Cour de cassation, Chambre criminelle, 6 novembre 2019, 18-82.724, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Me Anna Caresche · consultation.avocat.fr · 16 novembre 2021

Trois illustrations récentes de l'appréciation de la notion de bonne foi par la chambre criminelle de la Cour de cassation en matière de droit pénal douanier. Aux termes des dispositions de l'article 392 du Code des douanes, le détenteur des marchandises même occasionnel est réputé responsable pénalement : « 1. Le détenteur de marchandises de fraude est réputé responsable de la fraude. 2. Toutefois, les transporteurs publics ne sont pas considérés, eux et leurs préposés ou agents, comme contrevenants lorsque, par une désignation exacte et régulière de leurs commettants, ils mettent …

 

Cyrille Chatail · Actualités du Droit · 13 novembre 2019

Cyrille Chatail · Actualités du Droit · 13 novembre 2019
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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 6 nov. 2019, n° 18-82.724
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-82.724
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Besançon, 26 mars 2018
Textes appliqués :
Articles 392 du code des douanes et 593 du code de procédure pénale.

Article 67 D du code des douanes dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finance rectificative pour 2009.

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000039389083
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CR02139
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Sur les parties

Texte intégral

N° Q 18-82.724 F-D

N° 2139

CK

6 NOVEMBRE 2019

IRRECEVABILITÉ

CASSATION

Mme de LA LANCE conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

— 

— 

— 

— 

— 

La société Solvay Fluores France,

La société Solvay Electrolyse France,

M. S… J…,

M. G… L… ,

Mme M… A…,

et par :

L’administration des douanes et droits indirects, partie intervenante,

contre l’arrêt de la cour d’appel de BESANCON, chambre correctionnelle, en date du 27 mars 2018, qui a déclaré irrecevable l’appel formé à l’encontre de Mme A… et débouté l’administration des douanes de ses demandes après relaxe des sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse et de MM. J… et L… du chef d’exportation non déclarée de marchandises prohibées ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 25 septembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme de la Lance, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme Planchon, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire ASCENSI, les observations de la société civile professionnelle NICOLAŸ, de LANOUVELLE et HANNOTIN et de la société civile professionnelle BORÉ, SALVE de BRUNETON et MÉGRET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général VALAT ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

I – Sur la recevabilité du pourvoi de Mme M… A… :

Attendu que, après avoir constaté que, devant les premiers juges, les poursuites ont été abandonnées par l’administration des douanes à l’encontre de Mme A…, l’arrêt déclare irrecevable l’appel interjeté contre elle ;

D’où il suit que le pourvoi doit être déclaré irrecevable comme émanant d’une personne qui n’est pas partie, au sens de l’article 567 du code de procédure pénale ;

II – Sur la recevabilité des pourvois des sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse France et de MM. J… et L… ;

Attendu que l’arrêt attaqué a renvoyé les demandeurs des fins de la poursuite ; que, dès lors, cette décision ne leur faisant pas grief, leur pourvoi n’est pas recevable ;

III – Sur le pourvoi de l’administration des douanes

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que les sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse France, ainsi que MM. J… et L… ont été mis en cause pour avoir procédé à des exportations de produits chimiques dont la circulation est réglementée, sans que la société exportatrice Solvay Fluores France n’ait été elle-même titulaire des autorisations annuelles puis des licences d’exportation, lesquelles ont été délivrées à la seule société allemande Solvay Fluor Gmbh, et sans que l’administration douanière n’ait délivré de bons à enlever préalablement aux exportations ; qu’après s’être vus notifier cinq procès-verbaux d’infractions, les intéressés ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel du chef susvisé ; que le tribunal a prononcé la nullité des procès-verbaux de notification d’infractions ainsi que de la procédure subséquente et a renvoyé les prévenus des fins de la poursuite ; que l’administration des douanes et le procureur de la République ont relevé appel de la décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour l’administration des douanes, pris de la violation des articles 38, 67 A, 410, 411, 414 et 423 du code des douanes, du principe du respect des droits de la défense et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;

en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris rendu le 29 mars 2016 par le tribunal correctionnel de Lons-le-Saunier en ce qu’il avait annulé les procès-verbaux dressés par l’administration des douanes les 12 juillet 2010, 4 août 2010 et 24 août 2010, a confirmé la relaxe prononcée par le jugement déféré en faveur des sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse France et de MM. J… et L… et a débouté l’administration des douanes de sa demande de condamnation au paiement d’une amende douanière ;

