Cour de cassation, Chambre sociale, 2 juin 2021, 19-25.908, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 2 juin 2021, n° 19-25.908
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-25.908
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Bastia, 26 juin 2018, N° 17/00217
Textes appliqués :
Article L. 3171-4 du code du travail.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043618206
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2021:SO00679
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

LG

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 2 juin 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 679 F-D

Pourvoi n° D 19-25.908

Aide juridictionnelle totale en demande

au profit de M. [M].

Admission du bureau d’aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 17 octobre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 JUIN 2021

M. [G] [M], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 19-25.908 contre l’arrêt rendu le 27 juin 2018 par la cour d’appel de Bastia (chambre sociale), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Montravers-Yang Ting, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de mandataire liquidateur de la société Alterego,

2°/ à la CGEA [Localité 1], dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. [M], après débats en l’audience publique du 8 avril 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Bastia, 27 juin 2018), M. [M] a été engagé par la société Alterego (la société) pour la réalisation d’un film, en qualité de figurant, pour les journées des 9 et 11 octobre 2013, puis à la régie, suivant contrat en date du 11 octobre 2013, pour une durée de vingt-cinq jours.

2. La société ayant été placée en liquidation judiciaire le 28 mai 2014, la société Montravers Yang-Ting a été désignée en qualité de liquidatrice.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 19 juillet 2016 à l’effet d’obtenir divers rappels de salaire et une indemnité pour travail dissimulé.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de ses demandes en paiement d’heures supplémentaires, de « congés payés afférents » et d’indemnité de travail dissimulé, alors « qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur, qui a l’obligation de mettre en place un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque salarié, fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu’en se fondant, pour rejeter la demande de la salariée en paiement d’heures supplémentaires, sur la seule circonstance que cette demande n’était pas suffisamment étayée, sans rechercher si l’employeur produisait des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé de l’article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 3171-4 du code du travail :

6. Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

7. Enfin, selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

8. Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

9. Pour débouter le salarié de sa demande de paiement d’heures supplémentaires, l’arrêt retient, par motifs propres, que les attestations versées aux débats par ce dernier permettent seulement d’établir qu’il a effectivement travaillé lors du tournage d'« Afrikacorse » sans pour autant permettre d’étayer de façon suffisamment sérieuse et précise la réalité ou le nombre des heures supplémentaires qu’il aurait prétendument effectuées.

10. En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. En application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l’arrêt relatives au paiement d’heures supplémentaires et d’une indemnité de congés payés entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs de dispositif relatifs à la rectification des fiches de paie, à la remise de documents sociaux et à l’article 700 du code de procédure civile, qui s’y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

12. La cassation prononcée n’atteint, en revanche, pas les chefs du dispositif relatifs à la régularisation auprès des organismes sociaux et de retraite, à l’opposabilité de l’arrêt à l’UNEDIC AGS CGEA [Localité 1] et aux dépens, sans lien de dépendance nécessaire avec elle.

13. Elle n’atteint pas non plus le chef du dispositif se rapportant à l’indemnité pour travail dissimulé, dès lors que le salarié n’avait pas fondé sa demande sur l’absence de mention de toutes les heures travaillées sur les bulletins de paie.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute M. [M] de ses demandes de paiement d’heures supplémentaires et de rectification des fiches de paie, fixe sa créance au titre des congés payés à la somme de 225,42 euros, ordonne la remise d’un certificat de travail et d’une attestation employeur mensuelle, et déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 27 juin 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Bastia ;

Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;

Condamne la société Montravers Yang-Ting, ès qualités, aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Montravers Yang-Ting, ès qualités, à payer à Me Haas la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. [M]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR fixé la créance de M. [M] au passif de la liquidation judiciaire de la société Alterego aux sommes nettes de 267,02 euros au titre d’un rappel de salaire sur le contrat du 9 au 11 octobre 2013, de 1 271,81 euros au titre du contrat allant du 12 au 31 octobre 2013 et de 225,42 euros au titre des congés payés et D’AVOIR débouté M. [M] du surplus de ses demandes en paiement de rappel de salaire, de congés payés et d’indemnité de travail dissimulé ;

AUX MOTIFS PROPRES QU’en l’absence d’élément nouveau, au vu notamment des contrats de travail et des bulletins de paye produits ainsi que des justificatifs des sommes déjà versées, la cour d’appel estime que le premier juge a, par des motifs pertinents qu’elle approuve, exactement fixé les créances de M. [M] à la procédure de liquidation de la société Alterego aux sommes de 267,02 euros net pour le premier contrat et de 1 271,81 euros net pour le second contrat ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. [M] verse aux débats des documents permettant d’alléguer ses prétentions ; que les contrats de travail et les bulletins de paye afférents permettent de chiffrer les salaires dus ; que le mandataire liquidateur a déjà versé la somme nette de 715,39 euros pour la période du 2 au 12 novembre 2013 ; que les sommes nettes de 267,02 euros pour le premier contrat des 9 et 11 octobre 2013 et de 1 271,81 euros pour la période du 12 au 31 octobre 2013 n’ont pas été réglées ; qu’en conséquence, il y a lieu de faire droit à cette demande ;

ALORS, 1°), QUE, dans ses conclusions d’appel (p. 4, al. 5), M. [M] soutenait, pièces à l’appui, que sa rémunération quotidienne au titre du second contrat, initialement fixée à 80 euros bruts par jour avait été ultérieurement portée à 100 euros bruts ; qu’en calculant le rappel de salaire dû au salarié au titre du second degré à partir d’une rémunération brute de 80 euros, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QUE, dans ses conclusions d’appel (p. 4, al. 5 à 8), M. [M] soutenait qu’il avait perçu, eu égard aux tâches de régisseur adjoint qu’il avait effectuées, une rémunération inférieure au salaire minimum conventionnel ; qu’en laissant sans réponse ce moyen déterminant, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté M. [M] de ses demandes en paiement d’heures supplémentaires, de congés payés afférents et d’indemnité de travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE les attestations versées aux débats par M. [M] permettent seulement d’établir qu’il a effectivement travaillé lors du tournage d'« Afrikacorse » sans pour autant permettre d’étayer de façon suffisamment précise la réalité ou le nombre des heures supplémentaires qu’il aurait prétendument effectuées ;

ALORS QU’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur, qui a l’obligation de mettre en place un système objectif, fiable et accessible permettant de mesurer la durée du temps de travail journalier effectué par chaque salarié, fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu’en se fondant, pour rejeter la demande de la salariée en paiement d’heures supplémentaires, sur la seule circonstance que cette demande n’était pas suffisamment étayée, sans rechercher si l’employeur produisait des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d’appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé de l’article L. 3171-4 du code du travail.

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