pouvoirs, M. A… ; que ce dernier, dont les attributions et le rôle ont été parfaitement déterminés par les éléments de l’enquête, qui était conducteur de travaux sur le site dans le périmètre duquel s’était produit l’accident, impliquant des salariés mis à la dispositions de la société Eiffage Génie Civil, placés sous ses ordres, occupés au moment de l’accident à des tâches confiées par la société Eiffage Génie Civil, avait bien agi au nom et pour le compte de cette personne morale Eiffage Génie civil SAS en qualité de représentant de cette dernière ; qu’il avait engagé la responsabilité de la société dès lors que la cause de l’atteinte à l’intégrité physique de M. J… D… résultait de manquements aux règles qu’il était tenu de faire respecter ; que le fait que M. A… n’ait pas été poursuivi n’exonère pas la personne morale de sa propre responsabilité

; que sur les délits de mise à disposition de travailleur d’équipement de travail ne permettant pas de préserver sa sécurité (article L. 4321-2, R. 4322-1 du code du travail) et d’emploi de travailleur non autorisé à la conduite d’équipement de travail présentant des risques particuliers (articles R. 4323-55 à 57 du code du travail) ; que les éléments qui viennent d’être relevés démontrent : – qu’avait bien été mis à la disposition de M. G… un chariot télescopique de marque Manitou type MT 1740 n° 202205 dont le système de sécurité (moment de renversement) était défaillant et non conforme au fonctionnement prévu par les règles techniques de conception applicables, – que le même opérateur avait été laissé conduire ce chariot Manitou sans qu’une autorisation de conduite n’ait été établie (à savoir un certificat d’aptitude à la conduite en sécurité CACES) et sans que la prévenue se soit assurée qu’une formation lui avait été dispensée et à plus forte raison qu’il était médicalement apte à la conduite de ce chariot ; que les infractions ont été commises par un représentant de la société et pour le compte de cette dernière, en l’espèce M. A… ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point s’agissant de la culpabilité de la personne morale » ;

« 1°) alors que l’autorité de poursuite ayant basé son action sur un premier « représentant » de la société qui a finalement été relaxé, la cour d’appel ne pouvait, sans dépasser les termes de la prévention, entrer en condamnation contre la société Eiffage génie civil en se fondant sur la base de fautes qu’elle impute à un autre « représentant » de la personne morale non visée dans la poursuite : qu’en statuant comme elle l’a fait la cour de Colmar a violé ensemble les articles 121-2 et 121-3 du code pénal ainsi que les articles 509 et 551 alinéa 2 du code de procédure pénale ;

« 2°) alors que l’identification du responsable d’une infraction constitue pour la personne morale que celui-ci est censé « représenter » une donnée essentielle pour l’exercice des droits de la défense et que méconnaît ensemble les articles 121-2 et 121-3 du code pénal ainsi que l’article 6 de la CESDH la cour d’appel qui, statuant sur le fond, substitue un nouveau « représentant » de l’entreprise à celui qui était visé dans la poursuite et oppose ainsi au prévenu des charges nouvelles sans procéder à un complément d’instruction ni même entendre à l’audience la personne considérée comme coupable des infractions et ayant représenté son employeur dans la commission de celles-ci ;

« 3°) alors qu’à supposer que la cour de Colmar ait pu s’auto-saisir des manquements qu’elle impute au conducteur des travaux, elle devait, à tout le moins, répondre, avant d’entrer en condamnation, aux conclusions de l’entreprise « représentée » par ce salarié qui faisait valoir que celui-ci n’avait fait l’objet d’aucune critique de la part de l’inspection du travail (p. 10 al. 5), qu’il n’avait jamais pu imaginer que le salarié M. G… conduirait sans autorisation le chariot télescopique confié à deux autres salariés titulaires des certificats appropriés (p. 9 al. 8, p. 15 al. 3 et 8, p. 16 al. 1) et que les déficiences du réglage du chariot relevaient exclusivement de la responsabilité du loueur de ce matériel (p. 12 al. 5 et s.)" ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du procès-verbal de l’inspection du travail, base des poursuites, et des autres pièces de procédure, que le 4 avril 2014, M. J… D…, maçon intérimaire, intervenant sur un chantier dirigé par la société Eiffage génie civil, a eu le pied écrasé par une plaque de béton d’une tonne et demie, après que l’engin de levage de marque Manitou qui la soulevait à l’aide d’une flèche télescopique eut basculé en avant ; qu’à la suite de cet accident, la victime a subi une amputation à 18 cm sous le genou de la partie tibiale de la jambe gauche ;

Qu’il est apparu que l’ouvrier qui pilotait l’engin de levage ne disposait d’aucune autorisation de conduite appropriée et que l’engin avait basculé, d’une part, en raison d’une charge trop importante et, d’autre part, du fait que le système de sécurité, le limiteur de moment de renversement, n’avait pas fonctionné ;

Que M. Patrick Z…, directeur de l’agence Est de la société Eiffage génie civil, avait délégué ses pouvoirs à M. Rémy A…, conducteur de travaux au sein de la société Eiffage, en matière de « prévention travaux » ;

Que le procureur de la République a fait citer la société Eiffage génie civil et M. Z… devant le tribunal correctionnel des chefs de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité supérieure à trois mois par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail, de mise à disposition de travailleur d’équipement de travail ne permettant pas de préserver sa sécurité, d’emploi de travailleur non autorisé à la conduite d’équipement de travail présentant des risques particuliers, enfin, d’emploi de travailleur temporaire sans organisation et dispense d’une information et formation pratique et appropriée en matière de santé et sécurité ;

Que le tribunal correctionnel, après avoir relaxé les prévenus de ce dernier délit, les a déclarés coupables du surplus et a prononcé des peines ; que les prévenus et le procureur de la République ont interjeté appel de cette décision ;

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que, pour renvoyer M. Z… des fins de la poursuite, celui-ci ayant soutenu avoir délégué ses pouvoirs à M. Rémy A…, conducteur de travaux au sein de la société Eiffage, et, sur la culpabilité, confirmer le jugement prononcé contre la société Eiffage génie civil, les juges, d’une part, retiennent que la délégation de pouvoirs invoquée est valide, d’autre part, constatent que la matérialité du délit de blessures involontaires par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail est imputable au délégataire ;

Attendu qu’en statuant ainsi, dès lors, d’une part, que saisi d’une infraction non intentionnelle, il incombe au juge d’identifier la personne physique, délégataire de la responsabilité de l’employeur, qui représente la personne morale, d’autre part, qu’il importe peu que la poursuite qui vise la personne morale mentionne un autre représentant que celui qui a engagé sa responsabilité pénale, cette mention ne délimitant pas la saisine, la cour d’appel, qui n’était pas tenue d’ordonner un supplément d’information que ses constatations, effectuées à partir des pièces du dossier, rendaient inutile, a justifié sa décision sans excéder sa saisine ni enfreindre le principe du contradictoire ;

D’où il suit que les griefs ne sont pas fondés ;

Sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que pour retenir la culpabilité de la société Eiffage génie civil des chefs de blessures involontaires et infractions à la réglementation relative à l’hygiène et la sécurité des travailleurs, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre la prévenue dans le détail de son argumentation, a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé, en tous ses éléments, l’infraction de blessures involontaires dont elle a notamment déclaré la prévenue coupable ;

D’où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit janvier deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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