1°) alors que l’administration des douanes n’est tenue d’informer la personne contrôlée de la possibilité dont elle dispose de faire valoir ses observations dans un délai de trente jours que lorsqu’elle prend à son encontre, en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d’application, une décision défavorable ou lui notifiant une dette douanière, mais non lorsqu’elle prend une décision conduisant à la seule notification d’infractions prévues par le code des douanes national ; qu’en annulant les procès-verbaux des 12 juillet, 4 août et 24 août 2010 au motif qu’ils ne mentionnaient pas que les prévenus avaient été informés de la possibilité de présenter leurs observations dans un délai de trente jours, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si ces procès-verbaux n’avaient pas seulement pour objet de notifier aux prévenus des infractions d’exportation sans déclaration de marchandises prohibées, de défaut de respect de la convention de dédouanement à domicile et de fausse déclaration de valeur sur le fondement des articles 38, 410, 411, 414 et 423 du code des douanes national, ce dont il résultait que les prévenus n’avaient pas à être informés de la possibilité de faire valoir leurs observations dans un délai de trente jours, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes et du principe susvisés ;

2°) alors qu’en toute hypothèse, les droits de la défense de la personne à laquelle est notifiée une infraction douanière sont respectés, dès lors qu’elle a été entendue préalablement à la rédaction du procès-verbal de notification d’infraction et qu’elle a été mise en mesure de faire valoir ses observations en toute connaissance de cause et en temps utile à l’issue de la rédaction de ce procès-verbal ; qu’en annulant les procès-verbaux des 12 juillet, 4 août et 24 août 2010 au motif éventuellement adopté que la procédure contradictoire n’aurait pas été respectée, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les prévenus n’avaient pas été auditionnés préalablement à la rédaction de ces procès-verbaux et s’ils n’avaient pas été mis à même de présenter leurs observations en pleine connaissance de cause de ce qui leur était reproché et dans un délai raisonnable postérieurement à cette rédaction, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes et du principe susvisés" ;

Vu l’article 67 D du code des douanes dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 de finance rectificative pour 2009 ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que ne s’appliquent pas aux décisions conduisant à la notification d’infractions prévues par le code des douanes les dispositions de l’article 67 A de ce code organisant la mise en oeuvre du droit d’être entendu préalablement à toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d’application, lorsqu’elle est défavorable ou lorsqu’elle notifie une dette douanière telle que définie à l’article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire ;

Attendu que, pour annuler les procès-verbaux de notification d’infractions des 12 juillet, 4 et 24 août 2010, l’arrêt retient qu’il ressort de la rédaction de ces procès-verbaux que l’inspecteur des douanes indique à son correspondant que les faits constatés constituent une infraction au code des douanes, sans aucune mention relative à l’information des prévenus de la possibilité des observations dans un délai de 30 jours ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que les dispositions de l’article 67 A du code des douanes étaient en l’espèce inapplicables et qu’il appartenait seulement aux juges de rechercher si les prévenus avaient été mis en mesure de faire connaître leur point de vue sur les exportations litigieuses dans un délai suffisant et en connaissance de cause, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Sur le deuxième moyen de cassation des sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse, ainsi que de MM. J… et L… , pris de la violation des articles 67 A et 67 B du code des douanes, de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, du principe du contradictoire et du principe de prohibition de l’auto-incrimination ;

en ce que l’arrêt attaqué, statuant sur les exceptions de procédure, a infirmé le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité des procès-verbaux de l’Administration des douanes des 24 mai 2011 et 12 septembre 2011 ;

1°) alors que les juges sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que dans ses conclusions régulièrement déposées, la société Solvay Electrolyse faisait valoir que la violation de l’article 428 du code des douanes figurant dans le procès-verbal de notification du 24 mai 2011 était incontestablement étrangère aux faits reprochés par l’administration des douanes, ce qui empêchait les prévenus de présenter leurs observations utilement et en connaissance de cause (conclusions, p. 17 et s.) ; qu’en se bornant à juger que la lecture de l’avis de notification du 24 mai 2011 ne démontre pas de discordance entre le courrier du 12 avril 2011 et la notification, sans répondre à ce moyen déterminant de nature à entraîner la nullité du procès-verbal, la cour d’appel, qui n’a pas compris les termes du débat, a privé sa décision de toute base légale au regard des textes et principes susvisés ;

2°) alors que l’utilisation de textes manifestement inadaptés dans un procès-verbal d’infraction génère pour le prévenu une méconnaissance des faits exacts et des infractions qui lui sont reprochées, de telle sorte qu’il se trouve privé de toute possibilité de présenter une défense utile ; qu’en jugeant la lecture de l’avis de notification du 24 mai 2011 ne démontrait pas de discordance avec le courrier du 12 avril 2011, la cour a violé les textes et principes susvisés ;

3°) alors par ailleurs que le destinataire d’une décision qui affecte de manière sensible ses intérêts doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue avant que la décision ne soit prise ; que ce principe emporte l’interdiction de tout changement normatif substantiel entre l’avis d’enquête et le procès-verbal de notification afférent, qu’en jugeant qu’il n’y avait pas de discordance faisant grief entre l’avis de résultat d’enquête du 24 mai 2011 et le procès-verbal du 12 septembre 2011, au motif que les prévenus avaient usé de leur droit de faire des observations et sollicité un délai pour communiquer des pièces de défense, cependant qu’une telle discordance leur faisait nécessairement grief, la cour a méconnu les textes et principes susvisés ;

4°) alors que l’utilisation de textes manifestement inadaptés dans un procès-verbal d’infraction génère pour le prévenu une méconnaissance des faits exacts et des infractions qui lui sont reprochées, de telle sorte qu’il se trouve privé de toute possibilité de présenter une défense utile ; qu’en jugeant qu’il n’y avait pas de discordance faisant grief entre l’avis de résultat d’enquête du 24 mai 2011 et le procès-verbal du 12 septembre 2011, la cour a violé les textes et principes susvisés" ;

Vu les articles 392 du code des douanes et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, selon l’article 392 du code des douanes, le détenteur de la marchandise de fraude est réputé responsable de la fraude ; qu’il ne peut combattre cette présomption qu’en rapportant la preuve de sa bonne foi ;

Attendu que, pour renvoyer les prévenus des fins de la poursuite, l’arrêt retient que l’Administration des douanes rappelle, dans son procès-verbal du 12 septembre 2011 que, depuis le 1er janvier 2010, il est fait application du Règlement n° 10005/2009 du 16 septembre 2009 instaurant la délivrance des licences d’exportation et qu’elle a constaté que, à compter du 11 mai 2010, quatre exportations avaient été réalisées par les prévenus au moyen de la présentation par la société Solvay Fluores France de licences au bénéfice des sociétés Solvay Fluor Gmbh et Solvay Chemical International, soit des licences étrangères inapplicables ; que les juges constatent par ailleurs que les prévenus arguent quant à eux d’un accord intervenu entre la Commission européenne et le groupe Solvay, via des conférences tenues avec un représentant de cette institution, ce qui est confirmé par l’administration qui a fait état, dans son procès verbal de notification du 12 septembre 2011, d’une réponse par voie électronique de ce fonctionnaire européen ; que les juges en déduisent que les marchandises ont été expédiées sous licence et que les discordances d’appréciation entre la Commission européenne et l’administration sur les licences ne permettent pas d’établir que les prévenus aient intentionnellement cherché à tromper l’administration en ne sollicitant pas de licence française pour leurs exportations, de sorte que la preuve de leur bonne foi est rapportée ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que la seule existence de discussions relatives à la réglementation européenne et de la réponse d’un fonctionnaire de la Commission européenne aux demandes des sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse France, était insuffisante à établir la bonne foi des prévenus, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;

D’où il suit que la cassation est à nouveau encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

I – Sur les pourvois des sociétés Solvay Fluores France et Solvay Electrolyse France, de MM. J… et L… et de Mme M… A… :

Les DÉCLARE IRRECEVABLES ;

II – Sur le pourvoi de l’administration des douanes :

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Besançon, en date du 27 mars 2018, en toutes ses dispositions, à l’exception de celles relatives à l’irrecevabilité de l’appel formé à l’encontre de Mme A…,

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Besançon et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six novembre deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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